Chapitre 3 Seth
Nous avertîmes le vaisseau de transfert que les préparatifs de la traversée s'achevaient, dès que nous quittâmes le siège de l'Alliance. Il partirait dans deux jours. Quant à nous, deux semaines de voyage tranquille nous ramèneraient chez nous. Avant que nous ne partions superviser les travaux les plus délicats sous la direction de prêtresses du Sanctuaire, nous devions faire un compte rendu au Conseiller suprême Seth, le frère du Haut roi Osir.
Depuis que nous avions récupéré nos souvenirs dans cette vie, nous étions plus ou moins sous ses ordres. Ceci dépendait tout de même de l'implication occasionnelle du Haut roi dans les affaires qui nous incombaient. Seth était de taille moyenne, filiforme, des cheveux bruns toujours élégamment tressés. Il arborait des iris marron parsemés d'éclats jaunes, lui donnant l'air sévère et insatisfait. Il mettait un point d'honneur à constamment briller dans ses vêtements, une propension à l'ostentatoire qui me déplaisait. Bien qu'avenant malgré un caractère lunatique, je conservais une indescriptible défiance à son égard. J'étais continuellement des plus mal à l'aise et en dépit de tous les sourires qu'il nous accordait à l'occasion, je sentais au fond de moi qu'il dissimulait beaucoup de haine et de mépris à notre égard.
Le Haut roi Osir était bien plus chaleureux et agréable mais Seth se postait en un barrage efficace pour nous éviter de rencontrer son frère. Mes compagnons pensaient que je me faisais un peu trop de soucis à ce propos, qu'il était juste très solennel et strict. Le voyage jusqu'à notre planète passa plutôt rapidement, entre les entraînements encore doux vis-à-vis de notre jeune âge et les occupations de chacun. Nous nous retrouvâmes presque un peu surpris de devoir si vite positionner le Thémis en orbite géostationnaire avant d'emprunter une navette pour regagner l'atmosphère et la capitale. Nous devions faire attention à ne pas croiser la route d'un cargo de transport. La vue était particulièrement belle, bien que connue.
— Sahiane, on devrait arriver d'ici une dizaine de minutes, m'informa Drake.
— Drake, tu nous poses devant le Conseil, lui rétorquai-je.
— Tu veux vraiment que l'on commence par ça ? demanda Styx.
Il semblait visiblement peu enchanté à l'idée de se rendre auprès de Seth avant de retourner voir sa famille.
— Oui, on fait le plus pénible en premier, dis-je tandis qu'il soupirait.
— Tu exagères, on a connu pire, nous dit Auroria. Pas la peine de soupirer comme ça.
— Mais enfin, laisse-moi souffler en paix ! Tu t'ennuierais si je ne bougonnais pas un peu.
— Je dois avouer Auro que si Styx ne soupirait pas, je crois que je trouverais ça étonnant. J'ajouterai même, à la limite de l'angoissant, lui avoua Angal l'air visiblement gêné.
Les épaules d'Auroria s'affaissèrent de manière résignée, provoquant l'hilarité des autres.
— Tiens, pour une fois on n'a pas le comité d'accueil, commenta Drake en désignant l'aire d'atterrissage.
— Tant mieux, je préfère marcher sans escorte, répliqua Alia.
Drake posa la navette sur l'aéroport du Conseil et ouvrit la porte avant que nous ne prenions la direction de la pyramide tous ensemble. Nous saluâmes les deux gardes tenant leurs postes à l'entrée et nous pénétrâmes dans le bâtiment pour demander si le Conseiller suprême était dans son bureau, ce qui pour une fois était le cas. Je frappai à la porte. J'entendis son assistant, un jeune blondinet à lunettes, nous inviter à entrer dans la pièce.
— Bonjour, Ixtus.
— Oh ! Bonjour, Sahiane. On ne vous attendait pas de si tôt.
— Ce rapport fut beaucoup plus rapide que prévu, lui rétorquai-je aimablement tandis que nous entrions.
— Une très bonne nouvelle donc.
— Je vois qu'il s'est encore enfermé, notai-je.
Depuis sa prise de fonction, Seth avait mis en place un bouclier magique qui faisait office de cloison opaque et insonorisée pour pouvoir, selon ses mots, travailler au calme et en sécurité.
— Je vais lui faire savoir que vous êtes là.
Ixtus pianota sur sa console et quelques secondes plus tard, la cloison se dématérialisa.
— Notre Confrérie, j'aurais pensé que vous seriez rentré dans vos familles à cette heure, lança-t-il d'une voix traînante.
— Nous avons préféré venir vous voir d'abord, Conseiller, lui répondis-je avec un sourire diplomate.
— C'est fort aimable à vous. Alors, qu'avez-vous à m'apprendre que je ne sache déjà ? interrogea-t-il sur le même ton.
— Probablement rien. Le rapport au siège de l'Alliance s'est très bien passé. Nos ambassadeurs nous ont fourni un accueil et un soutien agréable. L'Alliance a approuvé comme prévu le projet de migration programmée de notre peuple. Comme vous me l'avez demandé j'ai informé le commandant du premier vaisseau qu'il pouvait donc partir dès qu'il serait prêt.
— Bien.
— Conseiller suprême, nous avons remarqué lors de notre arrivée que le vaisseau n'avait pas bougé, osa Angal.
— En effet...
Encore une fois, je trouvais le Conseiller suffisant et visiblement peu disposé à discuter.
— Ils auraient dû partir il y a plusieurs jours déjà, poursuivit Éloa.
— C'est exact, mademoiselle.
— Pourquoi sont-ils toujours là ? demanda Styx beaucoup moins patient que les deux autres.
— Vous n'avez qu'à aller poser la question aux prêtresses du Sanctuaire ! Ce sont elles qui ont annulé le départ, pour l'instant.
Le ton du Conseiller était monté d'une octave ce qui signifiait que le Sanctuaire n'avait pas voulu lui communiquer la raison du report et que ça l'agaçait particulièrement. Il fallait donc éviter toute autre question risquant d'envenimer le débat.
— Avez-vous des interrogations à propos de notre séjour au siège, Conseiller suprême ? tenta Angal pour changer de sujet.
— Non, vous pouvez rentrer dans vos familles en attendant vos prochains ordres.
— Merci Conseiller, nous allons vous laisser travailler, minauda Drake.
À peine avions nous suffisamment reculé vers le bureau d'Ixtus que le Conseiller remettait son bouclier.
— Ça a été bref en effet, admit Éloa.
— Désolé, il est un peu plus renfrogné qu'à l'ordinaire, s'excusa Ixtus.
— Il fallait bien venir.
— Sahiane, d'après le Conseiller, on ne lui a rien appris. On aurait pu s'épargner ça, fit remarquer Drake une fois sorti du bureau après avoir remercié Ixtus.
— Tu devrais savoir que si nous n'étions pas venus, il nous l'aurait reproché, lui asséna Alia.
— C'est fort probable, convint Drake.
— On fait quoi maintenant ? réclama Mnémésyne curieuse.
— On va au Sanctuaire, la renseignai-je.
— Pourquoi ça ne m'étonne pas, soupira Styx.
— C'est raté pour ce qui est de rentrer chez nous, reprit Mnémésyne.
— Ce sera au moins plus accueillant, lui sourit Alia.
À la sortie du Grand Conseil, nous traversâmes le parc arboré l'entourant pour rejoindre le Sanctuaire niché juste derrière. Ce jardin était calme et charmant quand il ne servait pas pour les buffets mondains. Nous nous arrêtâmes à l'entrée devant les deux guerrières pour signifier avec respect notre désir de pénétrer dans le temple.
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