Chapitre 25

Note d'autrice : Comme dans l'un des précédents chapitres, ce chapitre contient un morceau de musique d'accompagnement : à enclencher dès le début du chapitre ou au moment où il est évoqué par les personnages, si vous souhaitez parcourir les lieux dans la même ambiance musicale qu'eux. :)

***

Claire observa la scène. C'était comme si un spectacle s'était déroulé devant ses yeux mais dont elle avait été un acteur inattendu. Elle ne savait que penser de ce qu'il venait de se produire. Mathieu, lui-même, ne montrait rien, restant juste fermé et dur.

Véronique se planta à côté de Mathieu en suivant des yeux la maîtresse.

– Elle te fait chier, hein ? commenta-t-elle.

– C'est un euphémisme.

– Elle te sent t'éloigner.

Mathieu ne répondit pas.

Claire n'osa pas l'interroger, du moins, par pour l'instant. Ce n'était pas le moment. Son rapport avec la maîtresse l'avait toujours intriguée. Les voir s'affronter ainsi la perturbait plus violemment qu'elle ne s'y serait attendu.

Sur l'estrade, le dominant qui lui avait été désigné comme « Cain » faisait tomber des gouttes de cire sur le dos de sa soumise, ce qui – elle s'en rendit compte – la captivait largement autant que lui suscitait de la répulsion, dans une intensité parallèle. Le mélange entre les deux persistait à être surprenant, ses objets d'attraction aussi. Sous la brûlure répétée, la soumise se tordait mais n'émettait pas le moindre son, la bouche bien fermée. Son visage-même affichait un abandon extraordinaire, bien que la douleur y soit lisible. Les gouttes de cire tombaient si vite... Claire étaitstupéfaite par son attitude. Qu'elle s'offre ainsi l'impressionnait. Elle la trouvait belle, somptueuse... troublante.

– Le donjon doit être investi, maintenant, remarqua Véronique.

– Oui, approuva Mathieu.

– Tu restes pour la démonstration de Cain ?

Mathieu mit un moment à répondre. Il observait le spectacle sans sembler s'en émouvoir. Juste détaché.

– Non, dit-il enfin.

Puis il attrapa Claire par la main, avant de l'entraîner avec lui.

– Viens.

Claire se laissa emporter.

Ils dépassèrent Cain, qui les fixa attentivement tout le temps durant lequel ils traversèrent l'espace devant l'estrade, puis ils rejoignirent l'escalier extérieur qui montait au donjon. Situé un peu plus loin de la piscine, ce dernier plongeait rapidement sous un porche, les dissimulant des regards alors qu'ils en gravissaient les marches. A chaque instant, le plug la dérangeait. Il la gardait ouverte en permanence, appuyait contre ses parois tandis qu'elle montait, et les pinces sur ses mamelons la lançaient en continu, lui rappelant à quel point son corps avait été maltraité, stimulé, possédé, la transformant en objet de besoin, à fleur de peau à chaque seconde.

Mathieu s'arrêta une fois qu'ils furent parvenus en haut des marches.

– Qu'est-ce qui te dérange le plus ? lui demanda-t-il.

Elle eut envie de dire : « de ne pas savoir ce que t'a demandé la maitresse, me concernant ». Elle garda ça pour elle. Elle fouilla non pas dans les tumultes de son esprit mais dans les troubles de son corps. Que son malaise soit perceptible sur son visage ne l'étonnait pas.

– Les pinces, peut-être...

Elles lui faisaient véritablement mal, mais il était difficile de déterminer si le plug n'était pas plus dérangeant.

– Tu as du mal à les supporter ?

– Oui, souffla-t-elle.

Il caressa sa joue, doucement. D'envie, elle s'appuya contre sa main, cherchant le réconfort dans son contact. Pourtant, il était celui qui la poussait à bout, ainsi.

– Tu peux y arriver encore.

Elle ne sut déterminer si la voix de Mathieu était froide ou encourageante. Ce pouvait être difficile, parfois, avec lui. Ses paroles n'avaient rien d'une question, en tout cas ; c'était une sentence.

Elle expira, cherchant les ressources en elle pour tenir face à ce qu'il lui imposait.

Quand Mathieu ouvrit la lourde porte donnant sur le donjon, la musique qui en émana lui parla aussitôt.

– Tu connais ce morceau ? lui demanda-t-il.

– Oui.

Il connaissait son goût pour les vieux groupes, les vieux albums.

Venus in furs, dit-elle.

Le morceau des Velvet Underground inspiré par le roman de Leopold von Sacher-Masoch. Cet écrit sur le BDSM datait du XIXème siècle, mais elle ne l'avait su qu'après avoir rencontré Mathieu. Elle n'avait jamais fait attention plus que ça aux paroles, auparavant, et celles-ci restaient floues, pour ce qui était de leur sens, comme la plupart des morceaux de ce groupe. Cette chanson lui était pourtant toujours apparue comme la quintessence de l'érotisme... Maintenant qu'elle en connaissait le sujet, elle avait l'impression que la vie lui avait réservé un joli pied de nez.
Sur l'instant, la musique répondait parfaitement à l'aura de trouble qu'elle éprouvait : cette plongée dans l'inconnu, ce mélange indescriptible d'attraction et de crainte, d'envie de fuir et de besoin de savoir, d'aller plus loin... Jusqu'où, juste ?

Jusqu'où ?

L'éclairage, dans le long couloir du donjon, avait été entièrement aboli à l'exception d'une lumière si vive, à son extrémité opposée, qu'elle les éblouissait et transformait les corps leur faisant face en des ombres chinoises. L'atmosphère n'en était que plus sexuelle et intrigante. Claire sentit l'excitation ramper sous sa peau, le besoin d'extrémisme, de se perdre, si profondément...

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