9· Interlude
"Si seulement ces haut placés pouvaient arrêter de se mêler de tout."
<( ̄︶ ̄)↗
« Un remède pour mieux dormir ? » répéta Min-young.
L'intendante observa un bon moment les cernes sous les yeux du jeune soldat et son air secoué. Le manque de sommeil faisait des ravages et Jeongguk en était bien la preuve. Heureusement qu'elle était là. En effet, en plus de gérer le côté domestique de la demeure de Lord Min avec Ki-hyun, Min-young était aussi l'apothicairesse de Dalgubeol. Certes, elle n'avait pas une boutique spécialisée pour pratiquer ses connaissances. Mais elle n'en était pas moins compétente et demandée par les quelques habitants du hameau.
« Oui... Je sais qu'un soldat devrait toujours rester aux aguets en cas d'attaque mais... En ce moment, je dors assez mal et ça se répercute un peu trop sur mon travail... »
Le souvenir de ce cauchemar continuait de hanter ses nuits. Jeongguk n'était pas un froussard, loin de là. La douleur de revoir maintes et maintes fois ces horribles images lui faisait appréhender la nuit, au point de le tenir éveiller jusqu'au petit matin. C'était une habitude qui n'était pas des plus saines.
« Ah, je vois... » répondit la jeune femme.
Ils étaient actuellement en dehors de la grande salle où Lord Min et les messagers s'entretenaient. A plusieurs mètres d'eux, à leur droite, se tenait Sir Wang, les yeux levés vers les fleurs qui commençaient à se faner petit à petit. Le noble n'était pas assez proche pour entendre leur conversation et semblait trop occuper à admirer le paysage pour leur prêter son attention.
Min-young fouilla alors dans les poches de son hanbok avant de sortir un tissu qui renfermait une fleur qui commençait à sécher.
« C'est de la camomille ! Préparez-la en infusion, à boire après les repas. Ça devrait vous relaxer assez pour une bonne nuit de sommeil. »
Jeongguk prit le tissu renfermant le remède tout en remerciant chaleureusement la jeune femme. Ils terminèrent leurs entrevues d'une respectueuse révérence et Min-young retourna dans la salle. Le jeune homme allait lui aussi partir quand Sir Wang l'interpella.
Converser avec le haut gradé était une activité plus ou moins habituelle pour Jeongguk. Au-delà du rang social de cet homme, Jackson Wang était un homme curieux sur un sujet auquel peu aurait prêté attention à leur époque : le peuple. Certes, les autres dirigeants se montraient plus ou moins attentifs aux demandes de la majorité mais aucun d'entre eux n'avait osé les approcher comme Wang le faisait. Il étudiait la populace comme un apothicaire le ferait avec les plantes : chaque observation était notée et approfondie jusqu'à en tirer le plus d'informations possibles. Et le jeune soldat faisait partie de ses références favorites.
« Si ce n'est pas mon vieil ami Jeongguk ! » s'exclama Sir Wang quand le soldat s'approcha suffisamment pour qu'il n'ait pas haussé la voix.
« Une année serait insuffisante pour totalement vous comprendre, Sir. Je doute d'être un de vos plus proches connaissances. » répliqua modestement le jeune homme.
Le noble haussa nonchalamment les épaules en lui lançant ce sourire énigmatique qu'il aimait bien afficher :
« Et pourtant, ma propre famille ne me comprend pas aussi bien qu'un simple chevalier d'une cour étrangère.
-Vous me flattez, Sieur. »
Le ton qu'ils adoptaient oscillait entre ironie et sincérité, un équilibre qu'ils avaient développé au fil du temps. Et pour cause, Sir Wang était l'un des quelques personnalités que Lord Min semblait apprécier. Quand ce dernier s'était refermé dans son palais, les visites dans la région de Wang s'étaient alors faites rares.
« Je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer la nouvelle addition de domestique... »
Jeongguk retint le rire nerveux qui avait menacé de franchir ses lèvres. Il détendit inconsciemment son dos, se tenant dans une position plus droite avant d'acquiescer vaguement à son interlocuteur.
« Un... Un bien charmant jeune homme, vous ne trouvez pas ? » rajouta le soldat, comblant le silence qui avait commencé à s'installer.
« En effet... »
Masquant l'énorme rictus qu'il voulait afficher, Wang reporta son regard vers le cerisier en fleurs au-dessus de leur tête.
« Est-ce vrai ? Yoongi a-t-il réellement invité la Famille Gu ici ? »
L'atmosphère amical se transforma instantanément en une plus tendue. Il était impossible d'ignorer le lien primitif qu'il y avait entre eux : l'un était un noble, l'autre un simple citoyen. Chaque mot aurait ses conséquences autant pour l'un que pour l'autre. Jeongguk aurait peut-être paniqué si ce genre de situation ne lui était pas familier.
« Oui, c'est le cas. » fit-il en plaçant ses mains dans son dos, copiant la posture du noble. Mais contrairement à Wang, il était totalement tourné vers son interlocuteur.
« Hm... N'est-ce pas intriguant ? Votre Lord est plutôt quelqu'un de discret et de réservé...
-Malheureusement, ce n'est pas du ressort des simples concitoyens. Nous ne sommes pas amenés à nous mêler de ce genre de questionnement... »
La réponse du capitaine attira de nouveau l'attention de Wang qui quitta alors la vision des bourgeons colorés. Cette fois, son sourire apparut de suite comme un réflexe inarrêtable.
« Je vois... »
On ne le retint pas plus longtemps et bien vite, Jeongguk était déjà sorti de la cour, laissant au noble dans un calme grouillant de réflexions aussi réalistes que fantaisistes...
♘
« Taehyung ? »
L'apprenti couturier leva pour la première fois sa tête de la toile qu'il cousait ardument. Bogum fixait l'écusson qu'il venait d'apposer à l'unique tenue sur lequel Taehyung travaillait avec un air effaré. Le second valet suivit la trajectoire avant de retenir inconsciemment sa respiration.
« Oui ? »
Son collègue se contenta de hocher de gauche à droite sa tête avant de simplement annoncer :
« L'unique capitaine ici est Jeongguk et je ne veux pas te faire peur mais il est très... Méticuleux avec ses tenues... »
Et il avait fallu que son premier essai de couturier soit pour lui... Pourtant, ses sentiments étaient contradictoires. D'un côté, sa dernière discussion avec Jeon ne s'était pas terminée de la meilleure des façons et ils étaient pratiquement des 'étrangers' à cette heure-ci. Mais d'un autre côté, l'idée de Jeongguk portant une création faite de ses mains lui retournait le ventre, enflammant ses entrailles d'un feu qu'il n'avait jamais connu. Le châtain ne pouvait pas le nier : une partie de lui avait nourri le désir de draper le soldat dans un uniforme qu'il cousait depuis quelques semaines et de recevoir des compliments à ce propos.
« Si ça t'effraie... » commença le valet en observant l'air pétrifié de son collègue.
Ce dernier rougit légèrement avant de lui sourire comme jamais il ne lui avait souri : de toutes ses dents avec cette expression digne d'un mortel qui rejoignait le paradis.
« Je vais le faire... Tu n'as pas à t'inquiéter... »
Bogum se contenta de lever un sourcil, l'expression faciale confuse de Taehyung ne faisait que l'amuser, au dépens du jeune homme.
♘
« Comment ça, nous avons besoin de plus d'hommes ? » répéta le capitaine, au garde à vous devant son supérieur, assis derrière son bureau personnel.
Jeongguk n'avait jamais beaucoup apprécié l'air pompeux du lieutenant-colonel, renforcé par ses idéologies dignes de l'ère précédente. La guerre avait été plus concrète à son époque, peut-être qu'il anticipait une attaque de la part des territoires voisines (ou quelque chose qui y ressemblait) mais cela ne justifiait pas l'idée loufoque d'engrosser les rangs de l'armée de Lord Min. Ils étaient déjà une trentaine. Et encore, c'était beaucoup de personnes pour uniquement surveiller le seigneur et le marché.
« On n'en aura jamais assez, Jeon. Et vous le savez bien... Donc-
-Et où comptez-vous trouver d'autres recrues ? »
Le vieillard leva les yeux vers lui avant de soupirer lourdement, comme si la réponse était évidente. Sauf qu'elle ne l'était. Peu d'hommes, en dehors de ceux qui étaient déjà enrôlé, étaient disposé à rejoindre leurs rangs. Engager à l'extérieur du village n'était pas vraiment une idée favorable.
« Je ne pense pas que Lord Min ait besoin de tous ces gamins dans sa baraque. »
Le ressentiment du lieutenant-colonel était facile à deviner : il avait l'habitude de dénigrer indirectement leur seigneur.
« Ils ont sûrement du temps à tuer avant l'arrivée du reste des Gu. »
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