Chapitre 50 - partie 1
Après avoir fait leur sac en fin de matinée et déjeuné avec Ashley et son fiancé devant le journal télévisé, Théo et Lyly montèrent en voiture. Le jeune homme au volant, le couple stoppa la voiture que trois heures après, et décida de se garer près d'un petit commerce afin d'acheter de quoi manger. Ils s'installèrent sur un banc, quelques mètres plus loin, près d'un parc, et discutèrent ensemble pendant près d'une heure, avant de reprendre la route, l'estomac bien rempli.
Lyly dû attacher ses cheveux en une queue de cheval afin de ne pas les voir virevolter dans l'air à cause de sa fenêtre qu'elle avait à moitié ouverte, et se concentra sur son téléphone. D'après ce que sa cousine lui avait expliqué par message, Justin avait glissé d'une échelle en souhaitant aider l'un de ses voisins, et avait fini à l'hôpital. Heureusement, il y avait eu bien plus de peur que de mal, et celui-ci en était ressorti qu'avec une petite foulure, et un énorme bleu sur le bras droit et le côté de la cuisse droite.
Lyly répondit aux messages d'Ashley, et cala son téléphone verrouillé entre ses deux cuisses. Cela faisait déjà des mois que Justin était parti en échange universitaire. Que serait-il arrivé si, elle aussi, avait voulu partir en échange ? Aurait-elle pu se faire de nouveaux amis ? Elle n'en savait rien, et n'en saurait jamais rien. Mais tout ce dont elle était sûre, c'était qu'elle n'aurait jamais pu rencontrer de meilleures personnes que sa cousine, Théo et John.
La jeune femme tourna son visage et admira silencieusement Théo au volant, qui avait les yeux bien rivés sur la route. Elle n'échangerait son arrivée ici pour rien au monde. Jamais elle n'aurait voulu rater sa rencontre avec Théo. Jamais elle n'aurait voulu passer à côté de ce qu'elle vivait à ses côtés. Ce n'était pas facile, certes, mais elle faisait des efforts. Beaucoup. Et il en valait la peine.
Le chemin qu'elle avait parcouru depuis son arrivée ici relevait de l'inédit pour elle. Jamais elle n'avait autant réussi à s'ouvrir et à se confier à quelqu'un. Lyly glissa timidement sa main sur la cuisse du jeune homme. Elle le vit sourire, sans lâcher la route des yeux, décoller l'une de ses mains du volant, et glisser la sienne sur celle de Lyly, avant d'y entrelacer ses doigts.
— Comment s'appellent tes grands-parents ?
— Enrico et Louisa.
— Tu sais vers quel âge ils se sont rencontré ?
Théo fit non d'un signe de tête.
— Je ne me souviens pas très bien.
Lyly regarda vers sa fenêtre entrouverte, et observa les arbres défiler en espérant que Louisa et Enrico soient aussi gentils que Tô Tâm et Pascal. Et s'ils ne l'appréciaient pas ?
— Et toi, alors ? Tu voyais souvent tes grands-parents avant de venir ici ?
— Pas vraiment.
— Ils habitent loin ?
— Il me reste juste une grand-mère, du côté de mon père. Mais, ils se sont perdu de vu, donc je ne l'ai pas trop vu.
— Et tu te souviens des autres ?
— Non, ils sont décédés quand j'étais très jeune, ou quand je n'étais pas encore née.
Lyly croisa un instant le regard de Théo.
— Merde, je suis désolé, Lyly.
Elle sentit Théo lui presser davantage la main.
— Quand je vois des personnes entretenir de bonnes relations avec leurs grands-parents, je les envie beaucoup, tu sais. J'aurais beaucoup aimé les avoir près de moi.
— Je suis sûre que tu vas bien t'entendre avec Enrico et Louisa. Ils sont très sympas et très doux, la rassura-t-il.
— Ils ont déjà vu une de tes petites amies ?
— Jamais.
Théo activa son clignotant et tourna à droite.
— Avant qu'on aille chez mes parents, j'aimerais bien qu'on passe à une librairie. J'ai entendu parler d'un livre que mon père pourrait adorer.
— Ça parle de quoi ?
— Ils expliquent les différents types d'enseignements dans le monde, et comment ça se passe dans les écoles à l'international.
— Il va adorer, c'est sûr !
Le jeune couple sortit d'un petit restaurant après dix-neuf heures, et tous deux reprirent la route pendant une quarantaine de minutes, avant de garer la voiture devant la maison de Pascal et Tô Tâm, qui étaient probablement déjà sortis de table.
Théo détacha sa ceinture en même temps que Lyly, et observa les deux voitures garées à sa gauche. Visiblement, ses grands-parents n'avaient pas changé de voiture depuis tout ce temps, et prenaient toujours le temps de l'entretenir. La carrosserie brillait, et les pneus semblaient neufs. Il jeta un œil à Lyly et sentit son corps se détendre en croisant son regard. Théo se pencha et déposa ses lèvres sur celles de la jeune femme, qui prolongea le baiser en glissant sa main dans la chevelure du jeune homme. Il colla ensuite son front à celui de Lyly, les yeux fermés, et expira un bon coup.
— Je me demande c'est qui le plus stressé de nous deux.
Théo ricana nerveusement, recula et observa la maison en face d'eux.
— Très bonne question. Mais ça va bien se passer. On est ensemble, ça va le faire, tenta-t-il de se convaincre.
Il tapota la cuisse de Lyly, ouvrit la portière et était sur le point de sortir lorsque Lyly lui attrapa le poignet. Il se rassit sur son siège, intrigué, et tourna son visage vers la jeune femme, qui le regardait sérieusement.
— Ça va bien se passer, répéta-t-elle afin de le rassurer.
Théo acquiesça.
— On est ensemble.
Le jeune homme la fixa, et laissa lentement un sourire apparaître sur son visage. Sa présence était rassurante, et ses mots l'étaient tout autant. Théo lui fit signe de le suivre, descendit de la voiture, alla chercher le livre dont il avait parlé plus tôt à Lyly dans le coffre, ferma sa voiture, et avança vers la porte d'entrée, sa main dans celle de la jeune femme.
Il frappa trois grands coups à la porte, jeta un regard vers Lyly qui lui sourit en retour, et entendit la clé tourner dans la serrure. Il reporta ses yeux vers la porte, stressé, et la vit s'ouvrir sur Pascal, qui laissa la surprise s'emparer de son visage. Il observa Théo avec de grands yeux ronds, les glissa sur Lyly, puis les reporta sur son fils, avant de laisser un grand sourire apparaître.
— Tô Tâm ! s'écria-t-il, émerveillé. Tô Tâm, viens voir !
Il se jeta dans les bras de Théo qui dû lâcher la main de Lyly, et le serra fortement contre lui un instant.
— Ça alors !
Il recula, et tapota les épaules de son fils, qui se mit à rire.
— Bon dieu, Théo, ça alors ! Toute la famille est réunie !
— Ça va, papa ?
— Théo !
Tô Tâm se fraya un passage et parut tout aussi émerveillée que son mari en apercevant son fils devant sa porte d'entrée. Elle posa son torchon qu'elle tenait dans sa main sur le radiateur du couloir, et s'avança vers Théo afin de l'enlacer, pendant que Pascal saluait Lyly à son tour.
Comme la première fois, l'enlacement de Tô Tâm avec Théo dura bien plus de temps que celui avec Pascal, et c'est presque émue que sa mère recula des bras de son fils.
— Je suis heureuse que tu sois venu.
Tô Tâm tourna ses yeux vers Lyly.
— Et pas seul, en plus.
Elle contourna Pascal et s'arrêta en face de Lyly, les yeux brillants de bonheur.
— Je suis si heureuse de vous revoir, Lyly. Merci d'être venue avec Théo. Vous allez bien ?
— Tu pourrais la tutoyer, maman, plaisanta Théo.
— Je vais bien, merci, et vous ?
— Très bien, acquiesça Tô Tâm. Merci, Lyly. Je vais très bien.
— D'ailleurs, papa, j'ai un petit cadeau pour toi.
Pascal prit le livre que Théo lui tendit, lu le titre, et releva le visage vers Théo, le visage encore plus radieux.
— Quelle pépite ! Merci Théo ! Ça va m'en faire de la lecture !
— Je n'en doute pas, il y a plus de huit cents pages, tu as de quoi faire.
Pascal acquiesça vivement la tête, comblé, et fit signe au jeune couple d'entrer dans la maison. Théo rattrapa la main de Lyly au passage et suivit son père pendant que Tô Tâm refermait la porte à clé.
Lorsqu'ils pénétrèrent tous les quatre dans le salon, Lyly sentit la poigne de Théo se resserrer, et ce n'est qu'en suivant le regard du jeune homme qu'elle comprit pourquoi. Enrico était assis sur le canapé du salon, le dos courbé, pendant que Louisa semblait regarder la télévision debout, appuyée sur une canne dans la main droite.
— Maman, papa, regardez qui voilà !
Les grands-parents de Théo tournèrent lentement leur tête vers Pascal, puis vers Théo, qu'ils fixèrent, à la fois intrigués et surpris.
— Papa, tu te souviens ? C'est Théo !
Louisa pivota sur ses talons et s'avança vers le quatuor présent au milieu du salon.
— Qu'il a grandi ! s'étonna-t-elle. Ça ne nous rajeunit pas tout ça. Ça te fait quel âge ?
— Vingt-neuf, mamie.
— Que tu es beau !
Théo rigola et lâcha la main de sa petite amie afin de serrer sa grand-mère contre lui.
— Ça fait si longtemps, je suis contente de te revoir.
— Moi aussi, mamie.
Elle recula de ses bras, et observa Lyly d'un air curieux.
— Je te présente Lyly, c'est ma petite amie.
— Oh ! Enchantée, Lyly. Je suis Louisa.
— Enchantée, Louisa. Théo m'a beaucoup parlé de vous.
— Oh ! Qu'il est gentil ce Théo, en bien j'espère !
— Bien sûr !
Louisa toussota en rigolant.
— Ton grand-père a un petit peu de mal à se déplacer, reprit-elle plus bas, d'un ton plus sérieux. Tu devrais peut-être aller le voir.
Théo acquiesça la tête, fit signe à Lyly de le suivre, et tous deux s'arrêtèrent en face d'Enrico, qui avait reporté son attention sur la télévision. À la vue de deux ombres, il tourna les yeux vers Lyly, puis vers Théo, avant de paraître à la fois perdu et méfiant.
— Ça va, papy ? osa Théo, nerveux.
Théo se fit scruter en silence. Il resta immobile et sentit son cœur bondir bien plus fortement en lui.
— On se connaît ? demanda-t-il enfin, dubitatif.
— Mais enfin ! s'exclama Louisa quelques mètres plus loin. C'est Théo, ton petit fils !
— Théo ?
Enrico analysa le jeune homme en face de lui, les sourcils froncés, et resta un moment silencieux.
—Comment, tu dis ?
— Théo ! répéta Louisa.
Il ne lâcha pas Théo du regard, perplexe, plissa les yeux et secoua la tête, indigné.
— Tu l'as aidé à faire ses devoirs de mathématiques, tous les mercredis ! reprit sa femme. Et vous mangiez toujours une gaufre à la fraise avant de vous quitter !
Enrico fixa encore quelques secondes Théo, les sourcils nettement froncés, craintif, puis sembla soudainement se remémorer son petit fils, et ouvrit de grands yeux ronds.
— Ah, Théo !
Il acquiesça vivement la tête, ses lunettes rondes sur le nez.
— Théo ! Mais tu as vieilli !
— Oui, papy, j'ai vingt-neuf ans maintenant. Et je te présente Lyly, ma petite amie.
— Bonsoir, Enrico.
Il la salua d'un signe de tête et sourit à Théo.
— Qu'est-ce que tu fais maintenant ?
— Je suis enseignant, à l'université.
Enrico hocha la tête, le fixa silencieusement vingt bonnes secondes, et reporta brusquement son regard sur la télévision derrière le jeune couple, qui se sentit soudainement de trop.
Visiblement, Enrico avait perdu le fil de la conversation.
Théo échangea un regard inquiet avec Lyly, lui prit la main, et contourna le canapé afin de rejoindre Tô Tâm dans la cuisine. Pascal et Louisa les suivirent en silence.
— Maman, lâcha-t-il nerveusement.
Théo pénétra dans la pièce, le visage fermé. Tô Tâm coupa l'eau du robinet et se retourna afin de lui faire face.
— Qu'est-ce qui se passe avec papy ?
— Comment ça ?
— Il ne savait plus qui j'étais.
Tô Tâm échangea un regard inquiet avec Louisa. Théo pivota et fit face à sa grand-mère, qui le regardait, légèrement attristée.
— Ce n'est rien de grave, il perd un petit peu la mémoire.
— Un petit peu ? répéta Théo, incrédule. Un petit peu ? Il m'avait carrément oublié !
— Avec l'âge, c'est normal, intervint Pascal. Ça arrive que les personnes âgées aient des pertes de mémoire. Il suffit juste de leur rappeler qui tu es, que tu leur partages tes souvenirs pour qu'ils se souviennent de toi.
Théo secoua la tête, la mâchoire contractée. Oublier. Son grand-père avait carrément oublié qu'il existait. Cela lui faisait horriblement mal.
— Ne t'en fais pas, Théo, reprit Tô Tâm en s'approchant de son fils. Louisa prend bien soin de lui, il va bien.
— Quand il est arrivé, il se souvenait de vous ?
— Oui, mais c'est parce que j'avais parlé de ton père et de ta mère avant de venir, dit Louisa. Autrement il ne s'en souvenait pas non plus.
— Ce n'est pas normal, trancha Théo.
— Théo, ne te prend pas la tête avec ça. Il est suivi.
Théo resta silencieux, et relâcha légèrement la pression en sentant Lyly lui caresser soudainement le dos. Il la regarda d'un air attristé, et reporta ses yeux sur sa mère.
— Vous restez dormir ?
— Oui, madame.
— Pourquoi vous ne monteriez pas vous changer ? Vous devez être fatigués.
Lyly hocha la tête que oui, glissa sa main dans celle de Théo, et l'attira avec elle en dehors de la cuisine. Il se laissa guider par sa petite amie, silencieux, et monta inconsciemment les escaliers.
Ce n'est que lorsqu'ils furent entrés dans la chambre et que Lyly eut refermée la porte derrière eux que Théo sortit de ses pensées, et lâcha son sac sur le sol, abasourdi. Lyly se défit de son manteau, rangea les deux sacs près de l'armoire et se tourna vers Théo.
— Ne t'inquiète pas, ta grand-mère prend soin de lui.
Il leva les sourcils, à bout, et se massa les paupières du bout des doigts. Il avait envie d'exploser. De crier. De fuir.
— Théo, dis quelque chose...
Il hocha la tête que non, alla chercher son sac sous le regard inquiet de Lyly, et le posa sur le lit. Il l'ouvrit brutalement, sortit le short et le haut avec lesquels il dormait, les balança sur le lit, et reposa le sac sur le sol. Il ôta sa doudoune ainsi que son pull, le regard figé sur le lit, enleva d'un geste brusque son t-shirt, et enfila celui qu'il avait sorti de son sac quelques secondes auparavant, tout en ôtant ses chaussures du bout des pieds.
En venant ici, il avait eu conscience que des années s'étaient écoulées, et que ses grands-parents seraient changés, mais il avait été loin d'imaginer tout cela. Bien loin. Il défit sa ceinture, la mâchoire serrée, fit glisser son jean sur le sol, fit un pas de côté, et enfila son short.
Théo s'en voulait d'avoir été aussi naïf. Comment n'avait-il pas prédit que cela pouvait arriver ? Pourquoi essayait-il de fuir la réalité ? Il rassembla ses affaires sur le lit, les plia, et tourna les talons afin de les poser sur sa chaise de bureau.
Lyly n'avait pas bougé. Elle se sentait impuissante. Il était certain que dans la tête de Théo, les pensées fusaient, mais il ne lui en faisait pas part, et elle n'aimait pas cela.
— Théo, parle-moi, tenta-t-elle une seconde fois.
Le jeune homme était désormais arrêté devant le lit, dos à Lyly. Il resta un moment immobile, le dos droit, et pivota finalement afin de s'asseoir sur le rebord du lit. Il s'accouda à ses cuisses, et plongea son visage entre ses mains un instant, avant de relever les yeux vers Lyly, qui ne l'avait pas lâché du regard, inquiète.
— Tu n'as pas à endurer ça tout seul, je suis là.
Elle s'avança, le regard toujours plongé dans celui de Théo, et s'arrêta en face de lui. Elle s'agenouilla sur le sol, et posa ses mains sur les cuisses du jeune homme.
— Peut-être que ce soir il va se souvenir de tous les moments que vous avez passé ensemble, et que tu pourras en discuter avec lui demain. Il est quasiment vingt heures, il est tard, il a peut-être besoin de se reposer, tenta-t-elle pour le rassurer.
Théo l'observa, perplexe.
— Quand tu les as vu dans le salon, j'ai senti que quelque chose n'allait pas. Qu'est-ce que tu as ressenti ?
Théo baissa totalement les yeux et fronça les sourcils.
— C'est le fait que ton grand-père ne puisse pas se déplacer correctement ?
— Tout, lâcha-t-il enfin en soupirant. C'est tout, Lyly.
— Leur physique ? Leur façon de se déplacer et de parler ?
Théo retrouva le regard de Lyly.
— Ça doit faire... je ne sais pas... dix ans que je ne les ai pas vu. La dernière fois, ils se déplaçaient bien, Louisa n'avait pas les cheveux aussi blancs, et elle se déplaçait très facilement. Maintenant elle ne peut même plus bouger sans prendre sa canne avec elle. Je... Je n'arrive pas à me faire à cette idée. Je n'arrive pas à croire que je sois aussi naïf.
— Mais pourquoi « naïf » ?
— Je savais que j'allais être surpris, mais j'ai été incapable de me projeter dans ma tête, Lyly ! Je n'avais même pas réussi à imaginer comment j'aurais pu les retrouver. Je suis complètement con de me voiler la face. Les gens vieillissent et meurent, je suis juste con de ne pas vouloir l'admettre.
— Hey.
Elle lui pressa fermement les cuisses.
— Tu es loin d'être con, je ne veux pas t'entendre dire ça de toi.
— C'est pourtant le cas, répondit-il d'un ton amer. Au moins, ça, je l'admets.
— Et c'est n'importe quoi, trancha-t-elle. Tu ne pouvais pas prévoir comment tu les retrouverais. Chaque corps est différent, tu aurais aussi bien pu retrouver Louisa en fauteuil roulant qu'en forme et sans canne. Ça dépend des gens, c'est impossible à prédire ces choses là. Arrête tes conneries.
Théo l'interrogea du regard.
— Je n'accepte pas que tu t'en veuilles autant. Arrête de t'en vouloir comme ça, tu es tout sauf con et naïf. Tu essayais de te protéger de la douleur, à quel moment ça peut être con et naïf ? Tu es un homme fort, je te jure que je t'admire beaucoup, Théo. Tu trouves toujours des solutions, tu prends sur toi, et tu aides toujours les autres. Tu ne peux pas te dévaloriser comme ça.
Théo secoua la tête et se laissa tomber en arrière sur le lit. Il se passa les mains dans les cheveux, nerveux, et sentit Lyly s'étendre à ses côtés.
— Louisa a vieilli, certes, mais elle a l'air d'aller bien, reprit-elle. Elle a toute sa tête, parle très bien, se déplace, et se souvenait très bien de toi.
— Ce qui me rend dingue, c'est qu'ils me disent qu'il va bien alors que je sens que ce n'est pas le cas.
— Je ne pense pas que tes parents sachent à quel point tu prends ça à cœur. Tu devrais leur en parler.
— Je ne sais pas...
— Mais si tu leur demandes d'être francs avec toi, tu dois être conscient qu'ils te feront peut-être part de mauvaises nouvelles. À toi de voir si tu préfères en rester là ou si tu souhaites tout savoir.
Théo tourna sa tête vers Lyly, qui le regardait déjà.
— Tu penses que je devrais leur demander ?
— Si ça te tient vraiment à cœur, et si tu te sens prêt à encaisser n'importe quelle nouvelle, oui.
Il acquiesça lentement la tête et détailla minutieusement le visage de la jeune femme.
— Dans tous les cas, je suis là, reprit-elle. Si tu as besoin de moi, je suis là.
Théo attira subitement Lyly vers elle. Elle passa sa jambe gauche par dessus celles de Théo, posa son visage sur son torse, et sentit la main du jeune homme se poser sur dos.
— Quand tu te sentiras prêt, tu devrais aussi peut-être aller saluer ta sœur, si elle est là. Ça te fera du bien de la voir, même si elle ne parle pas beaucoup.
— Oui, je vais y aller.
Lyly eut du mal à fermer l'œil, et surpris deux fois Théo en train de se lever afin d'aller fumer une cigarette en pleine nuit. Dans un premier temps, elle avait pensé qu'il s'était peut-être rendu aux toilettes, mais ce n'est qu'une fois qu'il fut de nouveau dans le lit, à ses côtés, qu'elle se rendit compte, à cause de l'odeur du tabac, qu'il avait fait quelque chose de bien différent. Cela faisait bien des semaines qu'elle n'avait pas vu de paquets de cigarettes. Elle ne savait pas s'il avait réussi à arrêter ou s'il avait continué de fumer pendant toutes ces semaines, et cela que lorsqu'elle ne se trouvait pas à ses côtés, mais s'il se levait en pleine nuit pour aller s'allumer une cigarette, cela ne présageait rien de bon. Théo était bien plus anxieux que ce qu'elle avait pensé. Elle ne pouvait pas le laisser comme ça.
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