44. Cérémonie
En mars de l'an 850, j'ai épousé le soldat le plus fort de l'humanité en cachette. Quelques semaines plus tard, j'ai découvert que j'étais enceinte et que je devais cesser de participer à la guerre que je menais depuis 3 ans. Ce fut un gros choc pour moi car c'était l'investissement d'une vie. Et tous mes efforts ont été gâchés.
Je n'ai même pas pu assister à la reprise du mur maria, un objectif que j'avais depuis des années dont l'accomplissement m'a été privé.
A la place, je suis partie m'installer dans une maison que la reine Historia m'a donné, près du mur Sina. Elle était dans une grande plaine remplie seulement de quelques arbres aux alentours et une source d'eau. Les passages étaient rares et je restais la plupart du temps seul.
Et j'attendais... interminablement. Je m'occupais en lisant tous les livres de ma bibliothèque ou en cousant des vêtements. Et je restais des heures à regarder par la fenêtre à attendre je ne sais quoi... C'était si calme, si paisible. C'en devenait presque oppressant.
Cette période de silence me rappelait quand j'étais confinée à l'intérieur de chez mes parents. Ce n'était pas un sentiment agréable à redécouvrir. De plus que j'ignorais comme je le pouvais ce ventre qui s'arrondissait à vu de nez.
Je posais deux tasses devant mes invités qui étaient silencieuses, avec ce regard vide, annonciateur de mauvaises nouvelles. Je m'assis en face d'elles, la peur au ventre qu'elles viennent à me parler de mon mari. J'avais envie de leur crier de parler au lieu de me faire patienter dans l'angoisse.
- Erwin est mort, m'annonça Hanji en relevant sa tête.
Mon visage se crispa dans une expression d'horreur. Le sien était partiellement couvert d'un bandage, cachant son oeil gauche qu'elle avait vraisemblablement perdu.
- Quoi? Qu'est-ce qu'il s'est passé? M'exclamais-je.
- Il s'est sacrifié... pour sauver Armin.
- Pardon?
- Quand nous avions enfin réussi à capturer Bertholdt, Erwin et Armin étaient au bord de la mort, expliqua ma meilleure amie. Le major avait servi d'appât pour que le caporal puisse atteindre le titan bestial et Armin également pour qu'Eren attaque le colossal. Nous ne pouvions sauver qu'un seul des deux en lui injectant le liquide cérébro-spinal et lui faire dévorer Bertholdt pour qu'il récupère son pouvoir. Avec Hanji, le caporal et moi, nous étions de ceux qui voulaient sauver le major mais les amis d'Armin l'ont défendu.
Je fis calmement la part des choses dans tout ce qu'elle venait de m'expliquer avant de réaliser:
- Mais... je pensais que c'était à Livai que le major à donner le choix d'utiliser le liquide.
- C'est le cas, c'est lui qui a tranché, cingla Iris.
- Attendez, vous êtes en train de me dire que Livai a préféré sacrifier le major plutôt qu'Armin?! Mais... mais... c'est complètement inconscient! Le bataillon d'exploration a nécessairement besoin du major Erwin! Qu'est-ce qu'il va devenir sans lui? Pestais-je.
- Je sais... soupira Hanji. Mais c'est la décision de Livai.
Je m'enfonce dans ma chaise en avalant difficilement la nouvelle.
- Maintenant, Hanji est la nouvelle majore du bataillon, continua la blonde.
- Et... vous avez pu atteindre la cave des Jaeger?
- Oui, heureusement... Et ce nous y avons découvert était au delà de ce qu'on pouvait imaginer, explique Hanji. Grisha Jaeger explique venir de l'extérieur des murs, comme nous le pensions. En fait, il y a toute autre vie ailleurs, qui n'est pas sous la menace des titans. Violet, depuis le début, nous sommes sur une île entourée par la mer. Et les titans qui nous attaquent ne sont rien d'autres que des personnes transformées par cet autre peuple.
Hanji m'expliqua en détails le contenu des cahiers de Grisha Jaeger et son histoire. Le pacte d'Ymir Fritz avec le démon qui lui donna le pouvoir du titan, les neufs titans primordiaux, le peuple d'Eldia qui opprimait les autres espèces puis la grande guerre contre Mahr. Nous étions donc sur ce qu'ils appelaient l'île du paradis, avec ces murs forgés par le roi Fritz qui y a emmené une partie de ses sujets dont nous sommes des descendants. Grisha était de ces eldiens restés à Mahr qui étaient désormais opprimé par les habitants.
De plus, Grisha avait fait un premier mariage avec une descendante de la famille royale Fritz et a eu un fils, Sieg. Et ils ont essayé de l'intégrer dans le programme instauré par Mahr pour répliquer contre l'île du paradis avec les 7 titans primordiaux qu'ils avaient en leur possession. A savoir que seuls les eldiens, descendant d'Ymir, peuvent devenir des titans. Le véritable but de cette mission étant d'infiltrer les murs pour récupérer le titan originel afin de devenir la plus grande puissance militaire.
Mais Sieg dénonça ses parents et ils ont été emmenés sur l'île du paradis pour être jetés en pâture aux titans. Grisha fut le seul à s'en sortir et récupéra le titan qu'il allait léguer plus tard à Eren.
Je reste quelques minutes sans voix pendant que mes deux amies boivent calmement leur boisson.
- Ca m'échappe complètement... Le major nous était indispensable. Sans lui pour pouvoir nous guider, que va-t-on faire maintenant?
- Nous ne sommes que quelques uns à être revenu de là bas vivant. Il y a eu des centaines de sacrifices, dont Moblit...
Ma gorge se crispe. Seule une poignée de soldats en sont revenus en vie de Shingashina. Si j'y avais été, je serais certainement morte à l'heure qu'il ait et mon bébé... également. Le pire, c'est que j'étais prête à y aller à bras ouverts. Je lève un regard lourd vers mes camarades:
- Jusqu'à présent, les titans étaient nos seul adversaires, maintenant nos vrais ennemis sont beaucoup plus clairs, fis-je pensive. A ce que j'ai compris, le reste du monde veut notre peau. Même notre propre peuple s'est infiltré parmi nous pour nous décimer. Reiner, Annie, Bertholdt... ils étaient des eldiens envoyés sur l'île du paradis pour récupérer le pouvoir du titan originel. Que Grisha a volé finalement la nuit de la chute du mur Maria. On avait raison... cela va tôt ou tard nous péter en pleine face. Et si cette civilisation est bien plus évoluée que la nôtre, nous sommes bien dans la merde!
Je sens l'angoisse monter en moi et je me met à caresser mon ventre.
- N...nous en avons peut-être trop dis pour aujourd'hui, s'exclame Iris!
- N'y pense pas! Ce n'est pas la peine d'essayer de me ménager parce que je suis enceinte! Je veux savoir ce que j'aurai en face de moi à l'avenir. Merci d'être venues m'informer de la situation.
- Tu comptes... reprendre les combats après ta grossesse?
- Oui, bien évidemment. Je suis une soldate. Je dois rattraper le temps que je perd ici.
- I...il n'y a pas de quoi se hâter pour le moment. Nous devons encore récupérer entièrement le mur Maria et éliminer les titans à l'intérieur de l'enceinte.
- Et après?
- Il faut que l'on avise encore avec la reine. Nous avons à peine fini de décortiquer les cahiers de Grisha. Nous devrions la revoir très prochainement.
- Et... Livai, demandais-je? Où est-il?
Mes deux amis se regardèrent. Iris fronça les sourcils avant de lever les yeux au ciel.
- A Trost, très certainement, cingla-t-elle.
- Je vois...
- Violet, je pense que je vais rester un peu avec toi, m'avoua Iris. Je n'aime pas te savoir toute seule, enceinte, dans cet endroit paumé. Il pourrait t'arriver n'importe quoi et ton idiot de mari ne s'en rend pas compte.
- Je n'ai même pas envie de refuser parce que je m'ennuie comme un rat mort dans cette maison. Je me sens inutile et vous ne savez pas à quel point cela me frustre.
- Iris, tu as oublié la cérémonie, remarqua Hanji.
- La cérémonie?
- La reine va nous récompenser pour avoir récupérer le mur Maria!
- Oh!
___
- Bon sang... Pourquoi je t'en ai parlé, soupire Iris en me regardant encapuchonnée de la tête au pied. N'importe qui te reconnaîtrait avec ce déguisement. Tu es connue dans la bataillon, madame la capitaine. Et tu ne passes pas inaperçue avec ce ventre.
- Oh, ça va... Les femmes enceintes ne sont pas en voie de disparition, rouspétais-je en entrant dans le palais. Et puis, je suis un membre du bataillon d'exploration. J'ai très bien le droit d'assister à cette cérémonie, ça me sort un peu de ma routine.
- Oui, tu sais très bien cacher une grossesse en tout cas. Et si ton mari te voit?
- Il n'y a pas de danger! Livai ne fait pas spécialement attention aux personnes qui ne l'intéresse pas. Il est un peu dans son univers la plupart du temps. C'est pour ça, le regard froid...
- Tu parles! Arrête d'excuser son attitude froide et égocentrique.
Je balaye du regard la piège où était regroupé la plupart des gens du bataillon. J'avais réussi à convaincre Iris de m'emmener à la cérémonie de leur récompense à la capitale. Le voyage était épuisant et j'ai réalisé que mon corps n'était plus capable de supporter ces choses de mon ancien quotidien. Le seul avantage à ce stage était que je ne vomissais plus tout ce que je mangeais, ce qui commençait à devenir légèrement énervant et dégoûtant à la longue.
J'aperçus au loin le petit groupe avec Eren qui semblait se disputer avec un autre soldat. Je réalisai qu'Armin était à côté d'eux. Il était le nouveau possesseur du titan colossal maintenant. C'est assez ironique dans un sens.
- Le type qui se dispute avec Eren s'appelle Floch. C'est lui qui a tenté de sauver le major en le transportant à Shingashina alors qu'il était gravement blessé, m'explique Iris.
- Sa tête me dit quelque chose, murmurais-je. Je crois que je l'avais entrevu lors du repas avant votre départ.
- Lui aussi n'est pas d'avis avec le choix final du caporal.
Je fixe du regard le jeune blond avant de réaliser que Livai se trouvait juste à côté d'eux à les écouter. Dans un sens, je n'avais pas réalisé à quel point je m'étais inquiétée de ne pas le voir depuis ces dernières semaines. Il m'avait fait parvenir une lettre pour me signaler qu'il allait être occupé à Trost et je n'ai pas trouvé quoi lui répondre. Qu'est-ce que je pourrais bien lui dire d'intéressant?
Mes journées se ressemblent toutes comme deux gouttes d'eau. A la seule différence que je me déplace quelques fois pour voir un médecin. Je déteste ce fossé qui s'est créé entre nous depuis ces derniers mois. Avant que je découvre ma grossesse, nous combattions côte à côte et j'aimais ça. Je n'étais pas inquiété par notre couple car il n'y avait rien qui me semblait être mal fait. Peut-être que justement... nous n'avions pas à trop nous en préoccuper: la journée, nous étions des soldats et le soir, des amants.
Ce passé est révolu et peut-être que cela n'intéresse plus Livai. Mais pourquoi dois-je être la seule à être impacté par ça? Ce n'est pas juste...
- Il est assez silencieux depuis que nous sommes revenus, m'informe Iris. Peut-être que c'est dû à la mort d'Erwin. Après tout, ils étaient compagnons d'arme depuis des années.
- Livai a enterré un bon nombre de soldat. Mais j'ai toujours pensé que la mort du major serait une autre histoire. Il était la seule personne pour qui il montrait du respect et une confiance absolue. Ce que je ne comprend toujours pas d'ailleurs, soupirais-je. Même maintenant... C'est pour ça que je ne comprend pas sa décision.
- Ca va bientôt commencer. Tu devrais te mettre ici, me proposa Iris en me montrant un pilier.
- Il va y avoir des civils de toute façon.
- Quelques uns, mais ne compte pas sur eux pour te cacher.
- Si je me met tout au fond, cela n'a aucun sens, rouspétais-je. Je ne pourrais pas vous voir.
- Fais comme tu veux. Mais si on te reconnait, je ne t'ai jamais fait entrer ici!
Elle me serra contre elle avant de s'éloigner pour s'approcher du trône. Je me mêle à la foule pour regarder les quelques membres du bataillon se mettre à genoux devant la reine. J'esquissai un sourire en voyant Hanji se faire médailler, puis Livai...
Dans un sens, j'étais mélangée entre la fierté et la jalousie. J'étais peut-être une peu ambitieuse mais j'ai donné tellement de ma personne pour cette mission. Et je devais désormais vivre dans l'ombre. Je caresse mon ventre sous ma cape.
Tellement de gens sont morts ces derniers mois et je ne réalisais pas encore que je portais la vie...
___
- Hé! Qu'est-ce que vous faites là? Me demanda un soldat quand je suivais un mouvement de foule.
- Hein? Je suis venue pour la cérémonie évidemment, répondis-je avec un ton au peu dédaigneux.
Mais l'homme attrapa mon bras. Il faisait parti des brigades spéciales. Je me débâtai comme je pouvais alors qu'il put apercevoir mon visage.
Qu'est-ce qu'il me veut à la fin? Il y avait des dizaines de personne autour de moi et je suis la seule ciclée. Ca me sidère comment je n'ai pas chance.
- Mais... vous êtes...
- Quoi? Vous allez me lâcher bon sang! Je n'ai rien fait de mal!
- Vous êtes la jeune fille des Fiducia! Je me souviens de vous! Cela fait des années que l'on ne m'a pas vu.
Oh misère... Ce type a dû faire partie de la milice de Stohess et a dû me voir avec mes parents. Il a une sacré mémoire pour un type qui pue l'alcool. Je pensais que les brigades en avait fini avec ça.
C'est à ce moment que je réalise que nous avions fini seul dans le couloir. Il commence à me taper sur les nerfs. Je dois retrouver Iris...
- Pas du tout! Je suis capitaine dans le bataillon d'exploration, rétorquais-je. Et si vous ne voulez pas finir avec mon genou dans vos burnes, vous allez me lâcher immédiatement!
- Capitaine? Ah! Elle est bien bonne celle-là! On ne me l'avait jamais faites! Vous savez que vos parents vous cherchent depuis des années? Tout le monde disait que vous étiez la plus jolie fille de Stohess mais je trouvais qu'il y avait bien mieux que vous, ricana-t-il. C'est votre air de petite prude apeurée qui vous rendait juste populaire.
Après avoir perdue patience, de ma main libre, je lui flanque un coup de poing dans la mâchoire. L'homme me lâcha aussitôt pour s'éloigner. Il avait été surpris que je réplique aussi radicalement. Contente de savoir que j'ai de beau reste même si ma main me fait un mal de chien.
- T'en veux encore, pauvre con? Pestais-je en remuant mon poignet.
Il s'était relevé avec ce regard qui signifiait qu'il était vraiment en rogne, pas très content d'avoir été frappé par un fille. Il cracha du sang contre le sol avant de s'élancer vers moi. Je me recule. Il n'allait quand même pas...
- Espèce de...
Il s'arrêta juste en face de moi pour se retrouver au sol, la tête rétamé face contre terre. Cette fois, cela ne venait pas de moi mais d'une silhouette qui s'était faufilée discrètement derrière lui et avait attrapé grossièrement son visage. Livai releva la tête de l'homme en tirant ses cheveux.
- Tch... Alors comme ça, tu t'en prends à ma femme? Je crois que t'es tombé sur un os.... Elle n'est pas si docile qu'elle en a l'air.
- C...caporal-chef!? S'exclame l'homme éberlué.
Je jette un regard autour de nous pour constater que nous étions bien seuls. Cela ne ferait pas très propre que l'on nous retrouve en train de se taper entre soldats et moi, en cloque jusqu'au cou.
- Tu t'attaques aux femmes enceintes, c'est du joli... Qu'est-ce que t'as? T'as perdu ta langue? Tu fais dans ton froc? Je te préviens, si je te retrouve à lui tourner autour, t'auras une vraie raison de te chier dessus.
Livai le lâcha violemment et le soldat déguerpi rapidement du couloir sans se retourner.
- Qu'est-ce que tu fiches ici, continue Livai?
Il croisa ses bras devant lui. Une façon pour lui d'affirmer son agacement et de rester fermé face à son interlocuteur. Même moi... qui le connait. Je gratte ma joue, mal à l'aise.
- Hum... Ce n'était pas vraiment prévu que tu me voies.
- Enfin Violet, qu'est-ce que tu ne comprends pas dans "reste cachée".
Je baisse les yeux et ne répondis rien. Je savais qu'il ne faisait pas ça pour m'emmerder mais pour notre bien à tous les deux. Voyant que je restais silencieuse, il soupira dégageant les reproches de son esprit.
- Tu n'as pas répondu à ma lettre.
- Je sais... Qu'est-ce que tu voulais que je te dise de si intéressant? Rétorquais-je, vexée.
- Comment tu allais, je trouve que c'est un bon début, fit-il en haussant un sourcil.
J'ouvris la bouche une première fois, voulant répondre quelque chose de plus cinglant avant de me retenir et bougonner.
J'étais peut-être un peu contente de le revoir après cette longue absence remplie d'inquiétude.
- Evidemment, c'est facile à dire...
- Tu ne devrais pas rester ici. D'autres gens t'ont reconnus?
- Non, je me suis faite discrète.
- Tu n'es pas discrète, Violet. Tu as fait valdinguer un soldat en plein couloir, remarqua-t-il en prenant ma main.
J'ignore son commentaire pour réapprécier un court instant son contact.
- Tu as ton petit appartement privé dans le palais, demandais-je ironiquement en le voyant me balader dans les couloirs?
- La reine a tendance à nous favoriser. Je peux me permettre de lui voler une chambre de temps en temps.
Il ouvrit une porte qui mena à une pièce plutôt simple et bien rangée, ce qui était sa signature. Le lit n'était même pas un minimum défait, ce qui prouve qu'il ne dort pas du tout dedans. Je retire ma cape pour m'asseoir sur une chaise.
- Ah... J'en pouvais plus, murmurais-je. La cérémonie a duré longtemps et cela devient vraiment compliqué pour moi de rester debout.
- Elle m'a aussi demandé de te transmettre ceci, fit-il en me remettant une petite boîte.
Après avoir repris mon souffle, je la pris avec un air interrogateur et l'ouvris délicatement. Je reconnus presque immédiatement la médaille que la reine leur avait donné il y a moins d'une heure. Je la fis glisser entre mes doigts et lançai un regard incompris à Livai.
- Elle a considéré que tu méritais aussi cette récompense. Je suis d'accord avec elle. Tu as activement participé à la reprise du mur au côté de mon escouade ou en aidant Hanji dans ses recherches. Et tu as été mise de côté contre ta propre volonté.
J'admire la pierre avec le symbole du bataillon d'exploration gravé dessus. Je reconnus aussitôt le collier que portait constamment au cou le major. Je refermais la boite. Pendant ce temps, Livai retirait son manteau de cérémonie pour le poser soigneusement sur une chaise.
- Livai... Pourquoi tu n'as pas sauvé le major Erwin?
Il se dirigea vers la fenêtre de la pièce pour être dos à moi. Il resta un moment silencieux, comme s'il cherchait sa réponse sur le bout de ses lèvres. Sa voix transperça enfin le silence:
- Erwin... a déjà connu tout l'enfer de ce monde. Cela aurait été égoïste de le faire revenir car nous avions besoin de lui. J'ai jugé qu'il était tant pour lui d'enfin reposer en paix.
Je reste songeuse quant à sa décision en caressant mon ventre.
- Mais je lui ai fait une promesse: je tuerai de mes propres mains le titan bestial.
Mes doigts se crispèrent et ma gorge se noua. Sa voix avait pris une telle détermination que je devinai déjà ce jour arriver, que ce soit demain ou dans 10 ans. Je me relevai difficilement pour le rejoindre.
Désormais, il ne reste que très peu de soldats du bataillon d'exploration, une dizaine tout au plus. Nous sommes revenus victorieux mais complètement abattus. Les pertes sont si grosses. Tous mes amis sont morts là bas...
Pour la première fois depuis longtemps, je sentis les bras de Livai m'entourer. Il m'enlaça par derrière et posa sa tête contre la mienne. Je rougis légèrement et fermai les yeux en profitant de ce moment calme.
- Je ne sais pas si c'est flippant ou juste bizarre, fit Livai au bout de plusieurs longues minutes.
- Hum? De quoi tu parles?
- Je le sens bouger...
Je regardais ses mains posées sur mon gros ventre. Je me demande bien la tête qu'il doit faire à ce moment là. Je souris en le taquinant:
- En même temps, tu t'attendais à quoi? J'ai l'impression qu'il a envie de se battre alors même qu'il n'est pas sorti. C'est bien le tien, ça c'est sûr...
___
Je dépose un bouquet de pensées sur chacune des tombes de mes défunts amis. Iris restait silencieuse à mes côtés. Désormais, nous étions toutes les deux. Les deux seules survivantes de notre promotion dans le bataillon d'exploration. Elle serra fort ma main dans la sienne.
Je crois qu'on n'avait pas besoin de se parler pour se partager la peine qu'on traversait. Il n'y avait aucun mot exact pour la décrire.
Même si l'on pense être toujours prêt à l'inévitable. C'est juste complètement faux. N'importe quelle perte fait mal à être humain. Je pourrais me dire que Kiama, Hannah, Benedict ou Moblit... étaient des personnes complètement banales. Mais ce serait mentir, ils étaient chacun exceptionnel et je ne le réalisai pas quand j'étais à leurs côtés.
Je levai le regard vers Livai qui était à quelques mètres de nous devant une autre tombe. Il était figé comme une statue de marbre. Je caresse mon nouveau collier.
Ce n'est que lorsqu'on perd une personne que l'on regrette le plus ne pas lui avoir dit ce qu'on avait sur le cœur.
La guerre n'est pas finie... Loin de là...
Combien de personne vais-je devoir encore enterrer?
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