Soirée... Et malaise

Hello petit auditeur, me revoilà ! Le beau Tyler est de retour ! 

J'ai enfin trouvé une pomme pour notre conteuse professionnelle, je prends donc la relève le temps qu'elle la mange. Je ne crois pas être le mieux placé pour parler de cette soirée... Mais va falloir s'y faire.

Enfin bon, reprenons où elle s'était arrêtée. 

Leo nous conduisit à la salle à manger sans dire un mot. Je fermais la marche, tenant à la galanterie. Je sentais Coline stressée, et ça ne m'étonnais pas. Vu le faible nombre de fois qu'elle avait pris la parole en classe ces deux dernières années, j'avais bien compris qu'elle était affreusement timide.

Mais la jolie couleur rouge qu'elle abordait si souvent me plaisait, et les mots qu'elle arrivait à sortir sonnaient très bien. Il ne lui manquait plus qu'en peu de confiance en elle et elle serait une formidable oratrice. Je me promis alors de l'aider, histoire de mettre tous les avantages de notre coté. Et heureusement que j'ai fais ce choix, elle parle vraiment bien ma Coline !

Leo nous arrêta enfin devant la grande salle. Nous eûmes la surprise de découvrir que sa déco avait était totalement changée dans l'après-midi. Les tables rondes avaient été enlevées, remplacées par une unique grande table de vingt-huit couverts qui aboutissait sur une plus petite à la perpendiculaire de cinq couvertes. De grands rideaux de toutes couleurs étaient étendus sur les murs, affichant les teintes des quatorze régions, et les lustres avaient été allumés. Au long du mur face aux fenêtres trônait un petit orchestre. Fiers sur leurs estrade, les dix musiciens jouaient une musique douce dirigés par leur chef d'orchestre. Bercé par la belle symphonie, nous prîmes lentement nos places et nous détendîmes. 

J'eux alors la surprise de constater sur ma nouvelle montre hors de prix que nous avions passé trois quarts d'heure dans la salle d'enregistrement. Il était bientôt vingt heure, et mon ventre commençait à gargouiller.

Les trois quarts des chasseurs étaient déjà installés, et les places étaient nommées comme au déjeuné. Nous nous retrouvâmes avec d'autres voisins cette fois-ci : les Pacapiciens, les Aqulipois et les Brediens, respectivement habillés en noir, vert foncé et violet. Et ils n'étaient pas vraiment causants. Les Pacapiciens n'étaient de toute façon pas connus pour parler beaucoup et les Brediens étaient plutôt jeunes. Heureusement que les Aqulipois entretenaient la conversation.

La fille, une grande brune nommée July, avait un sourire magnifique. Je crois que c'est avec elle que j'ai les plus discuté autour de cette table. Coline essaya de suivre mon exemple. Elle parlait avec la fille de Bredie, une certaine Zoé. Cette petite fille était adorable, elle respirait la vie.

Dommage qu'on l'ait détruite...

Les derniers couples arrivèrent,puis ce fut le tour de la famille royale qui s'installa sur la petite table du bout. Même le jeune Myken était là. J'exultais, qui aurait cru qu'un jour, le bon vieux Tyler mangerait à la même table que le roi ? A cette époque là, personne. Je n'ai jamais été que le garçon sympathique, mais pas l'important. Le sous-fifre, le second. L'acolyte. Mais grâce à la Chasse... On peut dire que ça a changé.

Des domestiques entrèrent alors dans la salle. Ils nous servirent à tous une boisson d'une légère couleur orange fluo, sans doute hors de prix. Le roi pris son verre, se leva et déclara :

- A vous chers chasseurs. A vous, à votre mission, à notre destin et avant tout à la Nouvelle France. Bonne chance à tous !

Il leva son verre et nous en fîmes de même. A la fin de son annonce il le but, et nous l'imitâmes encore. La boisson n'avait pas un gout très agréable. Il me sembla distinguer un curieux mélange d'orange, de citron et de pamplemousse associé à un arrière goût que je ne reconnu pas. Je conclu que c'était sûrement un alcool cher réservé à la noblesse.

Eh oui les produits de luxes ne sont pas toujours les meilleurs. Je me souvenais avoir goûté un peu de caviar étant plus jeune, et ce n'était vraiment pas bon. J'avais eu envie de tout recracher mais, concentré sur le prix du produit, je m'en étais retenu et m'étais forcé à tout avaler. J'en avait été vacciné à vie. Les nobles ont vraiment des goûts bizarres parfois.

Par contre, le dîner était excellent. Mais je dois reconnaître que je n'en garde que très peu de souvenirs. C'est Coline qui est douée pour décrire les repas, pas moi. Quoiqu'ici c'est plutôt une bonne chose ; je passerai plus vite à la soirée.

Le repas dura deux heures, mais je ne le vis pas passer. Il était délicieux. Quand nous eûmes tous fini, soit un peu plus tard que dix heure, on nous fit tous nous lever et les domestiques accoururent pour bouger les tables. La lumière se baissa un peu, ou bien était-ce ma vue qui se brouillait ? 

Les tables furent plaquées contre les murs et on y installa un bar. Puis l'orchestre joua plus fort. Tous reculés contre les murs, nous regardâmes le roi prendre les mains de sa reine dans les sienne, l'enlacer et commencer à valser. Les organisateurs nous avaient bien formés, nous attendions la fin de la première musique en silence avant d'applaudir respectueusement le couple royale.

Je les regardais donc tourner lentement avec grâce. Les lèvres de la reine s'étiraient d'un sourire naturel et les yeux du roi brillaient. Leurs mouvements étaient parfaitement accordés avec la musique. Mais loin de leur performance, mon regard était attiré par la frêle silhouette de Coline près de moi. Ses yeux bruns fixaient le couple sans s'apercevoir que je la regardait. Je voyais son innocence à travers ses doux traits. A ce moment là, elle ne semblait plus se soucier de rien. Oui Coline, tu étais si mignonne à regarder admirativement le roi danser. Une bouffée de fierté me saisit à te regarder rêver. Je m'aperçu de la chance que j'avais de compter une fille comme toi en alliée, une fille à la fois intelligente et méfiante qu'attachante. Une fille que je connaissait depuis deux ans et pourtant si peu. Mais j'allais me rattraper.

Quand la musique changea, je posai une main sur le dos de la grande Aqulipoise restée à coté de moi. Elle tourna la tête dans ma direction, puis sourit alors que je la poussais sur la piste. 

- M'accorderiez-vous cette danse ma chère ? Lui demandai-je gentiment.

Son expression réjouie parlait d'elle-même.

- Avec plaisir, répondit-elle doucement en attrapant la main que je lui tendais.

Son visage souriant ne rougissait pas, bien plus présentable que Coline ne puis-je m'empêcher de penser. Je plongeai mon regard dans ses yeux bruns et me laissai entraîner le temps d'une valse. 

Mes amis on dû s'étonner des images retransmises. Je n'avais jamais montré mon habilité dans des danses si classiques en soirée. C'était ma mère m'avait appris à danser ainsi, elle savait qu'un jour j'en aurai besoin. Et ça ne manqua pas, je savais que je faisais sentation sur cette piste brillante.

July aussi dansait bien, nous formions un bon couple. Quand le morceau s'acheva, je la conduisis vers le bar. Nous commandâmes des verres que nous bûmes en parlant, loin de la gêne des moments plus solennels. Elle avait le sourire facile et je m'amusais à le lui tirer le plus souvent possible. Elle me racontait avec enthousiasme son enfance rythmée par les courts de danses et les repas importants de son père, un riche homme d'affaire. Bercé par ses paroles, mon regard se dirigeait du coté de Coline. Elle s'était détournée de la petite Zoé et discutait avec un Pylocillonois en costume rouge. Je l'identifiai comme étant celui de la voiture, ce certain Mathieu. Mes sourcils se froncèrent quand je me rendis compte qu'elle devait parler de complots autour de la Chasse. Mais son sourire franc et son air détendu me rassurèrent un peu. Au moins elle avait l'air joyeuse.

C'est bien ma Coline ça, même dans les moments de détente elle réfléchit au pire. Au final, je suis sûr que ça l'amuse. 

Ma vision se noircit encore, mais je n'y fis pas attention. Je portai mon verre à mes lèvres pour respirer l'odeur de l'alcool, j'en bu goulûment et la silhouette lointaine de Coline se brouilla. Ma gorge gonfla, mon souffle se fit plus court et mes poumons ne se gonflèrent qu'à moitié. Ma main s'abattit violemment sur la table et mon corps fut parcouru de frissons. Mon estomac me brûlait, ma tête me lançait, ma peau me grattait et j'avais une forte envie de vomir.

Surprise, July posa une main sur la mienne et me prit le bras de l'autre. Elle les serra, me secoua et je sentait l'empreinte brûlante de son contact sur ma peau. J'inspirais son souffle parfumé d'alcool alors qu'elle m'appelait. Ma peau me démangeait sous ses mains et j'eux une intense envie de me dégager. Je la repoussai et m'effondrai sur une chaise plaquée contre un mur.

- Tyler ! S'exclama-t-elle plus fort en s'approchant. 

Je tremblais, mon estomac se vrillait. Une réaction allergique, voilà ce qui m'agitait. Ma peau et mes membres gonflaient, raidis de froid. Je fermais les yeux, gagné par cette douleur diffuse.

Soudain, deux mains se plaquèrent sur mon front. Mes yeux se réouvirent peu à peu pour plonger dans un regard vert et concentré. Ma migraine cessa, mes membres se réchauffèrent et je repris mes esprits. July était penchée à ma gauche, le regard remplit d'inquiétude. Devant moi était agenouillé celui que j'identifiai comme mon sauveur, avant de me rendre compte que ce n'était personne d'autre que Lucas. Derrière lui me fixait Coline, crispée d'inquiétude, qui venait de traverser la salle en courant. À côté d'elle se tenait encore Mathieu, abordant un regard sombre, et je ne trouvai rien de mieux pour les rassurer que de sourire.

Lucas se releva, satisfait, puis se rapprocha légèrement de Coline. Je fus le seul à remarquer le bref regard inquiet dont il la couvra pendant quelques instants, toutes les attentions étaient toujours concentrées sur moi. Mais j'interprétai cette attitude comme un avertissement. Lucas m'avait vite soigné, il devait me surveiller. Sa soudaine inquiétude envers Coline signifiait-elle que ma compagne risquait quelques chose de similaire ?

July, toujours tremblante à coté de moi, ne sembla pas être rassurée par mon sourire.

- Ça va Tyler ? Me demanda-t-elle doucement.

Je me relevai lentement, toute douleur passée, et je lui confirmai en essayant de paraître enjoué :

- Oui, ne t'en fais pas. 

Je lui pris la main et elle hésita un peu avant de m'aider à me relever. Vous seriez étonnés de voir quelle force possède une danseuse classique ; je fus très vite sur pied. Mes jambes flageolaient un peu mais regagnèrent vite leur force pour me soutenir. Je passai une main dans mes cheveux et déclarai pour tous les curieux qui s'étaient approchés :

- Ça va mieux merci. La fatigue sans doute...

La plupart parurent satisfaits et s'éloignèrent. July aussi se contenta de cette excuse et ma lâcha la main. Coline haussa les épaules, pas dupe, et Mathieu détourna la regard. Lucas, lui, souriait légèrement. Il me fit un signe de tête et je lui signai un "merci" silencieux, reconnaissant.

Il savait comme moi que c'était loin d'un simple coup de fatigue. Non, ce n'était pas normal. J'essayais de retracer ma journée, cherchant un élément déclencheur. Entre l'air de la ville, une possible allergie à un des produits inconnus dont on m'avait aspergé toute la journée, une indigestion dû aux repas ou une bouffée de stresse amplifiée par l'alcool, il pouvait y avoir de nombreux motifs à cette brusque réaction. Mais rien ne m'apparaissait comme évident, et je ne comprenais pas comment Lucas avait pu mettre fin à cette crise d'un simple contacte.

Je le regardai, certain qu'il savait ce que j'ignorais. Coline s'approcha de lui, lui fit un grand sourire et lui parla. Je voulais lui souffler de faire attention, ce garçon m'inquiétait déjà. Mais elle ne me remarqua pas, et il ne me vînt pas à l'idée qu'elle puisse elle aussi chercher à soutirer des informations à cet étrange Cevalois.

Ah ça oui, toi aussi tu étais très calculatrice Coline...

Mais on la coupa dans sa conversation. Un jeune garçon habillé de jaune s'avança vers elle et l'apostropha soudainement :

- Coline Turner, c'est vous ?

Surprise, elle acquiesça et le garçon s'avança encore. Il lui semblait l'avoir déjà vu, mais elle ne parvenait pas à mettre un nom sur qui il lui rappelait. Toujours est-il qu'il s'arrêta juste devant elle, lui pris la main, et lui donna une petite boule de mouchoirs. 

- Ce qui est à moi vous appartient, annonça-t-il gravement. Bonne chance.

Sans rien rajouter, il se détourna et se dirigea vers la sortie. Il passa devant moi et je lus sur son visage une résignation qui ne correspondait pas à son jeune âge.

Tout ça parce qu'il savait. Le pauvre, je ne sais pas exactement jusqu'où s'étendait sa connaissance mais il en savait assez. Oui, il se savait déjà condamné. Aucun sourire n'éclairerait plus son visage enfantin : il allait mourir. Et il s'y était déjà résigné.

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