Condamnée

Je sentis qu'on me prenais, mais je ne me réveilla pas pour autant. J'entendais le brouhaha d'une foule au loin, puis soudain ce fut comme si on montait le son d'un cran, ça me fait tourner la tête. Ma joue me brûlait. En fait, on m'a giflé! Je montra les dents, furieuse qu'on m'ait réveillé de la sorte, mais je m'arrêta en voyant Maria devant moi.

- Je suis désolé, me dit-elle en baissant les yeux.

Je hocha la tête faiblement. C'est alors que les deux hommes qui me retenaient me tournèrent vers le bûcher. Au milieu des buches et du bois mort accumulés pour le feu se tenait... un poteau de fer. Merde! Je ne pourrai jamais le faire cramer! Comme je me rendais compte que j'étais fichue, je me mis à me débattre comme un diable dans de l'eau bénite, d'ailleurs, je me demande si ça me ferait quelque chose, de l'eau bénite... MAIS MERDE, CE N'EST PAS LE TEMPS DE PENSER À ÇA!
Les deux hommes virent finalement à bout de moi et m'attachèrent au poteau. J'étais maintenant dans un état second, au bord du précipice. À moins qu'on vienne m'aider, ce qui n'arrivera certainement pas, je mourrai ici. Fini, The End. Bizarrement, je n'avais pas peur, j'avais plus hâte que ça finisse. Le feu prit sans même que je m'en rende compte. Cette fois-ci, mon pouvoir n'éloigna pas le feu. Soit j'étais vraiment trop faible, soit c'est parce que j'avais finalement baissé les bras. J'ouvris les yeux un instant les yeux et je vis un immense corbeau voler au dessus de la foule. Ah, ah, la douleur me fait délirer. Près de moi, j'entendis ensuite un dragon hurler et mes chaînes se défirent. Les gens hurlaient, j'aimais leurs hurlements. Ils me berçaient. Doucement, je me sentis m'envoler, comme attiré vers le ciel par une force invisible. Est-ce comme ça qu'on se sens quand on meurt? J'ouvris les yeux et, à la place de voir le ciel, je vis un plancher de mousse, de fougères et de racines filant à toute vitesse. Bizarre. Je vis aussi d'immenses pattes noires et, au loin, j'entendis le bruissement d'une paire d'ailes. Je ne sais pas combien de temps j'ai passé à fixer le sol, mais je finis par perdre conscience.
Je me réveilla au moment où je touchai le sol et, maintenant que mes idées étaient plus claires, je me rendis compte que je n'étais pas morte. Je me releva avec peine sur mes coudes pour voir Wellan se transformer de dragon à humain. Il m'avait sauvé. Épuisé de m'avoir transporté, il tomba au sol.

- Ne t'inquiète pas, Wellan, je m'occupe de toi, dis-je avant qu'il sombre dans le sommeil.

À peine ai-je terminée ma phrase que je me rendis compte à quelle point elle était stupide. Que puis-je faire pour lui? Je n'arrivait même pas à me relever et j'avais la tête qui tournait, sûrement à cause de la faim ou du fer. En y pensant, je palpa mon visage pour découvrir que le fer refroidit était toujours là, incrusté dans ma peau. Après une autre vaine tentative pour me relever, je décidai s'essayer autre chose. Je pris une profonde respiration et rassembla mes forces pour me transformer en un renard immaculé. Génial, mon corps de renard n'est pas autant affecté par le fer! Je laissa Wellan seul au pied du chêne où nous nous trouvions et me mis en quête d'eau et d'un peu de nourriture. Je trottina au hasard jusqu'à ce qu'une délicieuse odeur soit capté par mon odorat développé. Je suivis le fumet sans faire de bruit quand je vis un petit cerf et sa mère. Sans même le temps de réfléchir, je leur donna la chasse et mon instinct animal prit le dessus. Je couru après les cerfs, mais la fatigue me gagna rapidement. Merde, fallait que ça arrive maintenant? Par chance, le bébé trébucha contre des ronces et la mère s'enfuit en le laissant seul. Mère indigne. Je m'approche et une vague de dégoût me submergea. Ce, ce n'était pas mal, non? Tous les humains le font, pas vrai? J'avais déjà mangé du cerf, mais tuer un petit me semblait cruel. Finalement, je n'eus jamais à le tuer, puisque une bête énorme sortit du fourré et le tua net. Je sursauta.

- Pas capable de tuer, hein? rigola Wellan qui avait reprit sa forme de demi-dragon.
- Pff, et toi, pas capable de te reposer? grommelais-je en reprenant ma forme de démon-renard.

Il rigola de plus belle en s'attaquant de nouveau au bébé cerf et engloutit la viande crue. Je frémis de dégoût. Quand il vit que son "repas" me mettait mal à l'aise, il essuya sa bouche dégoulinante de sang du revers de la main.

- Oulà, et dire que j'étais végétarien, j'ai jamais autant mangé de viande!
- Je crois que je vais m'y mettre, dis-je en courant vers les buisson.
- Et moi, je crois que je pourrai plus! ria-t-il.

Je me pencha pour évacuer mon mal de cœur, mais rien ne sortit de ma bouche. C'est vrai, je n'ai rien mangé depuis... Depuis la lasagne, en fait. Quand je revins, il ne restait que des os du petit cerf. Je détourna le regard et nous nous mirent à marcher silencieusement vers la montagne. J'avais déjà pus récupérer un peu d'énergie pour continuer le voyage.

- Alors comme ça, tu as retrouvé tes souve-
- C'est bon, me coupa-t-il. Je te pardonne.

Je me tus, mais le silence était déjà plus confortable. Je me demande ce que nous allons faire maintenant. Pas question de revenir dans un village, je crois que j'ai eu mon lot de souffrance. Perdue dans mes pensées, je ne remarqua pas que le brouillard c'était levé. Je me tourna vers Wellan, mais je ne le vis pas à mes côtés. Je cessa de marcher d'un coup.

- Wellan?
Bonjourrrrr! me répondit une voix sucrée, trop aimable à mon goût.

Je fit un tour sur moi-même en faisant virevolter mes cheveux blancs autour de moi, mais il n'y avait personne. J'eus un mauvais pressentiment.

Cesse de t'épuiser pour rien, tu ne peux pas me voir.
- Qu'avez-vous fait de Wellan?
Oh, je t'en prie, tutoie-moi. Je suppose que tu parles du demi-dragon? demanda la voix en mettant un accent de dégoût sur les derniers mots.
- Oui, c'est ça.
Ne t'inquiète pas, il a déjà commencé le test.
- Quel test? dis-je en commençant à m'énerver.
Celui que tu vas commencer dans quelques instant! ria la voix. Tout le monde passe par moi, je suis la Gardienne!
- Gardienne de quoi?
Oh, tu poses trop de question, petite fouineuse, allons voir plutôt ce qu'il y a dans ta tête.

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