Chapitre 13
Caleb serra ses mains liées contre sa bouche pour s'empêcher de bouger. Dans les filtres de lumière la jeune femme respirait une beauté pure, elle était à couper le souffle. Une émotion indicible lui comprima la poitrine alors qu'elle se redressait à l'aide de ses mains. Caleb brûlait d'impatience mais résista à la tentation de répéter sa question par peur d'élever la voix.
- Peut-être que je suis stupide, répondit-elle en levant la tête.
Caleb se leva d'un bond pour venir enfoncer ses poings contre le matelas, de chaque côté de son corps frêle mais qui résistait avec bravoure à la peur.
- Oh que oui vous l'êtes ! Affirma Caleb d'une voix sombre ; Je vous ai donné une chance de partir pourquoi vous ne l'avez pas fait ? Est-ce la pitié qui vous a empêché de reprendre la liberté ?
Caleb avait mis toute son amertume dans sa dernière question car il ne voulait pas pitié encore moins de sa part.
Ses lèvres charnues s'ouvrirent puis se refermèrent alors que ses yeux lui lançaient des jets de colère.
- Osez nier que vous n'êtes pas mécontent de ma décision, après tout les efforts que vous vous êtes donné pour parvenir à vos fins.
Caleb serra les mâchoires, alors qu'elle respirait comme un étalon fou.
- Croyez-moi, cela ne m'a pris aucun effort, juste une lutte acharnée contre moi-même.
Ils étaient si proche l'un de l'autre qu'il pouvait sentir son souffle tiède contre son visage. Caleb se redressa à la hâte pour s'écarter d'elle mais ne quitta pas son regard.
- Vous m'avez sauvé la vie, ce qui me laisse croire que vous n'avez pas l'intention de me tuer, commença-t-elle d'une voix étonnement timide ce qui laissait entrevoir un afflux de crainte ressurgir en elle.
Elle se racla la gorge en évitant son regard.
- J'ignore pour quelle raison je n'ai pas saisi cette opportunité mais comme vous l'avez dit, vous m'avez sauvé la vie alors...
- Vous, vous sentez redevable ?
Comme elle restait silencieuse Caleb se mit à faire les cents pas dans la chambre.
- Vous voulez du silence et ma présence, reprit-elle en se levant lentement du lit.
Caleb se retourna brutalement. La jeune femme ressemblait à une sauvageonne qui sortait d'une lutte acharnée contre elle-même.
- C'est bien ce que vous avez dit non ?
Sous choc Caleb la dévisagea longuement. Comment diable pouvait-elle réagir ainsi alors qu'il l'avait kidnappé ? Arrachée en quelques minutes à sa vie bien rangée ? Il avait tout envisagé...crises hystériques, pleures, elle le suppliant de la ramener chez-elle, grève de la faim...mais certainement pas une acceptation aussi facile de sa condition.
- Êtes-vous folle ou bien saisie d'un désir irrationnel de vous jetez dans les gorges de l'enfer ? S'enquit-il d'une voix glaciale.
La jeune femme l'observa perplexe.
- Et vous ? Rétorqua-t-elle en levant le menton ; Êtes-vous amnésique ou c'est votre double qui m'a enlevé au beau milieu de la nuit ? Je vous rappelle que c'est vous l'auteur de cette situation pas moi !
- N'importe quelle femme saine d'esprit aurait saisi l'occasion de fuir et vous...
Caleb se mit à la dévisager, les narines frémissantes. C'était comme s'il était tiraillé entre l'homme et la bête. L'un voulait la jeter dans le bateau pour qu'elle regagne la côte et l'autre voulait la garder sans prendre en compte les conséquences d'un tel acte et c'est exactement ce qu'il s'était passé la nuit où il l'avait emporté avec lui. Mais aujourd'hui c'est l'homme qui parlait avant que la bête reprenne le dessus.
Il s'approcha pour envelopper ses épaules avec ses mains et lui imposa un regard qu'elle ne put fuir.
- Je vous donne dix minutes pour changer d'avis et sauter dans le bateau, à la fin de ce temps, il n'y aura plus de retour possible.
Caleb la relâcha et quitta la chambre pour grimper les ponts supérieurs. Il traversa le dernier étage et se mit au commande du bateau prêt à le lancer sur l'Atlantique. Il vérifia sa montre à plusieurs reprises, l'oreille tendue pour mieux capter les sons qui provenaient d'en bas.
Malia se mordit la lèvre nerveusement mais ne bougea pas d'un cil après qu'il eut quitté la chambre d'un pas rageur. Il lui donnait une seconde chance et pour une raison qu'elle ignorait, Malia refusa de la saisir. Pourtant, il avait mis toute sa rage, toute son énergie pour la terrifier et même si cela avait marché, Malia refusait toujours de partir. Elle n'éprouvait pas de la pitié pour cet homme mais plutôt une étrange sensation comme s'il avait le pouvoir de l'aimanter sur des terres dangereuses et méconnues. Malia vacilla sur ses jambes quand elle sentit le yacht prendre de la vitesse. Elle se rattrapa à la table et comprit que les dix minutes venaient de s'écouler.
Elle s'approcha de la baie vitrée qu'elle fit coulisser et s'avança jusqu'à la rambarde transparente. La côte s'éloignait d'elle ou du moins c'est elle qui s'éloignait avec le sentiment qu'elle faisait peut-être une erreur mais quelque chose en elle l'a détourné de la raison.
- Vous n'aurez plus de chance à présent.
Malia sursauta tandis que cet homme au regard profond couvrait déjà la distance qui les séparait. Poussée par un mélange d'exaltation et de peur Malia se recula doucement.
- Vous êtes inconsciente, murmura-t-il d'une voix basse mais suffisamment lisible pour qu'elle l'entende.
- Peut-être, murmura-t-elle en soutenant son regard qui était lourd et intense.
Il se rapprocha plus près et leva sa main vers elle. Malia s'écarta légèrement pour refuser son contact et contre toute attente il l'accepta en laissant sa main retomber sur sa hanche.
Les yeux baissés, Malia se retourna pour regagner sa chambre en le laissant seul sur le pont. Elle s'enferma dans la salle de bains avec l'horrible pressentiment qu'il se trouvait derrière la porte.
- Je vous attends dans le salon, ne soyez pas longue, lança-t-il sèchement.
Le souffle coupé elle déglutit en s'installant sur le rebord de la baignoire qu'elle serra de toute ses forces. Une fois sûre d'être seule Malia se leva pour étudier son reflet et toucha ses joues brûlantes.
Elle ôta son pyjama avec honte de l'avoir porté si longtemps. Une fois nue elle se doucha en vitesse et enfila une robe qui était suspendue sur un cintre. Malia prenait lentement conscience qu'elle baignait dans l'opulence et se sentait mal à l'aise d'accéder à ce luxe qui pour elle ressemblait plus à une hallucination.
D'une main tremblante elle remit de l'ordre dans ses cheveux désordonnés et quitta la salle de bains en maintenant son souffle comme si elle craignait qu'il surgisse de nulle part.
Sa crainte se révélait exacte car il se tenait près de la baie vitrée, contemplant l'horizon d'un air sombre. Rougissante elle détourna les yeux de cet homme qui affaiblissait sa raison et se racla la gorge pour le sortir de sa torpeur.
Il tourna la tête puis son corps afin d'être en face d'elle. Dans ses yeux elle crut voir une lueur intense qui fut remplacée par une froideur inexplicable.
- Venez, murmura-t-il en s'éloignant.
Malia le suivit d'un pas craintif en remettant des mèches derrière son oreille. Elle mit ses mains en visière pour se protéger du soleil et se mit à marcher derrière lui tout en observant son dos rouler à chacun de ses pas.
Il s'arrêta brutalement et pivota son corps robuste pour la regarder puis reprit son chemin vers des escaliers qu'elle emprunta à son tour.
- Voici le salon, annonça-t-il en s'écartant pour la laisser passer.
Le salon ? Songea Malia en écarquillant les yeux.
- Je dirais plutôt un appartement, commenta-t-elle en pénétrant à l'intérieur de cette vaste pièce parée de luxe et de modernité.
- Ça ne vous plaît pas ? S'enquit le cheikh l'air sombre.
Malia osa poser son regard vers le sien et lut de la déception dans ses yeux opaque.
Soudain une question lui sauta à l'esprit et son cœur rata quelques battements.
- Depuis quand avez-vous ce yacht ?
- Depuis deux jours, répondit-il en inclinant légèrement sa tête.
Les joues en feu, Malia détourna les yeux alors qu'elle venait comprendre pour quelle raison il semblait déçu.
- Par pitié ne me dites pas que vous l'avez acheté juste...
- La cuisine se trouve juste derrière la séparation, la coupa-t-il brutalement en pliant son index pour qu'elle le suive.
Malia trouva un appui sur l'une des chaises couleur beige et descendit les trois marches pour le rejoindre.
La visite dura plusieurs minutes et elle dut reconnaître que ce yacht était majestueux mais ce n'était pas suffisant pour atténuer la peur qui lui nouait le bas-ventre. Pourtant, Malia avait noté un faible mais présent changement dans son comportement. Il s'était montré volontairement distant et doux dans sa façon de parler mais Malia savait que ce n'était que temporaire...
- Installez-vous, ordonna-t-il en lui tirant la chaise.
Malia se mordit la lèvre et s'installa le regard pointé sur l'océan. La vue était incroyable presque apaisante contenue de la situation. Malia remarqua très vite qu'il n'y avait plus rien autour d'elle, les côtes n'existaient plus.
- Nous sommes seuls ? Demanda-t-elle quand il prit place en face d'elle.
- Oui, affirma-t-il se penchant pour la servir.
Malia observa le plat posé au centre de la table.
- C'est vous qui avait cuisiné ?
- Oui et ça semble vous surprendre, répondit-il en plongeant son regard dans le sien.
- Oui, avoua-t-elle : Je m'attendais à voir du personnel, un cuisinier, des gardes du corps.
- Ai-je l'air d'avoir besoin d'un garde du corps ? S'enquit le cheikh d'une voix énigmatique.
Malia se remémora les dires de Scott et se surprit à regarder sa carrure de guerrier.
- Non, répondit-elle en jetant un regard sur l'horizon.
- Vous devriez manger, lui conseilla-t-il en prenant sa fourchette pour lui tendre.
Malia la prit en effleurant ses doigts virils et ressentit cette chaleur qui n'avait de cesse de l'envelopper à son contact.
Elle piqua un morceau de viande et le savoura en soupirant. Elle n'avait rien avalé depuis presque deux jours, son estomac grondait si fort qu'elle remerciait le bruit des vagues qui parvenaient à le couvrir. Lorsqu'elle releva les yeux Malia rencontra son regard opaque profondément ancré sur elle.
- Où allons-nous ? Osa-t-elle demander, impatiente de savoir si elle retoucherait la terre un jour.
- Je l'ignore, pour l'instant ce n'est pas ma priorité.
- Quelle est votre priorité ? S'enquit Malia en serrant le bord de la table.
Son geste n'échappa pas au regard aiguisé du cheikh.
- Chasser la peur qu'il y a dans vos yeux, répondit-il d'une voix déterminée en la couvrant d'un regard énigmatique.
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