Une petite plume au gré du vent - unemoldueaPoudlard [Mélodie Boréale]
Quelques points que j'aimerais rappeler :
- Cet avis n'est justement qu'un avis, avec toute la subjectivité que ça implique. N'hésite pas à le croiser avec ceux d'autres lecteurs.
- Si je ne suis pas claire, n'hésite pas à me demander de préciser un truc ! De même, si tu n'es pas d'accord, sens-toi libre de protester ; et s'il te reste des questions, ou s'il y a des points que tu aurais aimé que j'aborde, je serai ravie d'y répondre.
- Toutes remarques que j'ai faites ne veulent pas dire que j'ai enlevé des points sur le barème. Notamment, si une critique me semble trop subjective, je la formule au cas où elle puisse t'être utile, mais je n'enlève rien pour cela.
- Les suggestions que je fais sont de simples suggestions, je ne vais pas t'ordonner de modifier ton texte ou je ne sais pas quoi : je ne fais que souligner une possibilité.
Voilà voilà, passons à l'avis !
La couverture est dans l'ensemble très bien choisie ! Les images sélectionnées sont bien choisies : elles sont toutes reliées à l'histoire et en retracent les moments-clés (la plume peut-être un peu moins, mais elle fait référence au titre donc elle me semble adaptée). En voyant cette couverture, on peut se faire une idée de ce dont va parler l'histoire. En voyant cette couverture, on peut deviner que l'histoire parlera de faucons, de vol, on a une idée du dernier chapitre et, quelque part, je trouve que cette couverture véhicule quelque chose de l'ambiance de l'histoire – mais je ne saurais pas trop quoi dire à quoi ça tient, le graphisme n'est pas mon fort.
J'aurais néanmoins deux inconvénients à soulever. D'abord, la couverture est vraiment floue ; je sais que la résolution Wattpad n'est pas extraordinaire mais il suffit de zoomer un peu pour remarquer le flou, quand d'autres couvertures ont une résolution bien meilleure. Je ne sais pas si c'est un problème d'enregistrement ou si c'est un bug Wattpad (je suppose que ça ne vient pas des images, puisque le titre et le nom d'auteur souffrent du même problème), mais je te conseille d'y remédier : ce n'est pas dérangeant lorsqu'on regarde la couverture en miniature (sur la page de l'histoire ou sur ton profil), mais cela le devient un peu dès qu'on essaie de zoomer.
De plus, je pense que tu aurais pu travailler un peu plus le texte. Le nom d'auteur convient (même si, subjectivement, je te conseille d'enlever le @ qui est un peu inutile) : il est écrit dans une police lisible sans être trop simple, et sa couleur s'accorde bien avec celles de la couverture. En revanche, le titre me semble trop simple, pas assez mis en valeur. Vu sa longueur, je pense que tu aurais pu jouer sur la taille des mots : mettre les plus importants dans une police plus grande. Cela aurait le double avantage d'augmenter la visibilité de ces mots et de donner plus de vie à ton titre en le rendant moins régulier.
Les images, en revanche, son parfaitement travaillées ! Individuellement chacune est harmonieuse. Celle de l'œuf est peut-être un peu trop surexposée (il y a tellement de lumière qu'on ne voit pas ce sur quoi il repose) mais toutes sont très agréables à regarder. De plus, l'image globale est très réussie ! Les quatre images ont toutes les mêmes teintes et dégagent la même ambiance, je trouve qu'elles se complètent vraiment bien ! Cette couverture est, dans l'ensemble, très réussie.
Je dois avouer que je ne sais pas trop quoi penser du titre. D'un côté, je le trouve très harmonieux, j'aime bien la façon dont il sonne – l'impression de dérive et de liberté qu'il dégage – et le fait qu'il reprenne en partie le thème mais y ajoute une précision. C'est un titre qui donne vraiment envie de lire l'histoire.
De l'autre, est-ce qu'il correspond vraiment à l'histoire ? Certes, les oiseaux ont des plumes, quand ils volent leurs plumes se balancent au gré du vent : le titre correspond si on se limite aux faits. Mais si on regarde – de façon forcément plus approximative et personnelle, certes – l'idée que renvoient les mots, l'impression qui s'en dégage, je trouve que cela ne correspond plus trop. Dans « Une petite plume au gré du vent », le « petite plume » donne pour moi au titre une allure de vulnérabilité, ou au moins de fragilité, qui est renforcée par le « au gré du vent » qui induit une idée de dérive non maîtrisée. J'ai donc l'impression en lisant ce titre que l'histoire se concentrera sur quelqu'un qui – métaphoriquement ou non – se retrouvera ballotté par le vent comme le serait une plume. Or, si l'on excepte Hava au début de son chapitre, tes faucons maîtrisent le vent, ils ne sont pas soumis à ses courants...
Ce titre incite vraiment à lire l'histoire, mais je trouve que l'histoire qu'il incite à lire n'est pas celle que tu as écrite. (Ce qui est assez dommage, étant donné que celle que tu as écrite mérite vraiment qu'on incite à la lire !) Néanmoins, s'il y a quelque chose que je n'ai pas pris en compte, n'hésite pas à me le signaler ici !
Pour une raison différente, le résumé me laisse aussi assez partagée. J'aime beaucoup le premier paragraphe, les trois verbes sont très bien choisis pour représenter chaque partie sans pour autant dévoiler quoi que ce soit. C'est intrigant, ça donne envie de relire et, après lecture, le choix de ces mots était très pertinent. Reprendre les noms des trois faucons était aussi une bonne idée, tu fais le parallèle avec les trois verbes sans pour autant que ça soit trop explicite, on n'associe pas naturellement un verbe à un faucon.
En revanche, la phrase finale ne me semble pas très convaincante. Préciser que ce sont des faucons est bien vu, c'est la principale originalité de l'histoire, mais la suite ne nous apprend pas grand-chose sur l'histoire (il y a tant de façons d'être « différents mais pourtant liés » que ça ne nous dit presque rien, d'autant que c'est en général ce qu'on attend des personnages principaux d'une histoire) ; pour ce qui est du « pour toujours et à jamais » il me semble de plus discutable, je n'ai pas eu l'impression que Chidiya ait été très présente dans les chapitres des deux autres... De plus, c'est une phrase assez courante, au point d'être devenue un lieu commun. Je pense que l'utiliser dans ton résumé risque de te desservir car elle n'a plus vraiment de signification propre à force d'avoir été utilisée trop souvent : en la lisant, au lieu de se demander quel est son lien avec ton histoire, ce que cela signifie pour ces trois faucons, le lecteur risque de simplement la ranger dans la catégorie des « phrases de fin de résumé classiques » sans chercher à en savoir plus. Je pense que tu pourrais opter pour une phrase plus personnelle, qui évoque des questions plus spécifiques à ton histoire. Évoquer les liens entre eux est pertinent, mais je pense qu'il n'est pas forcément nécessaire de dire qu'ils sont différents : c'est ce à quoi on s'attend intuitivement et leurs différences ne constituent pas un enjeu de la nouvelle.
Après, ce résumé est tout de même intrigant ; la phrase de fin a, pour moi, fait un peu retomber l'effet mais j'avais tout de même bien envie de lire !
Concernant la forme, il y avait vraiment peu de fautes, ce qui rendait le texte très agréable à lire ! J'ai noté quelques petites erreurs au niveau de la ponctuation, qui restaient clairement marginales. Il faut utiliser les tirets demi-cadratins (–) pour les « parenthèses » (« ramena son regard sur ses parents qu'une fois – plus ou moins – maîtresse de ses émotions ») et les tirets cadratins (—) pour les dialogues au lieu des tirets du 6 (-) et mettre un espace après le tiret de dialogue (ce qui donnerait des dialogues de la forme : « — Pars, et ne reviens plus ! cracha sa mère »).
Pour chipoter un peu (énormément) : à la fin du flashback de Chidiya, les étoiles marquant la séparation ne sont pas centrées. De plus, le titre du troisième chapitre ne suit pas la même forme que les autres, et ce sans raison apparente ; je te conseille d'y remédier. (À ce sujet, l'orthographe du nom du mâle n'est pas la même dans le titre du chapitre et dans le texte, il y a un h qui se déplace. Du coup, comme je ne l'ai remarqué que vers la fin, les deux façons de l'écrire sont présentes dans ma critique, désolée.)
Sinon, je n'ai vraiment rien à redire sur la forme. Le texte est toujours très correct, il se lit avec beaucoup de fluidité et les paragraphes sont bien formés, assez espacés pour que le texte reste digeste, mais assez longs pour qu'il ne semble pas décousu. Ils sont de plus coupés aux endroits adéquats. Bref, c'est un texte vraiment propre et agréable à lire, bravo à toi !
Le thème « Au gré du vent » est parfaitement respecté. Je l'ai surtout senti dans le premier chapitre, où Hava apprenait réellement à voler et se laissait porter par le vent. Je trouve juste cela un peu dommage que cela soit peu repris par la suite (on a bien la présence du vent mais l'idée de « au gré du vent », moins, alors que tu aurais pu par moments l'introduire facilement ; par exemple à la fin du chapitre 2, Chidiya semble si épuisée moralement qu'il serait crédible qu'elle se repose sur le vent pour décider de sa destination, découvrant ainsi sa cachette idéale « au gré du vent »).
La contrainte est elle aussi respectée à la perfection bien que je pense qu'elle aurait pu être davantage exploitée. Certes l'histoire est racontée de trois points de vue mais au fond, cela pourrait être les aventures d'un seul faucon sans que l'histoire ne soit vraiment modifiée. Je pense qu'il aurait été intéressant que les trois points de vue apportent vraiment tous quelque chose à l'histoire. Je reviendrai là-dessus, mais insister davantage sur les différences entre Chidiya et Hava aurait pu être utile, ainsi que renforcer l'immersion dans le point de vue de Paalkhan au chapitre 3 en décrivant par exemple Hava de son point de vue.
L'histoire en elle-même... pour être honnête, je l'ai senti dès les premiers mots et cela s'est confirmé par la suite : j'ai adoré. Outre l'originalité de l'idée, tu écris vraiment bien, j'ai été plongée dans la scène dès les premières lignes et j'ai vraiment vécu cette leçon de vol – les désillusions puis l'exaltation de la fin – avec Hava. Néanmoins, j'ai relevé quelques éléments qui m'ont un peu dérangée au cours de ma lecture.
Dans l'ensemble, ton style d'écriture m'a semblé vraiment bon, tu immerges parfaitement le lecteur dans ton univers et tes phrases sont en général bien équilibrées. Mais certaines tournures m'ont semblé un peu trop complexes, au point d'en devenir tordues.
La phrase « Lorsque qu'elle se posa – s'écrasa serait plus juste, puisqu'elle ne maitrisait manifestement pas encore les délicatesses de l'atterrissage – sur la pierre fraîche, elle ne put s'empêcher de se retourner vers le ciel limpide, avec dans le cœur la fabuleuse impression d'avoir gagné un pari contre son soi pessimiste qui lui susurrait dans d'affreux cauchemars que jamais, elle ne volerait » me semble un bon exemple. Syntaxiquement elle est correcte, mais elle contient tant d'idées différentes qu'on en oublie le début une fois parvenu à la fin. On a dans l'ordre : elle se pose – elle maîtrise encore mal l'atterrissage – elle est sur la pierre fraîche – elle regarde le ciel – elle a l'impression d'avoir gagné un pari – elle croyait ne jamais pouvoir voler. Les idées s'entremêlent les unes aux autres ; les liens chronologiques et de cause à effet en sont brouillés. Je pense qu'il aurait été pertinent de réorganiser un peu les idées, quitte à séparer en plusieurs phrases. Par exemple (naturellement c'est juste une illustration, tu choisis ce que tu veux pour ton histoire) : « Hava, qui ne maîtrisait pas encore les délicatesses de l'atterrissage, s'écrasa plus qu'elle ne se posa sur la pierre fraîche. Elle ne put s'empêcher de se retourner vers le ciel limpide, avec dans le cœur une formidable impression. Elle se souvenait des affreux cauchemars dans lesquels son soi pessimiste lui susurrait que jamais elle ne volerait ; elle venait de gagner un pari contre cette partie d'elle-même ». Ce n'est qu'une proposition loin d'être parfaite, mais je pense que les idées y viennent dans un ordre plus compréhensible. Dans tous les cas, je te conseille de te pencher sur tes phrases un peu longues pour te demander si les idées y sont à peu près ordonnées de façon logique et, si ce n'est pas le cas, de suivre ce procédé de détailler les idées présentes puis de reformuler en essayant de rendre la phrase plus cohérente.
Tu as peut-être remarqué que, si j'ai essayé de rester fidèle à tes mots dans mon exemple, je n'ai pas repris le « manifestement ». En effet, ce mot n'a pas vraiment de sens ici : on est dans l'esprit d'Hava, on partage ses connaissances. On a donc autant de certitude qu'elle sur le fait qu'elle ne maîtrise pas l'atterrissage. Or le mot « manifestement » est utilisé pour dire, en gros « j'ai pas de certitude absolue mais eh, regarde, c'est évident ». Ce genre de mot, à vrai dire, est surtout utilisé comme « remplissage » à l'oral ; mais il n'apporte rien à un écrit. Je te conseille également de supprimer ce genre de mot qui a surtout pour effet d'alourdir les phrases.
Ces petits défauts sont cependant totalement normaux si cette nouvelle est ton premier écrit achevé. Ce qui est moins normal, c'est que tes descriptions soient déjà aussi bien exécutées... Plus sérieusement, j'ai beaucoup aimé ce point, tu sembles choisir à chaque fois le mot idéal, celui qui s'insère parfaitement dans la phrase. Ton texte était, à l'exception de ces quelques accrocs que j'ai mentionnés, harmonieux et immersif : les phrases sont vraiment plaisantes à lire et nous plongent dans la peau des faucons. J'ai particulièrement aimé les paragraphes où Hava jouait avec le vent – j'avais vraiment l'impression de sentir la brûlure de mes muscles, le souffle de l'air – et la naissance de l'oisillon d'Hava et Paalkhan – tu réussissais parfaitement à retranscrire l'embarras des parents face à cet œuf qui leur semble si facile à briser. En résumé, c'est vraiment réussi, bravo à toi !
Si les descriptions étaient immersives, j'ai trouvé en revanche que le texte, lui, aurait parfois pu être un peu plus accrocheur. J'étais emportée par tes mots, je vivais la scène, mais le sort des personnages ne me concernait pas tant que ça, comme si j'étais détachée de leurs émotions. Le « problème » (selon moi, à toi de décider si cela te semble pertinent ou non) ne vient pas des mots en eux-mêmes, ni vraiment des situations décrites, mais plutôt des enjeux que tu places sur l'histoire. Je pense que tu aurais pu les communiquer un peu mieux au lecteur.
Cela m'a vraiment frappée à la fin du chapitre de Chidiya. Elle se réjouit d'être, malgré la précarité de sa situation, indépendante et libre, et le chapitre se termine là-dessus, comme si c'était le point important de la nouvelle. Or cette envie de liberté ne transparaissait pas auparavant dans les pensées de Chidiya. On y sentait surtout sa détresse d'être séparée de sa famille, sa peur de l'inconnu peut-être... Si bien que la fin du chapitre semblait « tomber à côté » : elle répondait à une question qu'on ne s'était pas posée.
C'est pourquoi, d'une manière générale, je pense qu'il faudrait que tu définisses les enjeux du chapitre – quels sont les principaux problèmes du personnage ? que devra-t-il affronter ? – et que tu t'en serves pour guider l'écriture. Pour Chidiya, l'enjeu que l'on sent tout au long du chapitre est la séparation avec sa famille, mais à la fin on bascule sur sa liberté nouvelle. Je pense que tu pourrais donc concilier ces deux enjeux, par exemple en montrant Chidiya au cours du chapitre tiraillée entre la douleur de l'arrachement à sa famille et un besoin de liberté et/ou d'indépendance. Besoin qui n'a pas besoin d'être conscient, d'ailleurs : tu dis qu'elle est « délivrée d'un poids dont elle n'avait même pas conscience », et cela me semble assez logique que, toute à son désespoir de quitter sa famille, elle n'ait pas pris le temps de s'interroger sur ses besoins. Mais je pense que, même si elle-même n'en est pas consciente, le lecteur pourrait, lui, le sentir. Montrer les besoins d'un personnage lorsqu'il ne les connaît pas n'est pas évident, bien sûr, mais il y a plusieurs moyens de s'en sortir. Tu peux la montrer rejetant des pensées à peine formulées, se demandant l'air de rien ce que ce serait de vivre sans attache ; elle peut même, en disant adieu à Ravi, éprouver un peu de jalousie (sans forcément qu'elle-même n'identifie ainsi cette émotion).
Préciser les enjeux me semblerait assez utile, car c'est véritablement cela qui fait qu'on s'attache à une intrigue, qu'on s'inquiète de son aboutissement (à limiter à l'échelle de temps d'une nouvelle, bien sûr, mais cela fonctionne aussi !). Sans enjeux, on risque de ne pas se laisser emporter par l'histoire ou de se demander, après l'avoir finie, « pourquoi ? Qu'est-ce qui a poussé l'auteur à écrire cette histoire, quelle est sa raison d'être ? » C'est un peu, je dois dire, l'impression qui m'a parfois traversée. Pas que je n'aie pas apprécié ma lecture – au contraire, comme je te le disais c'était vraiment prenant et plaisant à lire ! – mais parce qu'une fois terminée, je n'arrivais pas à saisir ce qu'il fallait en retenir. Le problème n'était pas que les chapitres étaient vides, ils ne le sont pas ; mais parmi tous les éléments que tu nous y présentais, on ne savait pas auquel se raccrocher.
J'ai détaillé mon exemple dans le cas de Chidiya mais j'ai aussi eu cette impression pour Hava, quoique moins prégnante. On la voyait tenter de voler, on suivait son apprentissage, mais on ne savait pas ce qu'il y avait derrière, ce qu'il se passait dans sa tête. Je pense que tu aurais pu insérer plus tôt le fait qu'elle croyait ne jamais pouvoir voler. Ainsi, le chapitre aurait pu tourner autour de cette idée : surmonterait-elle ce manque de confiance, ou cela l'empêcherait-il de réussir ? Et la phrase de fin qui étale sa réussite n'en serait que plus percutante.
Pour le dernier chapitre, j'aurais un peu la même remarque – mais c'était moins dérangeant quelque part, car il y avait la curiosité de savoir ce qu'Hava était devenue. On assiste à une scène chargée pour les personnages, mais on ne sent cette charge que trop tard ; je pense qu'il faudrait intégrer avant l'inquiétude de Phaalkan pour ses œufs, sa peur de leur fragilité. En tant que lecteur on sait que des parents voient leurs enfants naître tous les jours, on a probablement déjà lu une scène de naissance ; la scène n'a pas, en elle-même, la nouveauté qu'elle a pour Hava et Phaalkan. Il faudrait donc que tu nous fasses sentir cette nouveauté, que tu nous montres à quel point ce moment est particulier. Et c'est quelque chose que tu faisais très bien dans les derniers paragraphes, au moment de la naissance ; sincèrement cela m'a remuée. Mais je pense que cette impression aurait pu être présente avant, même de façon plus diffuse.
Bref, je te conseille vraiment de t'interroger sur les enjeux de tes scènes : pourquoi nous montrer spécifiquement ce moment ?
Une remarque un peu plus spécifique : tu as choisi d'« humaniser » un peu tes faucons en leur faisant ressentir des émotions proches de celles des humains. C'est un choix plutôt judicieux : l'histoire se repose en grande partie sur leurs émotions, ce qui aurait été trop difficile si tu t'étais bornée à ce que l'on sait de leurs capacités émotionnelles ou que tu avais totalement inventé un autre système d'émotions. Avec ce choix, on comprend très bien ce qu'il se passe dans la tête des trois oiseaux et on peut s'identifier à eux, sans pour autant qu'ils ne soient trop humains. Ils restent ce qu'ils sont, on « ressent » leurs sensations physiques comme si on était dans le corps d'un oiseau et non d'un humain ; leur comportement est lui aussi celui de leur espèce, comme tu le montres avec les parents de Chidiya qui n'adoptent pas un comportement plus « humain » : leur rejet n'est pas dicté par des émotions mais par la nécessité de l'espèce, je suppose.
Je pense que tu aurais pu davantage utiliser cette humanisation. J'ai parfois eu l'impression que tu te retenais de décrire les émotions des personnages ; par moments, j'aurais aimé savoir ce qu'il se passait en eux, plus profondément, ce qui motivait certaines actions, quel impact avaient sur eux certains évènements... Je pense vraiment qu'à ce stade d'humanisation le fait de décrire plus ou moins leurs émotions ne changera pas grand-chose, en tout cas que cela n'aurait pas sonné faux. Je te conseille donc de t'autoriser à décrire davantage (après il est très probable que j'aie mal interprété cette réserve sur les descriptions d'émotions qui peut avoir beaucoup de raisons...).
Dans un texte avec une contrainte comme celui du thème 1, les personnages auraient, je pense, mérité plus de développement. On s'attend en effet à ce que le choix des points de vue soit justifié par autre chose que « c'est la contrainte qui le veut ». Je pense que tu aurais pu montrer la différence de caractères entre Hava et Chidiya, peut-être une différence de réaction face à la liberté qu'elles acquièrent toutes les deux dans ce chapitres, ou juste les montrer luttant contre des parties différentes d'elle-même ? En tout cas, il aurait été intéressant qu'on sente vraiment qu'elles ne sont pas la même personne, qu'elles ne pourraient pas l'être. Pour cela il aurait fallu, je pense, creuser davantage leur caractère. Je ne parle pas de te lancer dans de longs paragraphes introspectifs qui n'auraient sans doute pas leur place ici, mais d'esquisser un trait ou deux entre deux actions, de laisser deviner leur personnalité à travers leurs pensées et émotions.
Petite remarque en passant : actuellement, le flashback dans le chapitre de Chidiya me semble assez inutile. C'est un passage émouvant, certes, mais je trouve qu'il coupe le chapitre dans son élan alors qu'il aurait pu être résumé en quelques lignes. Je pense que ce passage serait légitimé s'il laissait entrevoir un peu plus de leur relation à toutes les trois. Chidiya pourrait par exemple s'imaginer disant à son tour au revoir à Hava, ce qui nous permettrait de les voir interagir ensemble, même de façon hypothétique. Tu pourrais ainsi plus facilement nous montrer leurs différences et préciser leur relation.
Enfin, pour Phaalkan, je pense qu'il aurait fallu insister sur le fait qu'on est de son point de vue, pas de celui d'Hava. Tu pourrais par exemple décrire Hava à travers ses yeux, ce qui nous permettrait d'en savoir plus sur elle et sur leur relation ; raconter leur rencontre de son point de vue pourrait être intéressant aussi, cela nous montrerait Hava à différents stades de sa vie. De plus, étant donné l'enjeu commun entre Hava et Chidiya (qui acquièrent toutes les deux, d'une certaine manière, une indépendance plus ou moins importante dans leur chapitre), il serait peut-être intéressant de raconter un épisode marquant de son enfance à lui aussi. Plus généralement, j'aurais aimé le connaître un peu mieux, avoir l'impression qu'il existait avant Hava, qu'il était un être à part entière.
Au sujet de leur œuf, par exemple, peut-être pourraient-ils en discuter davantage ? Nous expliquer les raisons du choix du nom Teela ? Quitte à donner un nom à tes oiseaux, ces noms pourraient avoir l'importance qu'ils ont pour nous autres humains ; on ne les choisit pas au hasard... Ici, la phrase de fin est émouvante et très forte, mais la présence du nom à la fin n'y fait pas grand-chose (l'ajouter est utile pour équilibrer la phrase qui est ainsi mieux rythmée, mais il n'est pas utile en lui-même). Si on avait su en revanche ce que ce nom signifiait pour les deux parents, le moment aurait pu être bien plus intense, la fin bien plus significative. Il pourrait par exemple faire référence à un épisode de leur histoire commune, correspondre à quelque chose qu'ils ont surmonté tous les deux (alors qu'ils se connaissaient ou non), faire écho d'une manière ou d'une autre aux thèmes de la nouvelle... Bref, je pense que montrer Hava et Paalkhan choisissant ensemble les noms de leurs oisillons aurait été intéressant pour l'histoire.
(Au passage, bravo justement pour ces noms qui sont tous très beaux !)
J'espère qu'avec tout cela je ne t'ai pas donné l'impression que j'ai détesté l'histoire... J'ai essayé de te proposer des pistes d'amélioration pertinentes, à toi de voir si elles te semblent appropriées, mais sincèrement ta nouvelle est vraiment touchante et bien écrite ! J'ai adoré l'originalité de l'idée, c'était bien pensé et bien exécuté ! Dans le chapitre 1, tu décrivais vraiment bien tout ce qui entourait Hava ; j'avais vraiment l'impression de voir un paysage naturel, la forêt montagneuse frappée par le vent, l'image formée dans ma tête était grandiose et paisible, bref j'ai beaucoup aimé ! Dans le chapitre 2 c'est ta façon de décrire un phénomène commun – les oiseaux quittant le nid – en le rendant touchant et déchirant qui m'a séduite. Et dans le chapitre 3, je l'ai déjà dit mais ça ne fait pas de mal de le répéter, le saisissement des parents face à la naissance de leur enfant, sa fragilité, leur angoisse émerveillée... tout cela était vraiment très bien montré, je me sentais à leur place, comme si l'œuf était juste face à moi.
Bref, ta nouvelle est originale et vraiment touchante ; les enjeux et les émotions des personnages ont parfois manqué de clarté à mes yeux mais cela reste un texte très bien écrit, qui nous plonge dans la peau des personnages et nous immerge dans leur environnement.
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