La Guirlande | 3 décembre
3 décembre
La confiance
*
Amaël n’avait tout simplement pas envie de participer à cette reconstruction de la Guirlande qu’il avait volontairement coupée. Sérieusement, quel était l’intérêt d’un bout de fil lumineux et de quelques bulbes couleur arc-en-ciel ? C’était d’un niais !
D’ailleurs, tout ce qui l’entourait semblait niais. Les lumières, les couleurs, les fichus bonnets de Père Noël que les membres de la communauté portaient pour se mettre dans l’ambiance, les emojis cœurs qu’ils s’envoyaient en pleine face à tout bout de champ… Tout ceci n’était qu’un ramassis d’hypocrisie et de faux sentiments.
Lui, il préférait la solitude. Pas besoin de parler aux autres ou d’interagir avec eux. C’était inutile ; tout le monde finissait par vous trahir, vous détruire, vous ignorer ou vous abandonner. Le choix du roi, finalement ! Bref, il n’avait pas besoin d’avoir des gens autour de lui. Les amis, c’était pour les faibles d’esprits ; ceux qui croyaient qu’on pouvait faire confiance à n’importe qui.
D’ailleurs, il était hors de question qu’il leur fasse confiance, à ces gens. Déjà, ils étaient sacrément bizarres ; ils passaient leur temps à idolâtrer un certain Saint Kek. Encore une religion étrange, qu’il ne connaissait pas mais se permettait de juger ouvertement. Et puis, ensuite, ces gens-là se connaissaient déjà tous entre eux. Il n’avait donc pas besoin de se frayer une place dans leur cercle. Car si cela ne menait qu’à une énième déception, non merci ! Il avait eu sa dose de trahison ces dernières années.
Pour autant, aussi farouche pouvait s’avérer sa volonté de rester à l’écart, la communauté d’AN était fidèle à ses convictions. Un nouveau dans l’équipe ? C’était toujours une explosion de salutations. Amaël était donc, en dépit de son acte abominable, poussé malgré lui au centre du cercle de ces gens qui lui paraissaient complètement fous.
— Bienvenue parmi nous, Amaël, commença Coco. Si tu veux être des nôtres, il faut qu’on se fasse confiance mutuellement. Bon, tu as mal commencé, mais on va te laisser une deuxième chance. Parce qu’on est sympas, aussi.
En guise de réponse, Amaël lui jeta un regard noir. Ils n’allaient pas l’avoir aussi facilement ! Mais une main chaleureuse se posa sur son épaule sans crier gare, le forçant à baisser la garde un instant.
— On ne te fera pas de mal, normalement, glissa Winna d’un air malicieux. Après tout, nous sommes une communauté. Et c’est notre devoir que de te montrer à quel point c’est génial, comme concept.
Soudainement et sur ces mots, elle lui enfonça un bonnet de Père Noël sur la tête. Amaël grogna par réflexe avant de tirer sur son nouveau couvre-chef pour s’en débarrasser, mais Winna fut plus rapide et le replaça en moins de temps qu’il n’en fallait pour dire kek.
— Fais-nous confiance, sourit-elle simplement. Même si tu n’es pas au bout de tes surprises.
Soudainement applaudi par le groupe d’Eidonniens surexcités, Amaël devint tout à coup aussi rouge que son bonnet. Bon sang, mais qu’est-ce qui leur prenait ? Il observa quelques visages dans l’espoir de comprendre leur intention. Moquerie ? Bizutage ? Rituel d’initiation ?
Mais les regards pétillants que ses yeux croisèrent ne disaient rien de tout ça. Seule une joie certaine, celle d’accueillir une nouvelle personne au sein de la communauté, ressortait pleinement. Winna lui tendit alors un miroir sans un mot. Ce fut ainsi presque machinalement qu’il le prit et qu’il s’observa un instant, sans trop savoir à quoi s’attendre. Il analyse son reflet, qui portait ce stupide machin rouge avec un pompon. Il ne put s’empêcher de pouffer devant l’image qu’il renvoyait.
Puis, il leva la tête. Il avait presque oublié que tout le monde portait un bonnet de Père Noël. C’était marrant, un peu. Fédérateur aussi.
Il était des leurs. Grâce à un truc pas très esthétique et sacrément cliché, certes. Mais il était des leurs, pour le meilleur et pour le pire. Bon, il gardait évidemment ses distances ! Toutefois, la confiance toute neuve qui s’était installée entre lui et tous ces Eidonniens - qui ressemblaient à des lutins, cela dit - lui faisait du bien.
Mais alors que ses yeux s’illuminaient légèrement, tandis qu’une toute petite lumière fissurait son regard de braise, constamment énervé, quelque chose se mit à l’éblouir. Le petit miroir qu’il tenait dans la poche se mit à briller très fort, trop fort, sans prévenir.
Il devint ensuite un peu plus chaud, et Amaël le lâcha, pris par la surprise. Le miroir tomba au sol - décidément, ça allait en faire, des choses cassées.
Mais oh, surprise ! Rien ne se brisa. Du miroir s’échappa au contraire une forme qui se modelait en continu tout en flottant dans les airs. Elle rejoignit finalement le visage d’Amaël pour se poser juste devant lui. Puis, elle se plia dans tous les sens, avant de prendre une forme plus arrondie.
— Qu’est-ce que c’est que cette fantaisie ? grogna-t-il de nouveau, par habitude sans doute.
— Un bulbe, affirma Winna. Rouge, qui plus est. Assorti à notre magnifique bonnet, n’est-ce pas ?
Des cris de joie lui répondirent. Mais à cet instant présent, Amaël, lui, ne porta pas vraiment attention au reste du monde. Car le bulbe s’était allumé et irradiait désormais d’une lumière rouge, comme une petite bougie magique.
Ce miracle provenait-il de la nouvelle confiance qu’il portait en lui ?
Il secoua la tête avant de penser : il s’agissait sans doute de sottises. Du moins, il essayait de s’en persuader. Parce que ce joli petit bulbe lumineux, qu’il venait de glisser dans sa sacoche, lui donnait envie de récupérer tous les autres, sans exception. Il fallait juste trouver le moyen de les fabriquer.
*
{ -PIANISSIM0TS-, modératrice }
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