– Mathieu... Ouvre les yeux, réclama Isabelle en se présentant devant lui, droite et fière.
Mathieu s'accomplit.
S'il vit sans le moindre doute l'objet que portait Isabelle, il ne montra aucun sentiment sur son visage, aucune peur, aucun reproche, comme s'il ne s'agissait que d'une information qu'il intégrait et que... peut-être que c'était évident, pour lui. Peut-être que ça l'était parce que c'était Isabelle et qu'il savait déjà ce qui allait se passer.
Quand Isabelle se remit en marche pour le contourner, Mathieu ferma de nouveau les paupières. Claire ne put s'empêcher de compter, mentalement : après Isabelle, il y aurait encore Cain, Véronique, et la maitresse. Encore trois coups. Puis elle : quatre, mais elle n'utiliserait pas cet objet, ce qui ferait encore quatre coups de fouet, au pire, avec celui-ci.
– Compte jusqu'à trois, exigea Isabelle.
Mathieu commença aussitôt :
– Un... deux...
Il n'eut pas la possibilité de prononcer correctement le « trois », toutefois, puisque ce fut à ce moment-là que le fouet s'abattit sur son dos, et ce qui sortit de sa gorge fut un grognement suivi d'un halètement prononcé.
Dans le silence de la pièce, avec la poitrine de Mathieu se soulevant et se rabaissant rapidement au fur et à mesure qu'il cherchait à reprendre son souffle, et la manière dont ses mèches blondes battirent son front, et dont ses bras se balancèrent au bout des chaînes, Claire ne put s'empêcher, au-delà de son affolement et de sa peur, et du retentissement de ses alarmes internes, et de l'aspect odieux de ce spectacle... de trouver ce son sexuel. Profondément.
Elle ne rejeta pas ce sentiment.
Elle était ébranlée, comme si elle avait atteint les plus grandes profondeurs en elle-même : ce qu'elle n'avait jamais eu à voir auparavant, mais elle l'accepta, comme Mathieu acceptait les coups, les laissant glisser en lui et attendant que la douleur s'estompe pour se préparer à recevoir le suivant.
D'une certaine manière, elle en prenait aussi, des coups, mais d'une autre forme. Être captivée par ce spectacle en était un. Être excitée en était un second, plus fort, plus intérieur.
Quand Isabelle tendit le fouet à Véronique, celle-ci le prit sans sourciller. Elle n'esquissa pas le moindre geste pour l'échanger contre un autre objet. Elle poussa même la légèreté jusqu'à s'approcher elle aussi du visage de Mathieu en passant près de lui et se pencher pour lui dire une « bêtise » – ou quelque chose de complice du moins, Claire ne savait pas exactement quoi – qui suscita une réaction amicale chez Mathieu. Puis elle alla cingler son corps dans un coup moins puissant que celui d'Isabelle mais non moins impressionnant.
De la sueur était maintenant visible sur le torse de Mathieu, une infime couche qui se lisérait de teintes orangées et dorées, avec des ombres mouvantes, suivant les mouvements des flammes des bougies. Claire se demanda à quoi pouvait ressembler désormais son dos.
Elle y pensa à chaque seconde.
Elle y pensa quand Cain apposa lui aussi, dans une précision stupéfiante, un long trait de cet objet terrible qu'était celui qu'avait choisi Isabelle, et elle y pensa plus vivement encore quand ce fut au tour de la maitresse de se positionner derrière lui, parce que c'était elle et qu'elle ne le frappa pas mais prit le temps de détailler sa chair du regard. Et que celui-ci était si précis et si intense qu'il était presque possible de visualiser l'état du dos de Mathieu simplement en le suivant.
Et quand elle eut fini, elle ne frappa toujours pas.
Plutôt, elle appela Claire.
– Viens.
Un mot, pour un ordre impérieux, et pourtant chargé de douceur.
Claire expira profondément. Son niveau de stress n'avait fait que monter et il venait de subir une hausse si forte qu'elle pouvait sentir son pouls battre dans ses tempes et que sa tête n'était pas loin de lui tourner. Elle craignait de perdre l'équilibre si elle avançait.
Quant à Mathieu, il se tenait face à elle, haletant, les yeux fermés, avec ses bras qui retombaient maintenant plus, leur poids devenant visible, toujours attachés au-dessus de sa tête, et son visage qui avait pris appui contre l'un d'eux à l'intérieur.
La maitresse ne la pressa pas. C'était surprenant, cette sollicitude, chez cette femme qu'elle avait vue si dure, jusque-là, mais Claire n'était plus en état de chercher à l'analyser.
Dans un soupir, elle s'arracha à sa réserve immobile, et avança pour contourner le corps de Mathieu. Elle aurait voulu avoir accès à son regard mais il était si concentré, si plongé en lui-même, et elle si fascinée par l'image qu'il lui offrait. Il lui semblait une bête fabuleuse, impossible à dompter, offrande improbable, magnifique et stupéfiante. Elle en était éblouie et troublée, et elle fut submergée d'émotion, en passant près de lui, parce qu'elle aurait voulu se serrer contre son corps, poser sa tête sur son torse, sentir sa chaleur et rester là, ainsi. L'étreindre, elle, s'il ne pouvait pas le faire, lui.
***
Note de l'autrice : Je ne vous dis pas comment je suis à l'aise sur l'écriture de ces chapitres, mais j'ai voulu écrire cette scène, j'assume, hein ? XD
Petite note pour dire que ça me fait râler, mais que je crains de ne pas pouvoir aller jusqu'au bout de ce roman avant de faire une nouvelle pause. Primo, cet épisode est beaucoup plus long que les précédents : d'habitude, je fais des épisodes de 20 000 mots ; eh bien ça y est, celui-ci en est aux 20 000 et il est loin d'être fini. Deuxio, ben je pars en vacances dans une semaine et je ne serai donc pas dispo pour écrire. Tercio, j'ai commencé le travail de corrections à faire avec mon éditrice sur un autre roman : une chick-lit érotique très fun que j'ai écrit avec une copine pour les éditions Harlequin et qui sortira dans 2 mois 1/2 (je vous en reparlerai, si vous le voulez), et ce taf de corrections me prend aussi du temps...
Bon, soyons réalistes, je n'y arriverai pas : il faudra que je re-fasse une pause, mais pas tout de suite : d'ici là, je continue à poster les chapitres et, promis, je tâcherai de faire une pause à un endroit... non pas qui ne sera pas frustrant (ça sera impossible de l'éviter) mais qui supportera un peu mieux l'attente. Et la pause sera courte !
Val.
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