Chapitre 19 : Refaire vivre un passé

Elle cogita toute la nuit. Qui avait bien pu lui faire une chose pareille ? Elle soupçonnait un membre des fuyards, après tout ils étaient les seuls à savoir pour l'inspection de sa chambre.

Le problème, c'est qu'hormis Léana et Velingrade, elle ne connaissait personne susceptible de faire partie du groupe.

La nuit passa, lentement, la laissant épuisée le lendemain matin. Hayden n'était plus présent dans la pièce quand elle ouvrit les yeux, comme d'habitude. Elle se prépara avec lenteur, puis sorti en direction des cuisines. C'était reparti pour l'épluchage et autres activités culinaires, bien barbantes et répétitives.

Cependant, elle avait l'avantage d'y voir encore Léana. Les deux demoiselles se saluèrent, et Mackenzie, tout en préparant sa table de travail, l'aborda :

« Salut, tu as passé une bonne nuit ?

– Oui et toi ? dit-elle tout sourire.

– Pas vraiment. Je sais que tu n'as pas la moindre idée d'où se trouve le planning des inspections, mais tu ne sais pas qui était la dernière personne à l'avoir eu entre les mains ?

– Non, je suis vraiment désolée. Quand je l'ai transmise à Velingrade, il a beaucoup circulé sans que j'y sache quoi que ce soit.

– Très bien, pas de soucis. »

Mackenzie soupira et Léana s'excusa de plus belle.

Elle était au point mort, incapable de faire démarrer son enquête. Elle en venait même à soupçonner Léana.

De toute façon, elle devait se méfier de tout le monde, y compris de ceux qui se faisaient passer pour ses amis.

Elle s'assit, et commença son travail. Elle réfléchissait à un moyen de faire avancer l'affaire. Si elle avait des ennemis, elle se devait de se défendre le plus vite possible. Et pour cela, il fallait savoir contre qui elle avait à faire.

La journée se termina et elle n'eut pas plus d'indices. Au moins elle avait réussi à éviter l'acharnement des gardes à son encontre, enfin, pour l'instant. Une fois le soir tombé, elle se dirigea vers sa chambre. Elle y trouva Hayden qui lisait encore son livre.

« Alors, tu as trouvé quelque chose ? lui-avait-il demandé.

– Non, je suis toujours au point mort. »

Elle lui en avait parlé, hier soir en rentrant, mais il n'avait pu lui apporter plus d'aide.

« Je vais aller manger à la cantine plus tard ce soir, reprit-elle, j'aimerais en discuter avec Velingrade, il doit savoir quelque chose, en supposant qu'il n'est pas sur le coup aussi.

– Fais attention, il risque de ne rien dire, si tu y vas franc jeu dès le départ. »

Elle acquiesça de la tête, avant de s'asseoir sur son lit. Elle devait penser à une façon de faire avouer Velingrade, s'il savait quelque chose.

Une fois les 21h30 sonnées, elle sortit de la chambre et se dirigea vers la cantine. Velingrade n'était pas encore arrivé, alors elle se servit et attendit dans un coin éloigné de la porte centrale.

Quand il pénétra enfin dans la grande pièce, il prit son plateau, se fit servir, et s'installa. Elle attendit un peu et continua son repas, sans ôter ses yeux de lui.

Alors qu'elle mangeait sa portion de purée, elle vit une fille le rejoindre à sa table et s'asseoir à ses côtés. La demoiselle commença un monologue tout en gesticulant des mains. Elle semblait très agitée mais Velingrade restait calme, inattentif, comme déjà lassé par sa venue.

Ça ne devait pas être facile tous les jours, de devoir faire face à des actifs pressés et contrariés. La jeune fille devait sûrement faire partie du groupe des fuyards, mais il était difficile de voir si elle portait une marque d'ici.

Quand la demoiselle eut fini son discours, il prit la parole. Il avait usé d'un ton terrible, mêlé à une certaine désinvolture, ce qui coupa cours au dialogue. A ces mots, elle se leva et parti.

Mackenzie décida d'attendre un peu avant de rejoindre le jeune homme, qui semblait à présent irrité. La demoiselle qui l'avait quitté était partie récupérée son plateau à repas – resté sur sa table –, les larmes aux yeux. Cette conversation les avait affectés tous les deux, mais pas de la même manière.

Mackenzie observa la demoiselle, tout en continuant son repas. Le spectacle sous ses yeux sembla lui révéler un secret bien gardé. La jeune fille, qui avait discuté avec Velingrade, semblait fébrile, tenant son plateau vide à une main et son ventre légèrement arrondis de l'autre.

Ce n'était pas une femme avec des formes bien pulpeuses, et un tel ventre semblait prédire la venue d'un nouveau martyr.

Mackenzie ressenti de la pitié à l'égard de la demoiselle.

Si elle avait raison, peut-être que Velingrade y était pour quelque chose. Cruel monde, qui obligeait cette jeune fille à vivre et assumer les conséquences seule, d'un acte à deux.

Mackenzie décida, après que la demoiselle ait quitté la pièce, de rejoindre Velingrade. Elle ne comptait pas se mêler de cela, pas cette fois.

Arrivée à sa table, elle lui parla sans retenue :

« Je vois que tu es quelqu'un de très sollicité, Velingrade. Ça explique peut-être pourquoi tu n'as pas encore pris le temps de venir me voir.

– Je t'avais dit d'attendre que je revienne vers toi, dit-il, impassible.

– Je ne suis pas une idiote, je ne vais pas attendre indéfiniment que l'on me plante un couteau dans le dos. »

Il ne dit rien. Elle y était peut-être allée un peu fort, surtout qu'il était encore énervé par la discussion qu'il avait eu précédemment. Pourtant, voyant le silence interminable, elle reprit la parole :

« Qui est la dernière personne à avoir eu le planning des inspections ?

– Je vois que tu passes du coq à l'âne sans soucis.

– Le souci ici, c'est que tu me fais poiroter après avoir obtenu ce que tu désirais. J'ai de moins en moins confiance en toi. Si tu me fais un coup à l'envers, je vous fais tous tomber... Sans aucun remords.

– Tu me menaces, Mackenzie ?

– Prends-le comme tu veux. Je suis sûr que tu sais qui est la personne qui détient le planning. Je ne pense pas que quelqu'un comme toi laisse traîner un document pareil sans savoir par qui il passe. »

Il eut un rictus et un sourire narquois s'installa sur son visage.

« T'es pas si idiote que ça, je suis vraiment ravi de t'avoir à nos côtés.

– Et donc ? Crache le morceau, à moins que tu sois impliqué dans cette histoire ?

– Je ne suis pas impliqué dans des idioties pareilles. Si tu parles bien de l'histoire du collier, sache que ce sont juste des gosses, qui pensent que la réussite du passé est la seule solution. »

Il approcha son visage de la demoiselle, sans jamais faire partir le sourire qui trônait sur le sien, puis lui dit :

« Ça sert à rien que je te donnes des noms, ils sont juste deux ou trois. Et puis, je vois que tu t'en es bien sorti, donc le problème est résolu.

– Tu le savais, et tu les as laissé faire.

– Je voulais voir comment tu allais t'en sortir. Je ne sais pas comment tu as fait, mais si tu n'avais pas réussi, tu ne serais pas devant moi.

– Bien, tu veux la jouer comme ça ? Dis à tes petits camarades de ne plus rien tenter contre moi. Je suis prête à faire couler toutes les petites merdes que vous êtes si vous tenter encore quelque chose à mon égard. »

La colère lui montait aux joues, à tel point qu'elle était prête à faire de lui son ennemi. Il jouait avec elle, la faisait patienter pour quelque chose qui devenait de moins en moins crédible, et elle détestait ça.

Velingrade la regarda se lever pour partir, et l'interpella, toujours avec le sourire scotché au visage :

« C'est drôle tout de même, quand on sait que tu es dans la chambre 306. Cette même chambre, qui avait appartenu au leader du premier groupe de fuyards. Tu sais, celui qui avait tellement envie de liberté, qu'il a fini par se faire bouffer par ses propres alliés. »

Cela sonna comme une menace, et son sourire narquois ne forçait que plus, l'aspect machiavélique de ses paroles.


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