Chapitre 27
Malia resta collée contre la paroi jusqu'à ce qu'ils disparaissent en prenant la direction des côtes. Perdue dans sa torpeur elle n'avait quasiment pas suivi leur échange. Quittant sa cachette elle se retourna pour rejoindre la cuisine mais heurta un bloc d'acier qui la retint par les épaules.
Malia leva les yeux vers le cheikh la bouche entrouverte.
- Je t'avais dit de ne pas bouger, dit-il d'un air mécontent.
Éberluée par la vitesse avec laquelle il l'avait rejoins sans qu'elle ne l'entende, Malia en perdit la voix qui se mua en un soupir imperceptible.
- Ma curiosité a eu raison de moi, murmura-t-elle en grimaçant.
- Il va falloir songer à la soigner avant qu'elle ne te fasse défaut, déclara-t-il d'une voix plus amène.
- Il s'agissait des garde-côtes, se justifia-t-elle maladroitement.
- Et si ça n'avait pas été le cas Malia ?
Muette, elle se contenta de lui faire les yeux doux dans l'espoir qu'il passe outre. Un sourire frémissant aux lèvres il secoua la tête cédant à son regard puis relâcha ses bras pour lui prendre la main.
- La prochaine fois veille à m'écouter, glissa-t-il néanmoins d'une voix teintée d'un avertissement limpide.
- Que voulaient-ils ? Demanda-t-elle quand ils furent dans la cuisine.
- Ils veulent que nous témoignions sur ce qu'il s'est passé hier.
Il lâcha sa main pour se servir un café qu'il avala d'un trait.
- Je n'ai pas envie de témoigner Caleb.
- Pourtant il va le falloir.
Voyant clairement de l'inquiétude dans ses yeux bleus, Caleb se rapprocha pour prendre son visage en coupe.
- Si ça tenait qu'à moi j'aurais refusé mais pour qu'ils soient jugé il faut que tu témoignes.
Caleb sentit un goût amer lui monter à la gorge car il ne supportait de lire dans ses yeux de la peur. Chaque fois il avait l'impression de basculer en arrière, dans cette nuit où elle lui avait imposé le même regard.
- Quand ? Demanda-t-elle d'une voix résignée.
- Aujourd'hui, je préférais que ce soit fait ce matin.
- J'approuve, dit-elle en fermant les yeux brièvement.
Caleb posa un baiser rassurant sur son front en fermant les yeux. La jeune femme se détendit soudain, déliée d'une raideur qu'il avait senti dans sa façon de se tenir.
- Mange un peu ensuite nous irons nous préparer.
Elle s'installa sur le tabouret sans bouder son plaisir de se restaurer. Caleb prit l'arme agrippée à la ceinture de son pantalon et la remit sous le plan de travail en la glissant dans l'étau d'adhésif.
- Est-ce que tu en as d'autres ? Osa-t-elle demander en mordillant sa gaufre sans le quitter des yeux.
- Dans chaque pièce, admit-il d'une voix gutturale.
La jeune femme écarquilla les yeux.
- Même dans ma chambre ?
- Même dans ta chambre, affirma-t-il en glissant son regard sur sa bouche qui remuait sensuellement au rythme de ses mastications.
- Tu peux peut-être trouver ça exagéré mais c'est ainsi que je fonctionne Malia.
- Je ne trouve...pas ça exagéré, bafouilla-t-elle en battant des cils ; Je trouve ça flippant.
Son honnêteté le fit sourire brièvement avant de reprendre son sérieux.
- Bienvenue dans mon monde habibti, ou plutôt bienvenue dans le monde réel et tu en as fait quelques tristes expériences qui me poussent à faire en sorte que cela ne se reproduise jamais.
Sa promesse fit briller les yeux de la jeune femme qui instantanément baissa la tête pour mieux la relever.
- Et puis je pense qu'il m'est inutile de te dire que je ne suis pas un homme comme les autres, ajouta-t-il sombrement.
- Non, c'est inutile, je pense l'avoir compris, dit-elle en esquissant un sourire timide.
Le temps s'arrêta soudain comme s'ils n'y avaient qu'eux sur cette terre. Caleb serra furtivement les mâchoires et la souleva pour la faire descendre du tabouret.
- Va te préparer avant que je ne puisse plus répondre de rien, chuchota-t-il à son oreille en s'éloignant avant de céder à la tentation.
Elle se mit à trottiner avec un sourire en coin et disparut de son champ-de-vision à temps.
Malia ne s'était jamais sentit aussi puissante qu'aujourd'hui car elle tenait entre ses mains un grand pouvoir féminin et cela la ravissait autant que ça l'effrayait.
Son sourire s'effaça lorsqu'elle parvint jusqu'à cette chambre qui avait été le théâtre d'une scène cauchemardesque. Elle déglutit, la bouche sèche alors qu'elle dévisageait les vêtements qui jonchaient le sol. Tous les sacs qui contenaient les vêtements que lui avait acheté Caleb étaient reversé, les tiroirs des commandes arrachés. Elle s'approcha du lit et sentit son corps partir en soubresauts en découvrant une écorchure dans le matelas. Cela ressemblait à un coup de couteau ce qu'elle n'avait pas remarqué la veille. Mais à présent que la chambre baignait dans un soleil radieux tout devenait plus clair et plus insupportable à regarder.
Malia se réfugia dans la salle de bains et prit le soins de s'y enfermer. Elle se brossa les dents, se doucha en vitesse et enfila un peignoir en serrant les pans contre elle. Elle prit le temps de se regarder dans le miroir et eut l'impression d'être une autre femme. Elle était comblée, désireuse de connaître ce que le futur allait lui réserver. Ressemblant ses esprits elle quitta la salle de bains et s'arrêta net devant l'encadrement en hoquetant. Elle se frotta les yeux pour être sûre de ne pas halluciner. La chambre ne ressemblait plus à celle qu'elle avait laissé quelques minutes plus tôt. Le lit n'avait plus de draps, les sacs et les vêtements qui jonchaient le sol n'étaient plus là, les tiroirs refermés. Malia s'approcha du fauteuil là où était disposé un legging noir et une chemise blanche qui appartenait au cheikh. Les sourcils froncés elle prit les vêtements et s'empressa de s'habiller puis releva ses cheveux en chignon. Elle traversa le pont en remarquant que le yacht était revenu au port. En descendant les étages pour gagner le pont supérieur elle remarqua deux femmes qui montaient et descendaient la passerelle sur le côté, les bras chargés de sacs.
Malia s'approcha en scrutant la scène avec incrédulité jusqu'à ce qu'un homme se dresse devant la passerelle, vêtu en homme d'affaires implacable, les cheveux fraîchement lavés, les bras croisés, le regard dissimulé derrière une paire de lunettes de soleil...
Malia chavira en vacillant sur ses jambes alors que les deux femmes bavaient littéralement devant cet homme viril et ténébreux qui n'était autre que le cheikh. Le ventre en feu, elle l'étudia en silence, profitant qu'il ne l'ait pas vu pour étendre son regard sur ses longues jambes musclées. Elle s'approcha lentement alors qu'il pivotait déjà sur sa droite pour la rejoindre. Les bras croisés, il s'avança plus près et se pencha un avant pour la regarder par-dessus ses lunettes.
Les joues cramoisies elle tenta d'affronter son regard ténébreux et hypnotique sans vaciller.
- Petite coquine, tu crois que je ne t'ai pas vu ? Murmura-t-il d'une voix suave.
Malia lui sourire et cambra son dos tout en rejetant la tête en arrière comme étourdie.
- Comment fais-tu pour t'apercevoir de tout en faisant mine de rien, geignit-elle alors qu'il prenait déjà son visage en coupe.
- Tu as encore beaucoup à apprendre de moi, dit-il en déposant un chaste baiser sur ses lèvres.
De ses pouces, il caressa ses pommettes alors que son regard était imperceptible derrière ses lunettes noires. Il se pencha alors à son oreille et son nez frôla sa joue.
- N'oublie pas, je suis le prédateur et tu es ma proie et un prédateur ne laisse aucun détail lui échapper.
Malia ferma les yeux en frémissant et sentit sa main chaude exercer une pression sur la sienne avant de totalement y refermer ses doigts.
Ordonnant à son esprit d'atterrir elle rouvrit les yeux en s'apercevant qu'il l'observait toujours.
- Ma chemise te va bien, commenta-t-il en l'entraînant avec lui.
- Elle dix fois trop grande, lui fit-elle remarquer en baissant les yeux sur celle-ci qui faisait presque office de robe.
- C'est temporaire, répondit-il furtivement.
Malia dévia son regard sur les deux femmes et s'aperçut qu'il s'agissait des sacs qui étaient dans sa chambre trente minutes plus tôt.
- Nous irons faire les boutiques pour t'en acheter des nouveaux, décréta-t-il en l'entraînant vers la passerelle.
Il n'en fallut pas plus pour Malia. Elle comprit les raisons qui le poussaient à s'en débarrasser.
- Ils seront vendus pour que l'argent soit reversé à une association, expliqua-t-il en refermant ses doigts aux siens comme s'il voulait raffermir sa pression.
- C'est très gentil de ta part Caleb mais tu n'étais pas obligé de t'en débarrasser.
Nul besoin de voir ses yeux pour comprendre que sa réponse lui avait déplu. Ses mâchoires volontaires tressautèrent légèrement alors qu'il lui ouvrait la portière.
- Tu as fermé les yeux n'est-ce pas ? Demanda-t-il d'une voix basse en glissant son pouce sur sa joue.
Malia fronça des sourcils avant de comprendre qu'il parlait du moment où elle était cachée dans le meuble pendant qu'ils étaient dans la chambre.
- À un moment oui, admit-elle.
Sa main retomba de son visage pour se poser sur la voiture.
- Donc tu ne les as pas vu les sentir ni les toucher avec leurs mains sales comme deux pervers, murmura-t-il d'une voix de plus en plus absente.
Malgré la chaleur de la Sicile Malia sentit un frisson lui glacer le sang.
Sans un mot de plus il l'invita à s'installer sur le siège alors que ses lèvres portaient un rictus éloquent.
Quand il s'installa au volant elle décida de choisir le silence le temps qu'il se calme.
- Jamais de ma vie je n'aurais cru ressentir ce sentiment un jour, confessa-t-il une fois devant le poste de police.
- Quel sentiment ? Demanda-t-elle prudemment alors qu'il ôtait ses lunettes.
Les rudesses de ses traits ciselés indiquaient une colère silencieuse.
- La jalousie.
Malia ravala un souffle sans le quitter des yeux alors que son cœur battait à la chamade.
- À une époque qui me paraît bien lointaine je n'éprouvais pas ce genre de sentiment. Jamais. Je ne savais même pas ce qu'il pouvait produire dans l'être humain.
Il daigna enfin de la regarder.
- Maintenant je comprends, achèva l'homme en plantant un profond regard dans le sien.
Il marqua une pause le temps d'une inspiration.
- C'est fort, c'est puissant et à la fois douloureux, reprit-il d'une voix rauque et sombre.
Il leva sa main pour caresser sa joue lui imposant ainsi le silence. Il n'avait même pas besoin de lui dire, elle l'avait sentie au plus profond de son être. C'était comme si elle avait su qu'il n'avait besoin de réponse de sa part...comme une confession silencieuse.
Il se pencha pour l'embrasser.
- Allons-y, ensuite je t'emmène faire du shopping.
- Je n'aime pas le shopping, marmonna-t-elle.
Il lui adressa un regard malicieux.
- Et c'est exactement pour ça qu'il me tarde d'y être, déclara-t-il l'air mystérieux.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top