Laura, en haut de la falaise, face à la mer.

Chat, derrière.

La mer, grise.

Des mouettes qui passent en criant.

Peut-être des violons qui font grincer les cordes de criaillements sinistres.

Le vent, très fort.

Laura crie pour se faire entendre.

La mer m'a menti !

La mer est méchante comme un chat.

La mer ne comprend rien.

Je la déteste, je la hais !

C'est une menteuse.

Elle a dit qu'elle répondrait, et elle m'a juste renvoyé ma question.

La mer est injuste.

C'était ma seule amie.

Papa et maman ne s'aiment plus, Chat ne m'aime plus, et la mer boude, maintenant.

Et moi, je suis folle pour toujours !

Je suis folle et personne ne me sauvera.

À quoi ça sert, une blouse blanche, si ça ne sait pas soigner les enfants ?

À quoi ça sert, la vie, si c'est pour mourir à la fin ?

Il n'y a pas de réponse, pas de savant, pas de poète, juste une mer muette qui décide de se taire le jour où j'ai le plus besoin d'aide, parce que la vie est injuste et que le monde est injuste et que la mer est injuste et que je déteste tout le monde, surtout la mer, que je déteste et que je hais la vie et tout, tout, tout, je ne veux plus jamais rien voir.

Jamais !

Chat la regarde.

Elle pleure.

Le vent emporte ses larmes, ses cris, sa vie.

Elle se sent lâcher prise.

Le vent la pousse vers la mer.

Je t'ai déjà dit que j'avais le vertige ?

C'est la dernière chose que je ferai : vaincre ma peur.

Il n'y a rien d'autre à faire.

La vie n'est qu'une passe-temps.

Elle saute.

Elle ne crie pas : elle a trop crié, elle n'a plus de voix.

Le vent souffle encore plus fort.

Les cordes des violons claquent à force de frottements.

Soudain, le silence.

Et le chant des vagues.

Chat se lève, tourne le dos à la falaise et repart vers la maison.

Des mouettes passent en criant.

Au loin, on entend les sanglots d'une femme.

La mer engloutit tout.

(note : si jamais un metteur en scène s'intéresse à cette pièce, n'oubliez pas le filet)

18 mars 2022, dans le noir