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« Sev'... Qu'est-ce qui m'arrive ? »

Je sens mon coeur s'affoler à la vue de son visage blême qui m'observe à travers le miroir de la salle de bain. Les mains cramponnées à l'évier, les jambes tremblantes et du sang au coin de la bouche, Harry m'observe d'un regard terne. Ses émeraudes scintillantes ont perdu cet éclat qui les caractérisaient. La vie quitte lentement ce regard que je me suis efforcé de faire pétiller des merveilles du monde. Je ne saurais dire si j'ai gagné ou perdu ce combat. Peut-être un savant mélange des deux.

« Réponds s'il te plaît... »

C'est effrayant comme la situation évolue à une vitesse affolante. Hier encore, nous étions à Lisbonne et le gosse gémissait sous mes attentions, m'attirant encore plus loin dans les vicieux recoins de l'affection. Et maintenant nous sommes à l'autre bout de la planète, perdus au creux des montagnes du Laos alors que le gamin crache des traînées carmin dans le lavabo, l'enlisant un peu plus dans la mort imminente.

Le temps file. Et avec lui, la vie de Harry.

« Severus... ? »

Sa voix est faible. Atone. Il continue de me fixer à travers le miroir et je finis par soupirer. Je décroise mes bras de ma poitrine et me décolle du mur.

« Allons dans la chambre Harry, je crois que nous y serons mieux installés. »

Il hoche la tête avec lenteur. Nous dépassons la fine cloison en bois qui sépare la salle d'eau du reste de l'habitation. Je m'installe sur le lit avec un soupir et m'adosse au mur. Le gosse vient immédiatement prendre cette place qui est sienne, la tête appuyé contre mon torse. Ses doigts pianotent sur ma chemise. Je frissonne.

« Comme tu le sais Harry... commencé-je avec prudence, Albus m'a confié une mission. Celle de te sortir de ton mutisme et ton enfermement au Square Grimmaurd. Mais avec cette directive, il m'a également confié une information. »

Mes mains s'affairent dans ses cheveux en bataille, passant et repassant nerveusement sur ce crâne si fragile. Je ne peux pas. Je ferme les yeux. Je ne peux pas. C'est impossible. Comment annoncer à un gosse qu'il peut mourir à tout moment alors même que celui-ci commence à s'ouvrir au monde ? C'est impossible. Je ne peux pas. Je ne peux pas le briser de cette manière. Je ne veux pas le blesser. Et peut-être que quelque part j'ai peur qu'il me blesse aussi.

« Oui, Severus ? Continue. »

Je rouvre les yeux. Ma gorge se noue douloureusement, enfermant avec elle les mots que je ne peux formuler.

« Severus ? »

Il relève légèrement sa tête et me scrute de son regard trop vert. Trop beau. Trop terne.

« Oui. Je disais donc que Albus m'a confié une information sur ta santé. Il-

- Viens en au fait, Severus. »

Sa voix est ferme, plate. Je sens une douloureuse torsion dans ma poitrine.

« Tu as un cancer du cerveau Harry. »

C'est sorti. C'est expulsé. C'est douloureux. Ma main tremble dans ses cheveux.

« Un...cancer ? Comme la maladie moldue ?

- Celle-là même, répliqué-je d'une voix horriblement faible.

- Combien de temps ?

- Connais-tu au moins-

- Non, je ne sais rien de cette maladie. Je ne veux rien savoir. Dis-moi juste..., sa voix tremble, combien de temps ?

- Environ une semaine, je lâche dans un souffle. »

Le gosse ne répond pas. Ses doigts continuent leur tapotement régulier et imperturbable. Je ne sais pas ce qu'il ressent. Je crois que de toute façon, je ne pourrais pas l'imaginer.

« Une semaine, répète-t-il d'une voix calme et basse. Alors pendant une semaine, on s'aimera jusqu'à ce qu'il ne reste plus une goutte d'amour à consommer. »

Je ne réponds pas. Je ne peux pas. Je sais pertinemment que mon amour pour lui ne sera pas consumé en une semaine, si ce n'est pas plus tôt. Je sais très bien que je continuerai à l'aimer, même quand la mort me l'aura arraché. Je sais très bien que jamais plus je ne pourrais me défaire de ses émeraudes envoûtantes, aussi inanimées soient-elles. Je sais très bien que le manque sera insupportable, quand la douleur s'estompera le temps d'un soupir. Je sais très bien que je vais souffrir quand je me réveillerai un matin alors que lui ne le pourra plus. Je sais très bien qu'il n'y aura jamais de fin heureuse pour ce nous un peu bancal. Je sais très bien que le jeu de l'innocence est fini, que la mort plane comme un vautour assoiffé de chair. Je sais très bien qu'on pliera face au poids du sort. Je sais très bien que tout est perdu d'avance, qu'on ne fait tout ça que pour s'occuper l'esprit et cesser de penser. Je sais très bien que c'est déjà fini.

Mais je me tais. Et je fais comme si.

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Mmmh.. En fait, c'est bientôt fini ;-;

J'écris cette fic tellement au feeling. Vous savez que quand je commence à écrire un chap je sais même pas où ça va me mener. Ça change de d'habitude...

Mais bon, j'ai recompté les jours et du coup... Ben il reste très exactement 7 jours avant que ça ne fasse un mois.

J'ai déjà la fin. Je sais pas quoi en penser. Comme c'est le cas de l'entièreté de cette fic.

Bref, bonne journée à vous !

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