16.

Chris, zone de Gloria à 00h05

Après avoir couru plusieurs minutes qui m'ont semblées interminables, nous avons enfin pu échapper aux sentinelles, non sans difficulté.

– Gloria est un adversaire bien trop grand et trop puissant pour être vaincu par des étudiants seuls, grogne Dane.

– Donc, ça marcherait si on était fort ? demandé-je, calmement.

– Je me demande si c'est un tort d'être faible. Ce jour-là, pour des enfants comme nous âgés d'à peine dix ans, le monde semblait malgré tout bien triste, continue-t-il morose, la faim, la maladie, la corruption, cette pitoyable décadence, notre déchéance, la discrimination, les guerres et le terrorisme... Tout partait en vrille. Tout !

– Une perpétuelle haine...

– Un ridicule cercle vicieux. Quelqu'un doit donc briser ces chaînes. Briser le cycle. On doit arrêter tout ça ! Nous devons stopper Gloria coûte que coûte.

– Arrête ton idéalisme, Dane, l'interrompt Brian, d'un ton posé, bien sûr, je ne pense pas qu'il soit possible de se débarrasser de tout ce grabuge d'un coup d'un seul, mais...

– Je n'ai pas cette prétention, Brian. Je veux au moins un monde sans guerre. Un monde où l'on ne perdrait pas ses proches, un monde agréable et respectueux. Revivre ensemble, être heureux les uns avec les autres. Je ne demande pas l'impossible, je ne veux pas décrocher la lune, je demande juste à ce qu'on soit égaux, enfin égaux ! Je n'ai aucune haine envers toutes ces femmes, notre plus grand problème, c'est Gloria.

– C'est un bien beau monde dit comme ça... murmure Brian, toujours aussi calme.

– Et comment y arriver ? s'interroge Willy, les bras croisés, ne semblant pas tout à fait convaincu par les paroles de Dane.

– C'est simple : dans une bataille, il n'y a qu'un seul vainqueur. À nous de la gagner.

– Un seul ?

– Si je rends possible l'impossible, vous me croirez, non ? Notre destin est d'être manipulés par un gouvernement et un système totalement féminin. C'est la guerre. Faut-il une autre raison pour prendre la tête de l'ennemi ?

– On n'est pas des Vikings, calme-toi, rétorque une fois de plus le psychopathe râleur.

– Il y a du mouvement, chuchoté-je, en entendant des voix s'approcher.

– Combien ? me demande Dane, sur le qui-vive.

– Trois femmes, peut-être quatre. Mais je crois qu'elles se sont séparées. Elles ont des armes à feu qui font ma taille ! Je n'y crois pas !

– Elles ne font pas les choses à moitié. Il faut qu'on bouge.

Mais avant même d'avoir eu le temps de bouger un doigt qu'une gardienne nous prend par surprise, surgissant du buisson derrière lequel nous nous sommes cachés.

– Halte, étrangers !

– On ne va quand même pas s'arrêter ? crache Willy, dans un murmure plus qu'audible.

– Tu préfères qu'on t'abatte dans le dos comme un chien ? lui balancé-je, ayant perdu toute patience avec lui.

– Retournez-vous doucement, les mains sur la tête, dit sèchement la gardienne, alors vous voilà enfin. Les fameux évadés de Culpa.

– En chair et en os, tente de blaguer Willy, sûrement pour se déstresser lui-même.

– Que faites-vous ici ? Sur les terres de Gloria, sa Majesté ?

– Il faut la jouer cool, ne pas être irrespectueux envers elles, les gars, nous murmure Dane, nous sommes juste des jeunes. Vous savez comment nous sommes. On était curieux de voir la merveilleuse Gloria en chair et en os. Et qui plus l'est, sa Majesté. D'enfin découvrir cette ville dont on a tant étudié et tant parlé. On voulait juste voir de nos propres yeux ce qui était juste à nos côtés.

– Tu devrais te limiter aux manuels de ton établissement, mon garçon. On ne t'a pas appris que la curiosité était un vilain défaut ?

– Certes, mais vous avez tout, l'amour et la lumière. Vous avez la paix et la liberté, voire l'argent. Nous, c'est la crise, la violence. Tout ce qu'on a, il a fallu souffrir pour l'avoir. Il y a de quoi vous envier. Je vous admire énormément.

Les deux autres garçons le regardent d'un œil incertain et méfiant. Ils n'ont donc pas compris qu'il est en train de les amadouer afin qu'on ne se fasse pas prendre tous les quatre ?

– Que veux-tu ?

– À quoi tu joues, Dane ? questionne Brian, anxieux.

– J'aimerais vraiment être à votre service. Être au service de sa Majesté serait une cause honorable et une excellente raison de donner ma vie pour sa protection.

– Dane...

– Mec, essaye à son tour Willy.

– Ce n'était pas ça le plan, continue Brian, prit de court.

– On doit s'en sortir, ne pas éveiller leurs soupçons. Continuez sans moi, je me débrouillerais. Faites ce qu'il faut, je crois en vous les gars, nous chuchote-t-il d'un ton encourageant, ne faites plus attention à moi, maintenant, c'est entre moi et la reine.

– Dane, ne joue pas au héros, commenté-je, on est parti à quatre et on continuera à quatre. Il ne faut pas qu'on se sépare.

– Plus maintenant, la donne a changé.

– Dane...

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