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Un mois plus tard, dans le doux soleil matinal, les chevaux s'ébrouaient attachés à la barrière dans la cour.
Finn qui sellait sa jument à la robe isabelle, adressa un salut à ses compagnons d'armes qui arrivaient en discutant et plaisantant pour s'occuper de leurs montures. Seul manquait Taram, l'étalon pommelé de Kian. Il soupira et caressa les naseaux duveteux de Melba.
-Je te laisse à tes mamours, dit-il à la jument qui frottait sa tête en hénissant avec douceur contre celle d'un hongre bai attaché à côté d'elle. Je vais couper court à ceux de notre ami.
Il se dirigea vers la caserne, immense bâtiment de pierre passé à la chaux blanche divisée en quatre ailes et réservée aux guerriers. Un puit naturel de rocher calcaire se trouvait au milieu de cet espace, l'on pouvait y descendre à l'aide d'un escalier taillé et atteindre le court d'eau souterrain à quarante mètres de profondeur. Outres les écuries et la sellerie, il y avait plusieurs bâtiments annexes; thermes, réfectoire, armurerie, petites maisons où se trouvaient les hauts gradés. Il adressa une plaisanterie à un retardataire qui lui répondit joyeusement et entra dans l'aile nord.
Le sol avait un plancher de bois brute patiné par les allers et venues des soldats. Les torches aux murs étaient éteintes, le soleil entrait à flots par les fenêtres illuminant ainsi les peintures murales, scènes de guerres, Camul se dressant sa lance à la main dans le soleil doré de l'aube, le taureau, brun, massif, noble, posté à ses côtés.
Le guerrier s'arrêta devant la quatrième porte depuis le fond, la voix chaude de Kian filtrait sous la porte, ainsi que celle de Mara, facilement identifiable avec son doux accent du sud du continent.
Il ouvrit la porte à la volée.
-Finn, soupira Kian qui était effectivement en train de faire des mamours à la belle aux cheveux cuivrés. Tu ne pouvais pas attendre cinq minutes?
Mara blottie dans les bras du jeune homme blond, lui jeta un regard assassin de ses yeux verts vifs, qu'il ignora royalement.
-Si tu veux de l'intimité emmène-là chez toi, suggéra son ami en sachant qu'il ne le ferait pas. Allez, Cynfarch t'attend.
Chaque guerrier pouvait disposer d'une chambre à la caserne, un lit, de l'eau chaude, un paravent derrière lequel on pouvait accomplir ses ablutions, un coffre où étaient rangé vêtements et effets personnels, deux chaises et d'une table où se trouvait toujours un tonnelet de bière et un plat de fruits frais. Suffisant pour ne pas rentrer.
-J'arrive, assura Kian. (Il se tourna vers son amante et l'embrassa légèrement). Je te retrouverai ce soir à la taverne.
-Ne m'oublies pas, lui chuchota-t-elle à l'oreille avec une caresse furtive.
-Ne t'inquiète pas, lui répondit-il avec un sourire en coin en se dégageant doucement, pendant que Finn secouait la tête et sortait de la chambre sans saluer la jeune femme.
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Vingt-cinq minutes plus tard, Kian vêtu d'une tunique et de braies noire, couvert de la cape grise propre à la cavalerie et maintenue par la broche gravée de l'emblème du taureau solaire le désignant comme un soldat, monté sur son étalon, ajusta son épée en bandoulière dans son dos et rejoignit Finn dans la cour. La jument tendit la tête et hennit bruyamment.
-Bonjour ma belle, souria-t-il en se penchant par-dessus l'encolure de Taram pour caresser Melba.
Ils se mirent en route côte à côte, les sabots ferrés de leurs chevaux claquant sur le sol pavés. Ils contournèrent l'enclos pour se rendre dans les prés.
-Dans un mois nous partirons à l'est, confia Finn à voix basse.
-Les Blacks Shields? questionna Kian en caressant l'encolure de Taram qui secoua les oreilles.
-Une mission de reconnaissance, acquiesça son ami.
Le guerrier blond regarda son supérieur avec surprise, d'habitude c'était les éclaireurs qui remplissaient ce rôle, légèrement armé, ils se déplaçaient rapidement à travers les territoires et ne prenaient pas part au combat. Lui, était un guerrier en armes, le lieu où il excellait était le champ de bataille et l'espionnage des troupes ennemies ne faisait pas partie de ses fonctions. Les yeux ciel de Finn soutinrent son regard.
-Cynfarch est allé voir le grand roi pour que notre garnison puisse venir en aide aux territoires qui l'ont demandées. Il a refusé.
Kian le regarda bouche-bée, le grand roi violait là l'une des lois les plus importantes édictée par Poséidon; "s'apporter une aide mutuelle entre les dix royaumes". Mais le dire à haute voix, aurait été susceptible d'être perçu comme un acte de trahison, il se mordit la langue. Le brun hocha la tête.
-Le grand roi, rallia-t-il, a quand même cédé devant l'insistance de Cynfarch et il a finalement accepté de nous laisser partir à sept pour que nous puissions évaluer la situation réelle sur place et constater qu'elle n'a pas été exagérée, comme il semble le croire. Si à notre retour le rapport confirme qu'ils ont des problèmes aux frontières, il envisagera d'envoyer du renfort. (Il adressa un sourire perfide à son compagnon). À condition, qu'une prophétesse nous accompagne.
-Dis-moi que je rêve! gémit Kian en se passant une main de haut en bas sur le visage.
-C'est elle qui s'est proposée quand elle a su que tu partais, précisa Finn en resserrant les lanières du bouclier qui pendait à sa selle. Au moins elle tiendra ton sac de couchage au chaud!
Finn éclata de rire, et sa jument, du pas, passa au galop, dévalant une colline fleurie faisant s'égailler un groupe de corbeaux croassant, laissant son compagnon d'armes son étalon piaffant, sur place.
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