Chapitre 17 : John

Chapitre 17 : John

25 Mars 2030

PDV CHARLIE

-Bon, les tourtereaux ! s'exclame Max qui ouvre la marche, on avance !

Nous marchons le long d'une rue plutôt calme, toujours autant ravagée par les robots, incluant de nombreuses voitures brûlées. C'est presque devenu normal.

Et il y a toujours cette odeur nauséabonde de cadavres qui se désintègrent également, c'est presque plus horrible que la vision des corps par milliers sur le sol.

Je lâche la main de Thomas pour rejoindre Max, après plusieurs minutes et le voyant subitement regarder dans le vide, je fronce les sourcils et demande :

-Tu ne cacherais pas quelque chose toi, à tout hasard ?

-Non, assura-t-il avec la même lueur de mystère que précédemment.

-Tu mens, répondis-je catégoriquement.

Il soupire et se résigne à me répondre :

-J'ai appelé des amis, de nouveaux soldats se joigneront à nous pour la suite.

J'acquiesce, sans ronchonner.

-C'est tout ? S'étonne t'il.

-Tant qu'ils sont dignes de confiance, repris-je en regardant au loin.

Il suit mon regard, et promet :

-Ne t'inquiètes pas, tout ira bien.

Je les dirige entre deux bâtiments, on s'arrête et je retire la grille d'un des conduits d'aération.

-Où on va ? questionne Clément.

-Tu verras, lancé-je, Max ?

Ce dernier se penche à mon oreille et chuchote le nom de la ruelle.

Je penche la tête sur le côté, soucieuse :

-Tu en es certain ? Questionné-je.

Il hoche la tête, heureusement que cette rue est assez sécurisée pour s'y rendre.

Mais ce que je redoute le plus, c'est le conduit. Je me baisse pour passer ma tête dans le conduit, je le trouve plus petit et étroit que tout les autres.

Je jette un coup d'œil au mur au-dessus de moi, il y a encore cette marque rouge et violacée, c'est certain, c'est ici.

-Merde, jurais-je en soufflant ma voix se répercutant contre les parois.

-Quoi ? S'inquiéta John.

-le conduit est trop étroit, répondis je.

Ils s'observent en silence, John demande :

-On fait quoi maintenant ?

-Certains passeront par le conduit, affirmais-je en regardant Thomas, John, Laura et Clément, d'autres prendront les toits.

Ils me fixèrent d'un œil inquiet, je me justifie :

-C'est pour assurer la sécurité et la discrétion du groupe.

Thomas, qui avait vu clair dans mon jeu, mais qui était déjà dans le conduit refusa aussitôt :

-Non ! Je t'interdis d'aller sur les toits.

Je sais que c'est dangereux, pourtant je n'ai pas le choix.

-John, lancé-je en me baissant pour récupérer mon sac à dos au sol, occupe-toi de Laura et Thomas, Clément t'accompagnes tandis que Max, moi et Eliott passeront par les toits.

Il n'était pas rassuré, mais j'étais déterminée :

-N'oublie surtout pas ces indications, droite, gauche, droite, tout droit, et ce sera la ruelle où tu devras retrouver les soldats.

Il répétait plusieurs fois mes indications à voix basse puis hocha la tête.

Clément pousse déjà péniblement Thomas à l'intérieur du conduit, ce dernier ayant réussi à s'en extraire tant bien que mal. J'avais fini par ne plus écouter ses interdictions, à contre-cœur.

-Tout va bien se passe, m'assure John en encadrant mon visage avec ses mains, je te le jure !

-Je n'en doute pas, sourie-je en dégageant ses mains doucement.

Laura entre dans le conduit à son tour, forçant Clément à pousser Thomas.

-Les gars, lâche John sérieusement, vous protégez Charlie comme si c'était la prunelle de vos yeux, compris ?

-T'es certain que ce n'est pas le contraire ? Réplique Max en riant légèrement.

Je lève les yeux au ciel en soupirant :

-filez, maintenant !

Ils disparaissent enfin dans l'étroit espace et je referme la plaque en ferraille dans leur dos.

Je me retourne vers mes coéquipiers.

-Ok, lance Eliott, Charlie tu penses pouvoir t'agripper sur le rebord de la fenêtre et continuer jusqu'en haut ?

Je lève un sourcil, étonnée qu'il me pose cette question.

-J'ai déjà fait ça un bon milliard de fois ! Déclaré-je, t'inquiètes pas pour moi !

Et je m'exécute juste après, employant  la parole au geste.

A la force de mes bras et mon agilité développée durant les derniers mois, je me hisse facilement jusqu'en haut, les deux soldats me suivant de près.

-On y va, lançais-je.

Puis, nous entamons une course effrénée entre les immeubles. C'est amusant au début, mais on s'essouffle trop vite ensuite, heureusement que ça n'est pas long.

Nous arrivons une bonne vingtaine de minutes plus tard au-dessus de la ruelle composée de sacs de sable et de poussière, encore et encore.

Je me pose contre le mur, Max souffle :

-Personne.

Du moins, jusqu'à ce que nous entendions des bruits de pas dans la rue, persuadée que ce sont des robots, je me glisse dans un renfoncement, excepté Max et Eliott qui arborent un sourire élargi.

Une voix grave me parvient lorsque je me décide à sortir de ma cachette, à peine aïs-je posé un pied dans la ruelle qu'une dizaine de mitraillette et de lasers sont pointés sur ma poitrine.

-Wow wow wow ! Lançais je précipitamment en levant les mains au- dessus de ma tête.

Ils sont tous cagoulés, j'avoue avoir eu peur sur le moment.

Soudain, un grand fracas retentit, je fais volte-face et découvre la grille du conduit au sol.

Les canons changent de position et se dirigent sur l'embouchure, pile au moment où Thomas apparaît, fatigué.

Je me dirige vers la gauche et m'interpose, toujours les mains levées.

-Non ! Crié-je presque.

Un par un, Thomas, Clément, Laura et John sortent du conduit, heureux de revoir la lueur du jour.

Ils semblent s'adoucirent et les armes se baissent, j'en profite pour baisser mes mains et m'expliquer à la place de mes deux coéquipiers :

-On a dû être séparé, voici l'autre moitié du groupe.

Finalement, Max commence à discuter avec eux et je me tourne enfin vers Thomas, mort d'inquiétude. Il n'attend pas mon approbation et me sert dans ses bras, tout en plongeant son visage dans mon cou.

Une fois séparés, il embrasse mon front et chuchote :

-j'ai eu tellement peur, j'ai cru qu'on ne vous retrouverait pas vivants.

Je souris un peu, sachant qu'il exagère quand même et sers sa main dans la mienne.

-Max, ce n'est pas tout ça, mais c'est qu'il faut y aller, reprend voix grave.

J'accentue la distance entre moi et Thomas pendant qu'un soldat se dirige vers moi, arme en main.

John observe faire, il ne semble pas rassuré, il jette des regards au soldat et à moi.

Le soldat s'arrête devant moi et une étincelle anime ses yeux Aubrun, à vrai dire je ne vois qu'eux ses cheveux et le reste de son visage son emmitouflés dans sa cagoule.

-Le bruit court que tu sais manier une arme comme n'importe quel militaire, lance t'il, celle-ci pourrait être ta première officielle, qu'en penses tu ?

Une lumière de malice passe devant mes yeux, je hoche la tête et saisit la crosse de l'arme de ma main droite, tout en le remerciant. Les soldats nous entourent, cinq ouvrent la marche et cinq autres la ferme, je déteste être au milieu pourtant !

Un petit espace s'offre à moi et je l'y glisse, ravie. Le chef d'opération l'offre un regard indigné, il n'aime visiblement pas qu'une simple civile désobéisse aux consignes. C'est également celui que j'ai surnommé voix grave au fait.

Arrivés à mi chemin, la rue que l'on doit traverser est bourrée de robots, je sais qu'il n'y a pas d'autres solutions.

C'est du suicide, mais ça semble intéressant. Cependant, je ne dis rien et laisse faire Monsieur le Professionnel. On rejoint le centre-ville, lui aussi infesté de robots gluants.

-fais chier, marmonn voix grave, il va falloir les contourner.

-Impossible, rétorqué-je en revenant après avoir inspecté la rue discrètement.

-Et pourquoi ça p'tite tête ? Répondit un soldat qui m'avait lancé un regard noir quelques minutes plus tôt parce que j'avais arrêté le convoi pour une broutille.

Il m'énerve celui-là !

-t'as étudié dans quelle école au juste, une école d'abruti ou une école militaire ? On ne t'a jamais appris à analyser un problème pour en déduire des solutions rationnelles ? Répondis-je à mon tour, mes yeux lançant des éclairs.

J'arque un sourcil dans sa direction, je le sens bouillonner, ça me rend de l'assurance.

Un éclair passe dans ses yeux et son poing se sert fermement contre la crosse de sa mitraillette, mais pourtant il se ressaisit très vite et se défend même :

-En revanche on m'a appris à ne pas agir sur un coup de tête et regarder le problème de plus haut.

Il est abruti, c'est désormais affirmé.

Je roule des yeux, exaspérée :

-C'n'est pas en fixant le ciel qu'un miracle de dieu en tombera, continuais-je, fais confiance à ton instinct plutôt qu'à une idée débile.

Cette fois-ci, il ne rétorque pas, donc je peux expliquer aux autres ma conclusion :

-La rue n'est pas une rue, c'est une grande avenue, avec des classiques et des minus dispersés un peu partout, affirmais-je, donc si vous voulez passer, visez dans la jugulaire.

L'autre malin émit une grimace, « Voix grave « me sourit et lance :

-en avant soldats !

Puis, tout le monde s'élance dans cette avenue, les coups de feu partent et les flammes surgissent aussi.
Et soudain, un robot s'arrête pile face à moi, arrêtant d'ailleurs le mouvement de tous.
Mon cœur bat à mille à l'heure dans ma poitrine, mes jambes sont engourdies et je suis paralysée par la peur, toute une sorte de scénario s'engagent dans ma tête.
Il me fixe avec ses yeux rouges et fluorescents, puis un éclair de lumière s'abat sur moi et une ligne verte d'hologramme scanne mon corps tout entier. Il cherche donc à m'identifier, et comme si ça m'était sorti de la tête avant, je me souviens de ces tests étranges.

Il y a de nombreux temps déjà, une éternité aujourd'hui. J'étais entrée dans la boutique de Kévin et il m'avait souri :

-Dis ma grande, tu pourrais m'aider pour un futur gros projet ?

-Je t'écoute ! avais-je dis en sachant pertinemment qu'il me demanderait un truc de fou.

-J'ai créer un logiciel indépendant de reconnaissance complète, mais comme je suis vieux un sujet comme toi aurait l'âge idéal ! Racontait-il.

J'avais accepté. Par la suite il m'avait fait passer de nombreux tests de reconnaissance comme un enregistrement d'empreintes digitales, reconnaissances faciales et optiques.

Et c'était ainsi tous les deux mois.

Je m'étais vite prise au jeu et j'étais naïve.
Aujourd'hui face à ce robot qui ne cherche qu'à m'identifier, j'ai un déclic.
Tout ce qui s'est passé avec Kévin n'était pas vraiment une coïncidence, ça avait un lien avec ce qu'il se passe aujourd'hui, et depuis le début de la guerre. Je me sens honteuse d'avoir été utilisée si facilement comme cobaye.

Brusquement, les yeux du robot changent de couleur et deviennent bleus, je sursaute lorsque sa voix robotique s'élève dans l'air :

-Alliée repérée, Charlie Evans, quatorze ans.

Son bras menaçant se baisse, je ne bouge plus, le monde est comme suspendu autour de moi. Son regard bleu s'arrête cette fois ci sur John et les soldats. Il ne prit pas le temps de les analyser et ses yeux devinrent de nouveau rouges sang.

-Ennemi à saisir, grogna la voix.

Je hurlai de désespoir et fut bousculé par une des ces choses de taille réduite.
Je voyais de nouveau des tirs, des corps tomber. Je voyais dans tout cet enfer, le mal se battre contre le bien. Je voyais John et tous les autres se battre contre les robots, puis se faire embarqués au loin.
Je criais, Max m'attire au loin, de l'autre côté de l'avenue, Clément s'occupait de Thomas alors qu'Eliott et Laura avaient disparus.

Je retrouve Thomas dans une vieille ruelle, je me laisse tombée dans ses bras, pleurant à chaudes larmes.

J'avais encore été trop naïve.

Les deux derniers jours furent épuisant moralement et physiquement. Je n'avais plus le cœur à quoi que ce soit, que ce soit pour taquiner Clément ou rire avec Max. Eliott et Laura avaient disparus je ne sais où avec « voix grave » alors que nous continuions d'avancer vers l'objectif principal : Détruire ACRONYM.

Arrivés dans une grande avenue, je découvre d'énormes robots avec des armes triplements plus grosses que celle de d'habitude. Les miniaturisés surveillent un groupement d'hommes, en se rapprochant, je reconnais John, le visage ensanglanté.

Je sors l'arme de mon jean en gardant le regard vissé sur l'un des robots, je pointe mon revolver vers cet horrible chose, les larmes dévalant déjà mes joues.

Cette grande place reste envahies de corps, de voitures retournées, et ce regroupement d'hommes.

Max pose sa main sur le canon et le baisse lentement, je secoue la tête, je refuse de rester là sans rien faire même si mes mains tremblent.

Il garde sa main sur le canon lorsqu'ils font lever deux personnes.

Ces derniers nous aperçoivent presque aussitôt, je veux les aider. John suit leur regard et une larme coule sur ma joue lorsqu'il plonge son regard dans le mien. Je secoue encore la tête, mes lèvres chuchotant un "non", à peine audible.

Les deux hommes sont abattus de sans froid d'une balle dans la tête, je sursaute et étouffe un cri de surprise. Leurs corps sont trainés jusqu'à un camion, je déglutis difficilement.

Puis, c'est au tour de John et du soldat m'ayant offert l'arme que j'ai entre mes mains.

Cette fois-ci j'explose et hurle de toute mes forces, j'appelle John en continu, je crie des paroles incompréhensibles. Je pense que ça pourrait dissuader ces horreurs de le tuer. Mais ça ne fait que nous faire repérer, je crie toujours lorsqu'un des géants tombe sur le sol.

Je fronce les sourcils, en levant mes yeux au ciel, je découvre un hélicoptère, il tire et abat les machines une à une. Les prisonniers s'enfuient, exceptés John retenu par un miniaturisé.

Il ne pleurait même pas, il semblait fier et digne.

-John ! Hurlais-je une dernière fois de toute mes forces, mais c'était déjà trop tard. La balle s'était logée dans son abdomen avec une puissance que je cru incapable d'exister. Je fixais son corps s'effondrer sur le béton, inerte.

Max me tire encore au loin, je me débats férocement. Il faut que j'aille le voir, coûte que coûte !

Les larmes ruissèlent de nouveau sur mes joues sales, mes poignets rougis par la poigne de Max, je perdis.
Je perdis encore puisque Max m'emmenait loin d'ici. Alors que je venais de voir mourir celui que je considérais comme un frère, sans aucune pitié.

C'était le début de la fin.

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