38. Reyna : Une fin... ?!
Deux semaines plus tard, au camp Jupiter.
- J’ai fini, souffla Léo avec soulagement.
Le jeune homme s’éloigna un peu afin d’admirer son œuvre, et Reyna, prudente, attendit son feu vert pour tenter de bouger. Ce n’est pas qu’elle n’avait pas confiance en lui, plutôt qu’elle se méfiait des options qu’il avait jugé bon d’installer. Elle ne voulait pas détruire la forge du camp Jupiter en bougeant les doigts. Finalement, le mécano hocha la tête d’un air satisfait. Il installa un miroir devant elle, et Reyna pu découvrir son reflet. Son bras gauche était toujours le même, mais là où à sa droite, il y avait un moignon ces derniers temps, un bras de métal était attaché. Le bras était la copie conforme de son bras gauche, mais en bronze céleste zébré d’or impérial, le tout dissimulé sous une fine couche de plastique grise afin d’éviter de rameuter tous les monstres avec l’éclat du métal. Reyna s’étonna de sa légèreté : il était à peine plus lourd que son bras de chaire, et elle ne doutait pas qu’elle finirait par s’habituer très rapidement. En tout cas, c’était du très beau travail…
- Il te plait ? demanda Léo avec anxiété.
Reyna prit le temps de contempler la jonction avec son épaule, que Léo avait pris soit de faire couleur chair pour ensuite le dégrader vers du gris-pierre avant le coude. C’était fait de manière à ce qu’elle ne soit pas dégoutée de ce nouveau membre. Et c’était réussi.
- Il est super, avoua la préteur avec circonspection.
Elle se méfiait encore des « aménagements » que Léo avait pu apporter. Le fils d’Héphaïstos sourit d’un air ravi :
- Evidement, c’est mon travail !
Néanmoins, Reyna perçu son sourire soulagé. Elle se doutait que c’était la chose la plus difficile qu’il n’ait jamais fait, et le temps qu’il y avait passé témoignait des obstacles qu’il avait rencontrés tout au long de sa conception.
- Essaye de bouger les doigts… ordonna-t-il. Doucement.
La préteur s’exécuta pendant que Léo regardait la main avec satisfaction.
- Tu rencontres des difficultés ? C’est bizarre ?
- Non, c’est parfait, répondit sincèrement la prêteur.
- Super ! Passons aux aménagements !
Merde… songea Reyna. Elle en était sûre, c’était trop beau.
- Ne fais pas cette tête, soupira Léo. C’est génial et ça vas te plaire, tu vas voir. Essaye de plier tes doigts dans le sens inverse…
La jeune femme obéit, et la main pivota pour laisser surgir une lame aussi grande que son avant-bras.
- Waouh, soupira la préteur. C’est incroyable…
Elle se releva et tenta quelques mouvement, découvrant rapidement que la lame était parfaitement équilibrée et la forme était tout autant parfaite pour son style de combat.
- On a tout étudié avec Annabeth et Clara, avoua Léo d’un ton prudent. Ton style de combat, le type d’arme que tu utilises et la forme des lames. Ça te plait ?
- C’est parfait, avoua la préteur, touchée. Vous avez fait du super travaille. Merci, Léo.
- Oh, tu sais, rétorqua le jeune homme avec bonne humeur. C’est mon job de contenter les gens, j’ai l’habitude.
Mais il ne put cacher sa satisfaction.
***
Perchée sur une colline de la Nouvelle Rome, Reyna bougeait doucement sa main droite. Le soleil était bas à l’horizon, mais elle ne s’étendait pas sur la magnificence de la ville, elle était beaucoup trop perdue dans ses pensées. Les pertes d’Hazel, Noémie et Harry lui pesaient sur la conscience. Elle n’avait même pas put parler à amie fille de Pluton avant qu’elle ne rende l’âme. Elle avait beau être habituée, elle avait toujours besoin de temps pour se remettre profondément de la mort de ses amis. Et Harry… il était trop jeune.
Reyna fit surgir la lame, et admira un instant la manière dont le soleil courait sur le métal. Vraiment un très bel ouvrage… des bruits de pas derrière elle la sortit de sa contemplation, et Clara vint s’asseoir à ses côtés. La jeune femme n’avait plus remit sa tenue de combat depuis qu’elles étaient sorties du labyrinthe, et Reyna comprenait. La simple vue de sa tunique lumineuse devait suffire à lui rappeler la mort de sa petite sœur… Comme si elle entendait ses pensées, la jeune femme murmura :
- Noémie aurait adoré cet endroit. L’architecture…
Elle se tue, et Reyna sentie sa détresse. Clara était du même genre qu’elle. Elle souffrait en silence, refusant de montrer ses faiblesses, même si l’étincelle de son regard s’était éteinte. Reyna tourna son regard vers la ville en contrebas, et demanda :
- Qu’allez-vous faire, tes frère et sœurs et toi ?
- Gwen et Eve veulent rester à la colonie. Elles s’y sentent bien. Milo préfère rester ici. Et moi aussi. On a pas… on ne veut pas la voir partout où on ira. Bien sûr, on continuera de se voir, mais pour l’instant… c’est mieux comme ça. Il faut qu’on apprenne à vivre sans être tous ensembles.
- Je comprends, souffla Reyna.
Elle regarda Clara, et vit qu’elle la croyait. Oui, on voyait tout de suite que Reyna comprenait la douleur et le deuil. De nouveaux bruits de pas retentir derrière les deux jeunes femmes, et Frank surgit dans leur dos. Il était équipé d’un sac à dos, et ses yeux étaient gonflés. Sans plus de cérémonie, il s’assit à gauche de Clara et se mit à regarder la ville avec elles.
- Je vais partir, avoua le romain.
Ils restèrent un instant silencieux. Reyna aurait aimée dire que c’était une surprise, mais elle mentirait. Elle s’attendait à ça.
- Où vas-tu aller ? demanda très calmement la préteur.
- Nous devons trouver Jason, répondit le fils de Mars. Je pars avec Piper. Ils reviendront tous les deux.
- Vous retournez sur cette île maudite ? demanda Clara.
- Oui. Reyna, je suis désolé. Je ne suis pas apte à être préteur sans Hazel. J’avais besoin d’elle. Sans elle, je n’y arriverais pas.
Reyna ne répondit rien. Elle comprenait. Et puis, elle avait l’habitude de gérer les choses seule…
- Je pense que je sais qui doit me succéder au poste, avança Frank en regardant ses deux amies.
Réellement curieuse, Reyna demanda :
- Tu penses à la même personne que moi ?
- Je crois, sourit Frank.
- Heu… je suis perdue là, avoua Clara. Vous pensez à qui ?
- A toi, annonça Reyna.
La jeune femme tourna brusquement son regard vers elle :
- Quoi ?
- Réfléchie, répondit la fille de Bellone. On a travaillé ensemble pendant des semaines, tu connais la mythologie comme ta poche, tu as été choisie par le seigneur des dieux lui-même et par une déesse très respectée dans notre société, tu connais l’histoire de Rome et de l’empire romain, tu as menée à bien une quête, tu es en bon terme avec la colonie, tu es agile avec des armes et dans tes paroles. Tu es parfaite pour ce poste.
- Mais je ne suis pas une romaine !
- Mais tu n’es pas non plus grecque, rétorqua Frank. Tu as été choisie par les dieux, Clara et tu peux tout à fait prétendre à mon poste. Je t’ai choisie pour prendre ma place.
- Tu as dit toi-même que tu voulais rester ici. Et je sais que tu ferras une bonne prêteur.
- Je ne sais pas…
- Prend ton temps, répondit Frank.
Ils restèrent ainsi pendant presque une heure, puis, alors que le soleil était presque couché, Clara finit par dire :
- Je ne veux pas que de nouvelles personnes meurent. Si je peux aider à l’empêcher… J’accepte.
Reyna sourit. Elle savait qu’elle travaillerait bien avec elle. Elles l’avaient déjà fait.
- Bien, répondit Frank. Dans ce cas…
Il se leva, et aida Clara à faire de même. Prenant son avant-bras dans sa main, il déclara :
- Moi, Frank Zhang, préteur de la douzième légion fulminata, je démissionne de mon poste et te nomme préteur, avec les pleins pouvoirs du grade.
Une marque apparue sur l’avant-bras de la mortelle : un croissant de lune duquel surgissait un éclair, un trait présent juste en dessous des initiales SPQR. Le tatouage de la légion. Reyna s’avança et détacha solennellement l’insigne de préteur de son ami, puis l’épingla sur le T-shirt de la mortelle. Frank sourit :
- Bienvenue dans la légion, Clara.
Il lui serra l’avant-bras, puis Reyna enlaça sa nouvelle collège.
- Ce sera un vrai plaisir de travailler avec toi.
Clara sourit, émue. Frank s’agita un peu, puis déclara :
- Je dois m’en aller maintenant. Pip’s m’attend.
Reyna lui sourit :
- Tu reviendras, hein ?
- Surement, répondit le fils de Mars. Quand je me sentirais plus calme. Quand j’aurais appris à vivre avec. En attendant, je sais que le camp est entre de bonnes mains.
Il la salua, puis partit, tout simplement. Quand il eut disparut à l’horizon, aigle géant portant sur son dos la fille d’Aphrodite, Clara se tourna vers son amie :
- Il va me manquer, avoua-t-elle. Je ne le connais pas très bien, mais je sais que c’est quelqu’un de bien.
- Oui, il va me manquer à moi aussi.
Les deux jeunes femmes se sourirent doucement. Tout semblait tellement nouveau, maintenant…
- Il reviendra vraiment, tu penses ? demanda Clara.
- J’en suis persuadée. Après tout…
Les yeux de la préteur se posèrent sur la ville :
- C’est ici qu’est sa famille…
- En parlant de famille… Comment va Jay ?
Reyna se tendit presque imperceptiblement. La dernière fois qu’elle avait parlé au jeune homme, ils s’étaient embrassés, et à peine dix heures plus tard, son petit frère avait perdu la vie.
- Je ne sais pas… Je ne lui ai pas vraiment parlé depuis… tu sais. J’ai vite été débordée, et nous nous sommes un peu… éloignés.
Elle ne voulait pas évoquer la double mort de ses amis. Pas devant Clara. Mais cette dernière compris :
- Je ne suis pas seule tu sais. J’ai ma famille… ils m’aident comme ils peuvent. Jay, lui, n’a plus que toi.
- Tu es sûre qu’il a envie de me voir ?
Clara tourna son regard vers la fille de Bellone, résolue :
- Il en a besoin. Après tout, si quelqu’un peut l’aider à surmonter ça, c’est bien toi.
- Tu as raison… soupira Reyna.
Son regard se tourna de nouveau vers la Nouvelle Rome. C’était vraiment un bel endroit pour y vivre. Et elle ferait ce qu’il faut pour que Jay s’en rende compte. Il méritait d’être heureux. Et pour la première fois depuis longtemps, Reyna savait qu’elle aussi méritait une belle fin. Qui sait, peut-être voudrait-il bien d’elle ? Après tout, la déesse de l’amour l’avait personnellement prévenue : aucun demi-dieu ne l’aimera jamais de manière romantique. Mais qu’en était-il d’un mortel ?
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