Chapitre 25

Les yeux toujours écarquillés d'horreur, Chat Noir gardait son regard rivé sur l'endroit où avait disparu son père, tandis qu'un triomphal sourire se dessinait sur le visage du Papillon.

Non.

- « Non ! », hoqueta Ladybug au même instant, faisant écho aux pensées paniquées de son partenaire.

Livide, elle chancela légèrement, tout en agrippant machinalement son coéquipier par le bras.

Une monstrueuse vague de désespoir surgit au creux de la poitrine de Chat Noir. S'élevant, gonflant, menaçant de s'écraser impitoyablement sur le cœur du jeune héros de Paris.

Et soudain, Gabriel apparu dans le dos du Papillon, surgissant du néant dans un éclair bleuté.

Une téléportation, qui fit immédiatement refluer la vague de terreur qui s'apprêtait à engloutir Chat Noir.

- « Que... » laissa échapper le Papillon, avant d'être interrompu par un violent coup d'éventail que lui porta vivement le père d'Adrien.

Le célèbre styliste avait frappé son redoutable ennemi de toutes ses forces, et par surprise. Aussitôt, le Papillon s'envola sur plusieurs mètres avant de chuter lourdement au sol, roulant sur lui-même pour n'être stoppé que lorsque son corps buta contre l'une des massives colonnes avoisinantes.

L'impact avait été d'une telle violence que Ladybug et Chat Noir s'attendaient légitimement à ce que leur terrible adversaire reste à terre. Mais à leur grande surprise, leur ennemi se redressa, prenant péniblement appui sur sa canne tout en fusillant du regard Gabriel Agreste. Alors que s'évanouissait l'aura bleue qui avait jusque-là entourée sa haute silhouette, l'illustre styliste serra les poings de fureur en constatant que son ennemi était encore loin d'être hors d'état de nuire.

- « Agreste », gronda rageusement le Papillon en achevant de se relever. « Combien de fois est-ce que tu vas encore te dresser sur mon chemin ? Laisse-moi ces miraculous ! Laisse-moi ramener Laura ! »

- « Tu ne pourras pas la ramener ! » martela une fois de plus le père d'Adrien, avant de se ruer vers son ennemi tout en brandissant son arme. « Personne ne le peux ! »

- « JE le peux ! », cria le Papillon en se mettant en garde, prêt à parer le coup. « Je SAIS que je peux y arriver ! Je la connais mieux que quiconque ! »

- « Alors tu devrais savoir qu'elle ne voudrait jamais ça ! », répliqua Gabriel en frappant son ennemi, qui réussit à dévier son attaque d'un souple mouvement de poignet.

Reculant d'un pas, le Papillon jeta un bref regard aux deux vilains qu'il tenait encore sous son contrôle, tout en leur adressant un léger geste du menton. Obéissant à son muet signal, la gigantesque femme et l'homme en rose se désengagèrent brusquement du combat qu'ils livraient jusque-là contre Ladybug et Chat Noir pour se ruer à toutes jambes vers le styliste.

Heureusement pour ce dernier, l'héroïque duo de Paris était fermement décidé à ne pas laisser le père d'Adrien se laisser submerger par le nombre. Ils réagirent aussitôt, et c'est à coup de bâtons et de yo-yo qu'ils interceptèrent leurs adversaires alors que ceux-ci avaient à peine parcouru quelques mètres.

- « Je sais ce que tu ressens », cria Gabriel à l'attention de son rival, tout en jetant un rapide regard aux deux vilains qui s'étaient dangereusement rapprochés. « Mais c'est de la folie ! Arrête ça tant qu'il en est encore temps ! »

- « Tu ne peux PAS savoir ce que je ressens ! » vociféra de plus belle le Papillon, son regard halluciné brillant d'une lueur démente. « Elle a toujours été dans ma vie, d'aussi loin que je me rappelle ! Dans mon plus ancien souvenir, elle était déjà là ! On a grandi ensemble, on s'est découvert une passion pour l'histoire ensemble, on a fait nos études ensemble... C'était la femme de ma vie ! »

- « C'ETAIT MA FEMME ! », rugit désespérément Gabriel. « Que ça te plaise ou non, elle t'a toujours vu uniquement comme un frère », poursuivit-il alors que le visage du Papillon se tordait de haine. « Mais si tu l'aimes autant que tu le dis, alors tu sais qu'il faut la laisser en paix. Arrête cette folie, Kubdel », conclu-t-il d'une voix que l'émotion faisait à présent trembler.

- « JAMAIS ! » aboya le Papillon tout en se jetant en avant.

Semblant trouver un extraordinaire regain d'énergie dans la haine brûlante qu'il ressentait pour le père d'Adrien, l'homme qui terrorisait Paris multiplia les assauts, plongeant, feintant, frappant avec une ardeur sans cesse renouvelée. Une pluie de coup s'abattait sur Gabriel qui ripostait autant que faire se peut, jusqu'à ce qu'une vicieuse attaque ne trouve le chemin de sa jambe.

La canne du Papillon s'écrasa avec une force dévastatrice sur le tibia de son rival.

Et cette fois, ce fut Gabriel qui se retrouva genou à terre.

- « Ces miraculous seront à moi », cracha le Papillon avec une haineuse arrogance. « Même si je dois d'abord me débarrasser de toi. »

Gabriel se redressa en grimaçant, tout en donnant un violent coup d'éventail en direction de son ennemi juré qui esquiva sans peine cette contre-attaque.

- « Tu ne peux pas me battre », reprit le Papillon avec un rire hystérique. « J'ai pu invoquer deux vilains en une fois grâce au peu que j'ai déchiffré du livre sacré », poursuivit-il en désignant la pièce d'un large geste. « Qui sait ce dont je serai ensuite capable ? C'est à toi de te rendre. »

Suffisamment proche du super-vilain pour saisir ses paroles, Chat Noir laissa échapper un involontaire hoquet d'horreur, tandis que les immenses yeux bleus de Ladybug se dilataient d'effroi.

- « Oh non », laissa machinalement échapper la jeune fille.

Le livre.

Comment avaient-ils pu être si stupides ?

Dans leur hâte de faire déchiffrer le texte, ils avaient fournis la plus terrifiante des armes à leur pire ennemi.

Les jeunes héros de Paris échangèrent un regard aussi bref qu'intense, avant de hocher la tête de concert. Le moment n'était clairement pas le bienvenu pour se laisser écraser par une accablante culpabilité. Au contraire, cette terrible prise de conscience ne fit que raffermir la résolution des deux adolescents, embrasant leurs volontés telle une allumette jetée dans un champ de broussailles.

Il était impératif de mettre fin aux agissements du Papillon.

Là, et maintenant.

Hors de question de le laisser filer entre leurs doigts alors qu'il était à présent plus dangereux que jamais.




Alors que ces pensées traversaient l'esprit de Chat Noir, son ouïe fine captura le son aigu d'un bip. Un son parfaitement identifiable, en dépit du chaos ambiant.

Les yeux du jeune homme se posèrent aussitôt sur la poitrine de son père. Sur la broche qui ornait son torse.

Les délicates plumes stylisées qui décoraient le miraculous du Paon s'effaçaient une à une, au point qu'il ne restait à présent plus que deux d'entre elles, tandis que le reste du bijou était désormais d'une douce couleur argentée.

Gabriel avait utilisé son pouvoir, et le compte à rebours qui le séparait de sa détransformation s'était implacablement lancé.

- « Ma Lady ! » lança Chat Noir d'une voix tendue. « Le miraculous ! »

Suivant le regard angoissé de son partenaire, Ladybug approuva d'un bref mouvement de tête quand elle comprit le sujet de son inquiétude.

Plus question de tergiverser.

- « Chat, couvre-moi ! », lui ordonna-t-elle d'une voix claire, alors qu'elle luttait pour se défaire de l'emprise du vilain vêtu de rose.

Son partenaire vola à son secours, lui permettant d'obtenir les quelques secondes de répit qui lui étaient nécessaires pour analyser la scène quelle avait sous les yeux.

Une idée.

Vite.

Il lui fallait une idée.

Le regard incisif de Ladybug balaya rapidement l'espace, tandis que son cerveau en ébullition décortiquait avec autant de précision que d'efficacité les éléments qui entouraient vilains et héros. Le sol. Leurs armes. Les bâches. Les fenêtres. Les colonnes.

LA colonne.

Une colonne dont la base avait déjà subi de lourds dégâts, manifestement suite à l'une des puissantes charges de la monstrueuse femme qu'ils avaient à affronter.

Suffisamment endommagée pour que Chat Noir puisse achever le travail, et suffisamment proche de leur groupe pour gêner voire neutraliser les vilains.

- « Parfait », murmura Ladybug.

D'un agile saut en arrière, elle se plaça au niveau de son coéquipier.

- « Chat Noir ! », s'écria-t-elle aussitôt, tendant le doigt vers la colonne. « Utilise Cataclysme sur ce pilier ! »

Son partenaire ne se le fit pas dire deux fois. Déclenchant son pouvoir, il écrasa sa main auréolée de lugubres particules noire à l'endroit exact que lui indiquait la jeune fille. La colonne vacilla dans un craquement sinistre, tandis que le héros s'éloignait d'un bond rapide pour se mettre à l'abri. Ladybug profita quant à elle de ce bref laps de temps pour lancer son yo-yo en direction de Gabriel. Elle fit habilement s'enrouler son arme autour du torse de l'illustre styliste avant de tirer sèchement sur le câble, entrainant l'homme en arrière pour le mettre lui aussi hors de portée de la dangereuse pluie de débris.

Le pilier oscilla une ultime fois, avant de s'effondrer à terre dans un fracas terrifiant. Le sol trembla sous les pieds des jeunes héros et de leur allié, les faisant trembler avec tant de force qu'ils eurent l'impression que leurs os s'entrechoquaient au rythme de cette terrible onde de choc.

Une poignée de secondes plus tard, l'épouvantable bruit cessa.

Un silence presque surnaturel régnait à présent dans la pièce, troublé seulement par les respirations haletantes des deux héros de Paris et de leur allié. Peinant à distinguer quoi que ce soit, Ladybug plissa machinalement des yeux pour tenter de discerner ce qu'il se passait devant elle.

Mais tout n'était que poussière.

Et alors que les fines particules soulevées par la chute du gigantesque pilier achevaient de retomber au sol, elle discerna une silhouette titubante au milieu des ruines.

Pas le Papillon, supplia-t-elle mentalement. Pas le Papillon.

Puis le bruit sec de la pointe d'une canne cognant contre le marbre résonna dans la salle, semblant venir de partout et nulle part à la fois alors qu'elle se réverbérait de façon angoissante contre les murs et colonnes.

Le Papillon.

Avant même que l'homme ne lui apparaisse distinctement, Ladybug lança son yo-yo dans les airs, hurlant « Lucky Charm » avec pour résultat l'apparition d'un petit sac en tissu qui retomba lourdement dans le creux de sa main tendue.

- « Agreste... », gronda sourdement le Papillon en surgissant enfin du nuage poudreux.

Son chatoyant costume violet était à présent recouvert d'une épaisse couche de poussière, qui lui donnait une couleur d'un pâle gris délavé. Toute la haute silhouette de l'homme était ainsi étrangement terne, à l'exception notable de son regard brûlant de haine. Ses yeux étincelaient tels deux brasiers flamboyant rageusement à travers la brume, et qui n'étaient braqués sur nul autre que Gabriel Agreste.

Ignorant royalement les deux vilains qui gisaient évanouis, le Papillon amorçant un nouveau pas chancelant en direction du père d'Adrien, avant de retrouver finalement son équilibre et d'avancer à grandes jambées agressives.

Voyant leur sinistre ennemi approcher de Gabriel, Ladybug se hâta de vérifier le contenu de son sac. Ses yeux bleus s'éclairèrent d'une lueur triomphale, avant qu'elle ne déverse rapidement au sol le contenu du fin sachet de tissu. Une nuée de billes noires et rouges se répandit à terre, rebondissant avec de doux bruits cristallins sur les dalles de marbres avant de poursuivre leur route droit devant le duo de héros et leur allié.

Les minuscules sphères de verre roulaient et roulaient encore, continuant leur implacable chemin alors que seules quelques-unes d'entre elles se voyaient déviées par les débris environnants. Elles ricochaient sur les rainures des dalles, puis reprenaient leur folle course jusqu'à se glisser sournoisement sous les pas du Papillon.

Trop focalisé sur Gabriel, le super-vilain réagit avec un temps de retard et trébucha légèrement tandis que sa semelle ripait sur les billes qu'avaient semées Ladybug. Sautant sur l'occasion, Chat Noir étendit aussitôt son bâton pour faucher les jambes de son adversaire, achevant de lui faire perdre définitivement l'équilibre. Le Papillon tomba lourdement sur le dos, laissant échapper une exclamation de douleur alors que tout l'air s'échappait de ses poumons sous l'effet du choc.

Etourdi mais toujours conscient, le super-vilain se redressa sur un coude tout en grognant de rage. Ladybug et Chat Noir fléchirent les jambes, prêts à bondir vers lui, mais avant qu'ils n'aient pu effectuer le moindre geste, Gabriel s'était élancé sur son adversaire.

Le célèbre styliste leva son éventail dans les airs, tandis que son regard brûlait d'une colère si froide que même Chat Noir et Ladybug sentirent leurs entrailles se glacer d'appréhension. Son bras tendu effectua un arc de cercle aussi magnifique qu'implacable au-dessus de sa tête, alors que les yeux de son ennemi s'écarquillaient d'horreur.

Puis, au dernier instant, Gabriel lâcha son arme.

Et écrasa son poing de toutes ses forces sur le visage du Papillon.

Un craquement sourd résonna dans la salle, et l'homme qui avait jusque-là tant fait trembler Paris s'effondra à terre une bonne fois pour toutes, évanoui.




Jetant un regard glacial à son ennemi, Gabriel se redressa tout en secouant machinalement ses doigts endoloris, pendant que Chat Noir et Ladybug le fixaient avec stupéfaction.

Les deux héros restèrent un instant immobile, comme sonnés eux aussi, peinant encore à réaliser que le violent coup de Gabriel avait bel et bien sonné la fin du périlleux combat qui les opposait depuis tant d'années au terrible Papillon. Au bout de quelques interminables secondes de flottement, ils reprirent finalement leurs esprits, se rendant soudainement compte que la bataille n'était pour l'instant pas tout à fait terminée.

- « Chat, le miraculous », lança Ladybug d'un ton pressant, tout en se déplaçant d'un pas rapide en direction des deux autres vilains qui gisaient toujours à terre. « Je te laisse le récupérer, je m'occupe des akuma. »

- « C'est comme si c'était fait, ma Lady », répliqua Chat Noir en secouant machinalement la tête pour remettre ses idées en ordre.

Alors que Ladybug se hâtait de purifier les akumas qui possédaient encore les certes innocentes mais redoutables victimes du Papillon, son coéquipier s'approcha d'un pas chancelant du Papillon. Le jeune homme gardait son regard le regard rivé sur le joyau qui ornait le torse de son adversaire.

Le miraculous du Papillon.

Un bijou d'une sombre couleur violacée, orné de quatre ailettes argentées qui le faisaient ressembler au gracieux insecte dont son porteur avait emprunté le nom.

L'objet de tous leurs tourments, enfin à portée de main.

Tout ceci paraissait si irréel à Chat Noir que le jeune homme se sentait étrangement déconnecté de la réalité. Il avait l'impression de se mouvoir dans un étrange rêve. Un songe à l'issue certes heureuse, mais aux éléments si incohérents que son esprit se cabrait encore à l'idée que tout ce qu'il venait de vivre s'était bel et bien produit. Son père, le Papillon, cette victoire tant attendue.... Le jeune homme réalisait encore difficilement ce qu'il venait de se passer.

Tendant ses doigts tremblants vers le col son ennemi, Chat Noir referma son poing sur le miraculous, avant de se redresser en serrant fermement le bijou dans sa main. Au même instant, le sinistre masque qui recouvrait les traits du Papillon disparut dans une nuée d'étincelles violettes, dévoilant le visage évanoui du conservateur du Louvre.




Alors que sa coéquipière déclenchait son pouvoir pour réparer les dégâts infligés par le terrible affrontement qui venait d'avoir lieu, Chat Noir se détourna de son ennemi pour porter son attention sur son père. La transformation du célèbre styliste s'évanouissait à son tour, disparaissant dans une douce lueur bleutée. L'adolescent nota soudain que la respiration de Gabriel s'était faite lourde et haletante, et à travers les familières lunettes qui remplaçaient à présent son masque, l'homme braquait sur son fils un regard d'une intensité presque effrayante.

- « Père », commença le jeune héros d'une voix inquiète, « J-Je... »

Avant que Chat Noir puisse prononcer une parole de plus, Gabriel Agreste avait effectué quelques grandes enjambées dans sa direction, effaçant en une fraction de seconde la distance qui les séparait encore. Un battement de cœur plus tard, le célèbre styliste saisissait son fils dans ses bras avec tant de force que l'adolescent en eut un instant le souffle coupé.

Alors qu'il restait encore tétanisé de surprise, Chat Noir sentit les mains de son père se crisper compulsivement dans son dos. Pendant ce temps, les épaules de cet homme d'ordinaire si maître de lui-même se levaient et s'abaissaient à un rythme qu'il ne semblait pouvoir contrôler.

- « Adrien. Mon garçon...», murmura-t-il dans un souffle, d'une voix si basse que l'adolescent cru un instant l'avoir imaginée.

Rêvée.

- « ...Tu n'as rien. Tu n'as rien. »

Tandis que Gabriel répétait ces mots avec autant de ferveur et de reconnaissance qu'une prière enfin exaucée, Chat Noir sortit enfin de sa torpeur pour rendre son étreinte à son père.

Fermant les paupières pour mieux savourer cet instant inespéré, l'adolescent dû se mordre violement l'intérieur de la joue pour se forcer à retenir ses pleurs. Durant ces derniers jours, persuadé que son père ne lui vouait que haine et mépris, le jeune homme avait été la proie de tant de sinistres émotions que cet instant de grâce n'en était que plus précieux.

Tremblant à présent de façon difficilement contrôlable, Chat Noir se sentait à présent proche du point de rupture. Sa poitrine était si nouée qu'il en avait désormais le souffle court. Sa gorge était tellement serrée qu'il arrivait à peine à déglutir. Ses yeux le piquaient de plus en plus, comme pour le presser de laisser jaillir de limpides torrents de larmes qui entraineraient enfin hors de son corps tous les violents sentiments qui l'avaient si implacablement torturé depuis maintenant deux semaines.

Gabriel se redressa lentement, posant affectueusement une main sur l'épaule de Chat Noir tout en relevant la tête pour plonger son regard humide dans les yeux verts du jeune homme. Alors qu'il dévisageait attentivement son fils, l'expression du célèbre styliste était chargée de si intenses et si inhabituelles émotions que Chat Noir sentit son cœur se mettre à bondir autant de surprise que de joyeuse incrédulité.

Les sentiments inscrits sur le visage de son père ne laissaient place à aucun doute.

De la fierté. De l'inquiétude.

De l'amour.




Alors que Chat Noir s'éclaircissait la gorge pour tenter de parler, ce fragile instant vola en éclats en une fraction de seconde, emporté par le bruit d'une porte qui s'ouvre avec fracas.

Père et fils s'éloignèrent précipitamment l'un de l'autre avec une absence de naturel qui passa heureusement inaperçue, tandis qu'une demi-douzaine de gardiens du musée investissait les lieux. Ils s'arrêtèrent à l'entrée de la pièce, stupéfaits par le spectacle auquel il faisait face. Deux de leurs collègues se relevaient péniblement à quelques mètres des deux héros de Paris, tandis que leur conservateur gisait au sol, inconscient. La présence de l'un des plus réputés stylistes de France ne faisait qu'ajouter à l'absurdité de la situation, et les nouveaux venus ne savaient manifestement pas comment réagir.

Un léger bruit de pas résonna dans le couloir par lequel les employés du musée étaient arrivés, et Nino et Alya déboulèrent à leur tour dans la salle. Tous deux haletaient bruyamment, alors qu'ils avaient manifestement épuisé leurs dernières forces pour arriver jusqu'ici le plus vite possible. Ladybug ignorait comment elle avait fait et n'était pas sûre de vouloir le savoir, mais sa meilleure amie avait visiblement réussi à intercepter la rumeur d'une bataille au Louvre et s'était aussitôt précipitée sur les lieux.

- « Ladybug ! Chat Noir ! », s'écria Alya d'une voix tendue, cherchant fébrilement les deux héros du regard.

La jeune blogueuse laissa échapper un soupir soulagé quand elle aperçut ses amis, tout en saisissant machinalement Nino par le bras comme pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas. Puis les yeux des deux lycéens s'écarquillèrent de façon presque comique quand ils réalisèrent que le père d'Adrien se tenait debout aux côtés des jeunes héros, pendant que Mr. Kubdel était quant à lui étendu à terre.

- « Mais que... Mais pourquoi », balbutia Alya, tandis que Nino laissait échapper un « Mr. Kubdel ? » suraigu.

Le visage de Ladybug s'éclaira d'un faible sourire, puis elle se tourna vers son adversaire toujours au sol.

- « Je vous présente le Papillon », déclara-t-elle avec emphase, tout en désignant du doigt le conservateur du Louvre. « Le fameux super-vilain. »

Alors que sa meilleure amie laissait échapper une exclamation de surprise, la jeune héroïne poursuivit son discours à l'attention des gardiens du musée.

- « Il a attaqué deux de vos collègues, et il a également enlevé le célèbre Gabriel Agreste », reprit la jeune fille avec un geste de la main en direction du père de son coéquipier. « Chat Noir et moi allons nous charger de l'escorter chez lui. »

Alors que Ladybug s'interrompait un moment, ses interlocuteurs échangèrent un bref regard avant de hocher machinalement la tête, visiblement trop abasourdis pour rétorquer quoi que ce soit. L'héroïne de Paris tressaillit brusquement quand le bip de son miraculous résonna dans les airs, puis se mordit nerveusement les lèvres.

Il ne restait plus beaucoup de temps.

- « Je vous laisse vous occuper de vos collègues », poursuivit-elle précipitamment. « Ils sont probablement encore sous le choc, ils auront besoin de votre aide. Il faudrait également que vous appeliez la police et que vous emmeniez le Papillon en lieu sûr en attendant. Faites bien attention à ce qu'il ne s'échappe pas. Merci d'avance. », conclu-t-elle d'un ton ne souffrant pas la moindre contestation.

Conscients que les transformations de leurs amis allaient bientôt s'évanouir et voyant que les employés du Louvre tardaient à réagir, Alya et Nino prirent les choses en main. Ils pressèrent les gardiens d'obéir rapidement aux instructions de la jeune héroïne, les houspillant sans cesses jusqu'à ce que Mr. Kubdel et ses anciennes victimes soient évacués. Quand ce fut enfin fait, ils leur ordonnèrent ensuite de quitter eux aussi la pièce.

- « Allez, plus vite ! », lança Nino aux retardataires. « Vous avez entendu Ladybug ? Dépêchez-vous. »

Alors que Nino escortait les derniers employés du musée en dehors de la salle, Alya se retourna pour jeter un regard soucieux à sa meilleure amie.

- « ça va aller ? » lui demanda la blogueuse d'une voix inquiète.

- « ça va aller », répliqua Ladybug avec un sourire reconnaissant. « Merci. »

Alya hocha la tête, puis s'éloigna à son tour avant de refermer la porte de la pièce derrière elle.

Chat Noir et Ladybug étaient à présent enfin seuls avec Gabriel. 




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