La joueuse de harpe


Cela devait être un moment de détente, un moment où j'aurais pu souffler après mon retour de nouveaux combats. Pour que le moment soit plus agréable, pour qu'on célèbre cette nouvelle victoire, on avait fait venir quelques musiciens au palais.

J'étais donc entouré de mes courtisans, qui m'épiaient, guettait le moindre de mes mouvement, la moindre de mes expressions y cherchant ce que j'aimais ou non pour émettre la même opinion dans l'optique de se faire bien voir. Habituellement je me glorifiais de tout cela, de mon beau palais, du fait qu'on fasse tout pour me plaire, qu'on considère mon opinion comme la vérité. Ce soir-là aussi.

Puis elle est arrivée. Et je fus charmé.

Non. C'est un bien trop faible mot pour décrire l'état de grâce dans lequel je me trouvais.

J'ignore exactement ce qui m'a le plus séduit ? Son apparence si belle, si frêle, si envoutante ? Sans doute. Son regard rêveur, ailleurs, perdu qui ne me cherchait pas ? Probablement aussi. Son sourire débordant d'une joie qui m'était alors inconnu ? Oui aussi. Ou même sa musique, ses doigts qui se baladait sur sa harpe, sa voix chantant par-dessus une ballade sans prétention et simple, mais le tout si harmonieusement, si magnifiquement qu'on ne pouvait qu'être emporté ?

Je l'ignore ce qui précisément me toucha mais je le fus. Je l'observais fasciné, totalement perdu dans sa musique, oubliant tout et tout le reste. Jusqu'à que ce soit fini. Elle se leva, s'inclina et comme les autres, guetta fébrilement mon avis, moi qui tenait sa carrière entre les mains.

La honte m'envahit alors. C'était à moi de chercher son approbation à cet ange descendu du ciel. Je n'aurais dû avoir aucun impact sur son futur alors même qu'elle avait su me transporter à un tel point, qu'elle jouait si divinement bien.

Et pourtant si.

Comme sonné je lui présenté du mieux que je pus mon contentement. Je crains de ne pas l'avoir assez présenté pourtant. Parce que j'étais certes comme sonné, mais aussi parce qu'il me semblait impossible d'exprimer à quel point j'avais été enchanté.

Je me rassis mollement alors qu'un autre numéro se présenta. Je n'y portai nulle attention. Je me sentais honteux. J'avais tout, le succès, l'argent, l'adoration de tous. J'avais atteint mes objectifs de pouvoirs après des années passées sur les champs de bataille ou a intriguer dans ce but. J'étais devenu l'empereur le plus puissant au monde et pourtant je ne connaissais rien du bonheur qu'avait ressenti cette fille en jouant. Je me rendis compte que je ne m'étais pas battu pour une bonne cause. Je ne m'étais pas battu pour mon bonheur ou celui des autres. Non. Je m'étais battu pour de futiles raisons. J'étais là, assis sur un siège confortable, entouré des hommes et des femmes les plus charmants et les plus aimants, écoutant la meilleure musique qui soit et pourtant je n'étais ni le plus chanceux des hommes, ni le plus heureux.

Je ne pouvais que le reconnaître, au fond ma vie était un échec.

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