Et l'amour c'était encore la lune et les étoiles - Part 2
OSCAR
Liane a de la cendre dans les yeux, qui tourbillonne et le fait suffoquer. Il pense à ces images en papier glacé dans les manuels d'histoire au chapitre « Antiquité » représentant les corps des victimes de Pompéi figés à jamais dans la cendre. Il pense, elle ne le croit pas.
Pétrifiée dans les nuées ardentes qui engloutissent ses pupilles, elle ne le croit pas. Elle ne croit pas qu'Evan puisse être parti sans lui avoir dit au revoir.
Elle pense que tout ceci est une mascarade. Un de ces vieux cauchemars éreintants qui peuplent ses nuits agitées. Et le fixant, elle comprend. Il est un livre ouvert dans la pénombre froide des branchages qui surplombent le toit de l'Acadiane. Il ne ment pas. Il n'est plus là.
- En quelque sorte ? s'énerve-t-elle.
Oscar prend une respiration puis deux, puis trois. Alors il lâche du bout des lèvres :
- Il ne sera pas là quand tu rentreras à la maison.
Bourdonnement. Liane cherche ses yeux sans les trouver. Il boue de désir pour elle, c'est déplacé, c'est instinctif. Il voudrait baisser les sièges et étendre son corps sur le sien, tout tremblant.
Va droit au but, pense-t-il. Si tu ne joue pas au sourd, elle ne t'écoutera pas.
Elle s'agite, gesticulant des bras, débitant questions sur questions. Il tourne ses yeux perçants sur son profil. Quelque part dans un couloir de son cœur, le sol s'écroule et la culpabilité s'y engouffre. Il va lui faire du mal, lui mentir, il va la dresser. Dans quel sens, il pense à cette nuit. Aux roues de la voiture sur les pavés glissant comme les joues d'un enfant en pleurs. Il doit faire simple. Ne pas soulever la bête ni les grandes valeurs.
- Liane, il y a des réponses que tu ne peux pas comprendre.
Elle s'étrangle d'ironie et de colère.
- Mais qu'est ce que tu racontes bordel ?!
L'air glacial qui flotte sur la vallée commence à s'insinuer sous leurs pieds et dans leurs mains par toutes les failles du véhicule. Elle ne tarde pas à trembler de froid. Il allume la radio. Se saisit de ses mains gelées. Une reprise lancinante de Bittersweet symphony grince contre la tôle de la voiture.
Il hésite. Esquisse un sourire. Quelque chose vole à leur droite dans les bois.
Et voilà comment il endort ses délires, embrassant de ses lèvres tièdes un à un ses petits doigts :
- Liane, dit-il d'un ton posé entre chacun des baisers, il y a des choses que parfois nous ne sommes pas en mesure de comprendre. Que nous ne devons pas chercher à comprendre.
- Mais tu me dis que mon petit frère a disparu... geint-elle
Elle hausse les sourcils mais ne se retire pas. Il avance sa bouche sur ses poignets, à la limite des manches de son pull effiloché qu'il repousse du nez pour embrasser les veines plus chaudes qui courent à la naissance de son avant-bras. À gauche, puis à droite. Elle frisonne, serre les jambes.
La radio bourdonne tandis que dans son crâne bouillonne la totalité des flammes des enfers.
Si elle l'entendait réciter ces paroles dans sa tête, elle lui demanderait avec naïveté : des enfers, parce qu'il y en a plusieurs ? Et pourquoi on dit le paradis, pas les paradis alors ? Y a-t-il des choses qui ne sont accessibles qu'aux âmes des plus damnés, des profondeurs plus noires encore dans lesquelles il faut finalement terminer ?
Rien que pour cela, parce que l'on conjugue la punition réservée aux pires existences humaines au pluriel, elle lui a dit qu'un jour elle ferait de sales choses, parce que le but de la vie est peut-être d'explorer la profondeur des abîmes infernaux de la souffrance. Pour voir comment c'est là-bas, lorsque faire souffrir les autres est plus qu'un fâcheux pléonasme.
Elle est timbrée parfois. Elle lui a dit à plusieurs reprises ce qui l'a fait sortir des rails, se taillader les bras. Elle est gentille, Liane, adorable femme qui ne veut blesser personne d'autre qu'elle-même. La maladresse candide qu'il peut contrôler.
Il retrousse les manches de son pull, inhale les effluves de Stefan qui imbibent le coton, serre alors les dents. Avec plus d'ardeur, il fait ramper ses lèvres humides le long de ses deux bras, à gauche et à droite. Au creux de ses clavicules, langoureux, à gauche et à droite. Elle comprime ses genoux l'un contre l'autre.
Sur la peau fine de son cou, à gauche et à droite, et enflamme l'aura glacée qui filtre de son corps.
Sa langue rampe jusqu'à ses joues, le long de leurs arêtes tranchantes, à gauche et à droite. Elle ouvre ses paupières et le dévisage avec étonnement et frustration. Il glisse le bout de son nez contre le sien. Elle peine à respirer autre chose que l'odeur d'Oscar. Instinctivement elle cherche ses lèvres et la bouche du garçon dessine un sourire carnassier. Enfoncée dans son siège, elle n'a aucune porte de sortie.
Evan, tente-t-elle de souffler.
Il dépose sur la commissure de ses lèvres un tendre baiser.
LIANE
Oscar a redémarré la voiture.
- Tu veux pas que l'on rentre à la maison, dis ? Chez nous, bébé.
Il conduit, une main posée sur mon genou. Une larme dégouline le long de mon nez, je respire son odeur salée de sueur. J'inspire, le regard fixé sur la route, la trace de ses lèvres au bord des miennes. Disparu. Le mot est si doux. Envolé. Il l'a prononcé avec un tel détachement que ces sept lettres m'ont donné l'impression qu'Evan n'était qu'un oiseau sur une branche qui a pris peur au bruit de pas.
Tragiquement invisible. Indifférence des plus totales qu'il feint, comme si Evan n'était qu'un fantôme que nous avions l'habitude de laisser nous hanter. Un fantôme qu'il suffit de chasser d'un geste de la main.
Quelque chose ne cloche pas. Oscar devrait déjà s'être précipité dans les commissariats, il aurait déjà dû mobiliser la police, il aurait déjà dû s'être préoccupé avec plus d'ardeur et de panique de sa soudaine disparition.
J'observe la couleur fauve des yeux d'Oscar. Ses pupilles sont comme chauffées à blanc, comme s'il les avait trempées dans de l'acide et galvanisées.
- Tu sais où il est. prononcé-je d'une voix dure.
Un cahot de la route déstabilise le véhicule. Ses doigts sont toujours sur ma jambe. D'une main il manie le volant et ralentit. Les cailloux sur le bord de la route lapident l'Acadiane.
Il déglutit, sa langue se presse contre la paroi de sa joue. Ses fossettes saillent.
- Je sais pas.
Un lourd silence accompagne ces trois mots. Il nie.
- Et Dimitri, Paulo, Jacques, Martin ?
- Ils sont partis pêcher. Murmure-t-il.
Exaspéré, je tape du poing sur le tableau de bord.
- Arrête ! hurlé-je. Arrête de jouer à ton petit jeu ! Dis-moi la vérité, sans filtre, arrête de me protéger !
Il contracte la mâchoire. Nous dépassons un carrefour et décrivons une embardée sur la droite. La voiture s'enfonce dans l'obscurité des bois. Les feuillages des arbres sont si denses que les feux de croisement, faiblards de l'Acadiane, s'allument. Le ciel gris n'est qu'une mince fissure qui lézarde le dôme végétal au dessus de nos têtes. Mon pied droit se met à tambouriner contre le sol compulsivement. Je lui jette un regard par-dessus mon épaule. Il fixe le chemin d'un œil noir.
- ... ou de te protéger ? soufflé-je d'une voix hésitante.
Toujours pas un regard. Cette soudaine lacune vertigineuse d'émotions sur son visage ne fait qu'accentuer mes soupçons. Il est de marbre, coulé dans du béton, lui normalement si doux, tendre, le regard habituellement velouté, habité d'une chaleur inébranlable. J'en ai presque envie de rire. Ses petites feintes me paraissent complètement ridicules.
Le contact de sa main sur mon genou me dégoûte subitement. Il m'est affreux de penser que l'homme que j'aime est impliqué dans la soi disant disparition de mon petit frère dont il m'accuse d'y porter trop d'attention. J'ai l'impression que le monde tourne à l'envers. Stefan et sa salle de bain me manquent tout à coup. À cette époque-là c'était encore moi qui enchaînais les pétages de câble et tournais la manivelle dans le mauvais sens. À présent le monde lui-même a décidé de mettre plein gaz sur l'absurde.
Les larmes me montent aux yeux. Bruyamment j'inspire puis expire. Oscar tourne la tête, les bois s'enfoncent avec la route vers le bas. Il remarque les gouttes salées sur mes joues, peut-être a-t-il senti l'odeur de mes larmes. Son visage se fend.
- Pourquoi tu pleures ? dit-il d'une voix rauque.
Je fais abstraction de l'ironie de la situation.
- Je suis en train de me dire que je suis instable, une dératée, une déséquilibrée.
Il retient sa respiration. Le moteur gronde. L'aiguille de la vitesse monte dangereusement. Clouée à mon siège, je ravale mes pleurs. Il trace entre les arbres en perçant de courts lambeaux de brouillard.
- Putain Lee ! On avait dit qu'on arrêtait de penser cela !
Je me rappelle toutes les séances de sophrologie que nous avons faites pendant l'été. Tous les efforts qu'il a concentré pour moi et toutes les heures qu'il m'a données. L'angoisse s'ébroue au creux de mon ventre et se déplie dans chaque parcelle de mon corps, venant s'enrouler autour de mes bras, de mes jambes. Je meurs soudainement de chaud alors qu'il ne décolère pas :
- Liane, mais Liane ! On avance pas pour reculer !
- Dis-moi où est Evan !
- Je ne peux pas te dire quelque chose que je ne sais pas !
- Tu es complice ! hurlé-je d'une voix suraiguë. Je le vois sur ton visage Oscar !
J'oscille de droite à gauche et mon épaule à intervalles réguliers cogne lourdement contre la paroi de la porte. Boum. Boum. Boum. Mon cœur pulse le sang, envoyant ses soldats pourpres enfoncer mes veines. J'ai l'impression de gonfler. Les arbres qui se resserrent sont notre seul passage. Il va plus vite, encore. Je veux crasher la voiture, qu'elle se crashe. Il me rend folle, nuage d'orage et pluie qui éclate, ne fait qu'éclater, pluie acide ou juste pluie de gouttes où il ne m'a pas appris à respirer. Je veux respirer dans l'eau.
On était au bord du lac. Il a passé son bras et j'ai frissonné. Du doigt il a tracé le contour de ma joue avec la salive du baiser qu'il venait d'y déposer. J'ai serré mes genoux l'un contre l'autre. Il m'a regardé comme si j'étais le monde entier, il m'a dit qu'il fallait que je respire, Lee, qu'il fallait que je boive de l'eau. Ses yeux étaient de la même couleur que celle des feuilles mortes qui s'échouent des branches des arbres. Je me souviens lui avoir dit :
« Je suis en apnée. Oscar. À chaque fois que je suis avec toi. Il va falloir que tu m'apprennes à respirer dans l'eau. »
Son sourire amusé a dessiné un croissant de lune humide sur son visage.
- Je veux respirer dans l'eau. murmuré-je.
- Hein ?
Oscar fronce les sourcils. L'Acadiane surgit hors du boyau sombre de la forêt. J'observe le splendide point de vue qui s'offre à nous, plongeant dans le vallon. De haut, la route en granit rose dessine un trait de rouge à lèvre au ravin. La vallée béante me fait penser aux lèvres pleines et charnues d'Oscar. Ses lèvres qu'il plisse avec tant de force que les commissures en sont blanches.
- Je veux savoir la vérité. J'ai l'impression que cette histoire est un cauchemar.
Je laisse basculer ma tête entre mes mains et réalise qu'il a arrêté la voiture. Violemment il me tire vers lui. Son visage se suspend à quelques centimètres du mien.
- Vous vous protégez merde... Et moi je suis quoi dans tout cela ? Je suis sûre qu'ils sont dans le coup, qu'ils ne sont pas partis pêcher, où ont-ils emmenés Evan ?
Mon diaphragme effectue un mouvement de balancier effréné dans mon abdomen. Il repousse mes mèches derrière mes oreilles, découvre mes traits brillant de larmes.
- Hé.
- Je veux que tout cela s'arrête. Je veux rentrer à la maison. sangloté-je, exténuée.
La fatigue alimente les pales de mes paupières et doucement elles se ferment.
- Alors rentrons. Ça sert à rien de s'épuiser. Ce soir quand ils rentreront...
Il me presse dans ses bras.
- ... nous parlerons.
LIANE
Le claquement des portières. Le moteur qui s'arrête. Les crissements de leurs semelles humides sur le gravier. Le chuintement de leurs souffles dans l'air froid. La lourde porte qui s'ouvre et je laisse exploser ma fureur. Je me rue dans le couloir. La main d'Oscar se meut avec trop de lenteur, elle ne peut me retenir. Nous jaillissons tous les deux dans le corridor de l'entrée. Moi le faciès écumant et lui, bras ballants dans le désespoir.
Martin finit d'essorer son bonnet orné de l'écusson des Reds de Liverpool. Son regard limpide trouve le mien tandis qu'il rejette ses mèches blondes en arrière. Un éclair zèbre l'air. Dimitri enfonce ses mains dans ses poches. Les jumeaux : Paulo et Jacques, se tiennent l'un à côté de l'autre, figés comme s'ils m'attendaient. Jacques respire toujours cette impression qu'il est là sans comprendre pourquoi, comme s'il se trouvait ici par erreur, par hasard.
- Où est Evan ? Tonitrué-je en m'élançant en avant.
Je m'apprêtais à empoigner Martin par les épaules lorsque Oscar se saisit de moi. Je me débats instantanément, élançant mes poings dans le vide. Dimitri se plante à ma hauteur, il me domine de sa large carrure qui roule des mécaniques. Jamais je n'ai eu autant envie de le frapper à la vue de son sourire crispé par l'hypocrisie.
- Tu n'as pas à connaître la réponse. prononce-t-il d'un air détaché.
Oscar jure avant que je n'ai le temps de voir rouge à mon tour. Intenable, je lui hurle dans les oreilles :
- Tu te fous de ma gueule ?!
- C'est vrai ça, t'avais pas mieux comme réponse ? se lamente Oscar, un bras enroulé autour de ma taille, me coinçant contre lui et l'autre posé sur mes épaules en signe d'apaisement.
- Je n'ai pas à connaître la réponse ? Vociféré-je et ma voix se brise. C'est mon petit frère, AU CAS OÙ AUCUN DE VOUS NE L'AURAIT REMARQUÉ !
Paulo et Jacques accourent jusqu'à nous.
- Je te jure calme-toi Liane, il n'y a aucune raison de t'énerver... commence le premier.
- ... nous avons des explications à te fournir, OK ? Mais d'abord tu dois te déstresser... termine le deuxième.
Je sue abondamment. Mes cheveux lourds et moites collent à ma nuque. La peur est un gigantesque broyeur qui passe à la moulinette chacun de mes organes.
- Je veux vos explications tout de suite alors !
Dimitri décoche un coup de coude dans les côtes de Jacques. Ce dernier dissimule un cri de surprise dans son souffle coupé. Je ressens dans mon dos la tension qui bande les muscles d'Oscar et hache son souffle, chaud au creux de mon cou.
- Je... Je veux parler avec Grand Pa' et Grand Ma' ! Ils sont au courant ?
Dimitri secoue la tête en articulant :
- Non. Tu ne les appelles pas. Ils sont en cure, tu le sais. Grand Pa' est fragile en ce moment. Ils n'ont pas besoin de savoir ce qu'il se passe ici. Après tout ce qui nous est déjà arrivé, ils ont le droit à un peu de repos.
Il tente de me prendre par les sentiments. Et le pire, c'est que cela fonctionne. Le poinçon cuisant de la culpabilité vient transpercer ma gorge. Après tout ce que j'ai fait à cette famille, ais-je encore le droit de perdre le contrôle de moi-même ? Existe-t-il un quota du nombre de fois où cela demeure acceptable de faire du mal à sa famille ? Faut-il le définir, en amont, avant que tout commence, établir un contrat, pour éviter les dérapages ? Et ainsi pouvoir se permettre de pouvoir pardonner, éponger, mentir.
Oscar me soulève à bout de bras, il me maintient debout, m'évitant de m'éparpiller au sol en des bouts de verre tranchant qui leur cisailleraient les chevilles.
- Dîtes-moi. Supplié-je presque, et les première larmes énormes et brûlantes perlent à mes yeux.
Je flanque mon poing dans l'abdomen de Dimitri sans aucune conviction. Les jumeaux Jacques et Paulo me dévisagent comme s'ils me voyaient pour la première fois. Ils sont figés dans un silence qui fait ployer leurs épaules. Tous. Je les sens écrasés par le poids de mots qu'ils ne veulent pas me dire.
Un instant ma vue se trouble. Mon esprit tournoie. Leurs regards s'arment d'un désespoir muet.
Qu'est-il arrivé à mon petit frère ?
Je ne peux que craindre le pire. Alors je hurle de nouveau, je bafouille et m'empêtre dans mes paroles. Je leur crie tous les plans et les éventualités horrifiques qui traversent mon esprit, je leur dis qu'ils doivent me laisser choisir le cercueil d'Evan, que je veux le voir, que je saurai supporter le poids de son visage mort. Martin lève la main, le blond pâle de ses cheveux se reflète dans les cristaux rutilants du lustre, il pose sa paume sur mon épaule et je sens à travers ma chemise légère le contact de sa peau glacée. Il me harponne de ses yeux d'un bleu polaire avant de murmurer :
- La police est prévenue...
Les autres tiquent mais il ne bronche pas :
- Ils nous protègent. Ils protègent Evan.
- Mais où est-il ? m'effondré-je, en pleurs.
Ses pupilles perdent en assurance, il cherche tour à tour le regard de ses frères sans en trouver un seul. Je répète ma supplication. Oscar desserre son étreinte. Libérée de ses bras je me sens vide. Affreusement vide et libre, mais de faire quoi ? J'ai besoin de sommeil.
Finalement il me saisit par les mains et coupe Martin avant que celui-ci n'ait pu poursuivre la conversation :
- Et si on en parlait après que tu aies pris une bonne douche ? prononce-t-il doucement. Lee tu es toute rouge. Va te laver, ça va t'apaiser et après on reparle ?
Secouée par des tremblements nauséeux, je plonge mes yeux dans le vert de ses pupilles, dans la profondeur de ces eaux d'une tendresse et d'une sérénité immuables. Il me dévore du regard, j'en ai le souffle coupé et je sens sa respiration, sifflante, rapide. J'acquiesce. C'est si facile de m'abandonner à lui, à ses choix, de le laisser prendre le contrôle.
Une seconde, un éclair d'hésitation hachure son regard, une rayure sur un disque qui se met à disjoncter. Alors il se penche, m'attire à lui. Il plaque ses paumes sur mes joues, incline la tête. Ses boucles brunes se déversent sur ses yeux et il embrasse à pleine bouche mon front en nage.
Lorsqu'il se détache étourdi je le vois se tourner vers Paulo, Jacques, Martin et Dimitri - nos frères - qui statufiés dans une torpeur soudaine, nous dévisagent avec de grands yeux, faussement insondables.
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