Chapitre 9
La demeure des de Castel ravivait des souvenirs dans l'esprit d'Iseult. Il s'agissait de l'un des endroits où elle s'était sentie le plus chez elle. La première fois qu'elle y avait mis les pieds, à treize ans, elle pensait qu'on la conduirait dans les quartiers des serviteurs. Aubépine, la mère de Morgan, avait paru horrifiée à cette idée et lui avait montré la chambre où elle logerait. Une vaste pièce avec un petit salon, et de grands rideaux de velours pour couvrir les fenêtres. La décoration y était plus sobre que dans le reste de la demeure. Ce fut la chambre qui lui fut attribuée, la famille de Castel avait décidé de l'accueillir comme un membre à part entière. Cette attention l'avait touché, elle s'entendait bien avec eux, même si elle n'avait vu Priam, le troisième de la fratrie que quelques fois, et que le seigneur des lieux ne faisait que de brèves apparitions. Il l'impressionnait et lui adressait peu la parole, c'était un homme distant qui ne témoignait aucune affection à ses enfants, si ce n'est quelques félicitations lorsqu'ils réussissaient quelque chose. De son côté, Iseult acceptait les compliments qu'il pouvait lui faire, même si cela la mettait parfois mal à l'aise vis-à-vis de ses amis.
Un serviteur se chargea de prendre leurs affaires pendant que le palefrenier prenait soin de leurs chevaux. Ils étaient parvenus à la demeure pour l'heure du déjeuner, comptant même quelques minutes d'avance. L'architecture ancienne du bâtiment lui donnait du charme, il avait été construit quelques siècles auparavant, ce qui le rendait aussi sombre à l'intérieur. La décoration semblait figée dans le temps, Aubépine lui avait une fois confié qu'on lui avait refusé de changer quoi que ce soit en dehors des chambres et de la nurserie. Le valet les conduisit jusqu'au salon où la famille de Castel se trouvait déjà. Tristan, le cadet de la fratrie bondit sur eux avec un grand cri de joie afin de se pendre au cou d'Iseult. Elle s'occupait de lui depuis qu'il était enfant, et ils jouaient ensemble là où ses frères le délaissaient. Du haut de ses treize ans, il avait l'air tout à fait charmant, mais ne s'était pas encore défait de son innocence enfantine.
– Iz ! Je suis si content de te voir ! s'écria le garçon qui faisait à présent sa taille.
– Tu as grandi ! Quand cesseras-tu ? demanda-t-elle avec un sourire.
– Quand je serais plus grand que Morgan, et plus fort aussi, s'exclama-t-il en montrant ses muscles encore peu développés.
– N'y compte pas trop, morveux, fit le grand frère avec un sourire narquois.
Lorsqu'ils se comportaient ainsi, Iseult comprenait les plaintes d'Aubépine de n'avoir eu que des garçons. Pierce arriva quant à lui par derrière, ce qui lui permit de prendre son cadet par surprise, il coinça le cou de Morgan avec son bras et lui ébouriffa les cheveux. Il était l'ainé et l'héritier de la famille, il ne s'en vantait jamais, préférant les voyages en mer à la vie de château. Malgré leurs âges différents et leurs caractères opposés, Iseult avait toujours été frappée par leur ressemblance physique, leurs yeux dorés étaient magnifiques et contrastaient avec leurs cheveux noirs.
Morgan se dégagea de l'étreinte de son aîné sans peine, et ce dernier tourna son attention vers Iseult. Dans un geste fraternel, il l'attira contre lui. Avec un sourire timide, elle accepta le geste, bien qu'elle ne soit pas la personne la plus à l'aise lorsqu'il s'agissait d'établir un contact physique avec les autres. Aubépine prit la relève et caressa la joue de son fils avec affection. Un valet vint prendre leurs capes tandis qu'ils s'asseyaient à table.
– Je suis heureuse que vous ayez pu venir nous voir, nous sommes si fiers que vous soyez des chasseurs à présent, s'enthousiasma Aubépine.
– Combien de temps comptez-vous rester ? demanda le seigneur de Castel.
– Beorn nous a accordé cinq jours de permission, répondit Iseult avec un sourire.
– Il s'est assoupli, il n'aurait pas été si généreux fut un temps. Sa gestion de l'ordre laisse à désirer, constata le père de Morgan.
La main d'Iseult alla chercher celle de son meilleur ami, elle ressentait toute la tension qui émanait de lui. Ce n'était pas la première fois qu'il critiquait leur supérieur et elle savait à quel point cela pouvait contrarier Morgan qui tenait Beorn en haute estime.
– C'est un plaisir que vous soyez ici, tous les deux. J'ai tout préparé pour la réception en votre honneur, leur fit la mère du jeune homme.
– Merci à vous, c'est vraiment très gentil. Mais, vous pourriez juste mettre Morgan en avant. Je pourrais rester dans ma chambre, je ne veux pas vous embarrasser devant vos amis, hasarda Iseult.
Les réceptions n'étaient pas ce qu'elle préférait, et elle savait que celles de la noblesse étaient guindées. Même si Aubépine avait veillé à son éducation de jeune demoiselle, Iseult savait que ce n'était pas ce en quoi elle excellait. Sa place était à l'Académie, à faire des recherches et à chasser, elle n'était pas faite pour pavaner dans une jolie robe tout en battant des cils.
– Tu es notre pupille, puis tu as l'âge de faire ton entrée dans le monde, lui dit Aubépine avec un doux sourire.
– Sans compter que tu es en âge de te marier à présent, ajouta le père de Morgan d'une voix froide.
Depuis ses treize ans les de Castel veillaient sur elle, ce dont elle leur était reconnaissante. C'était la seule famille qu'elle se connaissait avec les chasseurs. S'il n'y avait pas eu tout cela, Iseult aurait été seule, elle avait eu de la chance d'être abandonnée à la porte d'un temple d'Hëlia. Il lui était donc difficile de ne pas céder aux volontés de la famille de Morgan, elle n'avait rien d'autre que des mots à leur offrir.
– Mon frère n'a donc toujours pas fait sa demande, sourit Pierce.
– Iseult se mariera avec moi, affirma Tristan. Je lui ai demandé quand j'avais huit ans.
Il releva fièrement le menton. La jeune femme avait pensé que cela lui serait passé, et ça ne tarderait pas, mais elle trouvait cela mignon qu'il continue de s'imaginer comme son chevalier. Ses contacts avec le monde étaient limités, il n'avait pas d'amis, et ses seuls interlocuteurs étaient ses précepteurs.
– Nous avons le temps, fit Morgan en ignorant son cadet. Nous venons à peine de faire notre cérémonie, et notre espérance de vie est plus longue que la normale.
– Vous n'êtes plus des enfants, trancha le seigneur de Castel. Sauf si tu as quelqu'un d'autre en tête Morgan ?
Ce n'était là que de la provocation, Iseult le savait, mais elle se tut. Son partenaire avait une tendance à réagir avec véhémence, elle le savait. Plus il était proche de son père, plus il était difficile de l'apaiser.
– Laissons-les profiter, les défendit Aubépine. Nous devrions manger avant que le potage ne refroidisse.
Le nez dans son assiette, Iseult fut soulagée que la conversation s'arrête là. Son regard croisa celui de Pierce qui lui renvoya un sourire désolé. Il ne devait pas imaginer que son père réagirait ainsi. Le reste du repas se déroula plus silencieusement, quelques conversations vinrent agrémenter la morosité du déjeuner. Ainsi, Iseult apprit qu'elle devrait essayer des robes qu'Aubépine avait fait faire pour elle, afin qu'elle puisse choisir une tenue pour la réception. Celle-ci serait retouchée pour lui convenir dès qu'elle aurait arrêté son choix. La chasseuse regretta le temps passé chez les vampires, tout semblait plus simple là-bas, même si Judith avait râlé, car elle préférait ses chemises aux tenues qu'elle lui préparait, elle ne l'obligeait pas à se grimer. Aubépine était une femme gentille, qui avait pour regret de ne pas avoir de fille, c'était la raison qui la poussait à s'occuper d'Iseult de cette manière. Elle les voyait déjà former une grande famille avec Morgan, sans savoir que la jeune femme n'avait encore aucune idée de ce qu'elle prévoyait pour son avenir.
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Le soir de la réception était arrivé, ils étaient venus se reposer et Iseult avait l'impression d'avoir fait plus de choses en deux jours chez les de Castel qu'en une semaine à l'Académie. Aubépine lui avait fait faire plusieurs essayages pour sa robe, puis elle lui avait rappelé l'étiquette et les règles à suivre en bonne société. Sans compter les cours de danse avec ces affreuses chaussures qui écrasaient ses pieds et la faisaient souffrir. Iseult s'était pliée à l'exercice malgré ses réticences, accompagnée de l'hilarité de Morgan, qui s'était bien moins amusé quand sa mère avait décidé que lui aussi devait revoir ses pas de danse.
Iseult regarda autour d'elle, puis se recula dans un coin, assez à l'écart pour qu'on ne la remarque pas. Engoncée dans sa robe bleu nuit, aux broderies aussi magnifiques que luxueuses, elle avait l'impression d'être une impostrice. Tout le monde semblait se connaitre, Morgan avait été appelé à ses obligations de fils de seigneur et Iseult se retrouvait seule avec son verre de vin. La chasseuse n'aimait pas ce breuvage, c'était âpre et amer. On lui avait fourré le verre dans les mains lorsque le seigneur de Castel avait fait son discours d'accueil. Elle se dirigea vers l'un des serviteurs qui portaient un plateau avec des petits fours, elle en mangea plusieurs, ils étaient délicieux. La jeune femme essaya de se détourner avant d'être abordée par un groupe qui la lorgnait avec insistance. Il était, malheureusement, trop tard. Une noble d'à peu près son page s'approchait, suivi de deux autres filles et de trois garçons. Iseult poussa un soupir et but une gorgée de vin, ce qui l'obligea à cacher sa grimace. Elle aurait tout donné pour pouvoir recracher sa boisson dans les plantes.
– Bonjour, ma chère, commença la jeune femme avec un sourire.
Ses lèvres roses étaient surmontées d'un grain de beauté au-dessus de la lèvre. Ses cheveux blonds étaient relevés si haut sur son crâne qu'Iseult en eut le vertige.
– Bonjour, Ma Dame, fit Iseult avec une révérence qu'elle voulut élégante.
– Vous êtes la guérisseuse de Morgan ? C'est cela ? fit son interlocutrice d'une voix doucereuse.
– Je suis une chasseuse, et je suis sa partenaire. Pardonnez-moi, mais je ne crois pas vous connaitre, lui dit-elle.
Son ton se voulait sincère, sauf que cela lui importait peu. Dans son dos, les autres ricanèrent et elle se fit toute petite. Aux regards qu'ils lui lançaient, il la prenait pour une petite orpheline simplette.
– Sidonie de La Hautecour, mon père est le vicomte de La Hautecour. Vous connaissez ?
Iseult se souvenait de ce nom, elle l'avait lu à plusieurs reprises.
– Bien sûr, votre famille est connue pour ses élevages de porcs.
Le visage de la jeune femme se transforma en un rictus et les autres gloussèrent. Iseult arqua un sourcil, sans savoir ce qu'elle avait dit de mal, c'était la vérité. Les élevages du vicomte étaient reconnus, et il commerçait avec l'Académie pour nourrir les mages.
– Vous vous moquez ? grinça Sidonie.
– Je crois qu'elle n'a pas assez d'instruction pour cela, railla l'un des garçons.
Son instinct voulait qu'elle tourne les talons et se détourner du groupe. La politesse et ce qu'Aubépine lui avait appris interdisaient ce geste qui aurait été pris pour une insulte et une offense.
– N'est-ce pas un peu vulgaire de se battre comme un homme ? demanda une autre fille dont les oreilles brillaient à cause des diamants qui y pendaient.
– Il n'y a rien de vulgaire à défendre son royaume, rétorqua Iseult. C'est notre devoir.
Elle était fière d'être une chasseuse, elle n'avait pas à rougir de n'être pas assez féminine pour eux. Elle avait voué son apprentissage aux armes et à la magie. Une main se posa sur son épaule, Iseult leva les yeux vers Pierce qui lui sourit.
– Morgan te cherchait Iz, nous ferions mieux d'aller le retrouver, fit-il avec un sourire.
– Monseigneur de Castel, se pâma Sidonie.
– Mademoiselle de la Hautecour, c'est un plaisir de vous revoir.
– M'accorderiez-vous une danse tout à l'heure ? demanda la jeune femme en battant des cils.
– J'espère que vous me pardonnerez, toutes mes danses sont déjà réservées.
Pierce inclina la tête avec un sourire et offrir son bras à Iseult qui accepta. Elle était trop heureuse de pouvoir échapper aux harpies dans son dos, elle aurait préféré affronter une horde de goules plutôt que ces nobles. Dans un geste de compassion, la main de l'aîné des de Castel se referma sur la sienne.
– Désolé que tu aies à subir ça, souffla Pierce.
– Tu n'as pas l'air plus heureux, répondit-elle avec un sourire.
– Mon col me donne l'impression que je vais étouffer, je déteste ces obligations mondaines.
– Moi aussi, mais je n'aurais à subir ça qu'une fois contrairement à toi.
– Sauf si tu épouses Morgan, s'amusa Pierce.
– Sauf si je l'épouse... répéta Iseult.
Son regard se baissa sur ses mains. Ils semblaient tous avoir décidé de ce qu'elle devrait faire, de qui elle serait. Il manquait cependant une pièce essentielle au puzzle de ces décisions : son avis. Pierce l'entraina dans une autre pièce où il y avait moins de monde et moins de bruit, il lui servit un verre d'eau qu'il lui tendit. Même s'ils ne se parlaient pas, Iseult avait l'impression qu'ils se comprenaient.
– Iseult, ma chérie, tu es là, s'écria Aubépine en venant vers eux. Pierce, ton père te cherche, le baron de Tiercelieu cherche à lui proposer un marché financier sur nos vignobles.
– Je vais donc aller à son secours, fit le garçon avec un clin d'œil.
Il embrassa la joue de sa mère avant de se retirer. Aubépine était splendide dans sa robe dorée qui mettait en valeur son teint frais et ses yeux. Elle prit la main d'Iseult et l'entraina à sa suite.
– J'ai prévu que vous ouvriez le bal avec Morgan, plusieurs demoiselles s'accrochent à lui et je sais que tu seras trop polie pour les interrompre, annonça la femme.
D'une main elle replaça l'une des mèches de cheveux de la jeune fille qui se laissa faire. C'était bon d'avoir quelques gestes maternels parfois. Aubépine prit la main d'Iseult dans la sienne et l'entraina vers Morgan. Ce dernier discutait avec d'autres jeunes nobles, son père quant à lui commença à faire taire l'assistance. Le cœur de la guérisseuse se mit à battre plus fort dans sa poitrine, la danse n'avait jamais été son fort et elle n'avait aucune envie de montrer son manque de grâce à tout le monde. L'ambiance était bien différente de celle de la taverne ce qui n'avait rien pour la rassurer. Toute l'attention se tourna vers le seigneur de Castel.
– Je vous remercie tous d'être venus, j'espère que cette réception vous plait. Je souhaitais féliciter mon fils, Morgan, pour sa réussite. C'est une fierté immense pour nous que d'avoir un mage talentueux dans notre famille. C'est pour cela que nous voulons aussi remercier sa partenaire, Iseult, sans qui il aurait eu plus de mal à y parvenir.
L'homme marqua une pause le temps que tout le monde applaudisse. Morgan s'était approché d'elle, sa main serrée dans la sienne, il lui sourit ce qui la rassura quelque peu.
– Il est à présent temps d'ouvrir le bal, je laisse cet honneur à notre charmant couple de la soirée.
Pour accompagner son mouvement, les musiciens se mirent à jouer. Iseult se retrouva dans les bras de son partenaire, les mains serrées sur sa veste. Elle déglutit et reprit sa respiration, son corps raidi par la situation. Tous les regards étaient posés sur eux et même si Morgan lui souriait, elle ne se sentait pas à sa place, comme un poisson que l'on aurait mis hors de l'eau. La valse débuta. Son pas se cala sur celui du jeune homme qui la tenait comme si elle pouvait s'écrouler, ce qui n'était pas loin d'être le cas. Morgan menait la danse, il la faisait virevolter sur la piste dissimulant sans peine l'inconfort qu'elle ressentait. Entre les bras de Nathaniel, elle s'était sentie légère, cette fois, elle avait l'impression d'être aussi lourde que du plomb. Les gestes de son partenaire étaient brusques, il ne cherchait pas à l'entrainer, il ordonnait de manière silencieuse.
La torture s'éternisa, Iseult due accepter une seconde danse. Cette fois, d'autres se mêlèrent à eux, elle distingua même Pierce, qui derrière son sourire semblait souffrir tout autant qu'elle. Le corps de Morgan se rapprocha du sien, il se pencha à son oreille avec un sourire.
– Tu es magnifique ce soir, lui murmura-t-il en la faisant tournoyer.
– Merci, tu n'es pas mal non plus, répondit la jeune femme.
Si elle souriait, elle sentait aussi ses joues s'empourprer et devenir brûlantes. Iseult n'était pas coutumière des compliments sur son physique, elle ne les appréciait même pas tant que ça. Elle se savait jolie, les prêtresses n'avaient cessé de le lui dire, tout comme Aubépine, et quelques garçons. Sauf que cela ne l'intéressait pas, il lui semblait que les gens attendaient toujours quelque chose en retour de leurs compliments. Morgan lui en faisait parfois, comme ce soir, parce qu'il voulait entendre que lui aussi était beau. Ensemble, ils étaient un beau couple aux yeux des autres. Lui avec ses cheveux sombres et ses yeux dorés, elle avec ses prunelles bleu-vert et ses boucles châtain clair, sans compter le grain de beauté sous son œil droit que tout le monde semblait aimer.
Quand ils eurent terminé leur quatrième danse, Iseult préféra s'isoler. Elle annonça à Morgan qu'elle allait prendre l'air, ainsi, elle trouva refuge sur un banc dans les jardins. La soirée était bien avancée et le ciel était assez dégagé pour dévoiler les étoiles qui scintillaient au-dessus d'eux. Iseult contempla la voute céleste, à la recherche d'un signe quant à ce qu'elle devait faire. Son avenir lui avait toujours paru limpide, mais ses certitudes s'étiolaient petit à petit.
– Je savais que je te trouverais ici, constata son partenaire qui vint s'asseoir près d'elle.
– Tu me connais par cœur, j'avais l'impression d'étouffer, soupira Iseult les doigts emmêlés dans une mèche de cheveux.
– Je te comprends, je n'aime pas beaucoup ça non plus.
– Tu plaisantes ? Tes yeux s'illuminent dès que l'une de ces filles s'approche, les paupières battantes pour te susurrer que tu es fort et puissant, imita-t-elle.
La main de Morgan caressa la sienne, il se pencha vers elle, amusé.
– Parce que tu ne me trouves pas fort et puissant ?
– Je vis avec toi, je connais aussi chacun de tes défauts, comme ton incapacité chronique à ranger tes armes ou encore cette façon que tu as de te mettre en avant, tu sais le torse bombé pendant que tu vantes tes exploits.
Son partenaire éclata de rire et lui donna un coup d'épaule avant de redevenir sérieux.
– Des exploits que je ne saurais réaliser sans toi.
– Tu l'as dit à ces filles là-bas ? Fais attention, c'est moi qu'elles voudront épouser bientôt, s'amusa Iseult.
– Et tu oses dire que je suis imbu de ma personne.
– Je dis seulement que ton égo prend toute la place dans le lit.
D'un geste, Morgan l'attira contre lui et fit mine de la décoiffer. Iseult releva les yeux vers lui. Leur complicité lui faisait du bien, elle était un point fixe dans son univers. Il fit ensuite glisser sa main le long de son bras.
– Iseult, commença-t-il tandis qu'elle se redressait. Je voulais te dire, enfin te demander, quelque chose.
Les sourcils de la jeune femme se froncèrent. Morgan avait plongé la main dans sa veste dorée, elle le regarda alors qu'il se relevait pour lui faire face. Iseult sentit sa bouche s'assécher.
– Morgan, je...
– Laisse-moi parler, l'interrompit-il. Iseult, je sais que pour le moment tu veux que nous profitions de notre nouveau rôle, et que tu ne penses pas encore à un avenir plus éloigné. Mais, tu es importante pour moi, je ne vois pas en toi qu'une partenaire de chasse. Tu es ma meilleure amie, celle à qui je peux confier mes doutes et mes peines, tu m'écoutes quoiqu'il arrive et je sais que je peux te rendre heureuse, pourvoir à tous tes besoins.
– S'il te plait, ne termine pas...
– Iseult, veux-tu devenir ma femme ?
Il avait posé un genou à terre et lui tendait une bague sertie d'une topaze qui représentait un soleil. Sa main trembla sur le banc, puis leurs yeux se rencontrèrent.
– Tu sais que je t'aime Morgan, et que je te respecte. C'est pour ça que je ne peux pas accepter, tout est encore nouveau pour nous, ce que nous avons est suffisant, tu ne trouves pas ?
– Tu es réticente parce que tu as peur de l'avenir Iz. Tu as aussi peur parce que nos rangs sociaux sont différents, mon père approuve ma demande, tout comme ma mère. Cela m'importe peu que tu sois orpheline.
Ce n'était pas les problèmes principaux qu'elle imaginait, elle voyait au-delà de ça.
– Je ne te dis pas que nous allons nous marier dès demain. Tu mérites d'être aimée et protégée, tu veux une famille, et je peux te l'offrir. Je veux te l'offrir.
Sa main avait pris la sienne et il la fit se relever. Morgan avait raison, elle voulait une famille, elle n'était juste pas certaine qu'elle veuille la même que lui. Il voulait des enfants et une épouse afin de s'en occuper, il avait des ambitions chevaleresques, sauf qu'elle n'était pas à sauver ou à protéger.
– Non Morgan, je n'ai pas tes certitudes. Je ne doute ni de toi ni de tes promesses. Je ne sais juste pas encore ce que je veux.
– Parce que tu n'as jamais eu les mêmes ambitions que d'autres. C'est pour ça que je te choisis Iz. Je veux que tu sois ma femme et mon égale. Vois cela comme un essai, prends cette bague et je te montrerais que tu peux avoir tout ce que tu souhaites, parce que je te le donnerais.
Une nouvelle fois, elle allait protester, mais il la fit taire avec un premier baiser. Puis un second. Jusqu'à ce que sa main prenne la sienne et qu'il fasse glisser la bague le long de son doigt. Morgan glissa une main dans ses cheveux pour l'attirer contre lui et l'embrasser plus langoureusement. Un instant, Iseult se raidit à cet élan, puis elle se laissa faire, une main sur le bras de son partenaire.
– Je t'aime Iz, et je ne te laisserai pas partir.
C'était bien ce qui lui faisait peur tandis qu'elle sentait l'anneau à son doigt. Les bras du chasseur ne la lâchaient pas. Iseult releva les yeux vers lui, Morgan rayonnait de bonheur, pour sa part elle avait l'impression de s'enfoncer dans des sables mouvants. Il lui semblait impossible à présent de lui rendre la bague, il voulait qu'ils essaient alors, peut-être avait-il raison.
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