Chapitre 24
Tu es sûre ?
Deux semaines passent. J'en avais besoin pour me remettre de mon évasion car je reste fatiguée un long moment. Ma migraine peine à disparaitre et je passe de longues heures à dormir dans la journée. Malgré les soins de Lila, mon dos continue de me faire souffrir et je m'astreins à faire plusieurs séries d'exercices d'étirements pour redonner de la souplesse à mon corps, malgré les tiraillements de mes cicatrices.
Le confort du bunker n'est pas égal à la vie que je menais dans l'Odéon mais il est un milliard de fois supérieur à celle au mois passé dans la cellule, et à l'année dans la grotte. Ici, j'ai ma propre chambre, ce qui représente un luxe. Même lorsque j'étais parmi les rebelles, je dormais dans un dortoir, mais notre nombre est suffisamment réduit pour que je puisse m'isoler dans un lieu qui m'est exclusivement réservé, avec un lit et une salle d'eau personnelle. C'est presque trop beau. Lila a déniché tout un tas de vêtements dans de vieux coffres et les a distribués à l'ensemble du groupe. Ils sont un peu grand mais c'est mieux que mes affaires sales et trouées.
Tous les matins, nous déjeunons ensemble avant de nous réunir pour répartir les tâches journalières. Nous tentons de retrouver les survivants à l'aide de la carte mémoire et de l'annuaire trouvés par Macha. Quand nous localisons quelqu'un, nous notons sur une feuille ses coordonnées et son nom. C'est comme cela que nous nous nous apercevons vite qu'un groupe assez conséquent de personnes se trouve au même endroit. Parmi eux, nous repérons le nom de six rebelles de la « première génération », comme les appelle Valentin. Quatre hommes et deux femmes. Nous en trouvons trouvé d'autres qui n'étaient pas sur la liste de Lhionel et qui semblent vivre avec eux. Valentin et Nathaniel, experts en informatique, analysent les documents trouvés dans le bunker qui appartenaient aux anciens rebelles. Ils continuent aussi de garder contact avec les castes des ouvriers et des agriculteurs qui nous envoient de la nourriture.
Nous nous réunissons aux heures de repas dans la salle principale. Les enfants passent la majeure partie de leur temps dans cet endroit. Le bunker est devenu un véritable terrain de jeu et j'envie leur candeur. Ils semblent insensibles aux événements qui les entourent, perdus dans leurs jeux d'enfants. Ils ont un repas chaud, un endroit où dormir, des jeux de société, des livres imagés et ils passent leur temps à se cacher dans les chambres. C'est tout ce qui compte pour eux et ils sont loin de nos soucis de jeune adulte. C'est plaisant de voir des sourires sur leurs visages.
Les jumelles prennent très à cœur leur nouveau rôle de nourrice. Elles passent leurs journées à s'occuper des plus petits et leur trouvent de nombreuses activités. Je suis impressionnée par leur maturité. En quelques semaines, elles sont devenues des adultes. Nicolas leur apprend à faire la cuisine et ils nous régalent tous les trois de bons plats le soir. J'ai l'impression d'avoir trouvé une famille, ou retrouver l'ambiance qui nous unissait quand je vivais parmi les anciens rebelles. Je savoure chaque jour qui passe sans crainte que nous soyons attaqués, torturés ou tués. Je sais que ces instants ne dureront pas mais j'aimerais parfois qu'ils soient éternels. La seule ombre au tableau, c'est Lhénaïc qui s'obstine à ne pas vouloir me parler. Nos seuls échanges se résument à des conversations de groupe cordiaux et ça me met en colère. Parce que je ne parviens pas à comprendre son comportement.
Un soir, Khisa et Coraline trouvent une chanson dans une des chambres d'un ancien rebelle et se mettent en tête de nous la chanter. À l'instant où elles fredonnent l'air de la mélodie, les paroles ressurgissent dans ma mémoire. C'est une ode à la liberté. Nous la chantions avec les autres résistants, ils en avaient fait leur hymne.
Dans une plaine lointaine
Des hommes et des femmes vivent sous la terre
Jour et nuit, ils sont cachés
L'âme pleine de nostalgie
Ils pensent au Printemps
Ils pensent à la liberté
Ils chantent en riant
Ils croient en la liberté
Un jour l'illusion retombera
Un jour ces hommes et ces femmes se libéreront
La cité sera radieuse
Libérée de ses démons
Un jour les hommes et les femmes se libéreront
Nicolas et Lila reprennent le couplet. Les autres suivent. Nathaniel, Valentin et Lhénaïc écoutent en silence et je fais de même, submergée par l'émotion transmise par leurs voix. Lorsque le refrain arrive, j'ai la surprise d'entendre celle de Lhénaïc fredonner aux les autres. Mes yeux se perdent un instant dans les siens et il me sourit.
Dans la plaine lointaine
À l'abri de l'Odéon
Nous sommes unis
Un matin de printemps
Le soleil se lèvera
L'illusion retombera
Et la liberté renaitra
Sous ses beaux yeux bleus, des cernes creusent ses joues. Ses cheveux ne sont pas coiffés et il parait très fatigué. Il est beaucoup moins apprêté que lorsqu'il vivait à l'Odéon, son pull rouge vif troué contraste avec son pantalon blanc et fait ressortir le violet dans le fond de ses iris. C'est étrange de le voir porter une autre couleur que l'uniforme de la cité. Les enfants continuent de chanter, à plusieurs reprises. Je les écoute en souriant avant de mêler ma voix aux leurs. Après ça, nous finissons notre repas dans le silence. Avant d'aller me coucher, j'embrasse chacun d'eux, puis remonte dans ma chambre.
Même si j'apprécie d'avoir mon espace à moi, je me sens seule. Nous avons vécu en collectivité durant tellement longtemps que cela me fait bizarre de n'être qu'avec moi-même à la tombée de la nuit. Nicolas a retrouvé Lila et il ne vient plus discuter avec moi le soir. Je ne lui en veux pas, je comprends qu'il veuille profiter d'elle, mais je ne pas m'empêcher de souffrir de la solitude après toutes ces années à ses côtés. Je ne dormais plus seule depuis trois ans et la présence familière de mon meilleur ami me manque. Je suis presque arrivée dans ma chambre quand je remarque que quelqu'un me suit. Une main se pose alors sur mon épaule et je me retourne d'un bond, près à frapper la personne à qui elle appartient.
Mon regard rencontre celui de Lhénaïc et mon poing se fige en l'air. Je n'ose plus respirer et avale difficilement ma salive alors que son visage est proche du mien. Nous ne sommes qu'à quelques centimètres l'un de l'autre et je sens son souffle délicat dans mon cou. Il resserre sa main sur mon épaule et je sens mon cœur accélérer. C'est incompréhensible. Je devrais le détester de m'avoir ignoré ces derniers jours.
– Tu as besoin de quelque chose ? demandé-je.
– Je peux entrer ?
– Dans ma chambre ?
Je le regarde d'un air sceptique alors qu'il hoche la tête. Je pèse le pour et le contre, puis m'écarte en lui faisant signe d'entrer. Après, que pourrait-il se passer ? Vu son attitude, il est clair qu'il ne va pas se jeter sur pour m'embrasser. Il passe devant tandis que je referme la porte derrière moi et va s'asseoir sur mon lit. Je tire la chaise près du bureau et prend place en face de lui, dans l'attention qu'il parle. Je m'aperçois alors qu'il se serre les poings, comme chaque fois qu'il est stressé. Il ouvre la bouche, puis la referme, avant de finalement se lever.
– C'était une mauvaise idée, déclare-il.
Il s'apprête à partir quand je lui saisis le bras. Il s'arrête net et me fixe. Je ne peux pas supporter l'idée qu'il s'en aille et quitte ma chambre. Je me sens déjà si seule et je veux comprendre ce qui lui arrive. Nicolas est avec Lila, Mathie est mort – au moins psychiquement - et ma famille d'enfants perdus se débrouille très bien sans moi. Il n'y a que Lhénaïc qui soit proche de moi, qui puisse me comprendre et saisir ce que je ressens. Alors, même s'il me fuit depuis plusieurs jours, j'ai besoin de lui. Ma main glisse jusqu'à son poignet et je resserre mes doigts alors que mon cœur bat plus fort.
– Je t'en prie, reste !
Il lâche la poignée de la porte, se penche vers moi et prend mon visage entre ses mains. Je m'arrête de bouger, figer. Ses doigts glissent sur ma joue et je remonte ma main moi aussi. Que faisons-nous ? J'attends qu'il s'arrête, mais il ne me lâche pas. Ses yeux sont fixés dans les miens et je pourrais m'y noyer. Doucement, il s'avance vers moi et quand nos lèvres se rencontrent enfin, je ferme les yeux. Je ne sais pas ce qu'il nous arrive et je n'ai pas envie d'y penser. J'ai seulement envie de me serrer contre lui, de sentir son souffle, sa chaleur, ses mains sur ma peau, sa langue sur la mienne, ses lèvres contre mes lèvres.
Plus rien d'autre ne compte que nous. J'oublie Mathie, mes problèmes, l'endroit dans lequel je me trouve. Plus rien d'autre n'existe que lui et cet instant. Il passe ses mains dans mon dos et caresse ma peau sous mon t-shirt pendant que je me presse contre lui. Des papillons secouent mon bas-ventre et je me relève pour l'entrainer vers mon lit sur lequel nous tombons tous les deux. La chaleur se répand entre nous alors que nous reprenons nos baisers. C'est comme une fièvre, brûlante, qui s'empare de nous. Comme quand on a besoin de respirer. Nous ne nous arrêtons que pour reprendre notre respiration, alors que je retire son pull et qu'il fait pareil avec mes vêtements.
Rapidement, nous sommes en sous-vêtements, nos corps fiévreux et moites serrés l'un contre l'autre. Ses mains glissent sur mon corps et je le laisse faire. Cela fait tellement longtemps que personne ne m'a touché, et c'est arrivé si peu de fois. Avec Mathie, c'était... différent. Lhénaïc est doux, mais empressé. Ses mains tremblent, comme s'il craignait de me toucher et qu'il ne voulait pas m'abimer. Je récupère ses mains et les embrasse avant de les poser sur ma poitrine.
– Tu es sûre ? souffle-t-il dans le creux de mon oreille.
Ses lèvres descendent sur ma nuque et je hoche la tête en poussant un gémissement. Nous sommes en sous-vêtements et je ne sais pas ce qui nous arrive. Je sais juste que je veux qu'il vienne contre moi, qu'il continue de me toucher comme il le fait et de m'embrasser. Il s'empare de mes lèvres et retire mon soutien-gorge. Je frisonne quand ses mains passent sur ma poitrine et glisse les miennes sur son torse.
– T'as les mains froides, murmure-t-il.
– Les tiennes sont brûlantes.
Il caresse ma poitrine, doucement, presque timidement. Je reviens embrasser ses lèvres alors qu'il se couche contre moi et que les derniers vêtements qui protégeaient nos intimités tombent sur le sol. Ses yeux me dévorent du regard et je me sens rougir. Sa main s'attarde sur mon ventre, puis descends vers mes cuisses en m'arrachant un gémissement.
– Ne regarde pas mes cicatrices, lui dis-je alors qu'il embrasse ma nuque et passe ses mains dans mon dos.
– Ne regarde pas les miennes.
Un instant, mes yeux s'attardent sur ses avant-bras. Lorsqu'il a retiré son pull, j'ai vu des marques, comme des coupures, ou des brûlures, mais j'étais trop enfiévrée pour m'arrêter et l'interroger. Ce n'est pas le moment. Ni lui ni moi n'avons envie de parler de nos cicatrices. Nous voulons seulement combler ce désir qui dévore nos cœurs.
Il m'embrasse de nouveau. Je lui rends son baiser, ma langue court sur la sienne et je peine à respirer. Je me sens belle, pour la première fois depuis longtemps et je soupire de plaisir à chaque fois que ses lèvres effleurent ma peau.
– Vas-y, chuchoté-je à son oreille.
– Je... Tu me dis si je te fais mal, je ne veux pas...
– Lhénaïc, murmuré-je. Tu ne me feras pas mal.
Je glisse ma main dans son dos et l'encourage à venir contre moi. Nos yeux se croisent, nos lèvres se retrouvent encore. Alors, il s'avance et nos corps fusionnent enfin. Ne font plus qu'un. Je laisse ma tête partir en arrière alors qu'il m'embrasse dans le cou et que nous nous perdons l'un contre l'autre.
¤
Lorsque j'ouvre les yeux, Lhénaïc n'est plus dans mon lit. Ma main passe sur le drap où la forme de son corps est encore dessinée et un sourire étire mes lèvres. Je m'assoie, l'esprit encore embrumé par la nuit que nous venons de passer et jette un regard dans la pièce. Un papier est posé sur mon bureau, avec toujours la même écriture fine que la dernière fois. Ma main l'effleure et le souvenir des baisers de Lhénaïc me revient à l'esprit.
« Nathaniel avait besoin de moi. Nous serons absents toute la journée. Lila et Nicolas t'attendent dans le hall. A ce soir, je t'embrasse. Lhénaïc »
Ses derniers mots me font sourire. Des flashs de la veille me laissent un moment sur un petit nuage et ma main se porte instinctivement vers mon cou. Je sens encore le souffle chaud de sa respiration sur ma nuque et la caresse de ses baisers pendant que je prends ma douche et m'habille. Comment m'embrassait-il dans sa lettre ? Il aurait pu préciser. Je glisse le billet dans ma poche et sors prendre mon petit déjeuner.
Quand j'arrive dans le hall, Nicolas et Lila sont assis à table, l'un en face de l'autre. Ils discutent à voix basse, deux tasses de thé fumantes serrées entre leurs doigts. J'entre dans la cuisine et fais bouillir de l'eau avant de revenir vers eux. Lila a attaché ses longs cheveux bruns en un chignon. Je l'observe tout en faisant tourner mon sachet de thé, le regard perdu dans le vide. Il me faut un moment pour remarquer le petit sourire en coin qu'elle échange avec Nicolas.
– Quoi ? demandé-je.
– Tout va bien Anah ?
Je hoche la tête. Elle me tend un morceau de pain pendant que Nicolas pousse vers moi un pot de confiture. J'étale les fruits sur ma tartine pendant que Lila continue à m'observer en souriant.
– Mais qu'est-ce qu'il y a enfin ?! m'exclamé-je.
– Tu as l'air d'avoir bien dormi.
Lila croise le regard de Nicolas qui éclate de rire. Il est en train de griffonner sur un papier et s'arrête pour m'observer en ricanant.
– Qu'est-ce qui vous arrive ? m'agacé-je.
– C'est juste ton pull, relève Nicolas.
– Quoi mon pull ?
– Il ressemble beaucoup à celui de Lhénaïc, soulève Lila.
Je fronce les sourcils et baisse les yeux. Et là, je comprends. Je porte le pull rouge de Lhénaïc. Nous avons dû échanger nos vêtements sans le vouloir. Ici, les habits sont tellement grands et interchangeables qu'il a dû prendre le mien sans s'en rendre compte. J'ai l'impression d'être démasquée au grand jour et mes joues deviennent aussi rouge que mon pull. Nicolas mordille son stylo alors que je plonge dans ma tasse de thé.
– Ce n'est pas ce que vous croyez, marmonné-je.
– On ne croit rien ! se défend Nicolas en levant les bras.
– C'était bien au moins ? demande Lila.
– Mais ... Enfin... Non ... Enfin si ... Mais non !
Je bafouille. Nicolas continue de ricaner pendant que Lila lui fait les gros yeux. J'arrache des petits bouts de pain avec mes ongles et grignote ma tartine d'un air mal à l'aise.
– Ne vous faites pas des idées, marmonné-je. C'était juste comme ça.
– L'amour ! lance Nicolas.
– Ce n'était pas de l'amour, répliqué-je.
– Mais il s'est bien passé quelque chose, continue-t-il.
Je continue de bougonner et finis ma tartine et mon thé.
– Allez Anah ! Tu ne vas pas nous laisser comme ça, avec si peu d'information ? C'est perfide.
– Ce qui s'est passé hier ne vous regarde pas.
– Les détails non mais ...
– Je ne veux pas en parler ! le coupé-je. Je ne sais... Je ne sais même pas ce qu'il s'est passé...
Enfin si, je sais. Mais je ne sais pas ce que cela signifie pour lui comme pour moi. Mon cœur se met à battre dans ma poitrine, comme pour me perdre encore plus. Je revois ses cheveux me caresser le bout du nez alors que ses lèvres rencontraient les miennes. Je me souviens de ses yeux bleus plongés au fond des miens alors que sa main caressait ma poitrine et descendait sur mon corps. Je chasse ses images de mon esprit. Je dois arrêter de penser à Lhénaïc et me concentrer sur notre mission : sauver le monde !
– Mais il te plait, non ? veut savoir Nicolas.
– Je crois que c'est trop tôt pour le dire, répond-je en haussant les épaules. Je ne sais pas trop où j'en suis.
– Que te dit ton cœur ?
– J'essaye de ne pas l'écouter, répliqué-je.
– Pourquoi ?
Pour ne pas souffrir ? Pour ne pas prendre le risque de pleurer la perte d'un second amour ? Parce que je ne veux plus avoir mal ? Parce que Lhénaïc m'attire et m'intrigue mais qu'il a aussi l'air trop torturé et complexe. Parce que j'ai déjà perdu Mathie. Parce que je ne le connais pas vraiment. Il y a mille réponses à sa question mais je n'en donne aucune et garde le silence. Nicolas attrape sa tasse de thé refroidie et l'avale d'un trait. Lila se lève alors et dépose un baiser sur ses lèvres tout en nous informant qu'elle part rejoindre Valentin. Une fois qu'elle est partie, je me penche vers mon meilleur ami :
– Il ne m'adresse quasiment pas la parole. Et il débarque comme ça pour m'embrasser et...
– Aimer se passe de parole, me coupe Nicolas.
– Arrête ! Ce n'était pas de l'amour, c'était juste... Oh et puis mince ! Je ne sais pas ce que c'était. Mais il pourrait me parler ! Simplement me parler. Certaines personnes ont besoin de mots tu vois !
Lhénaïc est-il venu dans ma chambre uniquement pour coucher avec moi ou avait-il des choses à me dire hier soir ? Je me rappelle ses paumes qu'il serrait, de son air troublé. C'est moi qui l'ai rattrapé alors qu'il voulait partir, mais qui de nous deux à embrasser l'autre en premier ? Je serai bien incapable de le dire. Quant à savoir si nous avons des sentiments l'un pour l'autre, je n'en sais rien ! Peut-être voulions-nous seulement combler nos solitudes mutuelles ?
– Tu sais où il est parti ? demandé-je.
– Explorer des galeries je crois. Nathaniel était avec lui.
– Quelles galeries ?
– Celles de la plaine du Nord.
– Ils sont partis par quel tunnel ?
– Un tunnel ? Non, ils sont sortis et ils ...
– Ils sont sortis ? hurlé-je.
Je me lève d'un bond.
– Quand ?
– Il y a bien une heure.
– Quelle heure est-il ?
– Presque huit heures.
– Je vais les rejoindre.
– Hein ? Pourquoi ?
– Parce qu'ils ne connaissent pas les plaines, m'écrié-je. Parce que les vaisseaux peuvent arriver d'un instant à l'autre. Non mais où avait-il la tête ?
Je laisse Nicolas en plan et remonte dans ma chambre. Je pousse violement la porte et fouille la pièce à la recherche de mon arc et de mon carquois avant de retirer le pull de Lhénaïc pour enfiler des vêtements à ma taille, moins voyant, et de ressortir. Je dévale les escaliers qui mènent vers la grande salle en sautant plusieurs marches à la suite et passe devant Nicolas en coup de vent. Il n'a pas bougé et me regarde comme si j'étais soudain devenue folle. J'agrippe l'échelle qui permet d'accéder à la trappe au-dessus du bunker et je m'apprête à grimper lorsqu'une main se pose sur mon épaule.
– Tu pars sans moi ?
– Tu ne peux pas quitter Lila, rétorqué-je.
– Ne dis pas de bêtise. Nous avons survécu trois ans l'un sans l'autre. Ce n'est pas quelques heures qui nous tueront.
– Tu es prêt à prendre ce risque ?
– La vie est un risque.
J'affiche une moue dubitative. Il attrape un sac à dos, glisse quelques denrées à l'intérieur et revient vers moi.
– On ne peut pas toujours rester avec les gens qu'on aime.
– Et si vous étiez de nouveau séparé à cause de moi ?
– Nous nous retrouverons, dans cette vie ou dans une autre.
Il tapote mon épaule et affiche un sourire. J'admire son optimisme mais je ne suis pas aussi confiante que lui.
– Tu es plus que ma meilleure amie, me dit-il. Tu es comme ma sœur. Et il est hors de question que je laisse ma sœur courir seule, dehors, à la recherche d'un garçon qu'elle... apprécie !
Il termine par un clin d'œil alors que je soupire. Il lève son poing et dépose sa main sur son front, puis sur son cœur. Je lui souris et fais de même.
– Allez, grimpe !
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