Autant de têtes, autant de sentiments.

Autant de têtes, autant de sentiments.

Tchouang-Tseu



Plusieurs jours passèrent depuis ce fameux coup de téléphone, plusieurs sans que L'ombre ne daigne se montrer auprès des loups de la meute d'Adrian. L'Alpha fut surpris de ressentir sa présence en lui, comme n'importe quel membre de sa meute, ce qui le surprenait plus encore fut la façon dont il la ressentait. Les siens semblaient vibrer au fond de son esprit, L'ombre quant à elle brillait. Elle était partout et nulle part à la fois, envahissant son esprit tout en le laissant glacial par son absence.

Il savait qu'elle allait bien, qu'elle était proche d'eux, mais pas plus. Cela avait le don de le frustrer plus que de raison, lui qui aimait par-dessus tout avoir tout son petit monde autour de lui, il vivait mal son absence. Rixe était bien plus serein contrairement à son humain. Le loup lui disait, qu'elle referait surface quand elle en aurait marre de dormir dans les arbres, que de toute façon L'ombre était ce qu'elle était : insaisissable, indomptable. Plus sauvage qu'un loup.


Yaps et Vlass firent une pause avant de pénétrer dans ce territoire, les deux loups de Louis n'avaient pas vraiment pris le temps de se reposer depuis leur départ du Monténégro, à peine quelques jours auparavant. Ils sentaient qu'ils devaient arriver chez Adrian rapidement, pourtant aucun danger ne planait, ils sentaient juste qu'ils devaient y être. Mère Nature les guidait, les aidait même à avancer plus vite.

- Tu penses que tu vas reconnaître L'ombre ? demanda Vlass à son coéquipier entre deux bouchés de viande séchée.

- Has hur.... 'me houviens hu h'elle.

- Moi non plus avoua le puant en fouillant dans sa mémoire tout en fronçant les sourcils.

- Pour me voir, il faudrait commencer par me sentir. S'amusa L'ombre perchée sur une branche au-dessus d'eux.

Les deux loups firent un bond, Yaps fut surpris, lui qui avait toujours eu un instinct infaillible pour tout il ne l'avait pas senti venir.

- Ombre, je suppose. Dit avec force Vlass qui venait de se mettre devant son ami en quelques pas rapides.

Non pas que ce dernier ne savait pas se battre, bien au contraire, ce loup se sentait toujours très protecteur envers ceux qui l'avaient accueilli et accepté. Lui, le fils du traitre de Yata. Lui, fait de haine et de violence, qui avait pourtant réussi à trouver sa place auprès de Louis et des siens. Il s'était même fait des amis. Une famille.

- Tu supposes bien loup. Ça faisait longtemps. Dit-elle plus tendrement qu'elle ne l'aurait voulu.

- Tu ressembles donc à ça.

L'ombre sourit, il n'avait pas changé. Elle le laissa l'observer, son cœur ce sera en se rappelant qu'aucun loup ne se souvenait vraiment d'elle. Cela lui fit si mal que son souffle se bloqua dans sa gorge, pourtant elle ne montra rien. Ni ça ni la colère que ça provoquait en elle.

Elle se laissa tomber devant lui, ses cheveux voletèrent autour de son visage rond. Les deux loups froncèrent les sourcils. Quelque chose venait de passer dans leur regard, quelque chose de profond, d'intime.

- He crois he tu m'as hanqué.

- Toi aussi tu m'as manqué Yaps, tu as un peu plus de muscles non ?

- Entraînement, souffla ce dernier pas peu fier de la remarque de L'ombre.

- Comment se porte la meute ?

- Hien, sourit joyeusement le loup en venant la prendre joyeusement dans ses bras.

Il l'avait toujours fait, du premier au dernier jour, comme-ci ils avaient toujours été de très bons amis. L'ombre apprécia ce contact et s'en délecta, peu osait la toucher.

- Allons-y, suggéra L'ombre en jetant un coup d'œil au puant qui était resté en retrait comme souvent. Il n'avait cessé de l'observer en silence fouillant dans ses souvenirs avec ferveur.

Les deux vieux amis parlèrent tout le long du chemin, riant si fort que toutes les potentielles proies prirent la fuite. Juste avant d'arriver devant le monastère Yaps laissa sa place à son loup Vûr.

- Tu détestes toujours autant ta voix, conclus L'ombre en passant une main dans son pelage épais.

- On te suit. Rétorqua Vlass en passant lui aussi sa main dans le pelage du loup de son ami.

- Je ne mène pas, je guide. Alors marches à côté de moi veux tu loup.

Cette phrase résonna au plus profond des tripes de l'humain et de son loup Ikem, ils savaient qu'ils devaient se souvenir de quelque chose de primordial, mais leur mémoire leur interdisait l'accès à ce souvenir qui semblait pourtant si précieux.


Les trois étrangers se retrouvèrent vite aux pieds du monastère, les nouveaux loups ne ressentaient aucune angoisse de ne pas être chez eux. Ils souriaient même à quelques visages qu'ils venaient de reconnaître. Seule L'ombre restait stoïque, elle ne faisait que de regarder droit devant elle, la ou se trouvait Alpha Adrain et ses deux Bêtas. Quelque chose se calma en elle, un feu que sa solitude et les combats alimentaient depuis des siècles.

L'ancien militaire se tenait juste à côté de son chef de meute, les bras croisés sur sa poitrine. Quand leurs regards se croisèrent, un fin sourire se dessina sur le visage de l'homme impassible. Lui aussi se sentait mieux. L'autre Beta se tenait en retrait, sur le passage du pas de la porte. Son visage renfrogné était pratiquement caché par l'ombre du bâtiment. L'ombre voyait clairement le soulagement qui dansait aussi dans ses pupilles.

- Bienvenue Loups, commença l'Alpha en descendant les marches brunes du monastère. Je suis heureux de vous revoir même si j'aurais aimé le faire dans d'autres conditions. Il termina sa phrase en tendant une main ferme en direction du puant.

Ce dernier la saisit et lui rendit don sourire avec ferveur, ils s'appréciaient réellement et Adrian n'avait jamais remis en question ce loup même après avoir entendu parler de son géniteur.

- Pas eut de soucis pendant le trajet ?

- Aucun non.

- J'imagine que vous avez faim ?

Les loups avaient toujours faim, ce fut donc pour cela que la cantine était déjà pleine de nourriture en tout genre. Les deux invités suivirent le chef de meute tout en parlant de tout et de rien de façon très légère. Comme ci il n'y avait pas de menace.


- Bon retour, souffla l'ancien militaire quand L'ombre passa à son tour devant lui.

- Merci loup. Répondit cette dernière en se retenant de sourire.

- Tu devrais aller te laver, tout en lui parlant il lui saisit doucement le bras.

Steeve et son loup Alof avaient juste besoin qu'elle le regarde une petite seconde, chose qu'elle fit. Il la lâcha et se dirigea en direction du jeune homme qui l'attendait en bas des marches pour s'entraîner ou quelque chose du même acabit.

L'ombre le regardait descendre les marches brunes sans se retourner, arriver en bas l'ancien militaire se retourna en direction de la femme sans âge aux cheveux si étrange. Il l'a salua et posa une énorme main sur le jeune loup qui l'attendait de pied ferme, quand ils partirent tous les deux aucuns ne lui jeta le moindre petit regard. Pourtant, L'ombre sentait qu'ils étaient très attentifs à ses gestes.


L'ombre se décida enfin à passer devant Galaad, elle n'y était pas obligée des fenêtres étaient ouvertes ou elle aurait pu retourner simplement dans la forêt, pourtant elle y tenait. Le second Beta serra les dents, son loup Nero la regardait sans bouger d'un iota. Son regard franc et féroce n'avait de cesse de caresser le corps de cette étrange personne qui était pourtant déjà bien trop importante pour sa meute.

En passant devant lui, elle ne lui adressa aucun regard, cela le frustra au plus haut point. Ses lèvres se retroussèrent sur ses dents à la façon d'un loup, un grondement sourd fit vibrer son large torse. L'ombre soupira sans colère. Elle s'adossa contre le chambranle opposé de la porte, un rien les séparait quand Gal prit exactement la même position.

L'un en face de l'autre, se fixant sans bouger, sans céder le moindre millimètre a l'autre. Ils s'observaient, ils y prenaient même un certain plaisir, du moins L'ombre l'aurait interprété comme ça si elle avait su ce que c'était réellement. Le second Beta, quant à lui ne bouda pas son plaisir.

- Tu prends de la place pour rien, lui dit-il pourtant sans cesser de la fixer. Le ton de sa voix était dur et tranchant, il ne laissait rien paraitre, il ne voulait rien montrer tant qu'il ne comprenait pas pourquoi il se sentait aussi possessif envers elle.

Tout ce dont il était persuadé c'était qu'elle n'était pas son âme sœur. Cela désola Nero et rassura son humain.

- Reprends donc ma chambre alors chien, cracha-t-elle en retour.

- La forêt est ta maison. S'entendit-il dire alors que plusieurs idées purement masculines encombraient son esprit.

Si L'ombre fut blessée, elle n'en montra rien.

- Je n'ai pas d'affaires, reprends-la donc. Aussitôt sa phrase prononcée, elle tourna les talons en direction de l'escalier brun.

Elle ressentait de la colère, presque de la haine envers lui.

- Attends ! ses doigts s'enroulèrent autour d'un de ses bras, elle s'arrêta sans pour autant se retourner. Adrian n'accepterait pas que tu quittes ce qu'il t'a donné.

- Il me laissera faire. Son ton tranchant s'évertua à séparer la peau des os du second Beta.

Il ne voulait pas qu'elle parte, il ne voulait pas qu'elle dorme dehors. Il l'a voulait dans son lit. Ses dents s'allongèrent face à l'absurdité de ses pensées, des compagnes d'une nuit étaient monnaie courante pour ce loup qui attendait avec impatience son âme sœur. Pas ce désir.

- Ta chambre. Put-il seulement dire tant sa gorge venait de se serrer.

L'imaginer une nuit de plus loin de chez eux le rendait fou de rage. L'humain et le loup savaient parfaitement qu'elle pouvait se débrouiller seule. Des images de la plaine à la cascade venaient danser dans son esprit.

Elle se retourna sèchement, passa de nouveau devant lui sans le regarder tout en serrant les dents. Le seul contact qu'elle avait encore avec lui n'était autre que sa main posée sur son torse qui l'obligeait à rester à une certaine distance d'elle.


- Louis ne se souvient pas non plus de L'ombre, répondit Vlass à Adrian.

- C'est que ça doit être ainsi. Conclus le chef de meute en jouant avec un bout de viande rouge avant de le dévorer. Vür, tu veux un bout de viande ou tu préfères aller chasser ?

Le loup de Yaps posa son énorme tête sur l'immense table en bois qui trônait au milieu de la pièce. Adrian comprit le message et lui donna une cuisse entière à dévorer tranquillement dans son coin.

- On a plus eu à combattre depuis notre affrontement avec les Lehars, tout ce dont je me souviens c'est d'un vent violent qui a balayé pas mal des monstres.

- On a aussi senti ce vent étrange qu'elle en a tué pas loin d'une cinquantaine sur la plaine à la cascade.

Les deux loups de Louis interrompirent leurs gestes, cinquante monstres.

- Impressionnant, dit le puant en même temps que le grondement de Vür.

- La plaine est défigurée, plus rien n'y vivra plus jamais.


Pendant qu'ils discutaient, Steeve le premier Beta de la meute prit cet entrainement au sérieux tout en regrettant amèrement que Gal n'y participe pas. Ce loup avait une façon bien à lui de se battre, il était l'un des rares à se battre bien mieux seul qu'en groupe. À la façon d'un Alpha même s'il n'en avait pas du tout la carrure.

Par habitude il demanda à l'un des jeunes d'aller le chercher, tout en sachant qu'il refuserait catégoriquement.

Le second Beta était assis sur les marches brunes abritées par le porche en pierre blanchie et rendue inégale a causes des aléas du temps et des guerres. Il aimait cet endroit, un peu a l'écart du monde et surtout cet emplacement lui offrait une vue parfaite sur sa meute sans qu'on ne l'aperçoive tout de suite.

- Steeve demande si tu veux venir ? Le dérangea un jeune loup qui n'avait de tendre que son sourire.

Gal, ne répondit pas, il se contenta de se lever en silence et de suivre le jeune loup. 

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