Pour se donner, il faut s'appartenir.
Vauvenargues.

L'ambiance qui régnait dans la cantine mettait tout le monde sur les nerfs, tout le monde sauf L'ombre qui ne souhaite que trouver le chemin d'une douche, la plus chaude possible au début puis la plus fraiche qu'il lui sera possible de supporter.

- Tu as d'autres informations sur les Lehars ? Demanda à tout hasard le chef de meute, qui lui aussi commençait à se sentir lasse.

- Connais-tu leur histoire ?

- Parce c'que tu leur cherches des excuses ? Éructa Galaad qui ne tenais pas en place.

Le second Beta se leva d'un coup en repoussant sa chaise sur la quelle il était assis de travers, quand elle percuta le sol rude et froid en pierre grise du monastère elle se brisa. L'ombre soupira, agacé de tout ça. Qu'importe la meute qu'elle aidait, qu'importe les loups qui se trouvaient devant elle, elle devait irrémédiablement passer par là. Expliquer, expliquer, encore et toujours. Au moins, les sauts d'humeurs des uns et des autres, l'amusait quelque peu. Changeait cette routine macabre.

- Calme ton chien, conseilla L'ombre au chef de meute en soupirant une énième fois.

Ce dernier fronça légèrement les sourcils, ce geste passa inaperçu pour ses deux loups qui lui tournait le dos, pas pour la femme en face de lui qui paraissait bien sérieuse d'un coup.

- Gal, prends une autre chaise et ferme là. Imposa l'Alpha d'une voix qui n'autorisait rien d'autre.

Le loup gronda, l'humain insulta et le tout glissa comme de l'huile sur de l'eau.

- Les lehars que vous connaissez changent, ce n'en sont plus de simples monstres entre humains et loups qui détruisent tout sur leur passage. Ils, non quelqu'un, leur a soufflé l'idée que tout ce que les loups de des trois Déesses ont leur reviennent de droit. Ce n'est plus juste une question d'une dizaine de ces saloperies ici et là qui veulent votre peau pour le simple plaisir de tuer. Il s'agit plutôt, d'ancien humains mauvais jusqu'à l'âme, maudis par un Dieu jaloux, qui veulent vous détruire.

- Lyma a déjà tué un Dieu. Dit le Premier Beta qui n'avait pas bouger depuis plus d'une heure.

Assis droit sur une chaise, les jambes légèrement écartées et ses bras croisés sur son torse, le visage aussi impassible que d'habitude. Curieusement, L'ombre trouvait son côté imperturbable et solide digne de confiance. Presque rassurant.

- Quand elle saura quel emmerdeur est derrière tout ça, elle lui arrachera la tête. L'ombre voulut rajouter que celle-ci trônerait a côté de celle qu'elle avait déjà arraché trois siècles plutôt, mais elle préféra se taire.

- Qu'ils viennent ces batards ...

- Gal... Pourquoi ces Dieux nous font toujours chier...

- Nous sommes maudits à leurs yeux, répondis L'ombre à la question rétorque que venait de se poser l'Alpha. Tout ce qu'il compte c'est la façon dont vous allez vous battre pour protéger les votre. Conclut-elle en croisant à son tour ses bras sur sa poitrine.

- Qu'y gagnes tu ? Lui demanda l'ancien soldat qui n'avait toujours bougé d'un iota, tu le dis toi-même, tout ce qu'il compte ce sera notre façon de nous protéger, à aucun moment tu ne t'inclus.

- Je ne suis pas un membre de votre meute loup.

Ce simple et très logique fait d'arme, désarma intérieurement les trois loups en face d'elle. Cette vérité mit en rogne Adrian, possessif comme il l'était, il eut l'impression que L'ombre allait soit les trahir soit les abandonner tel un enfant trop désireux de vivre sa propre vie. Steeve avait plus l'impression qu'un de ces frères d'armes n'hésiterait pas une seule seconde avant de fuir a toutes jambes un combat qui ne l'intéressait plus. Quant à Galaad, il faisait tout ce qu'il pouvait pour ne pas la coller contre un mur pour l'obliger à jurer de se battre à leur côté jusqu'à la fin des temps. Il se sentait abandonné, sans raison apparente puisqu'elle ne faisait effectivement pas partie des membres qu'il devait protéger envers et contre tout. Cela le foutait en rogne de ne pas comprendre tout ce capharnaüm instinctif qui faisait rage en lui.

Qu'elle le veuille ou non, L'ombre avait toujours eut un certain impact sur les meutes dont elle avait la charge. Elle n'aimait pas cela, elle n'aimait pas finir par les apprécier, les connaitre et devoir disparaitre sans crier et gare un beau jour ou en pleine nuit dans la solitude et le silence le plus total.

- Qu'es tu ? Demanda Adrian dont son loup Rixe flottait sous la surface de son être.

- Je suis L'ombre, loup. Celle qui apparait et disparait aux grés des besoins des fils des trois Déesses.

Cette réponse, mainte et mainte fois répété depuis des années durant l'usant un peu plus encore l'écorchant encore un peu plus. Toujours plus.

- Tu as dit que tu n'échouais jamais, contrairement à nous.

- Je l'ai dit en effet, cette affirmation fit tomber une avalanche de pierre dans son estomac. Elle ne se souvenait que trop bien de cette petite meute qui n'avait pas voulu de son aide.

Leurs cris d'agonies, l'odeur de leur sang, le bruit de leurs os qui se brisaient. Elle se souvenait de tout, de tout même du tout dernier regard de cette Alpha qui semblait la remercier de ne pas les avoir abandonnés alors qu'il l'avait rejeté des années durant.

Elle n'avait pu sauver personnes, aucune âme humaine n'avait survécu à ce carnage, les loups quand a eux avaient depuis bien longtemps retrouver le chemin de l'âme d'autres humains. Elle n'en n'avait recroisé aucun depuis. Elle souhaitait intensément ne jamais en apercevoir un, elle aurait du mal a le supporter.

- Que nous conseilles tu ?

- Il faut mener plusieurs petits combats pour amenuiser leur nombre. Personne ne sait comment ces horreurs se reproduisent mais il y en a toujours plus.

- Peux-tu les sentir ? Lui demanda l'ancien militaire.

- Dans une certaine mesure oui, je ressens leurs énergies fourmiller sous ma peau, je peux savoir ou ils sont mais pas ce qu'ils vont faire ou non. Leur expliqua L'ombre avant de soupirer et de bailler.

D'ici peu, ils allaient l'utiliser comme un vulgaire détecteur a monstres, comme tous les autres.

- S'ils violent nos frontières

- Je le saurais oui. Coupa t'elle le chef de meute.

- Bien. Que ceux qui ont encore besoin de se reposer allez y, je vais organiser des tours de gardes plus important et passer quelques coups de fils.

- Besoin d'aide chef ? Demanda Steeve en le regardant, le premier geste qu'il fit depuis des heures.

- Va te reposer.

- Une douche c'est possible ?

- Si tu rajoute un « s'il te plait » tu peux même avoir une chambre, rétorqua le chef de meute en grimaçant un genre de sourire.

L'ombre le regarda vraiment pour la première fois, ces innombrables cicatrices déformaient les traits de son visage. Cela le rendait effrayant. Terrifiant même, mais elle n'en avait pas peur.

- S'il te plait, rajouta avec une pointe d'arrogance certaine, L'ombre qui se levait déjà.

Satisfait, l'alpha se leva pour lui indiquer son logement, il lui précisa aussi qu'elle y était chez elle. Ce fut concis et simple, mais cette toute petite phrase lui serra ce qui lui servait de cœur.

Alors que L'ombre entrait dans sa chambre, petit luxe qu'elle n'avait plus connu depuis depuis plusieurs dizaine d'années, Adrian fit un leger signe a son second Beta. Ce dernier lui emboîta le pas.

- Qu'importe ce que tu ressens ou ce que tu crois ressentir, demmerde toi pour être plus aimable avec L'ombre.

- Je

- Elle n'était pas obligée de défoncer la cinquantaine de Lehars à elle toute seule, qui voulait nous détruire hier. Oui cinquante Gal, on serait tous mort, elle les a tués a elle toute seule. Imprime et réfléchis. Gronda le chef de meute en regardant son subordonné dans les yeux.

Plus petit que son second Beta, il du lever les yeux pour le fixer ainsi, Galaad avouait sans peine que même s'il aurait fait deux mètres de plus que son chef, il lui serait soumis. Son regard, ce simple regard réduisait à néant la volonté des loups. Il l'avait vue de ses propres yeux.

Sans volonté du loup, plus de loup, juste un chien muselé a peine capable de lever la patte pour pisser.

- Compris. Conclut le second Beta avant de tourner les talons aussi bien pour mettre de la distance entre lui et son chef de meute et elle.

Il ouvrit sa porte a la volé, jeta ses affaires et laissa sa place à Nero. Le loup avait besoin de courir pour évacuer toutes ses tensions, frustration et inquiétude.

Le loup sombre ne se fondait pas dans le vert de la forêt, il cherchait juste à courir toujours plus vite et plus loin. Il ne fuyait pas, ce loup sauvage ne fuyait jamais, au grand damne de son Alpha.

Il courut sans relâche jusqu'à la plaine de la cascade, il fallait qu'il la voie de ses propres yeux.

Pour la seconde fois en trop peu de temps d'après l'ancien militaire, il se laissa tomber dans son lit encore chaussé.

- Raz les pattes... soupira ce dernier en frottant son visage, la paume de sa main râpa sur sa barbe naissante.

Pendant un instant l'idée de se lever pour se raser lui chatouilla son esprit, puis le sommeil l'emporta. Il pouvait se détendre entièrement, son loup Alof veillait sur lui. Tel un frère d'arme.

L'ombre resta un instant bête au milieu de sa chambre. Depuis combien de temps n'avait-elle pas gouté à la chaleur d'un lit ? A la tiédeur d'une douche ? Elle ne savait même plus. Un fin sourire éclaircit son visage saccagé par le poids du devoir et des siècles.

- Lyma ?

- Ta nuit fut courte. Lui dit la Déesse en apparaissant devant elle, toujours vêtu de blanc l'ancienne ayant droit s'assit sur le lit. Elle regardait avec une certaine douceur son Ombre.

- C'est peu de le dire... L'ombre s'appuya contre le mur en face d'elle.

- Repose-toi tout son soûl, je veillerais sur eux. La Déesse voulu rajouter qu'elle veillerait aussi sur elle, mais elle n'avait pas cœur de réveiller une vieille rengaine qui aurait pu prendre de grosse proportion entant donner le manque flagrant d'énergie de L'ombre.

- Mère nature pourrait nous donner un coup de main ?

- Je vais lui en toucher un mot, promis Lyma en se levant.

- Comment se porte la meute du Monténégro ?

- Bien grâce à toi, cette guerre fut rude. Murmura la Déesse. Ombre, repose-toi ton manque d'énergie tire tes traits. Conclut-elle en disparaissant lentement.

L'ombre se laissa aller à un petit sourire presque tendre, au fil des siècles elle avait appris à apprécier celle qui l'avait créé. Leur début avait été compliqué, voir chaotique, Lyma avait dû user de beaucoup de patiente et de tact pour faire comprendre ses motivations à son Ombre. Motivation que L'ombre avait encore du mal à accepter.

Tout en laissant couler l'eau bouillante sur son corps, elle laissa son esprit vagabonder dans son passé. La meute du Montengro... Celle de Louis. La bataille n'avait pas vraiment été plus rude qu'une autre, cet Alpha possédait la faculté incroyable de comprendre ce qu'il se passait en une fraction de seconde. Les monstres étaient aussi moins fort à cette époque-là, moins en colère, moins manipulé.

L'ombre ne voulait plus y penser, c'était le passé. Il devait rester là ou il était, tout en secouant la tête elle savourait le fait de se sentir à nouveau pleine d'énergie. L'eau avait toujours été son élément, aussi vide soit elle, aussi proche de Le disparition pouvait elle être, l'eau la réanimait toujours.

Le chef de meute était perplexe, toute cette longue discussion n'avait pas réussi à lui donner toutes les réponses dont il avait besoin. A moitié allongé sur son matelas a même le sol avec son téléphone entre les mains, il ne cessait de repasser encore et encore tout ce que L'ombre leur avait dit. Il se sentait étrangement possessif envers elle, pas de la même manière d'une âme sœur, heureusement n'arrêtait il pas de se dire, plus comme un membre égaré de sa propre meute qui venait de revenir de son trop long périple. Bien trop long périple.

Son loup Rixe, ressentait la même chose. Pour lui, lui qui avait toujours été à la tête d'une meute, L'ombre n'était pas un simple loup perdu depuis bien trop longtemps, elle était une part entière de sa meute sans qu'elle ne lui appartienne.

- Une fois que tout ce merdier sera fini elle repartira ... dit tout haut le chef de meute a son loup, ce dernier geignit dans son esprit. Lui non plus n'aimait pas cette idée.

Il cessa de jouer avec son téléphone et composa le seul numéro qu'il aurait dû faire depuis la veille. Il soupira à la seconde sonnerie.

- Adrian, lui répondit son interlocuteur d'une voix joyeuse.

- Louis, la voix du chef de meute est bien plus sombre que celle du fils du viking et du Premier, unique survivant du massacre qui avait eut lieu quatre siècle auparavant avant.

- J'ai une question sur L'ombre. Débuta t'il en ramenant un genou contre sa poitrine, son cartilage craqua. Bruit que le loup a l'autre bout de la ligne entendit sans peine.

- Ecoute la, on lui doit notre survie. Dit le plus sérieusement du monde l'humain de Myst. Les Lehars ne sont plus ce qu'ils étaient, ils sont animés par la soif de sang et de revanche. Plus fort que nous, bien plus.

- C'est ce qu'elle nous a dit oui.

- Ne remets pas en doute ces paroles, même si pour nous c'est pas franchement innés. Elle aura toujours raison sur ce point.

Le chef de meute opine du chef en silence.

- Tu as besoin de loup ? Tu m'en avais envoyé à l'époque.

Louis avait raison, seul Adrian avait répondu rapidement présent quand le chef de la meute du Monténégro avait demandé des loups en renfort.

Ce chef de meute n'avait jamais eu aucun problème à demander de l'aide ou accorder le fait qu'il ait pu avoir tord, Louis était a part. Son passé aidant, son héritage aussi.

- Pas pour le moment, merci.

- N'hésite pas avant qu'il ne soit trop tard, je n'ai pas de temps à perdre à porter votre deuil.

- Je ne te le demande pas, rétorqua le chef de meute amusé.

- Mère nature nous fera un signe.

- Il n'y a qu'a toi qu'elle parle, dit amère Adrian.

- C'est le pays qui fait ça, éluda Louis. Une visite de courtoisie ça te dis ?

- Il y a assez à manger.

- Vlass et Yaps prendront la route bientôt.

Les deux chefs se saluèrent rapidement avant de raccrocher. Les deux loups qui allaient venir chez lui n'était pas n'importe quel loup. Vlass, un combattant hors normes, Fils de Yata ennemie du Premier et Yaps, un loup a l'instant infaillible.

Louis prenait tout cela au sérieux.