Chapitre 24 part 2




Dans la pénombre elle pouvait difficilement apercevoir son visage mais la bride qu'elle put déceler lui noua la gorge.

Son cœur s'accéléra de terreur quand d'un mouvement souple et rapide il balaya les objets disposés sur un meuble et l'ouvrit pour la glisser à l'intérieur. Le dernier regard qu'il lui adressa était dépourvu de pitié remplacé par une froideur terrifiante.

Il referma l'ouverture et grâce au cannage du meuble Malia aperçut ses jambes puis celles-ci disparurent.

Le souffle court Malia pouvait entendre les pas se rapprocher suivit de rires presque sadiques. Elle ferma les yeux alors qu'une larme s'échappa pour sombrer sur sa main plaquée sur le bois massif. Elle rouvrit les yeux quand elle entendit la baie vitrée coulisser. Malia plaqua une main sur sa bouche en distinguant une silhouette pénétrer à l'intérieur suivit d'une autre.

La peur la faisait suffoquer comme dans la ruelle de Zyarhan et elle se raccrochait seulement à l'homme qui se trouvait là quelque part pour se rassurer.

L'un des deux hommes bredouilla en italien en brandissant un coteau vers le lit vide et arracha les couvertures comme s'il s'attendait à surprendre quelqu'un. Dans les lueurs de la lampe torche elle put voir son visage se déformer de frustration alors que l'autre s'approchait dangereusement du meuble après avoir fouillé dans la commode en s'emparant de l'un de ses vêtements.

- Puttana ! Rugit l'autre en jetant l'un des coussins à terre.

Malia ferma les yeux au plus fort qu'elle le put en écoutant leur pas s'éloigner après que le même homme ordonne de poursuivre leur fouille.

Lentement elle rouvrit les yeux pour dévisager la chambre de nouveau sombre et silencieuse.

Seulement quelques secondes s'écoulèrent quand un coup de feu retentit dans un silence glaçant.

Malia sursauta en lâchant un hoquet bruyant se mêlant à sa respiration affolée. Elle voulait ouvrir l'ouverture du meuble pour se jeter à corps perdu à la recherche de Caleb mais n'eut pas le temps de le faire. L'ouverture s'ouvrit brutalement lui exposant un homme aux traits marqués par les ténèbres alors que sa chemise était couverte de pourpre.

Il la souleva dans ses bras mettant un terme à ce terrible cauchemar.

- C'est fini, lâcha-t-il avec froideur en la serrant plus fort dans ses bras alors qu'une sirène retentissait au loin.

Dans un brouillard obscur Malia avait l'impression d'être happée par les minutes comme si tout se passait trop vite.

Les yeux dans le vague elle entendit une voix résonner dans son esprit et dut faire un effort surhumain pour relever les yeux.

- Est-ce que vous êtes blessée ? Vous n'avez rien ? Demanda un secouriste en lui passant une lumière devant les yeux.

Elle secoua négativement de la tête et chercha Caleb des yeux. Couvert de sang il échangeait avec un policier avec un calme terrifiant. L'un des deux hommes avait une blessure par balle à la jambe et l'autre n'avait pratiquement plus de visage, tuméfié par l'assaut de coups répétés.

- Il s'agit de Sergio Vitali et Luigi Carvelo, ils viennent de sortir de prison pour plusieurs braquages sur des yacht et trois tentatives de viol sur des victimes.

Enserré par les ténèbres Caleb fixait les deux agresseurs en songeant à achever son œuvre.

- Alors pour quelle raison ont-ils été relâché ? Demanda Caleb d'une voix sombre et menaçante.

- Pour bonnes conduites, ils ont recommencé à voler sur le port de la côte Ouest, nous étions à leur recherche depuis plus d'une semaine.

Caleb pouvait déceler de l'inquiétude dans la voix du policier.

Avec une pointe de nervosité il poursuit.

- Vous n'imaginez pas à quel point nous sommes désolé Monsieur Al-Eydhar. Une telle chose n'aurait jamais dû se produire.

- Dois-je vous fournir un port d'arme ? S'enquit Caleb en détachant son regard sur les deux hommes allongés sur des brancard pour le glisser sur Malia. Son visage pâle ne fit qu'amplifier sa soif de vengeance. Elle semblait si innocente et perdue dans les précipices de ses peurs que cette image était pratiquement la même que celle qu'elle lui avait renvoyé à Zyarhan. Et cette image renforça sa part sombre.

- C'est inutile votre majesté, nous avons grand respect pour vous, balbutia-t-il en se grattant l'arrière de la tête.

Les yeux affûtés sur les deux hommes, Caleb faisait peu à peu le vide dans son esprit pour raffermir ses pulsions meurtrières.

Malia fixait les tâches de sang disparaître soigneusement effacées par une équipe de nettoyeur. Le yacht était pris d'assaut de toute part, des personnes s'affairaient autour d'elle et entendit même deux policiers faire part de leur crainte que cet accident entache la réputation de la Sicile.

- Emmenez-les ! Ordonna l'un d'entre eux.

Un goût amer se glissa dans sa gorge quand les brancard passèrent devant elle.

Elle reconnut le visage de l'homme qui avait fouillé son lit. La jambe blessée, il demeurait cependant assez lucide pour rire derrière son masque à oxygène. Les yeux fixés sur elle, il ôta son masque pour déclarer en italien :

- Ce n'est que partie remise Bella, susurra-t-il en faisant rouler sa langue pour appuyer l'intonation.

Comme si le temps était subitement au ralenti, Malia tourna la tête vers le cheikh qui s'était déjà emparé de la gorge de ce dernier lui arrachant sa perfusion, faisant valser le masque à oxygène sur le sol.

- Caleb ! Cria-t-elle en se faufilant entre la ruée de policiers qui tentaient de lui faire lâcher prise.

Quand elle l'atteignit, Malia lut dans ses yeux une froide détermination d'en finir comme un serment qu'il était le seul à connaître.

- Caleb ! Je t'en prie lâche-le ! S'écria Malia en s'accrochant désespérément à son bras.

Rien n'y faisait. Le cheikh semblait épris d'une rage fixe, immobile, et seul son rival comptait. Livide, agonisant en agitant ses jambes contre la paroi du yacht, l'agresseur était sur le point de rendre l'âme sous les cris et supplications désespérés des policiers et secouristes.

Un mélange d'italien et d'anglais croassaient autour d'eux. Malia comprit que toutes ses voix ne faisaient qu'accroître les nœuds qui crispaient tous ses muscles et sa soif de le tuer.

- Silenzio ! Hurla Malia hystérique ; Il ne vous entend pas ! Reculez !

Le chef leva la main pour qu'ils reculent tous et les prises de mains qui tentaient de le faire relâcher disparurent.

Seule, Malia agrippa son bras dur et crispé, se hissa sur la pointe des pieds et utilisa la raideur de son bras comme levier puis leva sa main pour la poser sur sa joue.

- Caleb je t'en prie regarde-moi.

Sous la paume de sa main elle sentait sa mâchoire convulser. Elle insista en poussa sa main vers elle et peu à peu...millimètre par millimètre il tourna son visage alors que l'italien avait les yeux révulsés comme si la mort était devant lui.

- Je t'en supplie lâche-le Caleb, implora-t-elle quand elle put enfin capter son regard.

Ses yeux injectés de sang restèrent dans les siens, elle sentit sa main libre lier sa taille puis il hissa plus haut l'italien en pivotant légèrement. La seconde suivante il le plaqua sur le brancard qui ricocha sur le sol dans un bruit annonçant la fin de son supplice.

Elle sentit contre elle le corps du cheikh se relâcher alors que l'italien saisissait sa gorge en cherchant un filet d'air.

- Partez ! Siffla-t-il entre ses mâchoires serrées.

Malia resta devant lui, la respiration perdu dans les brises des ténèbres qu'elle pouvait sentir tout autour d'elle.

Le policier ordonna à ses hommes de partir en essuyant son front en sueur avec le revers de sa manche. Peu à peu le yacht se vida de toutes ses présences emportant avec eux les deux agresseurs. Tétanisée, Malia porta une main à son cœur écoutant le cheikh mugir silencieusement derrière elle. Elle se retourna consciente qu'en rien il ne s'était calmé. Pourtant elle s'approcha, le ventre noué. Il braqua son regard derrière lui tout en avançant vers elle et la souleva en la déposant sur son épaule. D'un pas rapide il parcourut le pont, la renversa sur le lit et disparut comme une ombre silencieuse.

Ne sachant pas quoi faire ni même comment agir Malia essuya les larmes qui roulaient sur ses joues et sentit une secousse la renverser en arrière. Elle se leva pour parvenir à la baie vitrée et comprit que le bateau s'éloignait des côtes guidé par les phares lumineux.

Ce qu'il venait de se passer ce soir était si impensable qu'elle avait l'impression d'être dans un cauchemar. Elle voulait se réveiller hélas tout était réel. Caleb venait encore de la sauver en réveillant la bête et savait sans l'ombre d'un doute qu'il s'en voulait de lui avoir montrer cette partie de lui qui s'avérait la plus impitoyable.

S'entourant de ses bras elle alla jusqu'au lit et s'installa au bord en fixant le coussin par terre. Un goût amer lui déforma la bouche en se rappelant avec dégoût le visage de l'italien qui impitoyablement lui avait rappelé l'un des hommes de Tahar.

- Je suis désolé...

Malia se figea sous cette voix sombre aux notes torturées.

- Je ne voulais pas te montrer ça et je comprendrais que tu ne veuilles plus me regarder à présent, ajouta-t-il sur le même ton.

Malia ferma lentement les yeux en inspiration doucement.

- Mais si c'était à refaire, commença-t-il d'une voix féroce et basse : je recommencerai sans hésiter.

Elle rouvrit les yeux et se retourna mais il était déjà parti. Le cœur serrée, elle se passa une main dans les cheveux puis baissa les yeux sur le matelas. Les paroles du cheikh confirmaient ses craintes. En dévoilant l'ultime facette de sa personnalité il craignait qu'elle puisse le voir comme un monstre. Mais ce n'était pas le cas. Comment lui faire comprendre qu'elle se sentait bien plus en sécurité dans ses bras quand dans n'importe quels autres ?

La peur qu'il lui inspirait était salvatrice, comme un besoin équitable au bien-être qu'il lui faisait ressentir.

Malia se leva, quitta la chambre et remarqua qu'ils étaient loin, très loin du port, au milieu de la mer silencieuse. Elle savait encore une fois qu'il s'était éloigné des côtes pour la mettre en sécurité et son cœur se mit à bondir. Guidée par la raison et poussé par ce que son cœur lui dictait Malia traversa le pont et s'arrêta à hauteur de la porte qui menait dans un long couloir aux murs boisés. Ce couloir menait à sa chambre et en l'empruntant plutôt que la baie vitrée elle espérait le surprendre.

À son grand désespoir elle la trouva vide avant qu'une épaisse vapeur attire son attention. D'un pas lent, elle s'avança et pénétra dans la salle de bains sombre et briquée d'un mur gris anthracite. Elle s'avança jusqu'au mur central qui la séparait de lui et se colla à ce dernier en se penchant légèrement.

Malia ravala un souffle en se pinçant la lèvre les yeux rivés sur cet homme entièrement nu, dos à elle, exposant un corps sculpté et magnifique. Impressionnée, presque aussitôt une chaleur naquit dans son bas ventre. L'eau retombait en cascade sur ses larges épaules alors qu'il avait les mains plaquées sur la paroi. Soudain il releva la tête puis se redressa lentement. Son dos se creusa sous la tension, crispant les reliefs de ses muscles.

Malia s'approcha d'un pas qu'elle espérait silencieux, craignant à la fois l'homme et la bête mais fut incapable de résister à l'appel de son cœur.

Les jets l'effleurèrent et sentit ses vêtements lui coller à la peau. Elle combla l'espace qui la séparait de son dos imposant et lézardé.

Malia savait que le geste qu'elle s'apprêtait à faire écrirait la suite de leur histoire.

Elle leva sa main et du bout des doigts caressa l'une de ses balafres avant d'y déposer un baiser.

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