- Comment ça, absolument pas ? s'inquiéta Emma.

- Je suis passée te chercher pour t'emmener au laboratoire de tes parents.

La jeune fille fronça les sourcils.

- Mes parents travaillent à l'hôpital !

- Cesse de mentir, je connais toute la vérité. Je sais que tes parents sont partis à New York. Alors nous allons en profiter pour utiliser leur labo...

- Je ne comprends pas madame. De quel laboratoire vous parlez ?

- Arrête de faire l'innocente.

- Je vous assure que non ! Vous devez faire erreur ! Laissez-moi sortir, j'ai cours à 9h !

- Non. Tu restes ici.

Le cœur de la jeune fille s'accélèra brutalement. Avait-elle bien compris ce qu'elle avait entendu ? Paniquée, elle n'osa pas répliquer et, avant même que l'idée ne lui vienne à l'esprit, la femme reprit :

- Et n'essaie pas d'appeler qui que ce soit.

La jeune fille commençait à sentir son ventre se nouer. Que lui arrivait-il ? Il devait forcément y avoir une erreur. Elle tenta de réfléchir à une solution mais elle ne put émettre aucune idée acceptable.

C'était une blague. Forcément. C'était son anniversaire, il fallait s'attendre à tout ! Elle allait rentrer au lycée et allait rejoindre ses amis qui lui souhaiteraient ses dix-huit ans en riant de lui avoir fait une mauvaise plaisanterie.

La peur lui donnait des frissons. Elle ferma les boutons de son manteau et se recroquevilla sur son siège, le regard fixé vers l'extérieur, priant pour qu'il ne s'agisse que d'une mauvaise blague. A travers la vitre ruisselante, elle ne reconnaissait plus aucune rue.

Alors, elle sentit une larme perler. Puis une autre. Elle se retint de renifler, trop effrayée de montrer son désespoir. Elle n'osait même pas fouiller dans son sac pour chercher un mouchoir, si bien qu'elle baissa la tête contre la vitre, et laissa les larmes couler.

*

Le bus filait toujours à toute allure. Les larmes coulaient toujours et elle s'efforçaient de les essuyer avec sa manche.

Elle se souvenait très bien de l'ordre de la femme "n'essaie pas d'appeler qui que ce soit".

Elle jeta juste un coup d'œil à sa montre. Les cours de la matinée avait déjà commencé depuis quarante minutes. Avait-on déjà signalé sa disparition ? Le lycée avait du appeler ses parents, mais hélas, ils étaient en plein travail à l'hôpital.

On allait forcément venir la chercher. C'était évident. Et puis, un bus qui ne suivait pas son trajet habituel serait nécessairement repéré. On tracerait sa position avec un GPS et tout serait très vite réglé...

Oui, cette pensée la rassurait. Elle prit une inspiration et souffla lentement, tachant de calmer ses sanglots.

Elle leva la tête. En face, l'homme en imperméable vert ne la quittait pas du regard. Impossible de répondre d'envoyer le moindre message. 

Le bus semblait avoir quitté la ville. Les habitations laissaient maintenant la place à des séries de terrains abandonnés.

- Alors, ça y et tu as arrêté de pleurnicher ? lança-t-elle depuis sa cabine.

Emma leva la tête vers la femme sans répondre.

- Réponds-moi quand je te parle !

La jeune fille trembla à nouveau de tout son corps.

- Oui.

- Parfait. Tu es une bonne fille, Charlotte.