Chapitre 5



Il était presque midi quand Caleb sentit une présence s'asseoir à côté de lui. Inutile de dévier le regard pour savoir qu'il s'agissait de Seth.

- Alors c'est elle ? Lança-t-il en l'observant paresseusement.

- Oui, affirma Caleb avec humeur.

- Alors ? Comment ça c'est passé ? Est-ce tu lui as parlé ?

- Nous avons eu effectivement une conversation mais pas celle que tu espères mon ami.

Contre toute attente Seth ne chercha pas à connaître les détails.

- Est-ce que ça va ? Il y a beaucoup de bruit, s'inquiéta Seth.

- Je gère ! Dit-il entre ses dents serrées ; J'en suis à mon treizième café.

Seth se mit à rire doucement.

- Bordel tu comptes en boire encore combien ?

Trop occupé à fixer Malia qui s'activait à servir les clients Caleb haussa des épaules.

- Dans cinq minutes je passe à l'eau, dit-il vaguement.

Seth secoua de la tête en riant puis il sentit son regard se porter sur Malia.

- Elle est très belle, exquise, commenta-t-il d'une voix traînante.

- Tu joues avec la mort Seth méfie-toi, rétorqua Caleb en guise d'avertissement.

La jeune femme passa devant eux pour s'emparer d'une bouteille de whisky et arrima furtivement son regard dans le sien mais baissa aussitôt la tête.

- Depuis combien de temps tu la regardes comme ça ?

- Comme ça ? Répéta Caleb en jouant avec la tasse qu'il faisait tourner machinalement.

- Tu l'as regarde comme si tu voulais tuer tous les clients pour enfin la posséder sur le comptoir.

La franchise de Seth l'obligea à détourner le regard dans sa direction.

Bouche tordue, il répondit :

- Le pire c'est que ça m'a traversé l'esprit.

L'aveu de cette pensée ne lui procura aucun sentiment de dégoût bien au contraire.

- Quoi ? Tuer les clients ou la posséder ?

- Les deux, répondit Caleb en terminant son treizième café.

- Je serais curieux de connaître les autres pensées qui t'ont traversé l'esprit depuis neuf heures du matin, lança Seth d'une voix neutre comme s'il s'agissait d'une conversation banale.

- Tu veux vraiment le savoir ?

- Évidemment !

- Des tas de pensées m'ont traversé l'esprit, commença Caleb en soupirant ; et il vaut mieux que je l'ai garde pour moi.

Un silence s'installa avant que Seth décide de le rompre.

- Sache que peu importe ce que tu feras, je te soutiens Caleb.

Il se tourna vers lui, les sourcils froncés.

- Hier tu disais le contraire, lui rappela Caleb l'air méfiant.

- Ça c'était avant d'avoir une discussion avec Izario, répondit-il avec sérieux.

- Depuis quand tu écoutes les conseils de Izario ?

- Je t'ai peut-être rejoins après que tu m'aies sauvé la vie par loyauté cela ne veut pas dire que j'ai oublié d'où je viens.

Caleb appréciait la loyauté de Seth et n'avait pas oublié la nuit où il l'avait sauvé en s'interposant lors d'une fusillade entre deux mafias très connus en Italie. En prenant part à cet affrontement Caleb avait aidé Seth qui blessé, était sur le point de se faire abattre par un membre de la famille adverse. Après ça, Seth avait éprouvé le désir de faire partie de ses hommes et Izario avait accepté conscient que sans lui, les choses auraient pu très mal tourner.

- Il m'a dit que l'on ne pouvait pas aller à l'encontre des pensées d'un homme qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Peu importe les décisions qu'ils prennent, vouloir les contrer ne fait que retarder l'inévitable.

- Des paroles très sages venant d'un homme comme lui, commenta Caleb avec humeur.

- Izario n'écoute que lui, et jusqu'ici il ne s'est jamais trompé, il sait ce qu'il veut et ce qu'il ne veut pas. Et toi Caleb qu'est-ce que tu veux ?

Sa question provoqua en lui un raz-de-marée de pensées obscurs et brûlantes.

- Regarde autour de toi Caleb, reprit-il d'une voix plus que sérieuse : Nous ne serons jamais comme lui ou bien lui.

Il désigna des hommes au hasard avec son menton.

- Tu ne seras jamais comme eux, ce n'est pas nous, ce n'est pas toi, conclut-il fermement.

Caleb crispa ses doigts sur le rebord en acier quand la jeune femme s'approcha pour s'adresser à Seth.

- Laissez-moi deviner, vous désirez un café ? Demanda-t-elle d'une voix presque amusée.

Seth consulta sa montre en faisant mine d'hésiter.

- Il est midi ma jolie, une vodka serait plus tentante.

Les yeux azurés de la jeune femme se posa sur lui.

- Un autre café ? Demanda-t-elle d'une voix à l'opposée de celle qu'elle venait de prendre avec Seth.

Elle était troublée, rougissante et une légère lueur de peur voilait son regard. Caleb n'eut pas le temps de répondre car un jeune homme posa une main sur son épaule.

- Je m'en occupe Malia, ton service est terminé.

Les mâchoires serrées, Caleb suivit des yeux le serveur qui écarta la jeune femme pour prendre sa place.

- Tout à coup, le bar perd tout son charme, commenta Seth en esquissant une moue de déception.

- Messieurs, les salua-t-elle avant de disparaître.

Caleb ravala sa frustration car il savait que ce soir elle serait là.

~

Perdue dans ses pensées Malia parcourait les rayons le regard dans le vague avant de percuter un chariot.

- Oh je suis désolée ! Je ne vous avais pas vu !

La vieille dame marmonna en s'éloignant.

- Depuis quand tu agresses les vieilles dames ? Lança Cassie en lui donnant un coup de coude.

- J'étais perdue dans mes pensées je ne l'ai pas vu, dit-elle en poursuivant son chemin à travers les allées du magasin.

Soupçonneuse Cassie leva un sourcil.

- Tu veux en parler ?

Malia ouvrit la bouche puis la referma. Cassie allait sans doute la prendre pour une folle sinon pire. Néanmoins elle était très préoccupée depuis sa rencontre avec ce mystérieux inconnu. Elle ne parvenait pas à oublier son regard profondément ancré dans le sien. Pendant tout son service il n'avait pas cessé de la regarder jusqu'à la rendre mal à l'aise. Il n'y avait pas que ça, songea-t-elle en se grattant la tête. La réaction de son corps l'avait trahi soumettant presque sa raison. Les mains encore moites elle se dirigea vers un autre rayon mais remarqua que Cassie ne la suivait pas. Son amie était une bouffée d'air frais qui l'aidait à retrouver sa joie de vivre alors lorsqu'elle la vit dévisager le rayon en se léchant les lèvres Malia sut tout de suite qu'elle n'était pas au bout de ses surprises.

- Je peux savoir ce que tu fais ?

- Je cherche....de la chantilly ! Pour jouer avec Peter ce soir ! s'exclama-t-elle en déployant ses ongles pour imiter une tigresse.

Malia explosa de rire en se cachant le visage pour masquer sa honte car la même vieille dame qu'elle venait de heurter avec son chariot prit une expression horrifiée.

- Tu es incorrigible !

Cassie la rejoignit en lui montrant la chantilly tout sourire.

- Je suis incorrigible, et satisfaite de l'être, affirma-t-elle en jetant sa nouvelle idée dans le chariot ; Maintenant j'aimerai savoir ce qui te tracasse autant.

Son rire s'affaiblit soudain et son rire disparut à la seconde où le regard de l'homme au bar passa dans son esprit.

- Tu vas me prendre pour une dingue, mais il y avait un homme ce matin au bar et il...était très étrange.

Cassie reprit son sérieux et bloqua le chariot pour l'empêcher d'avancer.

- Etrange comment ?

- Il n'arrêtait pas de me regarder et il avait un comportement très étrange.

Malia battit des cils en haussant des épaules.

- Je me fais peut-être des idées, acheva-t-elle en poussant le chariot.

- Comment il est ? Je veux dire physiquement ?

Aussitôt Malia sentit ses joues s'enflammer en se rappelant avec précision le profil de l'inconnu. Un profil qui ne s'oubliait pas de sitôt. Elle ressentait encore la chaleur qui l'avait saisie jusqu'à son bas ventre.

- Il est terriblement beau, admit-elle avec sincérité ; Vraiment très beau mais inquiétant.

- Développe ! dit Cassie avec un regard affamé.

Soudain timide voire paranoïaque Malia observa les alentours les lèvres pincées.

- Tu es en train de te pincer les lèvres, remarqua Cassie en plissant des yeux ; ce qui veut dire qu'il est vraiment sexy.

Malia acquiesça en silence.

- On dirait un gladiateur qui rentre d'un combat glaçant, dit-elle en inspirant profondément comme si elle manquait d'air ; il est grand, baraqué, il a un regard qui est capable de t'immobiliser, des mâchoires féroces et j'ai remarqué une brûlure sur son avant-bras gauche.

Cassie haleta presque en se faisant de l'air avec sa main.

- Eh bien, on peut dire que tu as le sens de l'observation, nota-t-elle en souriant.

- Je ne l'ai pas observé, je l'ai littéralement dévisagé, marmonna Malia honteuse.

- Il a fait de même avec toi, rétorqua Cassie en posant les articles sur le tapis de caisse.

- No...non, lui c'était différent, murmura-t-elle en grimaçant ; il s'est comporté vraiment bizarrement j'ai même cru qu'il allait me tuer à un moment.

- Ou il voulait tout simplement te faire l'amour, ajouta Cassie comme si cette option était plus probable.

- Cassie !

- Quoi ? Dit-elle en ignorant son expression choquée ; Ne fais pas comme si tu l'ignorais Malia, tu dois être la muse de plusieurs fantasmes ébauchés par des tas d'hommes, ce n'est ni surprenant et encore moins un défaut.

Agitée, Malia agrippa la poignée du chariot car une peur du passée la gifla violemment.

- Et on a vu où cela aurait pu me mener, lâcha-t-elle en fixant Cassie.

- Mais c'est terminé, trancha Cassie en recouvrant son sérieux ; Tu ne dois plus y penser, tu es saine et sauve, c'est tout ce qui compte.

Cassie avait raison, songea-t-elle en hochant de la tête. Ressasser cette histoire ne l'aiderait en rien. Le principal c'est qu'elle soit en vie et de nouveau épanouie. Cette agression avait cependant laissé une trace et elle ne pouvait pas la soustraire aussi rapidement.

- Et pour revenir sur le sujet précédant, je pense que tu devrais arrêter de t'inquiéter.

- Tu penses que je suis folle ?

- Non, seulement un peu paranoïaque et c'est compréhensible mais il est temps de lâcher prise Malia. Je veux retrouver la Malia d'avant, celle qui était joyeuse et qui n'avait pas peur de foncer sans réfléchir.

- Je suis sur la bonne voie, assura Malia avec un sourire.

- Quant à ce mystérieux inconnu, je pense qu'il a juste céder à l'ébauche du désir que tu lui as inspiré, rajouta Cassie une fois à l'extérieur du magasin.

- Il est dangereux, je l'ai senti Cassie, son aura, tout autour de lui semblait sombre et obscur.

- Mais ça ne t'a pas empêché de rougir, observa-t-elle en s'appuyant sur la voiture.

- Je n'étais pas la seule, se défendit Malia en chargeant le coffre de la voiture ; Il est intimidant.

Cassie élargit son sourire.

- Je suis sûre qu'il t'a déjà oublié pour chasser une autre proie, ces hommes riches ne restent jamais sur la même cible quand ils sentent qu'il n'y a aucune chance.

Malia se mordit la joue puis exhala un long soupir.

- Demain je t'annonce que nous sortons !

- Ah oui où ça ? Encore dans l'une de tes boîtes de nuit étranges ? Demande Malia en penchant la tête sur le côté.

Cassie passa son bras autour de ses épaules.

- Crois-moi, ça va te plaire !


Malia sourit mais au fond d'elle, son esprit était ailleurs, plus précisément elle songeait à son service du soir avec l'étrange sensation qu'elle reverrait l'inconnu au regard incroyablement puissant...

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