Arpentant la pièce d'un pas nerveux, Caleb avait l'impression d'être un lion en cage, privé d'espace. Les yeux rivés sur la porte close il posa ses mains dessus cherchant à détendre ses muscles raides. L'attente devenait insupportable.

Enceinte ? Malia enceinte ? Portant son enfant ?

Si jamais c'était le cas, Caleb savait d'avance qu'il allait devoir redoubler de vigilance et protéger Malia peu importe le prix à payer. En réalité il avait énormément de mal à réaliser que derrière cette porte il y avait peut-être son futur, un souhait qu'il s'était surpris à penser, à vouloir au moment où sa vie n'avait plus de sens. Un sentiment inédit lui comprima le cœur. Était-ce réellement le destin qui avait mis Malia sur son chemin ou les prières silencieuses qui l'avaient aidé à traverser les ténèbres ?

Caleb se recula, quittant ses songes rapidement lorsque la porte s'ouvrit lentement, laissant entrevoir une jeune femme timide aux yeux baissés.

- Alors ? S'enquit-t-il pressé de savoir s'il allait être père.

Père....ce mot si facile à songer lui donna presque le sentiment de l'être déjà.

- Il faut attendre encore un peu Caleb, quelques minutes du moins.

- Viens.

Il la guida jusqu'au lit et ils s'installèrent en silence. Très vite il remarqua à quel point Malia semblait stressé. Il ne pouvait pas lui vouloir car les événements semblaient s'enchaîner sans leur laisser du répit.

- Dis-moi à quoi tu penses, murmura-t-il en lui caressant les cheveux.

Semblant hésiter, elle lui lança un regard puis le dissipa en baissant les yeux.

- Je ne m'attendais pas à ça si tôt, j'ai peur que le haut conseil pense que je l'ai fait exprès pour te piéger.

Ravalant un accès de colère Caleb serra les dents, réalisant bien que trop tard que la bête éveillait en lui la part la plus sombre de son être.

- Je tuerais quiconque pensera ça de toi, articula la bête à la place de l'homme.

Sachant qu'il était très sérieux la jeune femme devint pâle.

- Caleb...

- Non, coupa-t-il en appuyant sa paume de main sur sa nuque pour ramener son front à sa bouche ; je suis extrêmement sérieux Malia. C'est moi qui fait la loi ici et personne d'autre. Je fais de nombreux effort, j'apprends à revivre avec des personnes autours de moi mais sache que c'est une épreuve chaque jour qui passe. Je déconseille à quiconque de dépasser les limites.

La jeune femme inspira profondément.

Pour lui le sujet était clos.

- Tu es sûre que ça remonte à notre première fois Malia ? Demanda-t-il en fixant le test de grossesse.

- Oui, ça ne fait aucun doute, je l'ai oublié, et puis tout ce qui c'est passé ce soir là m'avait assez perturbé.

- Cela remonte à plus de six voire sept semaines, dit-il en se levant pour faire les cents pas ; Est-ce toujours aussi long ?

Devant l'impatience du cheikh Malia eut presque envie de lui sourire. Cependant elle était trop nerveuse pour éclater de joie.

- Encore une minute...

Il grogna comme un homme frustré, se passant une main rageuse dans les cheveux. Jamais depuis qu'elle l'aimait elle avait songé à concevoir un enfant avec lui. Mais plus les secondes passaient plus Malia se surprit à le vouloir.

Elle baissa les yeux sur le test et presque au même instant deux traits rose lui confirma qu'elle était bien enceinte.

- C'est positif Caleb.

Il s'arrêta brutalement, le regard ancré dans le sien.

- Ce qui veux dire que tu es enceinte ?

- Oui, oui je suis enceinte.

Inquiète par ses traits impassibles Malia sentit son cœur battre sourdement dans sa poitrine. Pendant un instant elle prit peur car il ne bougeait pas, figé comme le marbre jusqu'à ce qu'il s'avance soudain pour parsemer son visage de centaines de milliers de baisers.

Il captura sa bouche avec une avidité inédite se fondant sur ses lèvres comme si c'était leur premier baiser.

Il articula, découpa chaque syllabes de son récit en arabe qu'il souffla sur son visage alors qu'il était le seul à comprendre.

- Tu es heureux ? Tu...

- Tu viens de me donner ce que je désire depuis le premier jour de notre rencontre.

Sa voix était puissamment rauque et enfin un sourire se dessina sur ses lèvres.

- Vraiment ? Insista Malia au bord de la panique.

Pour toute réponse il la souleva et la fit tournoyer en nichant son visage dans son cou.

- Je vais devoir t'emmener à la clinique au plus vite, es-tu capable de y aller ? Dit-il en la déposant sur le sol.

Malia leva les yeux au ciel.

- Je suis enceinte Caleb pas malade, lui fit-elle remarquer.

Le visage du cheikh se ferma.

- Tu es enceinte oui et je te demande de me pardonner à l'avance pour mon côté protecteur qui risque de s'accroître durant les prochains mois.

Malia ne put s'empêcher de sourire mais au fond d'elle ses émotions se bousculaient. Elle avait peur que cette grossesse inattendue vienne lui compliquer la tâche pour obtenir la confiance du pays. Très vite toutes ses peurs disparurent lorsqu'elle posa ses mains sur son ventre. Jamais jusqu'ici elle avait songé à avoir sa propre famille et surtout pas avec un redoutable guerrier dont le passé avait une place dans leur histoire d'amour.

- Votre Altesse, le conseil vous attend, déclara Omar alors qu'ils descendaient le grand escalier.

- Ils attendront, j'ai une urgence qui vient de devenir ma priorité, dit-il sur un ton impérieux.

- Est-ce grave votre Altesse ? S'inquiéta Omar en lui adressant un regard soucieux.

- Non, c'est plutôt l'inverse.

Sans plus tarder il l'entraîna à l'extérieur pour prendre la route vers la clinique. Cette fois-ci, cette sortie était différente de toutes celles qu'elle avait connue jusqu'ici. Deux voitures les suivaient. À bord, les hommes de Caleb.

- Bientôt, tu finiras par oublier leur présence, lui expliqua Caleb en s'arrêtant devant la clinique.

- Est-ce que ça fait parti du protocole ?

- Ça fait parti de mes ordres concernant ta sécurité.

- Mais tu es là, et crois-moi ta protection dépasse de loin mes espérances, dit-elle avec un sourire entendu.

Il plissa des yeux comme deux fentes impénétrables puis se pencha pour embrasser son front.

Dans la clinique, Malia avait l'impression que tout les regards étaient posé sur elle si bien qu'elle baissa la tête à plusieurs reprises.

- Il n'y a pas de doute, vous êtes enceinte.

Le verdict du médecin confirma définitivement sa grossesse. Ce fut seulement à cette instant qu'elle réalisa enfin qu'elle allait devenir mère.

- Depuis combien de temps ? Demanda Caleb.

Malia fut examinée avec minutie sous les ordres précis du cheikh. Sur l'écran, une légère forme noir apparut sur l'écran.

- Je dirais depuis sept semaines, conclut le médecin avec un radieux sourire.

L'index de Caleb se glissa sur sa joue pour essuyer la larme solitaire qui roulait sur sa joue.

- Est-ce qu'elle a des recommandations ? Est-elle en bonne santé ?

- Selon les résultats de sa prise de sang mais vous avez l'air d'être une jeune femme en bonne santé, répondit-elle en se tournant vers elle.

Caleb l'aida à descendre de la table avec une précaution particulière.

- Je compte sur vous pour ne pas ébruiter la raison de notre visite, dit-il à l'adresse du médecin qui s'inclina respectueusement.

- Évidemment votre majesté, je garderais ce secret aussi longtemps que vous le souhaitez.

Il n'avait pas besoin qu'elle garde ce secret bien longtemps. Dès son retour au palais il mettrait en place son avenir avec la jeune femme au plus vite. En plus de lui offrir son amour, Malia lui offrait le fruit de cet amour...

Sa gorge se serra lorsqu'il repensa à tout ce qu'il s'était passé entre eux à l'instant où son regard azuré avait pénétré le sien. Il ferma les yeux puis lui prit la main pour la porter à ses lèvres.

À leur retour au palais Caleb l'entraîna vers les jardins et l'invita à s'asseoir au côté de Hasma.

- Repose-toi, Hasma va prendre soins de toi, je reviens au plus vite.

En se retournant, il sentit sur lui son regard et le devinait inquiet. La pression qu'exerçait le haut conseil sur Malia n'était plus supportable, ni pour elle et encore moins pour lui.

Arrivé à hauteur des portes, Caleb les poussa avec une détermination farouche si bien qu'ils se levèrent d'un bond.

Caleb les observa tour à tour l'air menaçant.

Car il était temps pour lui de reprendre les commandes de son pays et montrer qui était l'autorité. Pour Malia et pour leur enfant.