.Le savoir...ira se faire voir.


- Attention, il va faire un arrêt !

- Vite, le défibrillateur !

- Amenez de la nourriture !

- Ciseaux, urgent !

- Posez-le, DOUCEMENT !

Des voix, des gens. Shi avait l'impression d'être dans une ruche bourdonnante d'abeilles, entouré de bruit et d'activité. Et cette agitation était tournée vers lui. Ces infirmiers en blouse blanche couraient dans tous les sens, et leur seule priorité était ; lui.

Il se redressa sur son séant. Aussitôt, une femme lui appuya sur le torse avec force,  l'obligeant à se rallonger. Il poussa un gémissement de douleur ; son torse était nu, et morcelé de patchs reliés à des fils. Il voulût les arracher, mais la même femme le coupa dans son geste. Toujours sans un mot, sans un regard.

Alors, il chercha à voir un peu mieux. Et il se rendit compte que trois machines, en forme de sarcophages étaient disposées près de lui, en cercle. Ces machines étaient les mêmes que la sienne, mais elles, étaient encore closes.

Il était donc bien le seul dont les médecins s'occupaient.

D'un coup, une peur bleue le saisit ; et s'il allait faire l'objet d'expériences ? À cette pensée, il se leva, et arracha tout ce qui couvrait sa poitrine ; pas question de rester sagement à attendre qu'on le coupe en morceaux.

- Oh, voyons, soyez raisonnable. On ne vous veut pas de mal, Shi, dit une voix dans son dos.

- Qui êtes-vous ? croassa le jeune homme,  sur ses gardes et la voix enrouée.

Le médecin qui lui avait parlé soupira.

- Je vais l'emmener, les tests sont bons, cria-t-il à la volée d'infirmiers qui tourbillonnaient toujours.

Une femme au visage sévère lui donna sa permission ; le médecin aida Shi à se mettre debout. Ses jambes étaient autant engourdies que s'il avait passé un mois à rester sans rien faire, il eût du mal à marcher sans tomber.

Ensuite, dans le couloir ciré, il suivit l'homme ; toujours torse nu, il attirait des regards curieux, mais il s'en moquait. Les marques des patchs lui faisaient vraiment mal, il essaya de se masser la peau, mais sans effet.

Ils arrivèrent devant un bureau aseptisé, où seule une machine à café apportait un peu de confort.

- Vous savez que je suis Terrien ? dit Shi, sans prévenir, avec brutalité.

Le médecin contint un petit rire. Puis, plantant son regard dans celui du jeune homme ;

- Mais, mon cher, moi aussi !

Et Shi vit un regard aussi bleu que le ciel.

*

- Tu aimes le café ?

Pas de réponse. Shi était sous le choc.

- Bon, tiens ; un latté machiatto. C'est au caramel, tout le monde aime le caramel, dit le médecin avec un regard encourageant.

Un regard bleu. Shi se passa les mains sur le visage ; il ne pouvait pas y croire. Était-il tombé sur des Terriens résistants ? Oui, ce devait être ça. Sur la Quatrième Face, que personne n'avait jamais exploré...

- On est où ? demanda-t-il, fatigué. Il avait une envie mortelle de dormir, mais trempa pourtant ses lèvres dans la crème brune de la boisson fumante.

- Bois, je te dirais tout une fois que tu auras fini. Sinon, tu risques l'arrêt cardiaque.

Shi leva des yeux amusés vers l'homme, pensant qu'il s'agissait d'une blague ; mais non. Très sérieux, son visage attendait simplement qu'il boive.

Avec résignation, Shi but rapidement le café. L'arrière-goût de sucre lui fit du bien ; et la chaleur dans l'estomac lui sembla une vraie bénédiction.

- Bon. Par où commencer ? Je dois prendre des pincettes, mais je ne sais pas quoi dire... murmurait le médecin, un peu gêné. Quand faut y aller, faut y aller...

- Je suis solide. Dites-moi tout, coupa Shi.

Avec un regard presque craintif, sans le quitter des yeux, l'homme lâcha la phrase la plus inattendue au monde ;

- Nous sommes sur Terre.

*

- Donc, tout ça était faux...

Dos au bureau, le médecin regardait dehors, par la fenêtre. Le ciel était si bleu...

- Oui. Tous vos souvenirs Ganymèdiens ont été implantés, prennant la place de vos anciens souvenirs Terriens. Mais, pas de soucis, vous pourrez les récupérer.

Un silence s'installa.

- Vous avez été placés dans une simulation. Notre gouvernement prévoit d'envahir Ganymède, et, avec notre travail, nous savions ce qui allait arriver... Nous avons donc voulu vérifier, en choisissant quatre volontaires, placés dans des contextes très différents de vie.

- On était volontaires ?

- Bien sûr ! Tu étais le plus motivé, se rappela le médecin, avec un petit sourire. Mais, malgré notre efficacité, le gouvernement refuse de nous écouter... Nous sommes le ministère de l'avenir, compléta-t-il en voyant l'air interrogateur du jeune homme. Avec cette expérience, nous pensions les convaincre de ne pas aller sur cette planète...

Il soupira. Shi se dit que le médecin avait vraiment l'air fatigué, et surtout, d'avoir perdu tout espoir.

Une rage immense commença à monter en lui. Tout ça, avec Vespera, Norem, et même Lorelei, tout ça était faux ?! Ses souvenirs, son petit frère... Son pouvoir ?

- Ton pouvoir est le même. Sur Terre, nous avons vraiment tous les yeux bleus et des capacités exceptionnelles. J'entends les pensées, ajoutait-il avec un petit sourire triste.

- Et... Je suis vraiment un tueur sur Terre ?

L'homme hésita.

- Non, mais tu as fait de la prison pour avoir tué trois personnes, dit-il avec gêne.

Shi éclata de rire.

- Je ne retrouverais jamais mes souvenirs Terriens. Je préfère rester celui que j'étais sur Ganymède. Je pourrais vous tuer sans remords, à cause de ce que vous avez fait. 

- On se doutait que votre réaction serait aggressive. C'est difficile à croire, mais... C'est comme ça. Tout ce que vous avez vécu est faux, et fabriqué. D'ailleurs, quelques petits défauts d'histoire ont failli vous mettre sur la voix.

- La fresque anachronique, dans le Palais... murmura Shi, sous le choc.

L'homme hocha la tête.

- Notamment.

Dehors, une fusée gigantesque s'envola, une traînée de fumée blanche derrière elle. En voyant celà, le médecin soupira profondément.

- Ils vont à leur perte... Ils ne pourront jamais s'en sortir indemne. Tout va se passer comme dans...

- Comme dans quoi ? Vous avez des voyeurs d'avenirs, dans votre équipe de cinglés ?

- Mais oui. La majorité de nos effectifs voient l'avenir, c'est ce qui nous a permis de dresser le décor de votre simulation.

- J'en ai assez. Donnez-moi mon adresse, je vais chez moi, déclara Shi, à bout.

*

Contrairement à la simulation, son chez-lui était très joli et grand.

Mais il n'y avait pas de balcon.

Le ciel bleu semblait le narguer, se moquer de lui. Il fouilla un peu dans cet environnement étranger, habité par un étranger, et dénicha une bouteille d'alcool. Lui, qui d'habitude détestait en boire, en avait vraiment besoin. Ensuite, il alluma une cigarette ; le tabac était vraiment mauvais, comparé au mélange de plantes aromatiques sur Ganymède.

Comment allaient les autres ? Chercheraient-ils à le retrouver ?

Il l'ignorait. Tout n'avait été que mensonge...

Finalement, c'était la Terre, la méchante.



                           The End

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J'ai peur que la fin n'ait été bâclée. Dites-moi si ça vous a plu ! Gros changement de perspective, c'est vrai.

C'est la fin de cette histoire qui m'a fait vivre pendant des mois! Ça fait quelque chose. Je suis heureuse d'avoir vécu cette aventure avec vous, et je vous rassure ; chapitres bonus au menu.

Donnez-moi vos impressions !

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