- C’est quoi ce bordel ? s’exclama Jason en découvrant le deuxième Milo juste en face du premier.

- Quoi ? demanda aussitôt celui-ci.

- Que se passe-t-il ? enchérit le premier.

Will les regarda tour à tour, chamboulé. Il n’y comprenait plus rien ! Qu’est-ce que ça signifiait ? Y avait-il un métamorphe à bord ? Mais pourquoi…

- Bon, quelqu’un vas me répondre ? demanda le Milo à ses côtés.

Le premier ne réagit absolument pas, comme si…

- Ils ne s’entendent pas, remarqua le médecin.

- Qui ne s’entendent pas ? demandèrent les deux jeunes hommes en même temps, et l’uniformité de leur voix fit tressaillir tous les autres.

Lentement, Noémie s’avança et se plaça entre les deux, faisant signe à tous les autres de reculer légèrement :

- Milo, mon ange, écoute-moi avec attention, s’il te plaît. Il y a un doppelgränger en face de toi.

Si elle avait espéré les différencier comme ça, elle faisait visiblement fausse route, car les deux demandèrent en même temps :

- Un quoi ?

Will frissonna de nouveau. Il n’aurait jamais cru que la même voix, dédoublée, serait aussi effrayante. Et pourtant… C’était comme s’il y avait une déchirure dans la réalité, comme si soudainement son monde prenait une autre dimension, comme si deux réalité se superposait. C’était plus qu’effrayant, c’était… tétanisant.

- Un doppelgränger, répéta Noémie. Une créature qui prend ton apparence et prédit ta mort prochaine si tu croise son regard.

- Un truc horrible qui a prit mon apparence ? répéta le premier Milo, entre Annabeth et Piper. Tue moi cette saloperie !

- Tu es en train de dire qu’il y a deux moi dans cette pièce ? demanda simultanément le second. Merde, fait quelque chose !

Tous échangèrent des regards inquiets. S’ils continuaient comme ça, jamais ils ne pourraient les différencier !

- Noémie ? Tu es toujours là ? demanda Milo entre Annabeth et Piper, que Will décida de nommer Numéro 1.

- Je suis toujours là, répondit posément la jeune femme, mais Will remarqua que ses mains tremblaient.

- Tu parles à ce doppel… truc ? demanda le deuxième Milo avec clairvoyance. Si je comprends bien, je suis le seul à ne pas l’entendre ?

- C’est exactement ça… répondit Annabeth.

Elle semblait vraiment agacée et inquiète, surement parce qu’elle n’avait aucune idée de comment résoudre l’affaire.

- C’est ça quoi ? s’enquit Numéro 1. Attend… vous l’entendez parler, c’est ça ? Je ne l’entends pas parque qu’il a pris mon apparence.

- Tu as tout compris, marmonna Piper avec un soupçon d’impatience.

- Compris quoi ? demanda Numéro 2.

On n’en sortira jamais, songea Will avec désespoir. Visiblement, Léo eu la même pensée, car il prit la parole :

- Bon, les Milo ! déclara-t-il, excédé. Vous avez la même tête et la même voix, et pour l’instant on n’a aucune idée de comment vous différencier, donc ce qu’on va faire c’est que vous allez vous taire et nous laisser réfléchir, parce que là, c’est juste pas possible de s’en sortir.

Poussant un même soupir, les deux jeunes hommes se turent.

- C’est l’une des choses les plus bizarres que j’ai jamais vue, avoua Percy devant le mouvement synchronisé de leurs épaules.

- Et moi donc, marmonnèrent les deux Milo en même temps.

Noémie s’avança vers la table des cartes et ramassa un poignard en bronze céleste qui trainait dessus. Elle revient se placer entre ses deux « frères » et, d’un mouvement rapide et précis, elle leur entailla légèrement la joue.

- Aïe ! s’écrièrent les deux jeunes hommes.

Numéro 1 porta par réflexe la main à sa joue, tandis que numéro 2 attrapa son pull pour s’essuyer :

- La prochaine fois prévient au moins ! exigea-t-il en frottant le sang qui coulait doucement le long de son visage.

- Ça a marché ? demanda numéro 1.

- Vous saignez tous les deux, répondit Noémie. Ce n’est pas concluant. Ok… Léo ? Tu peux nous faire un peu de feu ?

- Bien sûr ! répondit aussitôt le mécanicien.

Il embrasa ses paumes et, se plaçant entre les deux hommes, il posa une main sur chacun d’eux. Aucune ne fit le moindre geste, convaincu d’être l’unique à pouvoir supporter le feu qui essayait sans succès de mordre leur chair.

- Convaincu ? demanda le numéro 2 alors que Léo enleva ses mains, dépité.

- La chose as tes pouvoirs, murmura doucement Noémie. D’accord, alors… à quoi ressemblait ton sac de cours cette année ?

- Un sac classique gris, répondit aussitôt numéro 1. Avec un porte-clefs.

- Il est normal, répondit numéro 2. J’ai mis un porte-clefs de Kookie dessus.

- La… créature, commença prudemment Annabeth. Elle aurait pût voir une photo. Tu n’aurais pas une autre question ?

Will poussa un soupir de dépit :

- Au point où on en est, autant tenter un pierre-feuille-ciseaux, marmonna-t-il.

- Je ne mettrais pas la vie de mon frère en jeu avec un pierre-feuille-ciseaux, rétorqua aussitôt Noémie avec sécheresse, et Will se maudit intérieurement.

Sa remarque était visiblement mal prise, et il comprenait pourquoi. Si ça avait été Nico, il aurait surement déjà éclaté en sanglots.

- Ok, alors… pensa la jeune femme. J’y suis. Milo, dit moi une cachette ou j’avais besoin d’aide quand on jouait à cache-cache, enfant.

- Le coffre à nounours, répondit numéro 2. Tu avais besoin de moi pour remettre les nounours en place et qu’on ne te voit pas.

- Le haut de l’armoire, répondit avec le même aplomb numéro 1. Tu me demandais toujours d’enlever la chaise quand tu étais montée dessus.

Un long silence accueillit ces deux réponses. Un simple regard sur le visage catastrophé de Noémie suffisait à tous les renseigner : les deux étaient correctes. La bénie des dieux déglutit :

- Milo, murmura-t-elle. La créature a accès à tes souvenirs. Je ne sais plus comment faire. Prouve-moi que tu es bien toi. C’est entre tes mains, maintenant.

Les deux inspirèrent bruyamment, visiblement tendus et déboussolés. Will eu de la pitié pour Milo : comment prouver son identité alors que la personne en face de toi avait tout pour prétendre à ton nom ? Le Milo entre Piper et Annabeth pris alors la parole :

- Je ne peux pas te prouver mon identité. La seule chose que je peux faire, c’est te faire confiance.

Il respira profondément, calma légèrement le tremblement de ses mains, puis se redressa, le visage tourné vers Noémie sans la voir :

- Je sais que tu ne tromperas pas. Alors vas-y. Fait ce qu’il y a à faire.

C’est lui, comprit Will. Le seconde, juste à côté de lui, n’affichait aucune trace de peur. Alors que Noémie se tourna vers lui, le poignard à la main, la chose déclara simplement :

- Si je meurs, je te tue.

Sa menace, sur un ton des plus simple, tendis les épaules de l’intégralité des personnes présente dans la pièce. Du coin de l’œil, le médecin remarqua que Jason tenait sa pièce, prêt à défendre Noémie si la chose tentait quoi que ce soit. La bénie de Poséidon s’avança encore, leva son poignard. Ses yeux étaient imperturbables alors qu’ils se fixaient sur la créature. Puis, trop soudainement pour que quiconque ait le temps de réagir, elle se retourna et, d’un geste précis, trancha la gorge du Milo entre Annabeth et Piper. Ce dernier poussa un cri étranglé et porta sa main à la gorge, du sang coulant entre ses doigts. Pendant un horrible instant, tout semblait suspendu. Noémie regardait son frère égorgé, le visage pâle, les mains tremblantes. Tous étaient catastrophés. Puis, après une seconde qui  leur paru durer l’éternité, la chose sembla fondre, perdant toute trace de Milo, devenant l’une des créatures sans visages qu’ils avaient déjà affronté. Sans un mot, le doppelgränger s’effondra en un tas de poussière, et Noémie lâcha son poignard et tomba au sol, les jambes tremblantes.

- C’est fini ? demanda prudemment le Milo restant, le vrai, le seul.

- C’est fini, confirma Jason avec soulagement.

Will, lui, préféra se concentrer sur Noémie. Elle était visiblement chamboulée d’avoir du égorger son « frère », mais elle sourit doucement, murmurant un « je vais bien » peu convainquant.

- La vache, comment tu as sus ? demanda Léo avec admiration. J’étais sûr que c’était lui, le bon !

- Je suis curieux de le savoir aussi, enchéri Milo en s’accroupissant prêt de sa sœur et du médecin, enlevant d’un geste son bandeau.

- Il a dit qu’il avait confiance en moi pour faire ce qu’il fallait, répondit Noémie.

- Justement, je pensais… commença Percy.

- Il tremblait, le coupa Noémie en levant les yeux vers ceux de son frère. Il m’a dit ça, mais il craignait pour sa vie. Alors que toi…

- Je savais que tu me reconnaitrais, acheva Milo. Je n’ai jamais douté de toi.

Le frère et la sœur se sourirent et s’enlacèrent, soulagés.

- Tu n’as pas vu cette chose, au moins ? s’enquit tout de même Noémie.

- Absolument pas, répondit Milo. Ni vu, ni entendu.

Ils se serrèrent plus fort encore, et Will sourit. Une chance que Noémie connaisse tant de chose sur la mythologie et sur son frère, autrement, ils auraient pu avoir un mort à déplorer…