Une journée peu commune
Je traînai un peu au lit ce matin là, attendant que l'heure passe. C'était pas vraiment le bon plan de se réveiller vingt-cinq minutes avant l'heure à laquelle le réveil sonne normalement. Mais je ne voulais pas me rendormir, je replongerais à coup sûr dans ces rêves délirants qui me faisaient paniquer.
Mais ce qui m'effrayait le plus, c'était cette petite voix qui me martelait qu'ils étaient importants. Et au final, elle avait raison, je me demande d'ailleur toujours comment ces rêves me sont venus.
C'était pas dans mon habitude de faire des rêves prémonitoires, promis. Mais depuis j'en ai encore fait quelques uns. Et c'est pas le plus bizarre chez moi, loin de là. Sauf que cette facette de mon étrangetée, je n'ai toujours pas réussis à l'expliquer.
Je perdis encore bien un quart d'heure, étendue là sur mon lit, à compter les points noirs qu'il y avait sur le plafond et à chercher à en faire des constellations. Sauf que j'ai vite craqué, et je me suis finalement décidée à me lever. Je suis partie me doucher et j'ai traîné le plus possible, ce qui est plutôt difficile quand on a l'habitude d'aller vite. Surtout que l'eau était froide...
Quand j'ai entendu la porte de la chambre de ma mère claquer, j'ai su que je pouvais sortir de ma douche glassée. Je me glissai rapidement hors de la pièce et me dirigeai vers les escaliers.
Ma mère m'attendait dans la cuisine. Elle me glissa un enthousiasme "Bonjour ma chérie !" en me voyant. Mais son salut résonnait tristement. L'histoire de la veille n'était pas oubliée, et elle alourdissait l'atmosphère.
Je gobai mes tartines en silence, situation exceptionnelle pour un petit déjeuné. D'habitude, je décrivais ma futur journée à ma mère, lui confiant toutes mes ambitions et mes doutes. Mais là, elle ne m'adressa même pas un regard. La seule fois où, en levant la tête de mon bol, je la vis me fixer, je remarquai surtout les grosses rides qui strillaient son front. Elle était soucieuse, pas de doute là dessus. Mais en stressant, elle me stressait aussi, c'était presque comme si elle me punissait pour une faute qu'elle avait commise.
Quand je me levai, mon bol dans les mains, elle sembla enfin retrouver le courage de m'adresser la parole. Elle s'appuya près de l'évier et plissa les yeux, signe chez elle de profonde inquiétude, et je remarquai pour la première fois les cernes sombres qui tiraient son visage.
- Tu vas t'inscrire ma puce ? Me demanda-t-elle, sur ton qu'elle voulait neutre.
Mais j'avais remarqué l'inquiétude qui planait dans sa question, et ça me fit encore douter de ma résolution.
- Hum... Oui sûrement... Je ne vois pas ce que j'y risque après tout, répondis-je en haussant les épaules.
Je ne serait pas non plus contre trouver quelques diamants. Et puis si je ne le fait pas, Jacob se serait dérangé pour rien, respectons-le un peu !
Ma mère sourit, mais elle ne pavint pas à me cacher la peur qui s'emparait d'elle. Je lisait en elle comme dans un livre ouvert, et je déchiffrais ses attitudes si facilement qu'elle ne pouvait rien me cacher. Enfin... Elle ne s'en est quand même pas privée.
À ce moment, j'interprêtais ces signes comme de la crainte face aux risques que j'allai encourire dans cette histoire, et aussi comme du stresse après ce que nous a dit Jacob hier. Je pensais naïvement qu'elle avait les même peurs que moi, mais je n'aurai pas pus me douter qu'elle craignait surtout ma réaction quand je découvrirai le secret qu'elle m'a toujours caché. Et qu'elle avait aussi peur de la personne que je deviendrai quand je découvrirai mes pouvoirs...
Ce matin là, si ma mère s'était confiée, jamais je n'aurai participé à la Chasse. Mais elle ne l'a pas fait, et elle s'est contenté d'accepter ma décision d'un hôchement de la tête.
Après réflexion, je pense que mon avenir était déjà scellé. Mais ce qu'elle aurait pu me dire m'aurait tout de même évité de commettre de nombreuses erreurs.
Après m'avoir assuré qu'elle s'occuperait de ma vaisselle, elle m'a laissé partir, et je suis remontée dans notre petite salle de bain. Je me leurrais ce matin là quand je me disais que ma journée serait normal. Le tirage au sort pesait déjà sur ma tête, et je, tout comme ma mère, me savais déjà sélectionnée.
Tout le monde n'avait qu'un sujet à la bouche au lycée : la Chasse. Et quand je suis arrivée, je n'ai pas échappé à la règle.
Ma petite bande de cinq ne parlait que de ça, et j'étais obligée de participer à la conversation, tout en veillant biensûr à rester suffisamment à l'écart. Les cinqs avaient des avis différents sur l'annonce de la veille, et leur discours virulant me permettait de ne pas prendre partie.
Elena et Dorian s'imaginaient déjà être sélectionnés, mais ils se disputaient encore hargnesement sur le tour que prendrait leur chasse au trésor. Austin, lui, ne voulait pas participer à la Chasse. Il en avait peur et ne cherchait pas à s'y mêler. Et puis il y avait Camille qui, sûre de ne pas être sélectionnée, ne perdait pas espoir et imaginait les aventure des vingt-huit chanceux.
Moi, j'évitais de trop parler. Dans ma tête je faisait déjà partie des sélectionnés. Et y penser me faisait angoisser. Je sentais la boule dans ma gorge qui s'était installée depuis hier grossir au fur et à mesure que la Chasse prenait pied dans la réalité. À cette heure-ci, deux jours plus tards, j'étais dans le train.
Pour la première fois de ma vie, je ne parvins pas à me confier à Austin. Je ne savais pas comment lui décrire ce qu'il m'était arrivé la veille, et j'avais le pressentiment que cette courte discussion devait rester secrète.
Finalement, je passai la journée à discuter avec mon meilleur ami, Austin à l'époque, de tout sauf de la Chasse. Il a toujours aimé son confort mon petit hamster, et l'idée de crapahuter en pleine nature le répugnait. Aussi il me répondit vivement quand je lui parlai de mon repas d'hier soir. La pizza était son plat préféré, et ça m'amusait de le faire saliver.
Quand la principale passa dans la classe pour nous présenter l'urne, mon ami resta sagement assis à sa place. À part lui, tout le monde se leva pour déposer leur nom, et j'en fis partie. Sous le regard inquiet d'Austin, je marchai lentement vers mon destin, en ressentant tout de même un soupçon d'excitation. Je ne doutais plus, et plaçai mon nom dans l'urne, sous le regard bienveillant de la directrice.
De sa table, Camille m'applaudit silencieusement et je ne pus réprimer un sourire. Je lui fis pareil quand ce fut son tour, toujours sous le regard désapprobateur d'Austin. Et puis la principale repartit avec l'urne, nous laissant avec notre prof de maths légèrement énervé d'avoir été dérangé dans son cours.
Ah c'est bien mon prof de maths ça. Il fusile du regard tout ce qui le sort de ses calculs. Je suis sûre que même si quelqu'un tombait raid mort de sa chaise, il terminerait ses fractions avant de le sortir en râlant.
Bref, à part ça la journée continua calmement. L'agitation liée à la Chasse passée, je pus enfin retrouver mes amis. Austin me boudait, et je restai donc avec Camille qui mettait un point d'honneur à me faire rire.
Dire que j'était stressée est un bel euphémisme. Je sentais toute ma vie basculer, et je ne pouvais en parler à personne.
Je cherchai alors à me rassurer. Je me répétais que tout allait bien se passer, et que l'aventure m'avait toujours tentée.
L'après-tirage au sort me paraissait si loin, et en même temps si proche que j'en devenais presque folle. C'était l'attente, surtout, qui était terrible ; car je ne savais pas ce que j'attendais.
Ma soirée se passa normalement. J'abandonnai rapidement mon sac de cours dans ma chambre. Étant donné que je n'avais pas cours le lendemain, je n'avais aucune obligation de faire mes devoirs. Et je me doutais bien que je n'étais pas prête de retourner au lycée...
Ma mère ne rentra pas avant tard, une urgence l'avait retenue à l'hôpital. Je mangeai donc un bout de pizza réchauffé avec pour seule compagnie madame télé et monsieur canapé.
Il passait de nombreux reportages autour des inscriptions à la Chasse lors du journal. Je n'y prêtai qu'une attention modérée, ne sachant toujours pas quoi penser de tout ça.
Ne voyant toujours pas ma mère rentrer j'allai me coucher seule. J'étais habituée à ses absences de toute façon, et dormir seule ne me gênait pas. J'avais décidé de passer une longue nuit en prévision des prochains jours qui promettaient d'être mouvementés, et ce n'était pas elle qui allait contrecarrer mes plans.
Je ne l'entendis pas regagner la maison, mais je savais que je la verrai le lendemain. Je fermai donc les yeux, allongée sur mon lit, et cessa de guetter le bruit de la voiture. Je me répétais que je voulais dormir, et le sommeil vint rapidement. Ma dernière pensée fut liée au décompte qui se jouait inconsciemment dans ma tête : Une journée de passée.
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