19- "Le puzzle"
~ Position inconnue, Usa, 5 Novembre 1972 ~
Je me sens secouée. J'ai l'impression d'entendre des voix autour de moi mais je n'arrive pas à identifier ce qu'elles disent. Après quelques temps je comprends que l'une des voix est la mienne tandis que l'autre voix devient de plus en plus nette jusqu'à ce que j'arrive à comprendre ce qu'elle dit.
"- Lucy ! Lucy réveilles-toi ! me crie cette voix dont j'ignore le propriétaire."
La personne qui semble être avec moi continue à me secouer. Petit à petit je reprends mes esprits, et commence à faire bouger mes paupières jusqu'à ce que celles-ci s'ouvrent. Je reconnais alors la personne qui continue à me secouer. C'est Erik. Je me redresse et me mets en position assise sur le lit. Lui est déjà assis sur ce même lit.
"- C'est bon, ça n'est pas la peine de me secouer comme un cocotier, m'écriai-je un peu énervée qu'il m'est réveillé.
- Il fallait que je te réveille, tu étais entrain de faire trembler la grotte, me répondit-il plus calme après avoir arrêté de me secouer."
Je souffle et baisse la tête. Je n'ai encore une fois pas réussi à me contrôler. La première fois où j'ai réussie à m'enfuir du complexe j'ai rencontré le même problème. Je n'étais tellement pas habituée à contrôler mes pouvoirs que ceux-ci se manifestaient au gré de mes émotions. Au début c'était abominable, et il m'a fallu beaucoup de temps pour me maîtriser.
"- Désolé, je ferai en sorte que ça ne se reproduise pas, m'excusai-je toujours la tête baissée.
- Qu'est-ce qui s'est passé exactement ? me demande-t-il.
- Rien qui vaille la peine qu'on en parle, répondis-je.
- Ça c'est à moi d'en juger ! réplique-t-il."
Je ne sais pas si je dois lui dire. Je n'ai jamais parlé de ce qui m'est arrivé à qui que ce soit. Pas seulement par pudeur, mais surtout parce que le simple fait d'en parler me fait trop mal. Au contraire j'essaie de tout faire pour éviter de penser à mon passé même si je suis obligée de vivre avec celui-ci. J'ai toujours été seule alors je n'ai pas vraiment l'habitude de partager avec quelqu'un d'autre. Mais maintenant je ne suis plus seule, et je sais bien que j'ai besoin de ces mutants pour survivre.
"- C'était juste un mauvais rêve, dis-je.
- Un mauvais rêve qui t'a drôlement retournée, j'ai cru que tu allais nous enterrer vivants ! rigola-t-il.
- Au moins ça aurait évité de payer le cercueil, et les funérailles, répondis-je."
Suite à ma remarque il se met à rire. C'est étrange, ça n'est pas un rire moqueur ni narquois comme à son habitude, c'est juste un rire de joie, d'amusement. Le premier que je le vois faire. Depuis qu'il n'y a plus d'humains autour de nous j'ai l'impression qu'un poids s'est enlevé de ses épaules, et qu'il est plus...lui. Et je dois bien avouer que je préfère cette version d'Erik.
"- Ce sont juste de mauvais souvenirs qui reviennent parfois me hanter la nuit, m'expliquai-je tout bas.
- Des souvenirs de ce qu'ils t'ont fait subir dans ce laboratoire ? me demande-t-il ?
- Qu'est-ce que tu sais exactement sur mon passé ? le questionnai-je.
- Je n'ai que des brides de ton puzzle. Je sais que toute ta famille est morte depuis longtemps. Je sais que ces scientifiques ont profité de ton pouvoir pour expérimenter différents produits sur toi. Produits qui sont bien évidement impossibles à tester sur des êtres humains du fait des conséquences de leur utilisation. Je sais aussi que pour te contrôler ils ont dû te mettre sous perfusion quotidienne mais qu'ils réduisaient cette dose lorsqu'ils avaient besoin d'analyser les douleurs physiques et psychiques que leurs injections te procuraient. Voilà tout ce que je sais à propos de toi, m'explique-t-il."
C'en est déjà bien assez. Il connaît quasiment toute ma vie, même s'il n'en a pas tous les détails. C'est assez perturbant, mais au moins je n'aurai pas à lui raconter moi-même ce qui m'est arrivé.
"- Qu'est-ce que c'était cette fois ? m'interroge-t-il soucieux.
- Ça n'a pas d'importance, tu en sais déjà bien assez, répondis-je un peu froide.
- Faisons un compromis : si tu me montres ce dont tu as rêvé, alors je te montrerai un événement de mon passé, est-ce que ça te convient ? me propose-t-il."
Je dois avouer que c'est vraiment très tentant. Savoir ce qui est arrivé à Erik me permettra aussi de comprendre sa haine des humains, et peut-être de l'endiguer. Toutefois je ne vois pas pourquoi ce qui m'est arrivé l'intéresse tant. Après tout j'ai accepté de venir avec lui, c'est déjà bien suffisant. Mais peut-être espère-t-il qu'en en apprenant plus sur mon passé, il arrivera aussi à me rendre plus hostile aux humains. Ce ne serait pas si mauvais que ça comme raisonnement, après tout c'est à peu près ce que je compte essayer de faire avec lui, mais dans le sens opposé. Ça me fait un peu penser au principe de l'arroseur arrosé.
"- J'ai déjà essayé de pénétrer dans ton esprit, et je n'y suis pas arrivée, répliquai-je sur la défensive.
- C'est parce que je portais mon casque. Celui-ci a un pouvoir spécial, il bloquer les pouvoirs télépathiques, et t'empêche donc de lire mes pensées ou de manipuler mon esprit, m'explique-t-il.
- Donc lorsque tu n'as pas ton casque, comme maintenant, je peux m'immiscer dans ton esprit ? demandai-je incrédule.
- Exactement, dit-il sans aucune once d'émotion, comme si c'était banal."
Comment est-ce possible ? Les Hommes ont des pouvoirs, mais pas les objets. Je me demande bien ce que j'ai encore pu louper durant toutes ces années d'isolement. D'ailleurs cela m'étonne que les scientifiques du complexe n'en est pas mit s'ils avaient cette technologie à disposition. Ils avaient tellement peur de moi que s'ils l'avaient possédé ils auraient été capables de dormir avec leur casque ! Maintenant que j'ai cette information je pourrai fouiner dans l'esprit d'Erik sans qu'il ne s'en rende compte si je le souhaitais, et visionner tous ses souvenirs. Seulement je ne le ferai pas. Beaucoup ont abusé de moi et de mes pouvoirs, et je refuse de m'abaisser à leur niveau. Alors je n'ai plus qu'à accepter ce consensus.
"-Très bien, j'accepte ta proposition, me lançai-je stressée.
- Bien ! Commence par regarder dans mon esprit, je te montrerai le souvenir que je veux que tu regardes, me dit-il.
- Tu es sûr ? lui demandai-je.
- Tout va bien se passer, me rassure-t-il en souriant."
Aller, c'est parti. Je pose mes mains sur les tempes d'Erik et ferme les yeux pour me concentrer. Une fois dans son esprit, des images se mettent à apparaître devant moi.
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