Dane : 01h32

Je me suis assoupi sans m'en rendre compte et ceci durant un laps de temps qui m'est inconnu.

Depuis notre fuite, nous n'avons aucune informations concernant la date et l'heure que nous sommes.

Perdu dans le temps de la crainte et de la fuite, c'est peut-être mieux d'être dans cette situation que d'être enfermé dans une structure scolaire, surveillé de toutes parts.

Chris est lui aussi endormi dans son coin. J'ai eu tort de me méfier de lui, mais je n'avais pas le choix, car les femmes sont partout, même là où on ne les attend pas.

Mon ami n'a pas dû comprendre, parce qu'il n'est tout bonnement au courant de rien à propos de mon périple.

Je ne sais pas encore comment lui révéler ce qui se passe réellement, là dehors. Mais je n'ai pas la sensation d'avoir menti à mes camarades, ni même de les avoir trahi, sauf que c'est indubitablement ce qu'ils vont soupçonner sans réfléchir.

D'un autre côté, je pourrais faire comme si je ne savais rien de plus qu'eux. Après tout c'est vrai, comment pourraient-ils me juger sans preuves ? À part Willy, je présume n'avoir aucun soucis à me faire, seulement il ne faut pas que je sois excessif dans mes agissements et que je n'en dise pas trop non plus. Ça arrangera mes affaires et me soulagerait d'un poids.

C'est comme ça que faisait ma mère, lorsqu'elle était au pouvoir. Elle nous apprenait, à moi et à ma soeur, à ne pas trop en dévoiler et à rester de marbre face aux gens.

J'étais fasciné par sa facilité d'agir ainsi. Elle était douce avec les gens, voire compréhensive. Or, quand elle leur tournait le dos, elle avait un tout autre discours. Tout comme avec les jours sombres que l'on a traversé en 2029.

Elle passait de la pommade aux peuple en les rassurant du mieux qu'elle pouvait. À l'inverse, de l'autre côté du rideau, c'était la panique la plus totale. Rien ne marchait comme prévu.

Cela lui a valu sa destitution par la force, non pas par la population, mais par ces engins qui ont par la suite envahit notre pays.

Néanmoins, personne n'a été mit au courant. Les seules personnes qui savent tout cela, ce sont moi et ma défunte soeur ainsi que ses subordonnés envoyés je ne sais où.

Peut-être sont-ils en prison, probablement à Alibi. Rien ne présageait le meilleurs pour eux, de toute manière.

Et dire que tout ce qui se passe est de la faute de notre système, toujours avide de la modernité et de l'évolution de notre vie.

Cette évolution nous engloutie aujourd'hui, hélas nul ne le sait. Alors, comment sortir de cette impasse ? En crachant enfin toute la vérité ou en cachant l'ignominie qui nous persécute ?

Je ne veux pas faire de délation qui tourne à mon désavantage. J'aurais alors tout perdu dans mon espoir de venger ma soeur et mon père, mais aussi de sauver ma mère, la vraie reine de ce pays.

– À quoi tu songes ? lance soudainement Chris, réveillé.

– Je... je me demandais comment on allait se sortir de là.

Il soupire, vraisemblablement d'accord avec moi et tout aussi confus.

– Je suis fatigué de courir sans cesse. Cela fait combien de jours que nous espérons attraper notre liberté en vol, Dane ?

– Je ne sais pas exactement,  lui réponds-je, confus.

– On a à peine mangé, voire pas du tout, ni même bu ne serait-ce qu'un verre d'eau. Dane, je suis à bout, vraiment à bout.

Je le comprends. Et dire que tout cela est de ma faute. Moi qui ne voulais pas me lancer dans une expédition risquée et seul. J'ai donc convaincu mes amis de me rejoindre, sans trop en faire afin qu'ils ne se sentent pas forcés de me suivre.

Je les ai manipulé, au fond je ne vaux pas mieux que ma mère du temps de la crise.

– On va rebondir, fais moi confiance.

Ça va le faire, je me dois de les sortir de cette impasse. Après tout, ils en sont là à cause de moi, alors c'est à moi de les aider, de les mener au bout de notre quête. Je dois faire frond de mes mauvaises pensées et je dois me battre pour sauver mes amis de cette misère que je leur ai moi-même infligé.