Tout commence là...

C'était le soir du 20 mars 2164, vers 19h30 il me semble. Et oui, c'est important d'être précise pour ma bio-audio...
Bref, c'est ce soir là que tout a commencé.

Je regardais tranquillement la télé avec ma mère quand on a toqué à notre porte. Sans plus s'inquiéter, mum est partie ouvrir et je suis restée affalée sur le canapé. Je l'ai entendue tourner la clef dans la serrure et tirer la porte.

Vous vous disez sûrement que je ne peux pas me souvenir de tout ce qu'il s'est passé en détail, mais vous serez surpris de voir combien des événements qui boulversent votre vie peuvent profondément vous marquer. Bon, j'ai pas non plus une super-mémoire, donc il est aussi possible que j'invente quelques trucs... Mais Tyler saura me remettre sur le droit chemin, ne vous en faites pas.

Donc, tout ça pour dire qu'à défaut de me souvenir de tout ce qu'il s'est passé après, je me rappelle parfaitement de cette dernière soirée.

L'homme qui attendait derrière la porte a demandé à ma mère :

- Votre fille Coline est là ?

J'imagine qu'elle s'est figée. En tout cas, c'est ce que j'ai fait. J'ai laissé tomber le bout de pain que je grignotais sur mes genoux et je me suis concentrée sur la conversation, le regard perdu dans le vide.

- Entrez je vous pris. A répondu froidement ma mère.

Je me demande encore aujourd'hui pourquoi elle a laissé cet inconnu entrer. Moi, j'étais prête à filer appeller la police mais elle restait calme. Je crois que c'est à partir de ce moment que j'ai compris que ma vie allait déconner.

L'homme est entré dans le sallon et je me suis levée. Je n'avais pas honte de me présenter en pyjama rose devant lui et je le défiais hargneusement du regard. Sa grande taille et l'aura de sérieux qu'il dégageait ne m'impressionnait pas.
D'où connaissait-il mon nom ?

- Bonjour Coline. Je suis ravit de te voir.

- Qui êtes vous ? Je lui demandai sèchement, méfiante.

Ma mère semblait avoir perdu tout instinct protecteur envers moi. Après avoir fermé la porte, elle restait statique à fixer l'homme, raide comme un piquet.

Entre elle et moi, c'est plus le grand amour maintenant. Elle m'a caché trop de choses à cause desquelles j'ai faillit me faire tuer, vous verrez que j'ai le droit de lui en vouloir.
Bref, face à la brusqueur et la fermeté de ma question, l'inconnu ricana.

- Moi ? Je m'appelle Jacob Davis, fit-il en s'asseyant tranquilement sur une chaise de la salle à manger.

J'allai lentement m'installer en face de lui sans le quitter des yeux. Ma mère s'assit à côté de moi et attrapa ma main.

- Comment vous connaissez mon nom ?

Cette question m'obsédait. Une lueur de malice passa dans ses yeux bruns et il répondit, toujours aussi souriant :

- Ça, je ne peux pas te le dire. Je suis juste passé te livrer un message.

Un frison descendit le long de ma colonne vertébrale, mais je ne voulais pas céder à la crainte. Je penchai légèrement la tête pour l'inviter à continuer tout en restant la plus impassible possible.

Il gigota un peu, gêné. Mais je ne pense pas que l'isolence d'une petite fille butée soit la chose la plus grave qu'il ait eu à affronter dans sa vie. Il se ressaisit vite et déclara :

- Ce soir, une annonce va passer au journal, déclara-t-il.

Étonnée, j'allais lui demander avec ironie depuis quand était-il devin. Mais il m'arrêta en anticipant ma question :

- Ne me demande pas comment je le sais, ça non plus je ne peux pas encore te le révéler.

Sa remarque fut suivie d'un long soupir de ma part avant que je me souvienne qu'il ne fallait pas que je montre mes émotions. Je redevins rapidement aussi froide que je l'étais il y a quelques secondes.

- Et c'est quoi ce foutu message alors ? Je lui demandai, mettant le plus de lassitude possible dans ma voix.

Légèrement déstabilisé, il me répondit tout de même avec assurance :

- Tu vas être sélectionnée par leur soit-disant tirage au sort. Mais tu ne devras pas écouter leurs jolis discours ainsi que leurs promesses et rester méfiante.

Je ris jaune, et le coupai en plein milieu de son discours. Non mais pour qui se prenait-il cet inconnu pour se permettre d'exiger des choses de moi ?

- Imaginons que vous ayez raison, pourquoi suis-je cencée rester méfiante ? C'est pas eux qui entrent chez les gens le soir, et qui les appellent par leur nom sans vouloir dire d'où ils tirent toutes leurs informations. Admettez qu'ils m'inspireraient plus confiance que vous...

Il passa sa main dans ses cheveux, visiblement bien embêté. Puis son regard se durcit et son léger sourire quitta ses lèvres.

- Ce n'est pas le moment de tout t'expliquer, tu n'est pas prête. Je te demande juste de bien faire attention et de ne pas croire ce que te diront ces menteurs...

Je me souviens qu'il m'avait déjà convaincue à ce moment. Et oui, la petite Coline est peut-être un peu butée, mais elle est aussi prudente. Cependant, elle est aussi très curieuse et il avait attiré mon attention. Loin de me contenter de ces petits arguments, je recommençai à l'interroger :

- Et pourquoi ce serait des...

Il ne me laissa pas finir ma phrase. Les joues un peu rougies, il semblait à deux doigts de me crier dessus. Ça m'amusait peut-être un peu trop. Ma mère me serra plus fort la main et je savais que si je la regarderais, je la verrais m'avertir du regard. Mais je ne détournai pas les yeux de l'homme, prenant plaisir à le tourmenter jusqu'à ce qu'il avoue ce qu'il me cachait.

Mais il ne se laissa pas démonter. Il reprit rapidement son sang froid et affirma, toute trace d'amusement disparue de son regard :

- Ils le sont. Malgrés leurs beaux discours leur unique but est de réduire les hommes normaux au niveau d'esclaves, fît-il gravement. Et vous devez les en empêcher.

Je n'avais pas tout saisis, mais une chose était sûre, je le croyais. Le ton si sérieux de sa voix et la colère froide qui ridait son visage arrivaient amplement à me convaincre.

Qu'avais-je donc de si spéciale ? J'émettais inconsciemment plusieurs hypothèses dans ma tête, mettant en scène dans la plupart mon paternel. Mais j'étais quand même bien loin de la réalité.

Et oui, même avec mon imagination débordante je n'ai pas trouvé dans la petite dizaine de scénarii que j'inventais une version de la vérité. Et heureusement que mon esprit n'était pas assez tordu pour la trouver, il aurait fallut m'interner sinon.

Notre invité se redressa pour me regarder droit dans les yeux. Malgrés le sérieux et la colère qui coloraient son regard, j'arrivai à trouver dans ses yeux une émotion plus enfoui : de la peur.

- Tu es une des seules que nous ayons pu informer sans dévoiler notre présence. Nos espoirs reposent sur toi, me dit-il gravement. J'entendais presque la fin sa phrase tellement elle planait, ne nous déçois pas...

J'avais bien envie de lui rire au nez, mais je me retins devant la faible lueur d'espoir qui brillait dans ses yeux. Il avait compris, il savait que je suivrais ses directives car, au fond de moi, elles me semblaient légitimes. Après un vague instant de flottement, je lui lançai un regard que je voulais le plus méprisant possible, devant lequel il sourit effrontément.

- J'espère qu'on a bien choisi, conclut-il. Bonne soirée mesdames.

Et avant que ma mère ne puisse le retenir, il quitta la maison pour disparaître dans la nuit.

Vidée, elle alla doucement fermer la porte et me regarda presque avec pitié. Ah, si j'avais sû qu'elle n'était pas blanche comme neige dans cette affaire et qu'elle savait ce qui allait m'arriver, j'aurais sûrement quitté la maison et suivi l'inconnu.

Mais à l'époque, je croyais à son innocence, et je me contentais de la fixer sans savoir quoi dire. Ses yeux étaient humides, elle était à deux doigts de pleurer.

Au moment où elle ouvrait les bras dans l'attente de mon étreinte, un spot passa à la télé et me fît immédiatement tourner la tête dans sa direction.

Le journal avait été interrompu, et étaient maintenant filmés deux hommes en costume, assis sur de gros fauteuils rouges. Solennels, ils fixèrent un petit moment la caméra avant de déclarer :

- Mesieurs mesdames, bonsoir...

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