Chapitre 4
28/11/221, 15h01
Lucie regretta très vite sa promesse en l'air. Que du vent. Elle avait hyper faim désormais. Son ventre qui gargouillait l'empêchait de se concentrer sur ses équations. Mme Dolas, sa professeure de mathématiques et sciences en tous genres la regardait d'un oeil sévère. Nouveaux grondement. Lucie serra les dents. "Allez, plus qu'une demie heure", s'encouragea-t-elle. Après elle espérait pouvoir manger un bout.
Au bout de quelques minutes elle tendit sa feuille d'exercice à Mme Dolas et celle-ci lui rendit son verdict.
— Tu as presque tout faux. Que t'arrive-t-il ?
La fillette se mordit la lèvre inférieure.
— Je... j'ai juste un petit creux.
— Tant pis. Recommence. Tu ne sors pas d'ici jusqu'à ce que tout soit bon.
La blondinette avala sa salive et se remit au travail.
Plus tard dans la journée, Lucie avait rendez-vous pour un prélèvement sanguin. Nécessaire pour des analyses, lui avait-on dit. Elle regarda son sang remonter dans un petit tuyau transparent jusqu'à une poche hermétique, en se demandant combien de litres ils lui avaient pris de cette manière depuis le temps. 2 ? 3 ? Ça pouvait paraître peu en trois ans, mais pour elle cela représentait beaucoup. Épuisée une fois de plus par sa longue journée, Lucie se dirigea d'elle-même aux cuisines. Elle attendit son plateau en regardant les autres enfants dans le réfectoire attenant. Elle n'avait aucune idée du sujet de leur discussion mais les voir sourire lui faisait chaud au coeur. Leur bonheur était contagieux et Lucie se surpris à esquisser un faible sourire.
***
Les journées s'enchaînaient et toujours pas de nouvelles de Severina. Lucie se faisait un sang d'encre pour elle et n'arrivait pas à dormir la nuit. Dans ses pires cauchemars, la jeune femme était devenue une fondue sanguinaire, en proie à la rage et à la folie. Quand la petite fille se réveillait, ses joues étaient mouillées de larmes.
***
Ce jour là, enfin, tout parut s'arranger. Lucie était presque prête et se démêlait les cheveux, quand la porte s'ouvrit et que Severina apparut. Encore sous le choc, Lucie lâcha son peigne et courut se jeter dans les bras ouverts de la jeune femme en pleurnichant. L'assistante referma ses bras sur le corps frêle de la fillette et la serra fort contre elle. La blondinette lui rendit son étreinte et enfouit son visage dans son cou. En temps normal, même si elles s'appréciaient beaucoup, les effusions de tendresse n'étaient pas acceptées par le WICKED. Mais en cet instant Severina s'en fichait. Tout ce qui comptait pour elle c'était de rassurer Lucie.
— Deux semaines que je t'ai pas vue ! sanglota la petite. Pourquoi ? Qu'est-ce que t'avais ?
— Je devais me faire examiner après l'assaut des fondus. Afin de déterminer si j'étais apte à continuer de te voir.
— Mais tu ne m'aurais jamais fait de mal !
Severina soupira en caressant les longs cheveux blonds de la fillette.
— Lucie... tu connaîs aussi bien que moi les effets désastreux de la Braise. On ne contrôle plus rien. Je n'aurais pas voulu...
— Et donc ? Tu n'as rien ?
— Non. Je n'ai pas encore contracté le virus.
Lucie souffla, laissant évacuer le doute et la pression.
— Ah. Tant mieux alors.
Consolée, Lucie se retira des bras de Severina.
— C'était horrible.
— Qu'est-ce qui était horrible ?
— Ton absence. Tout. J'ai cru que je ne tiendrais pas, que tu allais mourir...
— Chuut... n'y pense plus, d'accord ? J'ai le temps et je vais bien. Tu n'as plus de soucis immédiats à te faire. Ok ?
— Tu me le jures ?
— Je te le jure. Tu as ma parole.
Elle lui tendit le petit doigt et Lucie fit de même.
— Croix de bois, main de fondu...
— ... sinon je me fait manger toute crue !
Elles rigolèrent. Severina se releva et donna la main à la fillette qui l'attrapa. Elles étaient devenues plus proches ces derniers temps et cela rendait leur existence au sein du WICKED moins sombre.
***
Quelque chose se tramait. Lucie ne savait pas quoi, mais c'était important. Elle avait bien essayé de soutirer des indices à Severina et même à ses enseignants, mais tous contournaient la question, avec obstination. La blondinette avait fini par abandonner. Elle grandissait, après tout. Une fois, elle avait réussi à écouter des bribes de conversations sur une sorte de projet tenu secret, dont elle n'avait rien compris. Elle se trouvait dans une salle de maintenance, avec un technologue, qui lui expliquait les différentes armes mises au point, l'évolution de la technologie depuis des dizaines d'années. Lucie adorait ces moments. Elle était passionnée par ce domaine et avait même le privilège de toucher à certains objets. Au moment où son professeur, un illuminé farfelu lui montrait comment démonter un transplat, des voix s'étaient élevées, venant d'une bouche d'aération au plafond. Trop petite, Lucie n'a rien pu saisir de bien intéressant. Mais sa curiosité était revenue au galop et elle décida de ne pas en rester là. Seul problème. Le sujet est resté en suspend, elle n'en a plus du tout entendu parler.
— C'est quoi une puce de propriété ? questionna Lucie, un soir.
Il devait être environ 19h30, et la fillette attendait patiemment le retour de Severina.
Le professeur de technologie, M. Bench, stoppa son travail et se tourna vers elle.
— Comment ?
Lucie réitéra sa question.
— C'est quoi, une puce de propriété ?
L'homme passa la main dans ses cheveux hirsutes et toussota.
— Où as-tu entendu ça ?
— Ça ne répond pas à ma question, monsieur.
M. Bench s'étonna de l'audace de la blondinette. Décidément, WICKED pouvait avoir une influence négative sur le caractère des enfants. À force de les surmener, ils finissaient par se révolter, c'était tout à fait normal. Mais cela ne donnait pas pour autant le droit à Lucie d'extérioriser sa colère sur lui alors qu'il n'avait rien fait !
— Un peu de respect s'il-te-plaît Lucie. Est-ce que je te parle sur ce ton, moi ?
— Non. Excusez-moi M. Bench.
Le professeur sourit et se baissa pour être à la hauteur de la fillette.
— Dis-moi juste qui t'en a parlé.
— Je l'ai entendu.
— Où ?
— Je... je sais plus !
L'homme se frotta les yeux. Lucie enchaîna.
— Et c'est quoi du coup ?
— Tu n'as pas vraiment le droit de le savoir.
— Mais ! Je ne le répéterai à personne !
— Pour commencer, cette information n'aurait pas dû sortir de la bouche des adultes présents ici.
— Pourquoi ? C'est si grave que ça ?
— ...
— Allez. Je vous en supplie.
— Bon, bon ça va ! Ça va...je vais te le dire.
Le visage de Lucie s'éclaira. Elle se pencha vers le professeur pour écouter ce qu'il allait lui révéler.
— Une puce de propriété c'est en quelque sorte un tout petit objet éléctronique très perfectionné, qui nous sert à pister ou à marquer un autre objet, ou même une personne. En...en prison par exemple. Pour savoir et repérer ceux qui tenteraient de s'échapper.
— Ah.
— Tu es satisfaite ?
Lucie fit une moue déçue sous le regard surpris de son professeur. Elle espérait en apprendre plus sur cet objet.
— Et pourquoi ils en ont parlé ici ?
— Stop. Je ne te dirai rien de plus.
— Et ses fonctions ?
— Elle nous sert à collecter des informations. C'est pratique pour... euh...
À ce moment là, Severina apparut dans la salle. Le professeur, heureux de ne pas avoir à en dire plus, se redressa et alla saluer la jeune femme.
— Bien le bonjour, Mlle Uxan (le technologue était le seul à appeler Severina par son nom de famille, signe de respect.). Votre venue m'a sauvé la mise ! Figurez-vous que la jeune Lucie ici présente a essayé de me soutirer des informations !
Il avait dit ça avec le sourire, bien que ce soit clairement un reproche. Lucie lui lança un regard noir que M. Bench ne parut pas remarquer.
— Ne vous en faites pas pour ça, la défendit Severina. Lucie a toujours adoré fourrer son petit nez partout.
— C'est pas vrai ! la contredit la fillette.
Elle voulu tirer la langue mais le peu de crédibilité qu'elle avait à son âge se serait envolé et elle se retint. Severina de tourna vers elle.
— Allez. On y va. Tu viens ? Il te reste encore un test à passer.
— J'arrive ! Au revoir M. Bench !
— À demain petite fanfaronne ! lui répondit le technologue.
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