Charlotte posa la tête sur l'épaule de Gaspard. Le jeune homme rapprocha ses mains liées à la plomberie de celles de Charlotte et tenta de lui tenir la main du bout des doigts.

- Tout va bien se passer, chuchota-t-il.

- Je ne t'ai pas tout dit, avoua Charlotte. J'ai bien une information au sujet de ma mère.

Le jeune homme se tut, afin de l'inviter à parler.

- Il y avait un portrait d'elle dans le salon. Quand j'étais petite, je l'ai fait tomber un jour, et le cadre s'est brisé. J'ai voulu essayé de le réparer, mais en récupérant la photo, j'ai trouvé une petite enveloppe jaunie. Il y avait marqué : "code génétique". J'ai reconnu l'écriture de ma mère, j'en suis certaine.

- Tu as ouvert l'enveloppe ?

- Oui, et il y avait des lettres et des chiffre. Plus tard, j'ai compris qu'il s'agissait d'une séquence d'ADN, du type ACGT, mais je ne me souviens plus des chiffres qu'il y avait.

Gaspard resta songeur un moment, avant de répondre :

- Ton père ne travaillait pas encore dans le laboratoire, à l'époque ?

- Non, je te l'ai déjà dit. Du coup je ne sais pas s'il y a un lien. Mais quand mon père était arrivé et a vu le cadre cassé, il a pris peur, m'a arraché l'enveloppe des mains, et a emporté la photo ailleurs. Je n'ai jamais revu ce cadre, ni cette photo, ni l'enveloppe depuis.

*

Octavia obligea Marvel à traverser de multiples couloirs, puis le dirigea vers une porte qui portait l'inscritption "bloc opératoire d'urgence"

- Où m'emmenez-vous ? s'inquiéta-t-il.

Elle ne répondit pas, ouvrit la porte et, au fond d'un couloir aux murs vert hôpital, l'emmena dans un vestiaire.

- Changez-vous, ordonna-t-elle en lui lançant un tissu enveloppé dans un plastique.

Marvel reconnu la tenue qu'il portait au bloc opératoire. Il avait l'habitude d'opérer de nombreux animaux ou farfadets en urgence dans cet endroit, et connaissait le règlement sanitaire. Il enfila la blouse et le pantalon bleu turquoise par dessus ses vêtements, et sortit par une seconde porte, qui s'ouvrit automatiquement, sans qu'il eut besoin de toucher la poignée.

Il pénétra ainsi dans un petit hall avec un grand robinet, qui s'allumait automatiquement, dès qu'Harold passa ses mains dessous. Il se lava et se désinfecta les mains très soigneusement, comme l'exigeait le protocole qu'il connaissait très bien. Enfin, Octavia, vêtu de la même tenue stérile que lui, l'invita à enfiler des gants de latex et une coiffe stérile.

Après toutes ses précautions, durant lesquelles Marvel ne cessait de se demandait ce qui l'attendait dans le bloc, Octavia l'invita à entra dans la salle d'opération.

Il s'arrêta net. Sur la table opératoire, la jeune fille inconnue, enlevée à la place de sa fille, pleurait. Il l'observa attentivement et se sentit effroyablement coupable.

- Que voulez-vous ? demanda-t-il à Irina et Octavia.

- Dévoilez-moi votre grand projet secret.

Cette fois-ci, Marvel n'hésita pas. La jeune fille courait un trop grand danger.

- Les farfadets, avoua-t-il. J'ai créé une immense population de farfadets, cachés dans le parc. Ils peuvent parler, penser, marcher, courir, grimper aux arbres, et former une société très équilibrée sans le moindre conflit. Ils doivent vivre en paix dans la forêt, et leur existence doit rester secrète.

- Des farfadets ? répéta Otavia, incrédule. C'est quoi ça ?

L'homme soupira :

- Ce sont de petites créaturs folkloriques, vivant dans les les forêts et très malignes.

- Merci Harold, dit Irina. J'avais donc raison : vos recherches et vos expériences sont immorales.

- J'ai des autorisations spéciales, se défendit-il. Mon laboratoire est tout à fait légal.

- Comment avez-vous inventé ces créatures ?

Marvel hésita :

- C'est... très secret.

Aussitôt, Irina enclencha la scie circulaire, qui se mit à siffler dans toute la salle. La pauvre Emma, ligoté à sa table d'opération, poussa un cri d'effroi et pleura de plus belle.

- Arrêtez-ca ! hurla Marvel.

Irina éteignit son appareil et sourit :

- Nous avons un accord, il me semble. Montrez-moi tous vos secrets, et Emma sortira indemne. Dans le cas contraire...

- Et bien ?

- Dans votre bureau, j'ai surpris un brouillon. Votre prochain grand projet concernait autre chose, de plus grand... Emma pourrait très bien avoir l'honneur d'être le premier spécimen créé.

Harold ne répondit pas, et Emma, tentant de calmer ses sanglots, demanda :

- Quoi ?

- Tu ne connais pas le prochain secret ? sussura la femme en s'approchant de la jeune fille. Marvel, dites-lui ce que vous comptiez inventer, dans un futur proche ou lointain.

Il ne répondit pas immédiatement, comme s'il n'osait pas.

- Dites-le, ordonna Irina d'un ton sec.

Alors il prit une inspiration, et avoua :

- Une sirène.