Interlude
"L'éternité sera le symbole de notre passion vermeille"
Forêt noire
Mercredi 11 novembre 2037
Je me réveillais juste avant l'aube avec l'espoir de voir le ciel et la vie faire éclater ce monde. Tendrement, je déposais un chaste baiser sur l'épaule de mon époux.
- Epoux, pensais-je en retenant mes larmes.
Je n'avais que 26 ans et j'étais désormais une femme mariée depuis un an, qui cachait encore pour quelques semaines, le plus merveilleux des secrets. Cette idée me gonflait soudain de joie et je me mordais la lèvre de bonheur. Jamais, je n'avais été aussi heureuse de toute ma vie.
Zach soupirait longuement et je fondis comme la neige au soleil. Bon sang, cet homme était vraiment mon mari, alors qu'il n'avait que 22 ans. Un sourire malicieux se dessinait sur mes lèvres et mon regard se mit à pétiller, lorsque je me rappelais notre première rencontre.
4 ans plus tôt, alors que j'étais en 4eme année d'université au MIT, ma meilleure amie Sara, m'avait présentée aux premières années fraîchement débarqué de France et je l'avais vu. Lui, beau, grand, son regard miel et ses cheveux bruns en bataille.
Le monde s'était effacé autour de moi, comme si brusquement, il n'y avait plus eu que lui. Mon âme avait su et j'étais tombée instantanément amoureuse. Mon cœur avait martelé durement mon être, alors que je croyais ne jamais ressentir un jour cela ou du moins pas avant de nombreuses années. J'avais tremblé et les larmes m'étaient monté aux yeux, car il était là. Enfin.
Et alors, que je devais lui faire la bise pour me présenter, mes lèvres s'étaient brusquement posées sur les siennes. J'avais littéralement quitté mon corps. Moi, la fille timide et bizarre, qui embrassait soudain un parfait inconnu. Sara s'était figée sur place, complètement sous le choc, alors que Zach avait plutôt mal réagi, car moi-même je ne savais pas comment cela était arrivé.
Après cette première rencontre, il m'avait évité pendant plusieurs semaines avant que l'on se retrouvent à une fête étudiante. Là, il était enfin venu me demander pourquoi je l'avais embrassé et ma réponse l'avait figé sur place.
- Parce qu'il ne saurait en être autrement, avais-je simplement répondu en soupirant.
Nous étions devenus amis et j'avais pris mon mal en patience pendant près d'un an, avant qu'il ne me déclare sa flamme, tout cela à cause de mon frère Henri. Un soir, ce dernier était venu me chercher avec sa moto, afin de me ramener chez nos parents et quelques jours plus tard, Zach m'avait demandé si je sortais avec ce mec tatoué, qui n'avait pas l'air net, selon lui. J'avais éclaté de rire en lui répondant qu'il avait entièrement raison, Henri était tout sauf net et qu'en plus, il était mon frère.
Le voir soupirer de soulagement, m'avais enflammé et me voyant rougir, il avait posé sa main sur ma joue avant de me dire, de but en blanc, qu'il m'aimait. Et quelques semaines plus tard, il avait fini par m'avouer lors de notre première fois, qu'il était tombé amoureux de moi, dès qu'il m'avait vu arriver ce jour-là, avec mon amie Sara. Et depuis, nous ne nous étions plus quittés.
Je l'avais présenté à maman, qui était déjà au courant à cause de ce cafteur d'Henri, puis, je l'avais présenté à papa et le reste de la fratrie et autant vous dire, qu'à l'annonce de son nom de famille, les choses avaient failli tourner au vinaigre et sans l'intervention de maman, je ne saurais dire comment tout cela aurait fini.
- Maman, pensais-je avec émotion.
Elle me manquait et il me tardait de la retrouver, lors de notre retour de voyage. Papa et toute la fratrie me manquait, mais l'heure était venue et avant de continuer ma vie et de devenir mère, je devais accomplir une dernière chose, histoire d'en finir une bonne fois pour toute, avec tout ces secrets.
Je m'étais douchée, savourant la douceur de l'eau chaude, qui glissait sur mon corps et sur mon petit ventre arrondit. Je mourrais d'envie de crier haut et fort que j'étais enceinte, mais je devais avouer qu'une infime partie de moi n'était pas tranquille à l'idée d'annoncer cette nouvelle à mon père. Lui qui avait toujours protéger notre famille et particulier maman et moi.
Je soupirais longuement, en me sentant un peu ridicule de douter ainsi de lui, alors qu'il avait eu les larmes aux yeux, lorsqu'il m'avait amené à l'autel. À vrai dire, nous avions tous pleurés ce jour-là, même mes trois frères, qui avaient juré de découper Zach en morceaux, s'il osait me briser le cœur.
Avais-je vraiment le droit d'être autant aimée?
Je serais heureuse tout au long de cette vie. Je le savais, d'ailleurs je l'avais toujours su. Comme si quelque chose en moi n'avais jamais eu le moindre doute. Non seulement je serais heureuse, mais je savais aussi que moi et Zach serions ensemble jusqu'à notre mort, lorsque nous serions très vieux.
Il n'était pas toujours simple de vivre avec de telles certitudes et pourtant, je savais des choses qu'aucun autre être vivant ne savait. Et c'était sans compter cette petite fille qui grandissait doucement au creux de mon être.
- J'espère que maman sera d'accord qu'on t'appelle Juliette, murmurais-je en m'habillant.
Zach n'avait pas bougé, car il était vraiment fatigué. Il avait enchainé sa thèse en économie, notre mariage et son année de stage dans une grande entreprise canadienne. Je souriais une fois de plus, car cet homme était vraiment mon mari.
Je levais ma main et regardais ma bague de fiançailles, qui trônait fièrement avec mon alliance. Les larmes me montèrent aux yeux et je me redis compte qu'être enceinte mettait mes émotions en pagailles. Je soupirais longuement et décidais enfin de me mettre en route.
La Forêt Noire était l'un des endroits les plus magnifiques sur cette terre. J'y étais venue enfant, avec mes parents et mon oncle, qui avaient mené une vielle enquete. Mais je n'avais pas vraiment envie d'y repenser pour le moment, car l'être qu'ils traquaient était bien trop perfide pour être nommé, d'ailleurs, il avait mystérieusement disparu.
Je serpentais sur la route qui menait au départ du télécabine que je devais prendre, pour me rendre à l'endroit que je voyais en rêve depuis ma rencontre avec Zach.
Ce rêve étrange, me faisait prendre une télécabine jaune, puis je devais marcher sur un chemin, avant de prendre un sentier, qui me mènerait à un banc, qui se trouverait sur l'un des versants. Là, je devais descendre, en suivant une espèce de crête et une fois, au pied de la montagne, je voyais un rocher recouvert de lierre, avec un grand chêne, soutenu par un vieux tronc recouvert de mousse. Je devais passer devant, remonter légèrement et là, je trouverais comme une espèce de grotte.
Je ne savais pas ce que j'allais y trouver, mais parfois, lorsque mon rêve était plus intense, j'avais l'impression d'entendre des voix. Des voix de femmes, qui me suppliaient de venir les chercher et depuis que j'étais tombée enceinte, c'était devenu presque des cauchemars. Je m'étais alors mit à chercher ce que je voyais dans ce rêve et le seul lieu qui correspondait était le versant sud de la montagne Rapsfelen, ici en Forêt Noire, à 30 kilomètres de Lörrach.
J'avais alors profité de notre voyage de noces, pour planifier une balade dans la région, histoire d'en finir avec tout cela.
Je me garais sur le parking et je fus aussi soulagée qu'apeurée, de voir la fameuse télécabine, qui était d'un jaune vif. Je pris mon billet et fit de mon mieux pour profiter de la vue imprenable qui s'offrait à moi. Décidément, cette partie de l'Allemagne était vraiment magnifique. La montée fut plutôt rapide et je commençais à marcher sans attendre.
Après quelques minutes de montée, mon regard fut attiré par ce qui semblait être un lac, niché au creux d'une colline, sans comprendre mon cœur se mit à battre la chamade et je crus sentir du sang, de la neige et le vent qui soufflait avec rage. Je secouais la tête et soupirais longuement avant de continuer.
Le chemin était bien là, ainsi que le sentier, même le banc n'avait pas bougé. J'avançais avec prudence et essayais de voir en contre bas, mais je savais déjà que je n'avais pas d'autre choix que de descendre, ce que je décidais de faire.
Heureusement, que j'avais acheté de bonne chaussure de montagne, car sinon, j'aurais pu glisser à de nombreuses reprises. Plusieurs fois, je m'arrêtais afin de reprendre mon souffle et posais machinalement ma main sur mon ventre, avec un petit sourire.
Je savais que maman se doutait de quelques choses. Lors de notre dernier diner, juste avant notre départ, elle avait préparé des sushis pour mes frères et mon père, ainsi que pour Zach, mais elle nous avait préparer une salade césar, prétextant que c'était comme toujours, notre plat favori. Ce qui était vrai, mais elle m'avait alors fait un petit clin d'œil, avec ce sourire, dont elle seule connaissait la signification. Papa aussi se doutait de quelque chose, mais il se gardait bien de faire la moindre remarque.
Zach lui savait. D'ailleurs et aussi étrange que cela puisse paraitre, il l'avait même su avant moi. Deux mois plus tôt, nous n'étions pas d'accord sur quelque chose, je m'étais un peu emportée et au contraire de d'habitude, Zach avait cédé, ce qui sur le moment, m'avais davantage énervée, alors j'avais fini par lui demander pourquoi il n'argumentait pas comme d'habitude.
Il avait eu alors un sourire, il s'était avancé vers moi, me surprit avec un tendre baiser, avant de me dire:
- Mon tendre amour... pendant les 9 prochains mois, il ne sera plus questions que j'argumente quoi que ce soit, avait-il embrassé mes lèvres avec ardeur, alors que je ne comprenais même pas ce qu'il était en train de me dire.
Il avait posé sa main tremblante sur mon ventre, avant de me serrer dans ses bras et de me dire à quel point il m'aimait et à quel point désormais, il nous aimait. Et encore maintenant, je n'étais toujours pas sûr de mériter l'amour de cet homme.
Je mis plusieurs minutes à trouver le rocher recouvert de lierre, car le grand chêne avait semblait-il rendu l'âme. Je montais sur environ 50 mètres et vis une fissure dans la roche, qui semblait posée par couche et retenue par de la mousse d'un orange vif.
Je retenais ma respiration et me mis brusquement à trembler, pourtant, je savais qu'il le fallait. Il fallait que j'entre et que je découvre ce qu'il avait à l'intérieur. Je sortis la lampe torche que j'avais acheté avec mes chaussures et entrais.
Le sol était mou. La roche humide et sombre. J'avançais lentement, le cœur battant à tout rompre. Je faisais aller la lumière d'un côté de la paroi, puis de l'autre, alors que les ténèbres semblaient m'engloutir. Puis, je me figeais sur place, lorsque ma chaussure heurtait quelque chose qui roula plus loin. Le bruit se répercutait comme un cliquetis inquiétant.
L'odeur fut alors insoutenable et lorsque je baissais ma lampe pour regarder ce que je venais de bousculer, je crus que mon cœur allait cesser de battre. Je plaquais ma main contre ma bouche pour retenir le cri qui se répercutait déjà, je me retournais brusquement et la lumière éclairait alors un autre crane, qui me regardait. Les larmes coulèrent sur mes joues, alors que je cherchais de l'oxygène et à réaliser pleinement ce que je venais de découvrir.
En me débattant, je sortis de là, avant de vomir mon petit déjeuner. Des sanglots hystériques sortirent de ma bouche, lorsque je sentis mon téléphone vibrer. Je tremblais tellement, que je mis plusieurs secondes à la sortir de ma poche et à répondre, dans un état second.
- Maman, répondis-je sans entendre sa voix. Maman... je... je l'ai trouvé.
Je crus qu'un long silence venait de s'installer, mais je finissais par comprendre que mon cœur battait tellement fort, que je n'entendais rien d'autre.
- Maman, sanglotais-je. J'ai... j'ai trouvé... l'œuvre du Diable!
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