6- "La proposition"

             ~ Walter Dick Memorial Park, Brookville, USA, 3 Novembre 1972 ~ 

    Je marche lorsque j'entends du bruit sur ma droite. Ce n'était pas un petit bruit comme celui que fait un animal, mais un bruit sourd comme lorsqu'on lâche quelque chose par terre.Je m'arrête d'un coup et tourne vivement ma tête vers l'origine de ce bruit mais un arbre me bloque une partie de l'horizon. Je ne vois rien, mais je suis convaincue d'avoir entendu du bruit. Je m'assois au pied cet arbre pour être cachée. Je décide de faire le tour de cet arbre lentement pour ne pas me faire repérer mais pour quand même pouvoir identifier la cause du bruit. Au début je ne vois rien. Puis j'aperçois une personne. J'ai peur qu'il s'agisse encore d'un de leurs soldats. Mais en m'avançant un peu plus je vois un homme seul et assez âgé, au moins la soixantaine d'après moi. Il jette dans une charrette des bouts de bois qu'il a surement lui-même préalablement coupés. Je décide de le regarder faire encore quelques secondes, puis je reprends ma route. Je n'ai le temps de ne faire que quelques pas lorsque quelqu'un m'interpelle :

"- Bonjour ! Qu'est-ce qui vous amène par ici ? C'est plutôt rare de voir des gens dans cette forêt, me dit l'inconnu."

    En me retournant je reconnais celui qui chargeait ses bûches il y a quelques secondes. Il pose sa charrette qu'il portait à bout de bras, et me fixe, surement parce qu'il attend que je lui réponde. Mais qu'est-ce que je peux lui dire ? Que j'ai échappé aux griffes de mes tortionnaires en les tuant tous et que maintenant je fuis le plus loin et le plus vite possible vers une destination qui m'est encore inconnue ? Non, ça n'est pas le genre de choses qu'il souhaite entendre. Il veut surement que je lui raconte des banalités. Par exemple, que j'ai décidé de prendre un bain d'air. Comme ça nous pourrons ensuite parler de la beauté de la nature qui nous entoure, de son importance et de ses ressources. Mais ce n'est pas ce que je décide de dire.

"- Je fuis, répondis-je.

- Qu'est-ce que vous fuyez, me demande-t-il inquiet.

- Une menace omniprésente, dis-je un peu froide."

    Mes paroles ont l'air de le troubler, et je le vois réfléchir en se frottant le menton. Je pourrais lire ses pensées, mais je préfère garder mon énergie. De toute façon, même s'il a plutôt l'air de quelqu'un de gentil, ce qu'il peut penser de moi m'est bien égal. Sa voix me sort de mes pensées.

"- Est-ce que vous avez un endroit pour vous cacher et vous abriter ? me demande-t-il.

- Non. Je vais simplement aussi loin que je le peux, m'exclamai-je.

- Vous êtes dans un sale état, me dit-il en levant le bras pour montrer mes vêtements pleins de sang, est-ce que vous êtes blessée ? s'enquit-il.

- En effet, ces derniers jours n'ont pas été de toute joie, dis-je en tirant mon sweat-shirt qui était même troué à certains endroits. Mais je ne suis plus blessée, ça va bien, terminai-je en relevant la tête vers lui.

- Est-ce que vous voulez venir chez moi ? me propose-t-il, ma femme serait ravie de pouvoir vous aider, et je suis sûre qu'elle doit encore avoir quelque part d'anciens vêtements datant de sa jeunesse.

- Pourquoi me proposez-vous cela ? m'étonnai-je.

- Eh bien, pour vous aider, me dit-il. Vous n'avez pas l'air de quelqu'un de mauvais, mais pourtant on voit que vous avez dû beaucoup souffrir. "

    Je ne sais vraiment pas quoi lui répondre. Sa proposition est extrêmement généreuse mais...je ne comprends pas pourquoi il fait cela. Qu'est-ce qu'il gagne là-dedans ? Peut-être que c'est un piège. Peut-être qu'ils ont envoyé ce vieil homme pour que je ne me méfie pas et que je le suive. Je réfléchis encore pendant un moment tandis qu'il continue à me scruter. Après beaucoup d'hésitations et de délibérations je décide d'accepter sa proposition. De toute façon j'ai besoin de lui. Cela fait deux jours que je n'ai pas mangé, et je sais que je ne tiendrai pas longtemps comme ça.  De plus, j'ai tout de même réussi à reprendre des forces, alors s'il le faut je pourrais me défendre si on m'attaque.

"- J'accepte, lui répondis-je."

    Ma réponse lui dessine un grand sourire de satisfaction sur le visage.

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