34. Léo : Cauchemar mit sur pause.


Le temps était suspendu. Le son ne lui parvenait plus de la même manière. Tout semblait étouffé dans un brouillard blanc alors que Noémie tombait doucement devant lui. Ou peut-être était-ce lui qui voyait les choses différemment, car alors qu'il tendait les bras pour la retenir dans sa chute, il lui semblait qu'il se mouvait lui aussi au ralentit. Son bras gauche passa autour de sa taille, sa main droite attrapa la lance. Léo se sentait trembler, et il lâcha aussitôt l'arme plantée dans le ventre de son amie, effrayé à l'idée d'empirer les choses. Quoi que, tout bien réfléchit, il voyait difficilement comment les choses pouvaient empirer. Noémie était d'une pâleur extrême. Ses cheveux brillaient sous les lumières du feu et les éclats de sang, sa respiration était laborieuse.

- Noémie, je t'en pris, marmonna Léo, trop abasourdit pour parler correctement. S'il te plaît...

A genoux au sol, la peau en contact avec le froid mordant de la pierre, ses bras tremblaient à la vue du liquide carmin qui sortait doucement du corps de son amie.

- Je vais bien, chuchota la mortelle. Ça va.

- Arrête tes bêtises, coupa Léo avec un ricanement étranglé. Tu es en train de mourir.

Son regard erra sur tout ce qu'il l'entourait. Il devait trouver Gwen avant qu'il soit trop tard, il lui fallait sauver son amie, il ne supporterait pas de la perdre après avoir perdu Hazel.

- Non, souffla Noémie en attrapant sa main. Non.

- Il faut qu'on te soigne, Noé. Il faut qu'on te soigne, ajouta-t-il en pleurant.

- Si tu lui demande de me guérir, elle va en mourir, avoua la mortelle. Je le sens. Le feu de la connaissance me tuait déjà. Elle n'est pas assez forte pour lutter contre ça.

- Je ne veux pas te voir mourir, pleura le fils d'Héphaïstos. Je ne peux pas...

Noémie sourit doucement, et sa main rejoint la joue du jeune homme :

- J'étais destinée à mourir, Léo. C'était ma quête, ma mission. Je suis heureuse de t'avoir sauvé avant. J'aurais aimé réussir à sauver Hazel. Je suis désolée d'avoir échoué. Je suis désolée...

- Tais-toi, marmonna le mécano. Tais-toi, je ne te permets pas de mourir, tu n'as pas le droit de partir, on a besoin de toi !

- Je t'en prie, Léo, rétorqua la bénie. Tu n'as jamais vraiment eu besoin de moi.

Sa respiration se fit haletante, et un sanglot douloureux lui échappa :

- S'il te plait, ne me laisse pas, paniqua Léo. Noé je t'en prie, reste avec moi.

- Je ne suis déjà plus là, avoua la bénie. Je vois les Élysées, Léo. C'est si beau...

Une larme coula le long de sa joue, et le fils d'Héphaïstos trembla de plus bel :

- C'est beau ? Tu peux m'en parler ?

- C'est magnifique, souffla la mortelle. Il y a de la lumière, et des bâtiments de marbres blanc. Je vois aussi des jardins, et je sens la caresse de l'air...

Les larmes du jeune homme s'écrasaient sur les joues de son amie sans qu'il ne puisse ce contrôler. Il tremblait, il commençait à étouffer :

- Je ne pensais pas que les mortelles pouvaient y aller. Je pensais que c'était réservé aux héros.

Sa voix se brisa sous la douleur, et Léo hoqueta :

- Tu es une héroïne, Noémie. Tu es l'une des plus courageuses héroïnes que j'ai jamais rencontrées. Merci pour tout ce que tu as fais. Merci...

- Tu diras à ma famille que je les aime, chuchota la jeune femme. Tu leur diras que j'aurais aimé passer plus de temps à leurs côtés. Que j'aurais aimé les voir grandir encore un peu.

- C'est promis, Noémie. C'est promis.

Il la berça doucement, la redressant lentement pour enfouir son visage dans ses cheveux :

- Je te promets de leur dire.

- J'ai aimé faire cette quête avec vous, avoua la jeune femme. C'était beaucoup plus supportable... de le faire avec des amis...

Léo ne répondit rien, étouffant ses pleurs dans sa chevelure châtaine. Noémie murmura :

- J'ai froid...

- Tout va bien, s'étrangla le jeune homme en les entourant de flammes. Tout va bien. Athéna avait raison de parier sur toi. Tu étais le choix le plus sage. Tu es une vraie héroïne.

- Je vois Hazel, s'émerveilla la jeune femme. Elle m'attend. J'ai si froid...

- Je vais te réchauffer, balbutia le fils d'Héphaïstos. Tu m'entends ?

- Merci, souffla une dernière fois la bénie.

Léo senti la main de la mortelle glisser de son bras. Son sang sur sa peau était toujours chaud, mais pourtant il sentait un froid plus mordant que n'importe quel sort de Chioné emprisonner son âme. Les yeux clos pour tenter de maitriser un peu le feu qui bouillonnait en lui, lui marmonna :

- Noé ?

Seul le silence lui répondit. En tremblant, il s'écarta de la jeune femme, découvrant son visage serein et ses yeux clos. Une unique larme avait tracée un sillon le long de sa peau pâle, et ses lèvres souriaient doucement. Lentement, il embrassa son front, et, d'un geste brusque, il arracha la lance du ventre de son amie. Sans qu'il ne puisse les contrôler, la haine, la colère et le désespoir enflèrent en lui. Tout autour, tout le monde se battaient. Cette parenthèse n'avait duré que quelques minutes, pourtant il lui semblait être plus vieux de dizaine d'année. Vieux comme le monde. Comme les dieux qui lui avaient arrachés Noémie. Un cri de douleur échappa à sa gorge. C'était un cri de haine, de défit. Un cri pour ses morts et pour tous les vivants qui n'avaient pas encore réalisé ce qu'il venait de se passer. Un cri qui voulait dire qu'il était toujours vivant. Et que ces ennemis allaient payer. Fermant les yeux, il souffla doucement. Hazel, puis Noémie... ses ennemis allaient payer. Et tant pis si ça lui couterait la vie. Tu diras à ma famille que je les aime, avait demandé Noémie.

- Je le ferais, jura encore une fois le jeune homme au corps déjà presque froid de son amie. Je le ferais.

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