Chapitre 25 : Retour à la case départ

          Bonjour ! Simplement pour vous prévenir que je pars en vacances pendant deux semaines. Je ne sais pas s'il y aura du wifi, donc je ne sais pas si je pourrai poster mais s'il y en a, vous aurez les prochains chapitres à coup sûr !

Bonne lecture !

Elena



_  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _  _

          Je serrais mon père dans mes bras. Fort. Je respirai à plein poumon son odeur boisée et m'enivrais de ce parfum si familier. Mes bras serrèrent convulsivement son corps frêle de peur qu'il m'échappe à nouveau. Je ne voulais plus partir. Plus le quitter. Non, plus jamais. Le fait d'être dans ses bras me rappelait combien il m'avait manqué et je tremblais tout contre son corps, retenant tant bien que mal les larmes qui menaçaient de couler.

Je ne sais pas qui de nous deux soutenait l'autre. Mon père, qui me caressait affectueusement les cheveux tout en me répétant combien je lui avais manqué, ou moi, qui le serrais tellement fort que j'avais peur de le briser.

      -Je suis là Maïa, je suis là, chuchotait-il.

J'hochai la tête douloureusement à chaque fois qu'il me le répétait, ne pouvant faire autre chose. Une boule s'était logée au fond de ma gorge et seul un gargouillis incompréhensible s'en échappait.

Je poussai un gémissement plaintif alors qu'il s'extirpait de mon étreinte et il me rassura aussitôt en posant ses deux mains sur mes épaules. J'essayai de le voir à travers mes yeux larmoyants, mais ne réussissaient qu'à discerner une forme indistincte.

      -Je suis vraiment heureux de te revoir Maïa, mais là j'ai vraiment besoin d'aller me coucher, me dit-il en me souriant.

Je tournai la tête vers la seule fenêtre de la cuisine et me rendis compte que la nuit était déjà bien présente.

      -Oui bien sûr, murmurai-je.

      -Bonne nuit Maïa, me dit-il en embrassant ma joue.

      -Bonne nuit Papa, chuchotai-je.

Mon père se figea un instant sur le seuil, avant de continuer vers sa chambre. Je savais que le mot papa l'avait interloqué. Pour une raison que j'ignore, je ne l'avais jamais appelé ainsi, utilisant toujours "Père" pour s'adresser à lui.

Je le regardai aller dans sa chambre, et une fois la porte refermée, je m'affalai sur une chaise, complètement exténuée.

La première raison était le fait que nous avions marché une bonne partie de la nuit et toute la journée avant de venir ici. Lorsque j'avais ouvert la chambre d'Alfred la veille, en lui expliquant les motifs de mon départ, il n'avait pas protesté un seul instant, enfilant rapidement quelques vêtements en m'ordonnant de l'amener avec lui.

Enfin, le terme exact serait plutôt qu'il m'a fait chanter. Soit il accourait prévenir la maisonnée de ma fuite, soit il m'accompagnait. Choix on ne peut plus cornélien. Pour autant, je crois que sa présence ne m'avait jamais autant rassuré.

Ma deuxième raison était le fait que Mike ne m'ait pas mentit. On pouvait lui reprocher énormément de choses, mais il avait toujours été honnête. Et s'il ne m'avait pas prévenu, dieu sait dans quel état j'aurai retrouvé mon père.

Il avait considérablement maigri depuis mon absence. Son corps si robuste n'était plus qu'un sac d'os. Dire que j'avais été choquée aurait été un euphémisme. Je n'avais plus les mots pour décrire ce que je ressentais. Même si la culpabilité et les remords déferlaient en moi plus vivement que n'importe quel sentiment.

Je me sentais écorchée de l'intérieur, écartelée avec pour seule solution de regarder ce supplice. Je ne pouvais rien faire.

      -Tu n'aurais pas quelque chose à manger ?

Je relevai vivement la tête vers Alfred, le regardant comme si une deuxième tête venait de lui pousser avant de me rendre compte que le pauvre n'avait pas manger de la journée ! Dans notre précipitation, nous avions totalement oublié ce qu'il pouvait nous être essentiel.

Sans perdre de temps, j'allai regarder si nous avions de quoi le nourrir avant de le regarder avec une tête désolée.

      -Nous n'avons plus rien.

      - Tu ne vas pas tout de même pas me laisser mourir de faim !

Sa mine outrée me fit éclatée de rire. Cet homme accordait une bien trop grande importance à la nourriture à mon goût.

      -Mais non, lui assurai-je. Aller viens

Je lui pris doucement le poignet avant de l'emmener à ma suite à travers les rues de la ville que m'avait vu grandir. 

Nous déambulions aisément parmi la foule et je pouvais voir la surprise qu'affichait son visage à chaque fois que nous croisions un bâtiment détruit. Pour nous autres, habitants du village, cela faisait simplement parti du décor. Mais je pouvais comprendre son désarroi. Il faut dire que ça changeait radicalement du château ; là où tout le monde avait beaucoup trop d'espace pour vivre, où il ne manquait de rien et où le seul paysage était une forêt luxuriante. Ici, nous vivions dans de petites maisons, fautes de moyens et rares étaient ceux qui pouvaient se payer des extras. Nos deux mondes étaient complètement différents.


     -Pourquoi tous ces bâtiments sont-ils en ruines ici ?

     -Tu ne le sais pas ? Ce sont les restes de la grande guerre.


Alfred écarquilla les yeux. J'étais surprise aussi. N'avait-il jamais vu les dégâts que cette bataille avait pu causer ?


     -Excuse-moi, c'est juste que j'ai toujours été au château. Et même si j'ai entendu parler de cette guerre, je ne pensais pas qu'elle avait fait autant de dommages chez vous.

     -Ne t'en fais pas, le rassurai-je. Ce n'est pas si terrible que ça. Et puis, on s'y est tous habitué, lui dis-je en souriant.


Sauf que ma phrase eut l'effet inverse. Il devînt encore plus livide et l'effroi figea les traits de son visage si expressif.

Je m'arrêtai soudainement avant de lui faire face. Il semblait ailleurs. A mille lieux d'ici. Je tournai sur moi-même et regardai mon village de nouveau. C'était si terrible que ça ?


     -Alfred je...

     -Maïa !


Cette voix, je la reconnaissais entre mille. Il s'agissait de Phil, mon employeur avant que les soldats ne m'embarquent pour le château. Il n'avait pas changé. Ses grosses bottes claquaient toujours lourdement sur le sol alors qu'il déplaçait tant bien que mal sa bedaine.


     -Mon dieu ma petite Maïa, tu vas bien ? Ils ne t'ont pas fait mal ? Ton père m'a tout expliqué tu sais ! Je t'en voulais au début de ne pas être venu mais je... Je comprends maintenant.


Toujours aussi doux et gentil en dehors de son travail. Je lui souriais doucement avant de le prendre dans mes bras. Il me tapa dans le dos de sa main bourrue, un poil gêné avant de me tenir à bout de bras pour m'inspecter. Rassuré que je n'aie rien, il se remit à distance.


     -Ne t'en fais pas, tout va bien.

     -Tu m'en vois ravis Maïa. Mais je voulais juste te dire que tu pouvais passer à la librairie tant que tu veux maintenant que tu es là. Et que si tu voulais retravailler pour moi, il n'y avait aucun problème non plus. Par contre je dois y aller. Ma femme m'attend, me souffla-t-il avec un petit sourire.

     -Je comprends Phil. Merci. Et salue ta femme pour moi !


Il me fit un vague signe de la main avant de s'en aller. C'était vraiment un homme bien. Je l'aimais beaucoup en tous cas.


     -Il a l'air de bien t'aimer.


J'acquiesçai à la phrase d'Alfred, pris sa main avant de l'emmener à ma suite à travers le village. Il se laissa faire, docile et continua de regarder les alentours, comme si de rien était. Il avait l'air d'aller mieux. J'en fus soulagé.

Finalement, je repérais sans aucune difficulté l'étoffe d'un bar assez sympa et le fit entrer à l'intérieur.

Les tons assez clairs du bistrot en faisaient un endroit cosy, renforcé par les lumières tamisées qui lui donnait un côté assez mystérieux. Chaque personne discutait avec son voisin, rigolant d'une blague ou s'exclamant suite à une nouvelle... C'était vraiment chaleureux. Et je m'étais toujours sentie à mon aise ici.

      -Qu'est-ce que je vous sers ?

Je ne m'étais pas rendu compte qu'Alfred nous avait d'office assis au bar, bien trop pressé de remplir son ventre.

Je relevai les yeux, prête à lui répondre et tombai face à des yeux gris intense. L'homme brun et à la peau basanée me scrutait, sûrement en l'attente d'une réponse.

      -Rien merci, lui souriais-je.

Il me sourit en retour avant de s'occuper de mon voisin. Aucun doute, cet homme devait rarement finir sa soirée seul.

      -Une bonne entrecôte. Saignante si possible. J'ai toujours adoré la viande pas trop cuite. Oh et du champagne. J'aime beaucoup le champagne. En avez-vous ? Et...

Alfred parlait rapidement, sa main l'accompagnant dans ses paroles. Contrairement à ma première impression, il était loin d'être vieux. Il avait enlevé son monocle et ses yeux pleins d'adoration s'étaient posé sur l'immense plat qui lui faisait face.

Désormais, je ne lui donnai qu'une quarantaine d'années maximum.

      -Tu es au courant que nous allons devoir rentrer ?

      -Je sais oui. Mais il est hors de question que je parte avant que mon père n'aille mieux.

      -On ne pourra pas rester indéfiniment Maïa...

      -Pourquoi ça ? Tout le monde m'ignore au château. Qu'est-ce que ça peut leur faire si je ne suis pas là ?

Alfred se racla la gorge, l'air sincèrement mal à l'aise.

      -Eh bien...

      -Oui ?

Il évitait mon regard désormais. Génial. Je n'avais plus qu'à faire un monologue avec le verre que le moustachu m'avait finalement commandé.

      -Ce n'est pas à moi de t'en parler. Je suis désolé Maïa...

J'hochai la tête, lui faisant comprendre que je comprenais. Ce qui en soit, était loin d'être le cas. Il faisait partit de l'immense demeure, et il était tout autant qualifié qu'un autre pour pouvoir m'en parlé. A moins qu'il y ait une sorte de hiérarchie bizarre et dans ce cas, tout l'honneur reviendrait à Keylan.

Même quand il n'était pas là, il trouvait le moyen de m'emmerder.

      -Où es-tu ?

Encore cette voix, rauque et mélodieuse. La même que celle dans la taverne, alors que je faisais une crise de panique. La même que celle qui m'avait parlé dans mon sommeil, après avoir été attaquée par Meïga.

      -Maïa !

Je frissonnai à l'entente de cette voix, complètement envoutée.

      -Je vais rentrer chez moi, pensai-je.

      -Non, surtout pas !

Cette phrase cassa tout l'adoration que j'avais pour cette voix, et je repris violemment pied dans la réalité, complètement interloquée.

Comment ça, je ne devais surtout pas rentrer chez moi ?

      -Dis-moi où tu te trouves s'il te plait.

      -Va te faire voir, pensai-je de nouveau. 


      -Désolé Alfred, on va devoir y aller. 


J'attrapai vivement le poignet d'Alfred qui glapit de mécontentement et l'entraînait à ma suite, sans oublier de payer le barman qui me regardait d'un œil acéré. Je fis le chemin inverse avec une rapidité étonnante et arrivai devant ma maison dont la porte d'entrée était défoncée.

Je lâchai aussitôt le poignet du moustachu et me figeai net sous l'intensité de deux billes émeraudes.

Je ne savais pas quoi faire. L'étreindre comme si ma vie en dépendait tellement il m'avait manqué ? Le gifler parce que cela faisait une semaine qu'il ne m'avait pas parlé ? Ou encore l'ignorer ?

Je ne savais pas quoi faire. Et chaque pas qu'il faisait dans ma direction me plongeait un peu plus dans l'incertitude

Il s'arrêta finalement à quelques centimètres de moi et scruta sans aucune gêne la moindre partie de mon corps, comme s'il voulait s'assurer que j'allais bien.

Je rougis devant son regard intrusif et bouillonnais devant son rictus suffisant, comme s'il savait exactement quel effet il avait sur mon traître de corps.

Ma décision venait d'être prise et je choisis sans l'ombre d'une hésitation la troisième option. Juste pour voir cette mine suffisante s'évanouir.

Il m'avait ignoré pendant une semaine ? Très bien. Je l'ignorerais pendant vingt jours. Soit le double de ce qu'il m'avait fait, mais avec les intérêts.

Il m'avait laissé seule avec ma tristesse ? Pas de problème. Je lui exposerai mon bonheur en pleine tête.

Mais pour le moment, j'étais consciente d'avoir besoin d'explication. Il paierait après.

      -Nous devons partir.

      -Pourquoi ma porte est-elle défoncée ? Évitai-je sciemment. Et où se trouve mon père ?

      -Maïa...

Il soupira fortement avant de se passer une main dans les cheveux.

      -On doit partir d'ici.

      -Je ne bougerai pas de là sans avoir de réponse.

      -Ne fais pas l'enfant !

Je le regardai d'un œil colérique et acéré pour toute réponse. Je voulais savoir.

      -Alors nous avons un problème.

Je le regardai sans comprendre avant qu'une exclamation indignée ne s'échappe de ma gorge.

En travers de son épaule, mes petits poings frappaient aussi forts qu'ils le pouvaient son dos musclé.

Imperturbable, Adkins continuait de marcher, sa main accrochée haut, très haut sur ma cuisse, ce qui me faisait redoubler d'ardeur.

Finalement épuisée, je regardai ma maison s'éloignée de plus en plus, progressivement cachée par les arbres de la forêt environnante.

Retour à la case départ.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top