Chapitre 20

Hermione n'eut pas le loisir de rester fâchée très longtemps, mais quand elle eut terminé son service et qu'elle rentra chez elle, elle fit part à Rogue des événements.

Tu as été pourtant... claire, je trouve, répondit le tableau, étonné. La réaction de Drago m'étonne.
— J'ai eu l'impression de l'insulter ! répondit Hermione en se débarrassant de la veste qu'elle devait porter pour son service. C'était bizarre, il... Je ne sais pas, on aurait dit que je plaisantais...

La jeune femme déboutonna les deux premiers boutons de son chemisier blanc puis soupira. Elle se tourna alors vers le portrait de son compagnon qui haussa un sourcil dans sa direction.

— Lui proposer ce deal, dit-elle. C'était comme si j'avais proféré une énormité, un blasphème des plus total.
Est-ce que Narcissa aurait réussi à les faire s'entendre ? demanda Rogue. Qui a-t-il choisi, d'ailleurs ?

Hermione haussa les épaules.

— Daphné a notre âge et c'est une sale vipère, comme toutes les Serpentardes, répondit-elle, amère. S'il choisi Astoria... Tu la connais ?

Rogue secoua la tête.

Je ne connais des Greengrass que Daphné, et ses parents. J'ignorais qu'elle avait une sœur plus âgée. Sont-ils riches ?
— Riches ? Severus !

Rogue leva les mains et tourna alors la tête.

Je vais devoir te laisser, la Directrice m'appelle... Ça va aller ?

Hermione, passablement agacée, se contenta d'opiner rapidement, les lèvres pincées. Rogue quitta alors son fauteuil et la jeune femme soupira. Elle se rendit dans la cuisine et se fit du thé.
Tandis que l'eau chauffait, Hermione entreprit de réfléchir au moyen de rendre la demande en mariage de Rogue officielle et ante-mortem, surtout. Elle ne pouvait cependant pas inventer décemment un mensonge, une relation entre eux qui serait antérieure à la mort de l'homme car non seulement c'était un mensonge, mais McGonagall savait qu'il n'y avait jamais rien eut entre son professeur de Potion et la Gryffondor. Et pour cacher quelque chose à la directrice de Poudlard, il fallait être très fort...
Avec un soupir, Hermione versa l'eau chaude sur la boule à thé dans son mug puis s'adossa à l'évier, les mains serrées sur la tasse. Elle remonta le fil de ses souvenirs et repensa au testament qu'elle n'avait jamais eu en mains, au final.

Le testament...

Hermione fronça les sourcils et regarda autour d'elle. Elle avait un vague souvenir d'une histoire à propos d'un testament falsifié par un neveu trop gourmand...
Posant sa tasse, elle se rendit au salon et se jeta sur son ordinateur.

Qu'est-ce que tu fais ?

Hermione agita la main en direction du tableau et continua de pianoter sur le clavier rapidement.

— Là ! dit-elle. Je savais que j'avais lu cette histoire !
Quelle histoire ?

Hermione pivota et regarda le tableau. Rogue avait croisé les bras, irrité.

— Une histoire de testament falsifié, répondit la jeune femme avec un sourire.

Rogue cligna des paupières. Un silence s'installa et soudain, il se pencha en avant.

Tu veux falsifier mon testament ? demanda-t-il.
— Non ! Non, pas du tout ! répondit Hermione en agitant les mains. Au contraire !

Rogue s'adossa à son fauteuil.

Je ne te suis plus, ma chérie...

Hermione lui décocha un sourire - elle pourrait tout à fait s'habituer à ce surnom ! - puis se mit à arpenter le salon en expliquant à son compagnon l'idée qui venait de germer dans son esprit et qui faisait son chemin dans celui de l'homme à mesure qu'elle expliquait.

— Il me suffit de convaincre ton Notaire d'adhérer à ce plan, quitte à lui effacer la mémoire après, et ensuite, plus personne ne pourra croire que je t'épouse pour des raisons obscures ! J'y serais simplement contrainte !

Rogue resta silencieux, les lèvres pincées. Il se passa alors une main sur le visage et secoua lentement la tête.

Tu es définitivement trop intelligente ! dit-il alors en rigolant doucement.
— Merci !
Le pire dans l'histoire, reprit alors Rogue. C'est que ça risque de marcher... Ni Potter, ni Drago, ni Minerva, ne pourront penser que tout est un coup monté parce que ce sera sur mon testament, rédigé plusieurs jours avant ma mort !

Rogue se leva et fit les cents pas dans son encadrement. Hermione l'observa un moment puis soudain, se renfrogna.

Qu'y a-t-il ? demanda Rogue en s'arrêtant.
— Ton Notaire est quelqu'un de très connu dans le monde sorcier, il est réputé pour être sérieux et si moi, une gamine de vingt ans, je viens le voir comme une fleur en lui demandant de modifier un testament validé pour arranger mes affaires, il risque de me rire au nez... Et je ne veux pas user de magie sur lui, car contraindre des gens à mentir ou à faire des choses contre leur volonté, fini toujours par nous retomber dessus un jour ou l'autre...
D'une, tu n'es pas une gamine, et de deux, il t'écoutera, j'en suis certain.
— Je veux falsifier un testament qui a déjà été ouvert, Severus...
Pour me rendre service... et pour rendre service à Drago aussi.

Hermione fronça les sourcils. Elle se mordit la lèvre puis souffla par le nez et posa ses mains sur le dossier du canapé.

— Et si ça ne fonctionne pas ? demanda-t-elle. Si ton Notaire ne veut rien entendre ?

Rogue ouvrit la bouche puis la referma.

Hermione, je connais cet homme depuis presque trente ans, répondit-il. Nous étions à l'école primaire ensemble avant d'être séparés lorsque je suis entré à Poudlard.
— Il n'y est pas allé ? demanda Hermione.

Rogue eut un sourire en coin.

Il est Français... dit-il.

Hermione haussa les sourcils puis rigola doucement en hochant la tête.

— Mais ça ne résout pas mon problème et de ce que je sais des français, ils ne sont pas très sympathiques concernant les modifications de documents officiels.

Rogue secoua la tête.

Ce n'est pas une modification, dit-il. C'est l'ajout d'une clause.

Hermione regarda le portrait, étonnée.

— Une clause ? Comment ça ?
Je viens d'y songer... Ce que tu vas faire, c'est aller voir mon Notaire et lui proposer de rajouter une clause à mon testament, une clause qui sera bien sûr non officielle, mais devra l'être aux yeux des autres.
— Une clause... ou je dois t'épouser après un certain temps ?

Rogue opina.

— Ce n'est pas un peu gros ? demanda Hermione. Je veux dire, je vis ici depuis neuf mois, Severus... Si clause il y avait, elle aurait été dévoilée depuis longtemps, tu ne crois pas ?
Pas nécessairement, j'aurais pu indiquer une date à laquelle la dévoiler... Tu lui montreras le papier que je t'ai donné et tu lui diras que tu l'as retrouvé dans mes papiers, en lui demandant si c'est valide ou pas. Il te demandera très certainement pourquoi tu voudrais faire une telle chose, mais je sais que tu sauras lui répondre...

Hermione entrouvrit la bouche.

— Mais... ?
Vois-tu, ma chérie, tu vis ici depuis neuf mois, tu as accepté ce que je t'ai demandé dans cette lettre que t'a remise Minerva, tu as foncé droit dedans, à vrai dire, et outre le fait que tu sois tombée amoureuse de moi après coup, tu as fait tout ce qui était demandé dans ma lettre...
— Oui, mais...
Même si nous savons tous les deux que ce n'est pas la vérité, j'ai indiqué une clause dans mon testament, une dernière volonté au cas où tu aurais rempli toutes les demandes que j'avais formulées avant de mourir, reprit Rogue.

Hermione resta silencieuse.

— Une ultime dernière volonté ? demanda-t-elle. C'est ça ?
C'est cela. Dans le cas où tu aurais accepté la mission de retrouver les Malefoy, de les traduire devant le Magenmagot, de faire condamner Lucius, libérer Narcissa, et protéger Drago ; dans le cas où tu aurais accepté de t'installer dans ma maison et de prendre possession de tous mes biens matériels et financiers...

Hermione se mordit la lèvre. Elle posa sa main contre et haussa les sourcils.

— Personne ne va y croire... dit-elle. Pourquoi aurais-tu fait ça !

Rogue rentra le menton et pinça la bouche.

Tu es mon dernier espoir pour que mon nom ne se perde pas, dit-il alors. Mes parents sont morts, mon père n'avait plus aucune famille à l'époque et ma mère n'a pas eu d'autres enfants...

Rogue grimaça ensuite et Hermione s'approcha du tableau.

Je ne veux pas disparaître... dit-il doucement. Je n'ai pas envie de n'être plus qu'une plaque dorée sur le cadre d'un tableau dans une dizaine d'années, je n'ai pas envie de n'être plus qu'une histoire dans un vieux livre poussiéreux dans un siècle... La vie ne m'a pas donné le loisir d'avoir une femme et des enfants, mais peut-être que toi...

Hermione leva la main et la posa contre la toile froide. Le contact de sa peau avec les aspérités de la toile et de la peinture lui serra le cœur. L'homme qu'elle aimait était mort et seul de lui ne restait plus que cette peinture magique qui était un écho de lui-même de quand il était encore vivant.
Baissant la main, Hermione serra les mâchoires puis opina.

— Entendu, dit-elle alors. On fait comme ça. Mercredi, je ne travaille pas, je vais à Londres voir ton Notaire. Je dois prendre rendez-vous ?

Rogue secoua la tête.

Il te connaît aussi bien que moi à présent, ou presque... répondit-il. J'ai passé des semaines avec lui à tout organiser en vue de mon assassinat... Il sait aussi que je n'ai plus de famille, mais il ignore que tu t'es éprise de moi...

Hermione eut un rire un peu aigre.

— Comme tout le monde, il ne va pas comprendre, dit-elle, amère. Il va me prendre pour une illuminée qui tombe amoureuse d'un homme mort depuis des mois, tourmentée par les visions qu'elle a de son assassinat.
Chérie...

Hermione serra les mâchoires et ferma les yeux. Elle renifla, déglutit, puis se tourna vers le tableau. Un sourire tremblotant étira sa bouche.

— J'aimerai pouvoir déplacer ces quelques heures que nous avons passées ensemble, Severus, dit-elle. Les déplacer à un moment où tu étais encore en vie, mais je n'arrive pas à m'en convaincre... Je t'ai vu mourir, sous mes yeux, et je n'ai rien fait... Je t'ai vu mort, sur cette civière... et j'ai assisté à ton enterrement, et pourtant, je t'ai retrouvé dans un monde parallèle, je t'ai serré dans mes bras, embrassé... Tu étais là, en chair et en os, et alors tous mes soucis avaient disparu...
Tu dois faire ton deuil, Hermione, dit alors Rogue. Tu dois surmonter ma disparition, ça prendra du temps, peut-être des années, mais tu dois accepter ma mort et accepter le fait que même en portant mon nom, tu n'auras pas d'enfants avec moi...

Hermione eut un rire amer ponctué d'un sanglot. Elle passa ses mains sur ses joues et regarda le plafond.

Va te reposer, dit alors Rogue. Va dormir un peu, on reparlera de tout ça demain.

Hermione hocha lentement la tête puis elle retourna dans la cuisine, prit son thé encore chaud et monta à l'étage. Rogue soupira quand les lumières s'éteignirent, et il prit la décision d'aller parler de tout ça à McGonagall.

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