37🐲La Déchéance

— Tu n'as que deux choix : soit tu mets ça dans ta bouche, soit tu ne survis pas.

— Ce que tu me présentes n'est guère un dilemme.

— Il est essentiel que tu restes éveillé pendant l'opération, car j'ai besoin que tu maitrises ta température corporelle.

Allongé sur une vaste table en pierre, torse nu, Arwin arqua un sourcil avant de saisir le chiffon imprégné d'alcool. La pièce était plongée dans une semi-obscurité oppressante, les lueurs des bougies projetant des ombres inquiétantes sur les murs.

Vyrr chauffait la pointe de sa dague à la flamme vacillante, tandis que Cassian, assis près d'Arwin, observait les morceaux d'okril cristallisé dans un bol à ses côtés.

— C'est à peine croyable que j'ai pu m'en sortir grâce à la punition de Cornélia... Et si nous avions su plus tôt que j'avais ces choses dans le corps, peut-être aurions-nous pu sauver Cristal.

— Les "si" ne nous avancent à rien. Es-tu certain de vouloir rester et voir cela ?

Cassian hocha la tête, prenant la main que Arwin lui tendait, signifiant ainsi son soutien dans cette épreuve. Vyrr attacha son poignet libre à la table, rejeta quelques mèches de cheveux en sueur de son front, puis prit la dague.

Sans plus de cérémonie, il entailla la peau du jeune homme, qui gémit à travers le tissu. La lame ouvrit sa chair, laissant échapper du sang mêlé à des particules métalliques, ainsi que des vagues de chaleur.

Après d'interminables minutes à inciser le corps et à endiguer la génération de ses blessures, Vyrr commença l'opération pour soigner l'okrilien d'Arwin.

Le métal enveloppait tous ses organes vitaux, agissant à la fois de manière mortelle et protectrice contre les tumultes du chaos en lui.

Vyrr travaillait avec une précision remarquable, manipulant habilement la dague chauffée pour découper soigneusement les filaments d'okril qui s'étaient insinués profondément dans le corps d'Arwin. Chaque incision était un acte chirurgical complexe, mais Vyrr n'avait même pas besoin de plus de lumière ou d'assistance pour y arriver.

« Sa maitrise en est presque effrayante », constata Cassian.

Arwin maintenait une concentration intense, se forçant à contrôler sa chaleur corporelle tout en endurant la douleur et l'inconfort.

Une atmosphère oppressante régnait dans la pièce, chaque seconde semblant s'étirer en une éternité. Finalement, après près de deux heures d'efforts intenses, un léger coup se fit entendre à la porte.

Vyrr était tellement concentré qu'il n'entendit ni le bruit ni Cassian se dirigeant vers l'entrée et quittant la salle d'opération. Il poussa un long soupir de soulagement, essuyant la sueur de son front avec des mains moites, lorsqu'il aperçut Nelian debout devant lui.

L'elfe n'aurait jamais osé déranger son seigneur pendant une opération aussi cruciale, ce qui inquiéta soudainement le chasseur.

— On ne peut pas le déranger, déclara-t-il en croisant les bras, même en cas d'urgence. La vie d'Arwin est entre ses mains, et la moindre distraction pourrait être fatale.

— Je le sais bien, mais... Je devais vous informer.

Nelian invita Cassian à le suivre un peu plus loin, pour minimiser les risques d'être entendus.

— Ils sont partis.

— Qui sont "ils" ?

— Arley et Aetalya Prideblaze. Ils sont introuvables depuis plusieurs heures.

— Quoi ?!

— J'ai trouvé cela sur le bureau de Vyrr.

Cassian saisit le morceau de parchemin et commença à lire à voix basse :

« Vyrr,

Je pars pour Greenland. Je ne peux pas laisser NoMercy et l'âme de ma mère entre les mains du Héros. J'emporte les broches avec moi. Je sais que tu es le seul capable de la ramener, mais je veux les convaincre de tes intentions.

La guerre est inévitable, mais le prix à payer est trop élevé.

Père a décidé de m'accompagner. Il était évident qu'il ne resterait pas passif en attendant qu'une décision soit prise... Mais il n'agira pas. Il connaît tes réactions lorsque l'on s'écarte de tes plans. Il restera discret, à sa manière. J'y veillerais.

Quant à moi, je me permets de désobéir et d'agir librement. C'est ce que tu m'as appris à faire. Aller à l'encontre des règles.

Ne m'en veux pas, mais si personne d'autre ne le fait, je me battrai pour toi.

Toujours. »

La signature sophistiquée de Talya trahissait son éducation noble, en contraste avec les rares occasions où Cassian avait pu lire des missives d'Arwin, qui écrivait comme un enfant du bas peuple.

— Si mon Seigneur apprend qu'ils sont partis, il risque de devenir incontrôlable.

— Je pense que le simple fait de savoir que Talya est à des kilomètres de lui pourrait suffire à plonger le continent dans le chaos. Il ne doit pas l'apprendre. Pas tout de suite, alors qu'il s'occupe d'Arwin.

— A-t-il dit combien de temps durerait l'opération ?

— D'après le contenu du bol se remplissant de l'okril d'Arwin... Je pense qu'il y en a encore pour plusieurs heures. Que pouvons-nous faire en attendant ?

— Restez avec messire Arwin. Il a besoin de vous.

Nelian fit un sourire nerveux avant de lever les yeux et de déclarer :

— Quant à moi... Je vais préparer deux litres d'hydromel corsé.

— Pourquoi ?

— Le saouler sera la meilleure option.

— Parce qu'il sera attristé par son départ ?

— Pour éviter qu'il nous tue tous pour avoir laissé celle qu'il aime partir dans les bras de ses ennemis.



🔥



— Vyrr dirait que j'ai l'air d'un « gueux ».

— Mais il n'est pas là, et c'est parfait.

Talya se dressa sur la pointe de ses pieds pour attacher les lacets de la chemise de son père avant de s'éloigner pour observer le résultat. Elle revint pour désordonner un peu plus ses cheveux, sous le regard désapprobateur de ce dernier, avant d'être frappée par leur ressemblance frappante.

Le voyage sur le dos de son père avait été silencieux, empreint de concentration. Bien qu'Arwin aurait pu trouver ces longues heures malaisantes, il n'en était rien pour eux.

Talya et Arley partageaient sensiblement la même personnalité et appréciaient le calme plutôt que des discussions sans but concret. Ils se comprenaient mutuellement sans avoir besoin de mots, et elle chérissait les rares moments d'échange qu'ils partageaient, comme en cet instant.

Si la traversée de l'océan avait été un long moment, c'est au-dessus des terres du nord qu'ils avaient ressenti le plus de crainte. Selon les lectures de Talya, mais aussi les dernières informations transmises par Nelian à Arley, le ciel près de la cité des nains d'Ironfrost était étroitement surveillé.

Les nains avaient toujours eu des conflits avec les dragons, et depuis qu'ils avaient commencé à exploiter l'okril, le nombre d'armes destinées à les éliminer avait considérablement augmenté. Une simple flèche ou un filet pouvait les faire chuter mortellement dans les montagnes, mettant en péril leur mission.

Talya avait donc élaboré un plan simple : s'infiltrer sur le territoire sous sa véritable identité, tandis qu'Arley jouerait le rôle du "rescapé de l'emprise de Vyrr" pour atteindre le prince Emmett.

Personne, parmi les encore en vie, ne connaissait l'apparence physique de son père, et tout le monde croyait qu'elle avait été mentalement manipulée par le nécromancien au moment de son enlèvement.

« Vyrr avait vraiment tout prévu au cas où je doive retourner dans l'autre camp... » pensa-t-elle en ajustant sa ceinture et en observant l'endroit où ils avaient atterri plus tôt.

Ils se trouvaient au croisement de trois frontières, entre Ironfrost, Elmetya et Crystalis, prêts à prendre la direction du sud vers les montagnes qui abritaient le siège de l'Église de la Lumière.

C'était là-bas qu'ils espéraient trouver des personnes capables de les conduire en toute sécurité jusqu'à Greenland.

À la lisière de la forêt, devant un vaste champ de blé doré, Talya et Arley se tenaient silencieux. L'étendue de blé s'étendait à perte de vue, une mer d'épis ondulant doucement sous la brise légère. Les tiges des céréales se balançaient en un doux mouvement.

Alors qu'ils avançaient à travers le champ, la première chose qui attira leur attention fut le silence profond qui régnait.

Aucun chant d'oiseau, aucun bruit d'insecte, seulement le doux murmure du vent agitant les épis de blé. L'absence de vie animale était étrangement troublante, et ils se demandaient pourquoi la nature semblait s'être retirée de cet endroit.

Puis, tandis qu'ils poursuivaient leur chemin, une odeur âcre, semblable à la mort, commença à flotter dans l'air. Elle était portée par le vent venant de l'est, et elle leur parvint comme un avertissement silencieux. L'odeur était nauséabonde, un mélange de putréfaction et de désolation, suffisamment fort pour s'accrocher à leurs narines et pénétrer leur conscience.

Talya et Arley échangèrent un regard inquiet, comprenant que quelque chose d'inhabituel et sinistre se cachait dans cette paisible étendue de blé.

Jusqu'à ce qu'un craquement retentisse, les forçant à s'arrêter net. Arley releva le pied pour découvrir l'os qu'il venait de briser en deux, tandis que Talya fixait le corps en décomposition à quelques mètres d'eux.

Le cadavre, à la fois squelettique et couvert d'un résidu de chair en décomposition nourrissant les vers, semblait paisiblement allongé au milieu des champs dorés de blé.

« Halte ! » entendirent-ils soudain venant de devant eux.

Un soldat vêtu d'une armure singulière émergea des blés, tenant un marteau dans sa main.

— C'est un paladin de l'Église de la Lumière, murmura Talya à son père, reconnaissant l'armure qu'elle avait déjà vue portée par ces chevaliers. Ne dis pas un mot.

La tâche serait aisée pour Arley.

Deux autres paladins, un nain et un homme imposant à la tête chauve, les rejoignirent, puis tous les trois observèrent le cadavre à proximité.

— Encore un, commenta le nain.

Ce dernier donna un léger coup de marteau sur le corps, puis poussa un long soupir résigné.

— Pas d'identification pour ce pauvre homme. Bex, tu t'en occupes ?

Le chauve hocha la tête et, sans répugnance apparente, prit le cadavre avec lui.

— Que faites-vous ici ? demanda le premier homme en les détaillant du regard. Ces terres ont été désertées depuis plusieurs semaines. Êtes-vous à la recherche d'un proche ? D'effets personnels ?

— Etes-vous des pilleurs de cadavres ? intervint le nain plus méfiant. Votre odeur ne me revient pas, surtout la vôtre.

Il désigna Arley du menton, ce dernier restant impassible, jusqu'à ce que Talya toussote et prenne une posture plus élégante en déclarant :

— Je suis Talya Green, la fiancée du prince Emmett.

— Vous mentez. La princesse est captive du nécromancien.

— Ancienne captive. Moi et ce compagnon d'infortune à mes côtés, nous avons réussi à briser l'emprise qu'il avait sur nous et à nous échapper. J'ai eu vent de ses plans, et je dois en parler de toute urgence à mon fiancé et au Héros de la Lumière.

— Qu'est-ce qui prouve votre identité ? insista le nain. Nous avons fait nos classes avec Emmett. Prouvez-nous que vous êtes bien cette fameuse "Tal" dont ils ne cessaient de nous parler.

La jeune femme leva les yeux au ciel, cherchant dans ses souvenirs lointains d'Emmett une habitude qui aurait perduré au fil des années et aurait marqué ses camarades.

— Emmett est ambidextre.

— Ça veut dire quoi ? demanda le nain.

— Il manie son arme aussi bien de la main droite que de la main gauche, répondit l'homme à ses côtés. Mais cela n'est pas un secret. Il suffit de l'avoir vu combattre dans une arène et d'être attentif pour le savoir.

— Mais peu de gens savent pourquoi il est devenu ambidextre. Le savez-vous ?

— Il se peut... et vous ?

— Un camarade de classe lui a fait croire, quand ils étaient enfants, que les gauchers étaient refusés par l'Église de la Lumière. Désireux de suivre les traces de son père, il a tout fait pour se servir de sa main droite. Adolescent, lorsque le Roi lui a confirmé que cela n'avait aucune importance, il a commencé à se servir de ses deux mains au combat, ce qui lui donne souvent un avantage.

L'homme fronça les sourcils avant de hocher la tête et de s'agenouiller devant elle. Le nain fit de même, en baissant la tête.

— Votre Majesté. Veuillez nous excuser pour notre impolitesse. Vous êtes bien Talya Green.

— Nous vous escorterons jusqu'à notre prince, et nous vous servirons du mieux que notre fonction l'exige.

Talya retint un commentaire désobligeant à la manière de Vyrr et approuva leur respect, les suivant plus loin dans le champ.

Lorsqu'ils arrivèrent devant une charrette, Talya retint un hoquet de surprise en voyant la dizaine de cadavres en décomposition qui s'y trouvaient.

— Je m'appelle Lorin. Voici Bex, et enfin notre muet préféré, Olly.

Le chauve fit une petite révérence avant de tendre sa main pleine de grains au seul cheval tirant la charrette.

Lorin expliqua la situation à son camarade paladin qui sourit timidement, montrant les quelques dents qu'il lui restait.

— Nous ne pourrons emprunter un portail d'invocation qu'après avoir traversé la Déchéance, fit remarquer le nain Bex à son compagnon.

— N'avez-vous pas de monture autre que ce cheval ?

— Nous sommes en mission de... fossoyeurs ? Une tâche ingrate, mais nécessaire pour empêcher le chaos de se propager davantage sur ces terres.

— C'est le chaos qui a provoqué cela ? demanda-t-elle en désignant les cadavres.

Bex et Lorin se regardèrent un instant avant de désigner le sommet de la colline du champ de blé. Ils se dirigèrent tous vers cet endroit, suivant le chemin de terre qui se dessinait progressivement sous leurs pas, jusqu'à ce qu'ils s'arrêtent au sommet et que le nain déclare :

— Voici la Déchéance.

Là où autrefois s'étendaient de riches champs de blé doré, la corruption avait tout dévoré. Les épis de blé étaient désormais flétris et noircis, formant un paysage dévasté et apocalyptique.

Des arbres calcinés se dressaient comme des sentinelles tordues, leurs feuilles mortes pendouillant tristement comme des lambeaux de chair en décomposition. Des fissures profondes marquaient le sol, révélant des racines entrelacées qui semblaient se tordre et se battre pour leur survie, telles des mains squelettiques s'extirpant de la terre.

L'air était lourd et empli d'une atmosphère malsaine, chargé du parfum âcre de la mort. Une brume sinistre flottait au-dessus de la Déchéance, obscurcissant le ciel pourtant clair derrière eux. Les oiseaux avaient déserté cette terre maudite, ne laissant derrière eux que le silence lugubre, comme si les âmes des défunts murmuraient dans l'air.

Les empreintes d'anciens combats étaient visibles, des cicatrices noires et profondes marquant le sol, rappelant que ces terres avaient été le théâtre de batailles sanglantes. Des armures brisées et des ossements blanchis parsemaient le paysage, témoins silencieux de l'horreur qui s'était déroulée ici.

La charrette descendit la colline pour pénétrer dans cette terre corrompue, tandis que Talya observait ce paysage de mort avec une profonde tristesse.

— Le chaos est dévastateur..., dit-elle pour briser le silence dans le groupe.

— Ce n'est pas le chaos, répondit le nain. C'est le résultat d'une bataille perdue contre le nécromancien.

Le cœur de la jeune femme se serra soudain, comprenant que sa vision de la guerre était bien loin de la réalité. Elle jeta un regard à son père qui restait impassible, ignorant même les insectes qu'il écrasait sous ses bottes.

— On me l'a raconté, intervint Lorin. Les troupes de l'Alliance Étincelante pensaient affronter une armée de monstres, mais lorsque le général de cette division est arrivé sur ces terres, il n'a trouvé qu'un seul homme.

— Un seul elfe corrompu, rectifia Bex. Le nécromancien. Vyrr Loraelyan Rhapsody.

À l'évocation de son nom complet, les trois paladins crachèrent en chœur sur la terre morte, comme si le simple fait de le prononcer avait souillé leurs âmes.

— Imaginez, princesse, reprit Lorin. Un seul être au milieu d'un champ d'or, vêtu d'une robe sombre, et des iris d'un rouge sanglant vous transperçant l'esprit. Mais malgré l'ordre de ne jamais sous-estimer le nécromancien, le général a lancé ses troupes contre lui.

— Supériorité numérique. C'était logiquement un combat facile, et ils auraient eu l'honneur de mettre fin à la guerre en tuant la plus grande menace du monde. Mais le nécromancien n'est pas devenu l'ennemi d'Heranyon par sa simple présence, ajouta Lorin.

— Parait-il que la terre a tremblé, que le sol s'est imprégné d'un poison corrosif, et qu'une armée de centaines de squelettes est sortie de terre. Des os animés par la magie nécromantique, pour ainsi dire. Mais plus nos soldats tuaient les leurs, plus les rangs du nécromancien gonflaient.

— Le nécromancien s'est servi de sa magie pour ramener chacun de nos morts à la vie et les retourner contre l'armée. Nos camarades d'enfance devenant soudain nos ennemis, ne trouvant jamais la paix... C'est une horreur à vivre. Beaucoup ont été traumatisés, et certains se sont même suicidés en rentrant au pays.

— Vivre une telle défaite, c'est cauchemarder chaque nuit d'une armée de mort.

— Ce n'est pas le chaos qui a détruit ces terres, mais bien la nécromancie. Et c'est ainsi sur tous les champs de bataille où Vyrr Rhapsody est intervenu.

— On en vient même à apprécier les combats plus conventionnels avec les monstres. Eux, au moins, sont vivants et ont une "éthique du combat". D'après les rumeurs que ce sont d'anciens humains. Mais personne n'y croit vraiment avant d'avoir fait face aux cadavres animés par le nécromancien.

— On dit que les monstres sont d'ailleurs manipulés par la menace du nécromancien. Qu'ils ne se battent que parce que l'elfe corrompu a un pouvoir sur eux. Cette créature est un véritable fléau pour notre monde.

En entendant parler ainsi de celui qu'elle aimait, cette sensation de boule dans le cœur et la gorge de Talya ne cessait de grossir et d'être douloureuse.

Elle restait silencieuse, les écoutant cracher sur l'être le plus abject que leur monde n'ait jamais connu, tout en traversant le résultat et la preuve de sa monstruosité.

Alors qu'ils dépassèrent un énorme champignon semblant dévorer les racines d'un arbre déjà mort, le nain demanda soudain :

— Comment était la captivité avec le nécromancien ? Avez-vous souffert ?

Elle hésita à les imiter et cracher comme eux sur l'image que Vyrr s'était forgée pour être l'incarnation de l'horreur sur ce continent.

— J'ai versé quelques larmes.

— Notre prince Emmett se fera un plaisir de lui faire regretter cela ! Le nécromancien semble insaisissable, mais le Héros a déjà prouvé que même la mort était mortelle.

— C'est-à-dire ?

— Il l'a blessé il y a quelques années avec l'Épée de Lumière. Jamais aucune arme n'avait réussi à percer le bouclier magique qui entoure sa peau, mais la Lumière le peut ! Nous avons une chance de mettre fin à ces horreurs.

Talya se souvint soudain de ce moment-là.

C'était le jour de son anniversaire. Il était arrivé en Sinath, trempé et avec une blessure importante. C'était elle qui l'avait soigné, et il avait éludé l'origine de sa blessure. Après cela, elle avait cédé, tout comme lui, et elle avait compris que leur amour était réciproque, malgré les réticences de l'elfe.

La discussion s'orienta sur Emmett, sur sa force, sa détermination, ses exploits, et tout ce qui semblait faire de lui un modèle de bonté, rendant honneur à son héritage et rendant fier le Héros.

Talya resta silencieuse, envahie par ses souvenirs d'un homme si impatient, capable de la prendre en bafouant son consentement sur un autel alors qu'ils allaient se marier quelques heures plus tard.

Elle reconnaissait qu'à mesure d'entendre tout ce qu'avait fait Vyrr, elle ressentait des doutes sur lui. Mais entendre tout cela d'Emmett ne changeait rien : elle ne l'aimerait jamais, et il était clair qu'il était obsédé par elle.

Une heure plus tard, le convoi atteignit enfin le bout de la Déchéance, où un camp de fortune était dressé. D'autres paladins s'affairaient à jeter des cadavres dans un grand feu funéraire.

— Nous allons vous laisser ici, annonça Bex. Lorin vous accompagnera devant notre prince. Quant à nous, nous avons encore du travail pour purifier ces terres.

— Il faut nous hâter, ajouta Lorin. Les portails d'invocations elfiques sont capricieux.

— C'est rare d'en voir, remarqua Talya. Je croyais qu'il n'y avait plus d'invocateurs depuis Leone Stormrage ?

— Cette magie est de nouveau enseignée pour l'effort de guerre. Le problème est que ces portails peuvent être empruntés par d'autres créatures capables de les manipuler, y compris le nécromancien. Nous évitons de les laisser ouverts très longtemps. Bien, êtes-vous prête, princesse ?

Talya échangea un regard entendu avec son père avant de pénétrer dans le portail, atterrissant près des portes de la capitale de Greenland.

Des barricades de fortune avaient été dressées pour protéger la ville, et les murs partiellement reconstruits portaient encore les marques des flammes dévastatrices de Talya le jour de son mariage.

Les bâtiments endommagés avaient été réparés dans la mesure du possible, mais certains étaient encore en ruine.

Cependant, malgré ces cicatrices, les habitants vaquaient à leurs activités, reconstruisant leur maison et leur vie. Les rues étaient animées, et les étals des marchés étaient à nouveau ouverts, signe que la vie reprenait peu à peu son cours.

Talya sentit son cœur se serrer en voyant les conséquences de l'attaque dont elle était en partie responsable, jusqu'à ce que Lorin la ramène à la réalité en disant :

— Bon retour chez vous, princesse Talya Green.

Ce n'était pas chez elle, c'était chez l'ennemi.

Ceux qui l'avaient manipulé jusqu'aux derniers instants. Ceux qui l'avaient privé du vrai bonheur et de la liberté.

Ceux qui gardaient précieusement l'épée NoMercy et l'âme de sa mère.

Ceux qui ne méritaient aucun pardon.



Talya a fait la rebelle, son père l'a suivi et à mon avis, je connais un elfe qui ne va pas apprécier qu'on lui désobéisse 👀 Que pensez-vous de leur fuite ?

De l'impact et de la violence de Vyrr pendant la guerre ? On a tendance à souvent oublier que c'est un "méchant", un pur, un vrai, et qu'il n'a que peu de pitié devant ses ennemis 🤔

D'ailleurs... vous le verrez bien au chapitre suivant, surtout la fin qui va vous rendre aussi diabolique que lui 😈

J'espère que la suite vous plaira ! On se retrouve pour le prochain chapitre ! N'hésitez pas à soutenir cette histoire en votant/commentant/la partageant à vos proches🥰

🔥🔥🔥



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top