Chapitre 2


Si l'enthousiasme de Nino était palpable à l'idée d'enquêter sur l'identité du Papillon, ce n'était rien en comparaison de l'état de surexcitation qui semblait s'être à présent emparé d'Alya. Partagée entre appréhension et amusement, Marinette observait discrètement sa meilleure amie, assise à ses côtés alors que les adolescents avaient repris les cours pour l'après-midi. Alya faisait machinalement tourner ses boucles rousses entre ses doigts tandis que ses yeux étincelants scannaient un à un chacun de leurs camarades.

Le cerveau manifestement en ébullition, la jeune fille réfléchissant visiblement déjà à la façon dont elle pourrait mener ses interrogatoires, tandis qu'elle couvrait sa feuille de notes qui n'avaient strictement rien à voir avec ce qu'expliquait leur professeur. Marinette devait bien reconnaître qu'Alya n'aurait que l'embarra du choix pour choisir par qui commencer : presque toute leur classe avait déjà été akumatisée, à l'exception notable d'Adrien et de Marinette.

Exception à laquelle personne ne semblait heureusement prêter attention.

La jeune apprentie journaliste continuait d'écrire furieusement, penchée sur son cahier. Elle se redressait de temps à autre, fronçant les sourcils, scrutant quelques visages, avant que ses yeux n'étincellent de plus belle et qu'elle ne se s'incline de nouveau sur son bureau.

Marinette étouffa un petit rire en la voyant s'affairer ainsi, mais plus elle y réfléchissait, plus le fait de faire appel aux compétences de sa meilleure amie lui semblait être une excellente idée. Afin d'éviter de trop attirer l'attention sur eux, Adrien et Marinette avait toujours pris soin de garder une prudente réserve dès que le sujet de Ladybug ou de Chat Noir était abordé, et il aurait probablement paru suspect qu'ils s'y intéressent tout à coup d'aussi près.

En revanche, Alya pouvait enquêter à loisir sans soulever le moindre soupçon. Son intérêt quasi obsessionnel pour les héros de Paris était à ce point légendaire que nul ne s'étonnait plus de la voir mener des investigations touchant de près ou de loin les activités de Ladybug et de Chat Noir. Elle pouvait harceler littéralement ses camarades et leur poser des questions plus absurdes les unes que les autres sans que personne n'y voit quoi que ce soit sortant de l'ordinaire, tous mettant cette activité sur le compte de la préparation d'un nouvel article du Ladyblog.

Lorsque la sonnerie annonçant l'heure de la récréation résonna dans les locaux, Alya était prête à passer à l'action.

Alors que la salle de classe se vidait de ses élèves, elle se dirigea d'un pas rapide vers la cour, entraînant dans son sillage une Marinette dont la curiosité était piquée au vif. Elle tenait à voir son amie agir au moins une fois. Les deux jeunes filles étant d'ordinaire inséparables tant qu'un certain garçon blond n'accaparait pas l'attention de Marinette, personne ne trouverait étrange le fait qu'elle se tienne parfois non loin d'Alya pendant que cette dernière menait ses interrogatoires.

La jeune blogueuse s'arrêta soudain dans son élan, se tournant brusquement vers sa meilleure amie. Elle n'avait pas oublié la promesse qu'elle lui avait faite, et le sérieux se disputait à l'excitation sur son visage tandis que son regard cherchait celui de Marinette en quête de son approbation.

- « Je pensais commencer par interroger Rose et Juleka », lui lança-t-elle en désignant du menton les deux lycéennes qui bavardaient un peu plus loin. « Pour leur demander si elles se souviennent de quoi que ce soit ayant un rapport avec leur akumatisation. Qu'est-ce que tu en dis ? »

- « Ça me va parfaitement », répondit Marinette en acquiesçant d'un signe de la tête, à la grande joie d'Alya qui se mit à sautiller sur place pour mieux marquer son ravissement.

La jeune héroïne n'y voyait sincèrement aucune objection, au contraire. Rose et Juleka étaient toutes deux calmes et attentives, cela offrirait certainement un début en douceur à ce qui s'annonçait comme une laborieuse enquête.

Marinette et Alya se rapprochèrent nonchalamment de leurs camarades, s'installant à leurs côtés avant de commencer à discuter avec elles avec autant de naturel que possible. Si l'exercice semblait d'une facilité déconcertante pour la blogueuse, Marinette avait plus de difficultés à paraître faussement détachée, et c'est avec soulagement qu'elle laissa Alya prendre la direction des opérations.

Les quatre jeunes filles bavardèrent un instant joyeusement, parlant de tout et de rien, puis sous l'habile impulsion d'Alya, la conversation s'orienta vers le sujet des vilains qui terrorisaient Paris. Rose fronçait à présent légèrement les sourcils, tentant de rassembler ses souvenirs alors que la jeune apprentie journaliste avait adroitement abordé le point précis de l'akumatisation.

- « Je ne me rappelle plus exactement », commença-t-elle, ses immenses yeux bleus se perdant dans le vide tandis qu'elle essayait de se rappeler des détails de cette éprouvante journée. « C'est vrai que ça s'est passé il y longtemps, mais déjà à l'époque je ne me souvenais pas de grand-chose. C'est comme si ma mémoire avait été complètement effacée. »

Elle se tu un instant, passant machinalement la main dans ses mèches blondes sous le regard attentif de ses amies.

- « En fait, reprit-elle pensivement, je me rappelle seulement du tout début. J'étais en colère, j'étais triste, et puis... Je ne sais pas trop comment décrire exactement ce qu'il s'est passé, mais d'un coup je me suis sentie encore plus en colère, encore plus triste... et puissante. Extrêmement puissante. Et après ça, c'est le trou noir », conclu Rose non sans une certaine gêne, ses joues se parant délicatement de rouge. « C'est seulement après avoir été sauvée par Ladybug et Chat Noir que j'ai compris que j'avais été akumatisée. »

Marinette se reteint de laisser échapper un soupir de déception. Jusque-là, l'histoire de Rose ne différait que peu de l'expérience que leur avait relatée Alya.

- « Et la voix ? », demanda sa meilleure amie, fermement décidée à exploiter la moindre bribe d'information.

Rose tourna la tête vers elle, battant légèrement des paupières sous l'effet de la surprise.

- « La voix ? » releva-t-elle, étonnée. « Je n'ai entendu aucune voix, enfin, pas que je me souvienne. »

- « Moi si », intervient soudain la discrète Juleka, ses paroles la plaçant aussitôt au centre de l'attention de ses amies. La jeune fille leva la main, tapant doucement sa tempe de ses doigts vernis de noir pour mieux illustrer ses propos, avant de poursuivre d'une voix posée mais à peine audible. « Dans ma tête. Au début c'était comme Rose, j'étais en colère, et j'ai entendu une voix résonner sous mon crâne. Puis il y a eu ce... ce déferlement de rage et de puissance, et ensuite le néant. Je ne me rappelle de rien d'autre, pas même de ce qu'on m'a dit. Mais il y avait une voix, c'est certain. »

Juleka s'interrompit quelques secondes, ses amies toujours suspendues à ses lèvres.

- « Enfin si », poursuivi-t-elle doucement, avec un haussement d'épaule à peine perceptible. « Je me souviens du nom qu'il a donné quand il s'est présenté. Le Papillon. Mais c'est tout. »

- « Il ? », nota immédiatement Alya, les yeux brillant d'excitation. « Tu veux dire que c'était un homme? »

Mais Juleka secoua négativement la tête, ses longues mèches noires striées de violet accompagnant gracieusement le mouvement en dansant autour de ses épaules.

- « Non », rectifia-t-elle, « c'est une façon de parler. Homme, femme, je ne saurais vraiment pas dire. Je me rappelle seulement de son nom. »

- « Et rien d'autre ? », insista la blogueuse en regardant tour à tour ses deux camarades, laissant transparaître malgré elle une pointe de dépit dans sa voix. « Une impression, quoi que ce soit de particulier ? »

- « Désolée », répondit Rose d'un ton navré, tandis que Juleka leur faisait comprendre d'un signe qu'elle non plus ne pouvait rien ajouter d'autre. « Je ne me souviens vraiment de presque rien. »

Elle se pencha légèrement vers Alya, la curiosité se lisant à présent sur son visage.

- « Est-ce que tu es en train de préparer un nouvel article pour le Ladyblog ? », lui demanda-t-elle joyeusement, manifestement sincèrement intéressée par les activités de sa camarade de classe.

- « Oh, j'y songe », éluda Alya avec un petit sourire. « Avec tous les super-vilains qu'il y a eu ces derniers temps, tous mes derniers reportages sont des comptes-rendus de combats. Oh bien sûr, je compte bien continuer à les couvrir, Paris doit savoir à quel point ce que font Ladybug et Chat Noir est extraordinaire ! », poursuivit-elle avec enthousiasme, tandis que les joues de Marinette rosissaient légèrement. « Mais il faut aussi que je propose d'autres sujets de temps à autre, personnellement je trouve ça très intéressant de ne pas juste se contenter de parler des attaques des vilains mais de faire aussi quelques petits articles annexes. Du coup, là je cherche des idées », ajouta-t-elle d'un ton faussement détaché.

Rose approuva chaleureusement, un large sourire illuminant son visage tandis qu'elle assurait à Alya que le travail qu'elle fournissait était absolument impressionnant et qu'elle était elle-même une fidèle lectrice du Ladyblog. La conversation se poursuivit joyeusement, entrecoupée des rires cristallins des quatre jeunes filles, jusqu'à ce que la sonnerie indiquant la fin de la récréation ne retentisse et qu'elles ne se dirigent de nouveau vers leur salle de classe. Rose regagna sa place non sans avoir adressé un petit salut de la main à Alya, lui souhaitant bonne chance dans ses recherches.

La journaliste lui répondit d'un sourire reconnaissant, avant de s'installer à son tour à son bureau.




Adrien et Nino se tournèrent vers Alya et Marinette avec une magnifique coordination, leurs regards brillant d'une curiosité qu'ils ne cherchaient même pas à dissimuler.

- « Alors ? », souffla Adrien à voix basse, passant son bras par-dessus le dossier de sa chaise tandis que ses yeux d'un vert électrique cherchaient ceux de Marinette. « Vous avez appris quelque chose de nouveau ? »

Sa coéquipière secoua aussitôt la tête, imitée par Alya.

- « Presque rien », lui répondit la jeune héroïne. « Elles ne... »

Elle s'arrêta au milieu de sa phrase, interrompue par l'arrivée intempestive de leur professeur qui franchissait la porte en réclamant le calme. Retenant le soupir de frustration qui s'apprêtait à franchir ses lèvres, Marinette leva les yeux au ciel. Le moment n'était décidément pas l'idéal pour discuter du Papillon, d'autant que le sujet était probablement un peu trop sensible pour être abordé au beau milieu d'une salle remplie de leurs camarades de classe. Même s'ils savaient être discrets, les quatre adolescents n'étaient jamais à l'abri du fait qu'une oreille indiscrète ne capte une parole qui leur serait compromettante.

Alors que les lycéens sortaient consciencieusement les livres et cahiers dont ils auraient besoin pour leur dernier cours de la journée, Marinette se pencha légèrement en avant.

- « On se retrouve chez moi tout à l'heure ? », chuchota-t-elle hâtivement, les yeux rivés sur leur professeur afin de s'assurer que celui-ci ne risque pas de la surprendre en plein bavardage.

Du coin de l'œil, elle vit Nino et Adrien hocher silencieusement la tête en signe d'approbation, tandis qu'Alya murmurait un discret « Ok » à son attention. Marinette se redressa, satisfaite, avant d'afficher brusquement sur son visage une expression aussi sérieuse que possible lorsque son professeur lui jeta un regard soupçonneux.

Le reste de l'après-midi s'écoula lentement, puis lorsque sonna la fin des cours, les quatre adolescents se retrouvèrent pour faire route en direction de l'appartement de Marinette. Ils passèrent brièvement par la boulangerie, saluant les parents de la jeune fille qui s'affairaient derrière le comptoir. Marinette remonta d'un pas vif la longue file de clients qui attendaient patiemment d'être servis, embrassant rapidement sa mère tout en adressant un affectueux geste de la main à son père, occupé à emballer un gigantesque gâteau.

- « J'ai invité Adrien, Alya et Nino à passer un peu à la maison », les informa-t-elle. « Vous êtes d'accord ? »

- « C'est d'accord, ma chérie », répondit Sabine avec un large sourire. « Mais je compte sur toi pour garder suffisamment de temps pour faire correctement tes devoirs. Je ne veux pas te voir debout à des heures impossibles pour rattraper ton retard. »

- « Promis », répliqua Marinette avec un petit rire, serrant sa mère dans ses bras avant de faire signe à ses amis de la suivre.

Ses trois camarades dirent joyeusement au revoir à Tom et Sabine, puis se dirigèrent vers l'appartement des Dupain-Cheng à la suite de leur amie. Alors qu'elle traversait le salon, Marinette s'arrêta un instant, une idée traversant soudainement son esprit.

- « Je vous laisse partir devant », leur lança-t-elle. « Vous pouvez m'attendre dans ma chambre, je vous rejoins tout de suite. »

Les adolescents s'exécutèrent, Adrien ouvrant la route tandis qu'ils grimpaient rapidement la volée de marche menant à la chambre de Marinette. Le jeune homme et Alya étaient tous deux des habitués des lieux, c'est donc tout naturellement qu'ils se chargèrent de disposer un pouf et la chaise de bureau aux côté du sofa qui trônait au bas de la pièce, de façon à ce qu'ils puissent tous les quatre s'asseoir non loin les uns des autres. Nino les regarda distraitement faire avant de s'installer arbitrairement sur la chaise, tournant machinalement sur lui-même en attendant le retour de Marinette tandis qu'Alya se laissait tomber sur le pouf avec un petit soupir satisfait.

Le pas léger de la jeune héroïne résonna dans le couloir à peine une minute plus tard, et c'est les bras chargés d'une énorme boite de cookies que Marinette entra dans la pièce, un large sourire aux lèvres.

- « J'ai ramené de quoi reprendre des forces », leur annonça-t-elle gaiement en posant son précieux bien au milieu d'eux, s'asseyant ensuite sur le sofa aux côtés d'Adrien.

- « Ah, ma Lady, j'ai toujours su que tu étais parfaite », lança malicieusement son coéquipier en s'emparant d'un biscuit d'un mouvement vif, sous les regards amusés de Nino et d'Alya.

Durant bref un instant, le silence fut seulement troublé par les bruits de mastication des quatre adolescents en train de grignoter. Tikki profita naturellement de l'occasion pour s'emparer elle aussi d'un cookie, plongeant dans la boite pour se servir avant d'aller s'installer confortablement sur le bureau. Suite à ça, Adrien se trouva dans l'obligation de sortir de son sac un morceau de camembert pour mettre fin aux jérémiades de Plagg, lequel se plaignait que certains étaient scandaleusement privilégiés et qu'il allait mourir de faim d'ici la fin de la journée si on continuait à le négliger ainsi.

Une fois son ombrageux kwami satisfait, Adrien se retourna vers ses camarades.

- « Donc si j'ai bien compris, » commença-t-il, « l'interrogatoire de Rose et de Juleka n'a pas donné grand-chose ? »

Marinette tenta instinctivement de lui répondre alors qu'elle était en train de finir un biscuit, l'action lui arrachant une violente quinte de toux tandis qu'elle manquait de s'étouffer avec les dernières miettes. Les yeux larmoyants, elle reprit péniblement son souffle sous le regard inquiet de ses amis, avant de leur faire signe que tout allait bien à présent.

- « Pas vraiment », répondit-elle en toussotant encore, tandis qu'Adrien passait doucement sa main dans son dos en signe de compassion. « Elles ne se souviennent quasiment de rien elles non plus. Elles se rappellent toutes les deux qu'elles étaient en colère, et que leurs émotions se sont soudain exacerbées en même temps qu'elles ressentaient une brusque sensation de puissance, mais elles ont oublié tout le reste. Juleka se souvient d'avoir entendu une voix, mais elle ne saurait pas la reconnaitre. »

La jeune héroïne se redressa, écartant les mains en signe d'impuissance.

- « Bref, on n'est pas beaucoup plus avancés qu'avant », poursuivit-elle. « Si ces amnésies font systématiquement partie du processus d'akumatisation, on risque d'avoir du mal à trouver des informations supplémentaires. »

- « Et ça ne m'étonnerait pas que ça soit le cas », intervint pensivement Adrien. « Les victimes du Papillon ont toujours l'air désorientées après les attaques », précisa-t-il alors que ses amis tournaient vers lui des regards interrogateurs. « Généralement, la première chose qu'ils nous demandent c'est ce qu'il vient de se passer, ou encore comment est-ce qu'ils ont fait pour arriver là où ils sont. C'est comme si leurs souvenirs de quand ils étaient possédés étaient immédiatement effacés. »

- « Vu comme ça, c'est sûr que ça risque d'être compliqué de trouver quoi que ce soit », approuva Nino avec une grimace dépitée, tout en plongeant sa main une nouvelle fois dans le bocal de biscuit.

- « Mais pour l'instant on n'a pas beaucoup d'autres options », objecta immédiatement Marinette. « Ce n'est pas comme si on pouvait remonter la moindre piste géographique. A moins d'une miraculeuse coïncidence, on n'a aucun moyen de savoir d'où viennent les akumas vu qu'ils possèdent déjà quelqu'un au moment où on apprend l'attaque. »

La jeune héroïne s'interrompit un instant, un petit sourire se dessinant peu à peu sur ses lèvres tandis qu'elle redressait fièrement le menton dans une attitude volontaire qui rappelait furieusement qu'elle n'était bien nulle autre que la légendaire héroïne de Paris.

- « Et puis on ne sait jamais », reprit elle avec un optimiste contagieux, sa voix claire résonnant dans la pièce. « Rose ne se souvenait pas d'avoir entendu une voix, mais Alya et Juleka si. Qui sait ce qu'on peut encore découvrir d'autre ? Si on continue à creuser, peut-être qu'à force, quelqu'un finira par se rappeler d'un détail significatif. »

- « Je suis entièrement d'accord », approuva Alya avec enthousiasme. « Ecoutez », poursuivit-elle en se penchant vers Adrien et Marinette, « si ça vous va, je peux déjà interroger les élèves de notre classe. On pourra toujours aviser ensuite, mais là c'est trop tôt pour se décourager. »

Les deux héros échangèrent un bref regard, accompagné de légers sourires. L'opiniâtreté légendaire d'Alya n'était décidément pas à négliger.

- « De toute façon à ce niveau, on n'a pas grand-chose à perdre », approuva Adrien en passant machinalement la main dans sa blonde chevelure, ses yeux toujours plongés dans ceux de Marinette. « Et s'il s'agit juste d'interroger quelques lycéens, il n'y a pas vraiment de risques. »

- « Je suis d'accord », acquiesça sa partenaire. « Mais ! », reprit-elle d'un ton catégorique, tout en pointant du doigt sa meilleure amie dont les yeux brillaient de nouveau d'excitation. « Uniquement les élèves de la classe pour commencer. Pas. Une. Personne. De. Plus. », martela-t-elle. « Pas sans notre accord. On verra ensuite pour élargir le champ de recherche si besoin, mais pour l'instant on se limite à nos proches. »

- « Je te le promets », lui affirma Alya en posant sa main sur son cœur de façon certes théâtrale mais sincère, tandis que Nino hochait vigoureusement la tête. « Vous, vous sauvez Paris, et nous, on essaye de trouver ce dont ceux de notre classe se rappellent de leurs akumatisations », résuma-t-elle.

- « Du parfait travail d'équipe, en gros », compléta fièrement Nino. « On est les enquêteurs personnels des super-héros de Paris », poursuivit-il tout se levant pour singer comiquement l'une des poses fétiches de Chat Noir, arrachant une grimace consternée à Adrien et de francs éclats rire aux deux jeunes filles.




Les quatre amis restèrent encore quelques instants à discuter, puis Nino et Alya s'éclipsèrent en souhaitant une bonne fin de journée aux jeunes héros, tandis qu'Adrien s'attardait encore un peu chez Marinette.

Sa coéquipière s'était de nouveau assise à ses côtés après avoir raccompagné leurs amis dehors, s'installant si proche de lui que leurs hanches se touchaient à présent. Adrien avait machinalement passé une main autour de la taille de la jeune fille, respirant le délicieux parfum fruité qui se dégageait d'elle.

- « Le Papillon », soupira Marinette en se blottissant contre lui, inclinant la tête pour la laisser reposer sur son épaule. « Cette fois, on s'attaque vraiment à un gros morceau. »

- « Oui, ma Lady », approuva Adrien tout en déposant un léger baiser sur son front.

Il prit une profonde inspiration, tendant sa main libre pour saisir celle de Marinette, savourant la douce chaleur que diffusaient ses doigts contre sa paume. D'ordinaire, la perspective d'affronter le plus redoutable de leurs adversaires l'aurait certainement plongé dans un profond état de panique, mais la présence de la jeune fille l'apaisait de façon extraordinaire. A ses côtés, il se sentait presque invincible, comme si rien ne pouvait leur résister tant qu'ils étaient ensemble. C'était faux, bien entendu, et il le savait pertinemment.

Mais elle lui donnait la force de continuer là où il aurait certainement déjà abandonné sans son soutien.

- « On n'a pas le choix », poursuivit-il pensivement. « On ne tiendra pas éternellement comme ça, à jongler entre les vilains, les cours, les examens... Et il terrorise Paris depuis bien trop longtemps, il faut qu'on l'arrête. »

Tikki et Plagg s'étaient approchés, voletant à présent à proximité des deux adolescents.

- « Il faudra que vous soyez prudents », souligna Tikki de sa voix flutée. « Le Papillon sera certainement bien plus compliqué à battre que vos adversaires habituels. »

Marinette laissa échapper un grognement de contrariété, avant de se redresser et de tourner son visage vers celui d'Adrien, plantant son regard bleu azur dans ses yeux verts. Une farouche détermination s'y lisait, celle qui brillait d'ordinaire au fond des prunelles de Ladybug avant chaque rude affrontement.

C'était sa Lady, dans toute sa splendeur.

Belle.

Forte.

Indomptable.

- « On y arrivera, chaton », lança-t-elle d'un ton résolu, son hypnotisant regard étincelant de plus belle à la chacune de ses paroles. « On va le trouver, et on va le battre. Ça va être difficile, et on ne pourra sûrement pas se permettre de l'attaquer de front sans mettre au point une solide stratégie avant, mais on va y arriver. »

Comme envouté, Adrien leva instinctivement la main vers elle, posant sa paume contre la douce peau de sa joue. Marinette sursauta légèrement, ses immenses yeux bleus s'écarquillant sensiblement tandis que ses pommettes s'empourpraient. Distraitement, elle se demanda si elle finirait un jour par arrêter de rougir ainsi à chaque fois qu'Adrien la dévisageait avec autant d'intensité. Les doigts de son partenaire se déplacèrent, courant doucement le long de sa mâchoire pour venir ensuite à la rencontre de ses lèvres. Ils en tracèrent les contours de avec une infinie délicatesse, et lorsque Marinette entrouvrit machinalement la bouche, Adrien se pencha vers la jeune fille emprisonner ses lèvres dans un tendre baiser.

- « On va y arriver, ma Lady. »




Quelques jours s'écoulèrent sans que leur enquête ne donne le moindre résultat significatif. Pour la défense de Nino et d'Alya, leur classe traversait une période lourdement chargée en devoirs, exposés et contrôles en tout genre, et qui était donc peu propices à de profondes investigations. La moindre période de pause était ardemment rentabilisée par leurs camarades pour réviser ou avancer autant que possible à travers la masse d'exercices qui leurs étaient imposés, les rendant ainsi difficile à interroger sur leurs ressentis concernant leur akumatisation.

Alya avait seulement réussi à poser quelques questions à Mylène, profitant d'un devoir de groupe où elles devaient travailler ensemble pour aller à la pêche aux renseignements. Hélas, rien de ce qu'elle avait alors appris ne semblait avoir une réelle importance. Mylène se souvenait de la peur, de la rage. De l'extraordinaire sensation de pouvoir qui s'était emparée d'elle, déferlant avec fureur dans son esprit, et d'une voix sèche qu'elle aurait été incapable d'identifier.

Mais rien de plus.

Son impressionnable camarade avait tant pâli au cours de ce bref interrogatoire qu'Alya avait un instant craint qu'elle ne fasse un malaise, et c'est presque avec soulagement qu'elle avait constaté que la malheureuse Mylène ne pouvait rien lui apprendre de plus et qu'elle pouvait ramener la conversation sur des sujets moins effrayants.

La studieuse ambiance qui régnait au sein des élèves fut finalement brusquement rompue lorsqu'un bruit sourd résonna tout à coup dans les rues de Paris, faisant vibrer légèrement les vitre de la salle de permanence où la plupart d'entre eux étaient alors réfugiés pour travailler.

Adrien et Marinette relevèrent aussitôt la tête, se concertant du regard avec inquiétude avant de laisser échapper de lourds soupirs.

L'origine de ce soudain vacarme ne faisait aucun doute.

Le Papillon venait de frapper à nouveau. 

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