Chapitre n°11: Attentat


- Allez ! Tout le monde descend ! s'exclama Pshar, debout sur le ponton.

Clark, Tela, James et Efilenia s'exécutèrent, suivis par Juekpol qui fermait la marche. Passé la passerelle de bois menant au quai, le petit groupe s'arrêta pour contempler l'entrée du palais.

L'endroit était très calme. Le ponton était situé au bout de l'une des branches de l'estuaire, éloigné des autres. Véritable crique dans la cité, cette dernière était isolée derrière une large porte mécanisée et d'épais murs de béton. Quand celle-ci se referma, ils purent apprécier la beauté du bâtiment qui se dressait devant eux : bâti et rénové selon les anciennes traditions, celui-ci proposait un contraste saisissant avec le reste de la ville.

Haut de six étages, le palais, d'une blancheur éclatante, comptait une centaine de pièces. De nombreuses colonnes de pierres en ornaient la façade, imposant le respect. Des statuettes étaient disposées sur les balcons de marbre, placés aux fenêtres des chambres, telles de véritables marques de raffinement et de richesse. Les nombreux arbustes plantés autour du monument accentuaient le luxe qu'il dégageait, laissant les visiteurs sans voix.

- C'est encore plus beau que dans mes souvenirs... chuchota Efilenia, sous le choc.

- Bienvenue au palais de notre grand et merveilleux roi : Andmus le Moderne ! s'exclama Pshar, les bras ouverts en direction de l'immense structure.

Ce dernier rayonnait. Face au succès que remportait la splendeur de sa ville et du palais qui y siégeait, il bombait le torse et se pavanait devant les étrangers. C'était un Lotrassien de Téloris, et il en était fier.

- Suivez-moi, je vais vous guider jusqu'à la salle du trône ! s'écria-t-il avant de passer le grillage en or menant dans la cour.

Muet, le reste du groupe le suivit. De nombreux pavés de pierre formaient l'allée qui menait au palais. Deux longues bandes d'herbe taillées de près s'étendaient à sa droite et à sa gauche, apportant fraîcheur et tranquillité aux invités du souverain. Une fois arrivés devant l'immense porte du bâtiment, ils patientèrent le temps que Pshar explique leur situation aux deux soldats postés à l'entrée. Ceux-ci étaient jeunes, imberbes, et avaient des cheveux châtains coupés très courts qui leur durcissaient le visage. Chacun avait un fusil d'assaut dans le dos, un pistolet accroché à chaque hanche, un gilet pare-balles ainsi qu'un pantalon au motif camouflage laissant transparaître les couteaux qu'ils avaient placés le long de leurs cuisses.

Après quelques minutes de pourparlers, l'un d'eux hocha la tête.


C'est ce moment que choisirent les intrus pour frapper.

Ils étaient trois. Cachés derrière les arbustes du jardin, ils avaient attendu une heure entière l'arrivée des étrangers... et de leur cible. Cachés dans de longues robes de cuir couleur de blé, usées et couvertes de saletés, les assassins vivaient sûrement dans le quartier pauvre de la ville.

Si ce n'avait été pour les deux longs sabres édentés et le pistolet qu'ils tenaient, ils auraient pu ressembler à n'importe quels vagabonds.

Sur un ordre de l'homme au pistolet, la jeune femme s'élança en première, rapidement suivi par son comparse.

- Mort à la traîtresse ! hurla-t-elle avant de bondir sur Efilenia, sabre en avant.

Cette dernière n'eut qu'une seconde pour réagir. Levant les bras pour couvrir son visage, elle encaissa le coup de plein fouet. Stupéfait, le reste du groupe comprit qu'ils étaient attaqués au moment où le deuxième homme chargea. Clark et Tela venaient d'entrer dans le bâtiment et étaient trop loin pour agir.

Cependant, Juekpol, fort de ses réflexes, plaqua l'assassine au sol. Au moment où cette dernière tenta de l'embrocher, il lui avait déjà attrapé le poignet et n'hésita pas une seule seconde à lui trancher la gorge avec son propre sabre.

- Pour Lotras ! Non aux vendus ! cria le second combattant en sautant au-dessus du corps de son amie.

Il s'apprêtait à se ruer sur Efilenia qui gisait sur le sol, hurlant de douleur.

James allait l'attraper avant qu'il n'atteigne sa cible quand il aperçut l'homme caché derrière un arbuste, face à lui. Il jeta un rapide coup d'œil alarmé en direction de l'un des soldats.

Celui-ci avait déjà armé son fusil. Le deuxième vagabond ne serait donc pas un problème.

James se focalisa alors sur son nouvel adversaire. En moins d'une seconde, il collecta un maximum d'informations : en retrait, c'est sûrement lui qui avait donné les ordres ; sa longue robe de cuir empêchait de distinguer ses traits mais le canon de son arme brillait à la lumière du soleil. Quand l'assaillant pointa celle-ci en direction de James, la réaction fut immédiate. Ce dernier roula sur le côté, sortant du champ de vision du tireur. D'un mouvement militaire, fluide et rapide, il se releva immédiatement et plongea ses mains dans les poches de son pantalon, à la recherche d'une arme. Et merde ! On a laissé nos armes dans le bateau ! pensa-t-il. Contraint à agir, il s'élança en direction de l'arbuste.

Au moment de refermer ses bras sur ce dernier, il poussa un cri de victoire :

- Je te tiens !

Trop tard.

Ses mains ne rencontrèrent que feuilles, branches et bourgeons. Le mystérieux individu avait filé.

James s'apprêtait à rebrousser chemin pour voir si Efilenia s'en était sortie, mais un éclair de lumière sur sa droite attira son attention. Le pistolet scintillait à la lumière du soleil. L'intrus l'avait fait tomber dans sa course. Relevant la tête, il aperçut une forme se déplacer au loin. Je ne le laisserai pas filer !

- Je vais le choper ! lâcha-t-il en direction de Tela et Clark qui venaient de ressortir du bâtiment, paniqués.

Sans attendre leur consentement, il se lança à la poursuite du malfaiteur. Pshar, qui était resté immobile pendant toute la durée du combat, fit un signe d'approbation à Juekpol, lui intimant de venir en aide à James. Constatant la mare de sang en provenance des corps, il ordonna aux deux gardes de trouver du secours à l'intérieur du palais pendant qu'il s'approchait d'Efilenia, inerte.


Paniqué, Atlas courait. Il ignorait si l'opération avait réussi ou non, mais il était en danger. Ses deux compagnons avaient lamentablement été exécutés alors qu'ils tentaient de mettre fin à la vie de la traîtresse. Terrifié par la façon dont la jeune femme avait été égorgée, il avait été pris de tremblements et n'avait pas pu tirer. Il se retrouvait maintenant désarmé, prenant ses jambes à son cou comme le plus faible des lâches.

Cela faisait prêt de deux semaines qu'ils préparaient l'opération... La Guilde comptait sur lui. Pitié qu'elle soit morte... pensa-t-il. Arrivé au bout du jardin, il escalada le mur en pierre blanche qui le séparait du reste de la ville. Après une dizaine de secondes, il entendit quelqu'un hurler après lui. On le poursuivait.

Sans regarder derrière lui, il accéléra. La roche était ancienne et les prises nombreuses. Il serait de l'autre côté en un rien de temps. Confiant, il atteignit le sommet rapidement. Sans perdre une seconde, il entama sa descente, plaçant la pointe de ses bottes en cuir dans les failles du mur. Un jeu d'enfant pour un jeune homme agile comme lui.

Soudain, la roche s'effrita et Atlas perdit pied. Il s'écrasa de tout son long sur la voiture noire, longue et rectangulaire qui était garée en contrebas. La toiture se tordit sous l'impact et le pare-brise vola en éclats. Malgré la douleur du choc, le jeune homme n'attendit pas que son adversaire le rattrape et roula au sol avant de reprendre sa course.

Il s'élança en direction du centre-ville. La ruelle dans laquelle il avait atterri était très sombre. Peu passante, elle était encadrée par de hautes maisons en pierre brune, à l'aura malfaisante. Au vu des rideaux qui se refermaient derrière les fenêtres carrées des habitations, il n'était pas le bienvenu ici.

Rejoindre les Complots... Je dois rejoindre le quartier industriel ! songea-t-il.

Quittant la ruelle, il s'engagea dans le quartier des affaires.


Il ne s'en sortira pas comme ça ! pensa James en cherchant parmi la foule.

Perdu au milieu des hautes tours de verre et d'acier qui encadraient les longues et larges rues du quartier des affaires, James redoublait d'efforts. Il avait jeté sa veste et légèrement déboutonné sa chemise pour plus d'aisance. Le climat était si doux dans le Sud-Est du pays qu'il ne craignait pas de prendre froid, et c'était le cadet de ses soucis.

Les passants, habillés de façon élégante, peignés et bien coiffés, semblaient avoir bien profité du développement de la ville. Les hommes étaient en costard simple, noir, et avaient, pour la plupart, une mallette ou une sacoche à la main. Les femmes, quant à elle portaient un tailleur cintré. Pressés, ils jetaient des regards interloqués à l'homme qui les bousculaient mais ils n'avaient pas le temps de s'arrêter pour le réprimander.

Le malfrat qu'il cherchait n'était pas comme tous ces gens... Plissant les yeux pour tenter de distinguer une tenue anormale dans la foule, il ne tarda pas à retrouver sa piste. L'individu, dissimulé sous une longue robe de cuir brune, contrastait grandement avec les hommes et femmes d'affaire du quartier.

Sans perdre une seconde, il se rua dans sa direction, ignorant les plaintes des bousculés.

Petit à petit, il gagna du terrain. Même si le fuyard connaissait bien les lieux, James courait plus vite et était plus endurant. Il fatigue... ça se sent. Bientôt, il va devoir s'arrêter. Et là... se dit-il, un sourire mauvais au coin des lèvres.

Après quelque longues minutes de course, les hautes tours de verre laissaient peu à peu place à des grands bâtiments en brique rouge. Les voitures se faisaient plus rares, les habits des passants avaient changé. On entre sur son territoire... Le quartier industriel. Je dois le choper maintenant !

Mais James n'était plus qu'à quelques mètres. Il pouvait entendre le souffle paniqué de son adversaire. Il sentait la terreur qui avait pénétré le meurtrier de toutes parts, tandis que sa propre colère flambait au rythme de leurs pas. Elle montait, montait encore... Le malfrat avait raison de le craindre. Rien ne le sauverait de ce qu'il avait fait.

Il n'y avait rien au bout de la ruelle dans laquelle Atlas s'était engagé. Le terroriste était fait comme un rat.

- À table... déclara James avant de passer sa langue sur ses lèvres.

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