Texte n°450
Deux cambrioleuses.
Bon.
On peut faire mieux (zéro cambrioleuse), mais on peut toujours faire pire (des cambrioleuses armées par exemple).
À un bras de l'angle du mur, son arme serrée entre deux poings, Wyndt risqua un pas de côté pour jeter un coup d'œil en direction du salon où la famille Koppel était retenue contre son gré.
Un éclat de métal, et il se plaquait de nouveau contre le papier peint.
Deux cambrioleuses armées.
De l'autre côté de la porte ouverte, également dissimulée dans l'axe du montant de bois, sa partenaire fit la grimace, puis un signe de tête.
Ça va ?
Il inspira profondément. Pas trop, non. Pour une première mission sur le terrain, on pouvait faire mieux. Il inspira de nouveau.
Un signe de tête.
Ça va.
Un enfant pleurait dans le salon, des sanglots de peur que personne ne parvenait à atténuer.
La voix ferme et calme de leur capitaine d'équipe, venue en renfort lorsque le cambriolage s'était transformé en prise d'otage, résonnait dans le salon au travers de ces cris. Sans la confiance rassurante de Marie, Wyndt aurait autrement paniqué.
Son excitation à l'idée de se rendre pour la première fois sur le terrain —mission de routine, vérifier la raison du déclenchement d'une alarme— avait fondu comme neige au soleil.
Il lança un regard du côté de Babirye qui, de l'autre côté de la porte, prenait son mal en patience en suivant de son mieux le déroulement des négociations.
Contrairement à lui, elle avait déjà quelques années de terrain sous les bottes et maintenait sans peine une apparente tranquillité ; Wyndt pouvait cependant la voir se mordiller l'intérieur de la lèvre. Sa peau sombre frémissait légèrement à cet endroit-là.
Il respira calmement durant quelques instants.
Il n'y avait aucune raison que cela se passe mal. Les cambrioleuses ne sont pas forcément des tueuses. Certes, leur mauvaise posture les rendait plus dangereuses parce que désespérées, mais...
Marie passa lentement la porte à reculons, les mains levées quoi qu'elle n'ait pas lâché son arme, passant entre Wyndt et sa partenaire et bientôt suivie de sa propre coéquipière.
Elle fit un signe de tête à ses deux agents pour leur intimer la prudence.
« On recule, dit-elle. Leur voiture est arrivée. »
Babirye obtempéra immédiatement en se dirigeant vers le hall d'entrée et Wyndt se maudit d'avoir attendu une demi-seconde un complément d'instruction.
Toute la bonne volonté du monde ne peut compenser le manque d'expérience.
Marie leur fit prendre position de part et d'autre de la pièce ; Wyndt se retrouva derrière une table basse en bois vernis surmontée d'un vase en lapis lazuli vraisemblablement précieux.
Les cambrioleuses n'étaient pas venues par hasard.
Elles approchaient, d'ailleurs, l'air étonnamment confiant, poussant la famille Koppel devant elles de la pointe du canon l'une d'un fusil de chasse, l'autre d'un pistolet de tir.
Les Koppel étaient habillés pour sortir, de grosses chaussures fourrées, une veste épaisse et des manteaux, des écharpes en laine enroulées autour du cou des deux enfants, un bonnet sur chaque tête avec un pompon.
Le père portait l'enfant qui pleurait, le plus jeune, qui avait passé les bras autour de son cou. Une petite bouille reniflante aux yeux humides et au nez rouge.
La mère restait en arrière, surveillant calmement l'autre bambin que les cambrioleuses avaient gardé près d'elles.
Neuf, dix ans, songea Wyndt. L'enfant resté en arrière, la tête enfouie dans un épais bonnet de laine rouge, se frottait le bout d'un nez presque rouge avec le dos de ses moufles.
Wyndt gardait dans son axe de tir les pieds de la procession, soigneusement pointée par terre mais assez proche des criminelles pour se relever immédiatement au besoin. Luttant pour ne pas trembler, angoissé malgré les centaines d'heures d'exercice destinées à le préparer précisément à ce type de situation. Une boule étranglait son estomac sous la protection rigide du gilet pare-balle.
Ce ne serait pas à lui d'agir, de toutes façons ; bien qu'il ait donné l'alerte, il n'était plus ici qu'en renfort d'une équipe bien plus compétente.
Lui venait tout juste de rejoindre les A.S. ; il était techniquement au niveau délits mineurs et sauvetage de chatons. Babirye lui jeta un nouveau regard.
Toujours ok ?
Il lui fit signe que oui. Ou du moins que cela aurait été pire sans une mentor aussi professionnelle. Wyndt prit note de l'en remercier plus tard, pourquoi pas autour d'un verre.
« Nous allons sortir, maintenant » exposa Marie d'une voix forte et claire un peu avant de passer l'embrasure de la porte d'entrée.
« Les parents d'abord, puis mes Agents Spéciaux. »
Wyndt ravala sa salive et s'efforça de raffermir ses jambes fléchissantes. Babirye et lui formaient désormais l'arrière garde et occupaient donc la place la plus vulnérable dans l'unité.
Il se força au calme. Être brave, c'est affronter sa peur.
Plus le groupe approchait de la sortie, plus Marta Koppel semblait se tendre. Wyndt la vit jeter plusieurs regards soucieux à l'enfant qu'encadraient les cambrioleuses. L'une avait posé une main ferme sur la petite épaule pour le faire avancer, ou le retenir.
Au moment où la lumière du jour toucha la chaussure de Tonis Koppel, le regard des parents se croisa et Wyndt y surprit l'apparition d'une décision muette, suivi du plus subtil mouvement d'acquiescement du père.
Dans le même temps, les deux cambrioleuses se tournaient vers Wyndt et Babirye, seuls agents encore présents avec elles dans la pièce, si vite que Wyndt n'eut pas le temps de relever son arme.
Choc violent au niveau du ventre —puis une autre explosion de douleur aiguë à la poitrine, qui lui coupa la respiration alors que plusieurs coups de feu éclataient dans les airs.
Malgré son gilet protecteur, l'impact le projeta en arrière contre le mur —par réflexe, alors que son arme, suivant la trajectoire de sa main, se retrouvait à mi-hauteur, il appuya sur la détente.
Juste avant que sa tête ne heurte le béton il remarqua l'explosion rouge formée par la tête de l'enfant dans les bras de son père, une gerbe de couleur dont il aurait pu décrire chaque détail —une image qui lui parut un instant immortelle et hors du temps.
Puis il percuta le mur et s'effondra, se rendit compte que des cris résonnaient dans le bourdonnement de ses oreilles, que des coups de feu étaient encore tirés. Le souffle coupé par la douleur, il se força à se redresser sur un coude, s'exhortant sans y parvenir à se relever, l'esprit asphyxié par l'angoisse et cette image de crâne éclaté.
Babirye gisait à terre de l'autre côté de la pièce, sur le dos, le regard fixe. Il pouvait voir la racine de ses dents sur le côté de la mâchoire.
Tombée de côté, la criminelle qui lui avait tiré dessus ne remuait pas non plus. Celle qui avait voulu tuer Wyndt gisait à présent sur le ventre, sur le ventre parce qu'on lui avait tiré dans le dos —dans le dos parce que Babirye, alors que l'autre femme pointait son arme sur elle, avait choisi de protéger Wyndt.
Ses jambes tremblaient.
Il se redressa lentement, comme si le monde pesait soudain des tonnes. Il était glacé.
Marta Koppel était morte, visiblement tuée peu après Babirye. Le père et l'autre...
Wyndt secoua la tête pour en chasser l'image qui y restait gravée, son doigt sur la détente alors qu'il était projeté en arrière, le bruit du coup de feu, la gerbe rouge dans les airs.
Assis entre tous ces morts, il restait l'enfant au bonnet rouge.
Depuis un moment, quelqu'un s'agitait devant Wyndt, Marie essayait de lui parler, de le faire réagir ; il remarqua que ses lèvres bougeaient, mais lui n'entendait qu'un sifflement.
Une explosion rouge. Une gerbe de sang.
Il avait moins froid, on l'avait enveloppé d'une couverture. Des agents avaient délimité le périmètre et embarquaient déjà les corps.
Il n'y avait plus personne, mais Wyndt croyait encore voir le petit enfant dans son bonnet rouge assis au milieu de la pièce, sonné, deux moufles retenues par des fils pendant sur le parquet.
Son doigt sur la détente. La résistance du métal quand il avait tiré.
Le bouquet de fleurs rouges s'élevant dans les airs.
Il avait mal à la tête. Il s'était cogné. Il s'en souvenait maintenant.
Son épaule aussi était douloureuse.
Ses côtes, et sa poitrine.
Sa chemise était ouverte ; quelqu'un l'avait examiné. Sa veste protectrice reposait désormais sur une chaise. Un éclat rouge dans sa mémoire.
Des bleus jaune et mauve sur sa peau, qui déjà se violaçaient.
L'enfant assis au milieu de la pièce.
Wyndt ferma les yeux pour ne plus voir tout ça, le mettre de côté, penser à autre chose.
Derrière ses yeux fermés explosaient encore et encore des bouquets de fleurs rouges.
Commentaires :
TicusLeFaune
#candidate Bonjour cher auteur ou autrice. Je pense que les wacademiciens passés avant moi ont déjà parlés des points importants. Je vais donc te parler de points moins marquants, mais tout de même notables. Tout d'abord, la concordance des temps: « Un éclat de métal, et il se plaquait de nouveau ... » Ici, s'agissant d'un verbe d'action, il serrait préférable de dire « il se plaqua ». Pour augmenter la tension et le stress, il faudrait faire des phrases courtes et percutantes lorsque le personnage est dans le feu de l'action. Ex: « par réflexe, alors que son arme, suivant la trajectoire de sa main, se retrouvait à mi-hauteur, il appuya sur la détente » serait remplacé par « Instinctivement, il pressa la détente. » Bien sûr, il y a une perte d'information, mais le fait que le revolver se trouvait à mi-hauteur n'est pas très important. Pour t'aider à faire des phrases percutantes, sert toi d'un dictionnaire de synonyme. Cela te permettra d'utiliser le mot donnant le plus d'information. J'espère t'avoir été utile. Bonne journée!
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Juliettelem
Bonjour, Déjà l'intro est à revoir : "Deux cambrioleuses. Bon. On peut faire mieux (zéro cambrioleuse), mais on peut toujours faire pire (des cambrioleuses armées par exemple). " pas bon du tout ce démarrage. " À un bras de l'angle du mur, son arme serrée entre deux poings, " empoigner une arme oui, la tenir à deux mains, oui, mais cette phrase non. Un démarrage de très texte laborieux, un style trop décousu : attention là on se croirait dans la description d'une fiction TV, or ce n'est pas un script, c'est censé raconter quelque chose sans aucun support visuel. "Il inspira profondément. " puis" respira calmement durant quelques instants. " avec le "" Wyndt pouvait cependant la voir se mordiller l'intérieur de la lèvre. " ça fait beaucoup de platitudes pour tenter de décrire la tension qui habite les personnages. incohérence de temps dans le récit : ces intrusions au présent genre " Toute la bonne volonté du monde ne peut compenser le manque d'expérience. " très malvenu surtout pour énoncer des poncifs. Revoir le bien fondé de ce type de précision, ça sort le lecteur d'une lecture déjà poussive. " La mère restait en arrière, surveillant calmement " passons sur le participe présent suivi de l'adverbe, niveau crédibilité : la mère calme... la famille est sous la menace d'une arme ??? Le reste du texte n'est pas plus convaincant. Manque de variété dans le vocabulaire et dans maîtrise de la scène d'action. Beaucoup trop détails qui n'apportent rien, ça n'est pas du tout efficace pour faire monter la tension et faire frissonner le lecteur. Visualiser une scène d'action c'est une chose, la retranscrire et en exprimer à la fois la tension, l'horreur et le chaos demande un gros travail. Là on passe à côté. C'est bien d'être ambitieux mais il faudrait lire beaucoup de thriller pour passer le cap de la simple visualisation et rendre l'écrit efficace. Là l'expression est trop faible pour avoir un bon rendu. Bon courage.
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TatouageVoyageur
Hello ! Petit retour sur son texte : * parce-qu'elles étaient désespérées * perso, je ne trouve pas qu'il y a trop de descriptions. Les scènes sont suffisamment détaillées. Tu ne tardes pas sur les choses futiles, mais plutôt sur les éléments importants. Tu prends le temps de décrire ceux-là, une sorte d'analyse et pour ce contexte, je trouve ça super ! J'ai un peu moins compris, au début, la dernière partie. Mais ici, je pense que le côté " vague " est voulu, car le personnage se remémore la scène. Je trouve aussi qu'il y a un souci au passage ou Wyndt a été tiré dessus. À ce moment, tu en as fait trop. Une balle ne peut pas propulser aussi violemment, en arrière, un homme portant un gilet par balle. Pour rendre ça plus cohérent, tu pourrais dire qu'il est simplement tombé sous le choc. Le seul détail qui m'a énormément dérangé, c'est le début. J'ai mis du temps à comprendre les trois premiers paragraphes, il porte à la confusion. Sachant que le texte est à la troisième personne, le début est assez troublant, car on ne sait pas s'il s'agit des pensées du personnage ou des remarques du narrateur. Il faudrait éclaircir ce passage, mettre ces paragraphes en italiques marquerait une distinction. Pour l'instant, je n'arrive pas vraiment à déterminer si l'intrigue est intéressante, mais je pense que cette scène va jouer énormément pour la suite. C'est un très bon point !
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-SilverWing-
Bonsoir/bonjour ! Alors pour ma part je n'ai pas grand chose à redire, à mes yeux ton texte est très bien, aussi bien au niveau du fond que de la forme et il m'a d'ailleurs beaucoup plu ! D'expérience j'ai conscience que réussir à décrire ce genre de scène où plusieurs personnages vont évoluer en même temps, dans un espace défini, le tout de façon claire et compréhensible n'est pas évident. Tu parviens néanmoins à le faire tout en nous introduisant brièvement tes personnages, c'est bien joué ! Pour ma part les descriptions très détaillés ne dérangent pas, au contraire elles m'aident à m'imerger davantage dans ton récit et à visualiser la scène, donc je ne te dirai pas de les écourter. Mais après je sais que cela peut en décourager ou déplaire à certains donc là à toi de voir selon tes préférences. Fais attention aux éventuelles répétions, lorsque tu nous décris les enfants tu utilises pas mal de fois le mot "rouge", pareil à la fin quand Wyndt ressasse le passage avec l'enfant au bonnet et son frère à la tête "explosée". D'ailleurs à ce propos, c'est Wyndt qui lui a tiré dessus sans le faire exprès ou l'une des cambrioleuses ? C'est assez vague, je ne sais pas si c'est volontaire de ta part...? Enfin dernière remarque, quand Wyndt se fait tirer dessus il est projeté en arrière par la violence du coup de feu, je n'ai pas d'expérience dans ce domaine mais ça me paraît bizarre, un peu exagéré ; on parle d'une simple petite balle (mortelle et tirée à une vitesse ahurissante, certe !), mais face à la masse d'un homme adulte blindé d'un gilet pare-balle le choc devrait être plutôt atténué non ? Bonne continuation, en espérant avoir été utile.
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