Chapitre 17
Hermione fit une culbute en avant dès l'instant où ses pieds quittèrent le sol de sa maison. Elle sentait toujours qu'on la tenait par la main, mais elle tournoyait sur elle-même, la tête en haut, la tête en bas, sans rien pouvoir y faire.
Soudain, elle sentit le sol sous ses pieds et elle accusa l'atterrissage en fléchissant les genoux. Elle perdit alors l'équilibre et tomba sur les genoux en se retenant sur ses mains. Aussitôt, un violent haut-le-cœur lui souleva l'estomac, mais elle se retint de vomir. Elle n'avait rien avalé depuis la veille, de toute façon...
Déglutissant, la jeune femme rouvrit les yeux et regarda autour d'elle en se relevant. Machinalement, elle frotta ses mains et cligna ensuite des paupières. Elle se trouvait dans une pièce assez similaire à celle qu'elle venait de quitter. Les meubles et leur agencement étaient différents, mais la configuration générale était la même.
Soudain, elle perçut une présence dans son dos et fit volte-face. Elle sentit alors son cœur louper un battement et ses poumons se vidèrent dans une réaction viscérale. Elle poussa ensuite un cri et se jeta au cou de l'homme qui se tenait à quelques mètres d'elle.
Sans réfléchir, Rogue referma ses bras sur elle et la serra contre lui en enfouissant son visage dans ses cheveux. Hermione resserra sa prise en sanglotant et quand elle sentit les grands bras se détendre, elle recula et observa le visage de l'homme.
Incapable de prononcer un mot, elle se contenta de lui toucher les joues, les cheveux, et de l'observer.
— C'est vous... dit-elle alors dans un souffle. C'est bien vous...
Deux grosses larmes glissèrent alors sur ses joues et, sans réfléchir, elle posa ses lèvres sur celles de l'homme qui lui rendit son baiser sans un mot, resserrant sa prise sur elle...
.
— Asseyez-vous...
Hermione prit place dans le canapé qui décorait ce qui était le salon de Rogue, celui qu'il avait autrefois dans la maison de l'Impasse du Tisseur.
— Monsieur, je suis désolée pour... commença-t-elle alors.
— Assez, Hermione, la coupa alors Rogue en s'asseyant en face d'elle sur la table basse.
Hermione le regarda et il secoua la tête. Il lui tenait la main et quand elle la récupéra pour la poser sur sa joue, il détourna la tête.
— Que craignez-vous ? demanda-t-elle alors.
— Vous, répondit Rogue. C'est vous que je crains...
— Moi ? Mais pour quelle raison ? Je ne...
Hermione se tut et baissa le nez. Elle renifla discrètement et passa ses mains sur ses joues. Elle regarda alors autour d'elle et, levant les yeux, elle sourit.
— Une verrière... dit-elle.
Rogue leva son grand nez et hocha la tête.
— C'était une bonne idée, répondit-il.
Hermione baissa alors la tête et le regarda. Quand il la regarda à son tour, elle lui sourit et se mordit les lèvres.
— Je sais que vous êtes mort, dit-elle alors doucement en lui prenant les mains. Mais vous êtes là devant moi, en chair et en os et...
Récupérant l'une de ses mains, Rogue la glissa sous la tignasse de la jeune femme, et lui emprisonna la nuque délicatement. Hermione sourit puis soupira.
— Quand McGonagall m'a donné ce sortilège, dit-elle. Je pensais entrer dans ce monde et juste vous dire au revoir convenablement, mais ça va être plus compliqué que ça, je pense...
Elle se mordit la joue et ajouta :
— Soyez sincère, professeur, et dites-moi la nature de vos sentiments pour moi.
Rogue grimaça. Il se redressa et se frotta le visage.
— Il se pourrait bien qu'ils ne soient plus aussi cordiaux qu'à l'époque, répondit-il alors. Malgré mes efforts, je n'ai pas réussi à les faire disparaître, et vous voir déambuler dans ma maison comme une âme en peine, pleurer et vous rencogner dans un coin, m'a rapidement fait plus de mal qu'autre chose.
— Depuis quand...
Rogue évita le regard de la jeune femme.
— Bien des mois avant la bataille... répondit-il. J'ai réalisé un jour que ma meilleure élève était devenue une jeune femme et qu'en plus d'être intelligente, elle était jolie... Je m'en suis immédiatement voulu d'avoir songé cela, vous étiez une élève, vous aviez vingt ans de moins que moi, c'était... malsain. Et puis, vous avez disparu, Potter, Weasley et vous, personne ne vous a revus avant la bataille et j'avais oublié ces sentiments malsains...
— Mais quand je suis revenue à Poudlard, tout est revenu d'un coup, n'est-ce pas ?
Rogue baissa le nez. Il regarda la jeune femme qui souriait doucement. Elle secoua alors lentement la tête.
— Je devrais être choquée de vous entendre, dit-elle. Mais ce n'est pas le cas. J'ignorais vos sentiments quand vous m'avez tout légué, et je ne comprenais pas... Maintenant si. Ce n'était pas un acte vide de sens. J'ai été choqué par votre mort, j'en ai été traumatisée pendant des semaines... Pourquoi ? Pourquoi vous, pourquoi vous assassiner comme ça, aussi cruellement, aussi... inutilement ?
Hermione se pinça l'arête du nez mais une larme glissa sur sa joue.
— Je regrette tellement votre mort ! dit-elle alors en regardant Rogue. Débarrassé du Lord, vous seriez redevenu le professeur Rogue, McGonagall vous aurait protégé du Ministère, vous et Drago, et vous...
Elle se tut et passa sa langue sur ses lèvres.
— Et nous aurions pu apprendre à nous connaître...
Rogue resta silencieux et se contenta de serrer les mâchoires. Il inspira ensuite profondément et se leva soudain. Hermione le suivit du regard et il alla chercher quelque chose dans le secrétaire. La jeune femme sourit. Elle avait conservé ce magnifique meuble...
— Tenez, dit alors Rogue en revenant vers elle.
Il s'assit au bout du canapé en tendant un parchemin plié et Hermione le prit avec étonnement.
— Qu'est-ce que c'est ?
— Quelques ultimes instructions, mais cela risque de faire trop pour vous alors je concevrai que vous refusiez... Vous trouverez l'exemplaire officiel dans le secrétaire, dans le double fond du premier tiroir de droite...
Fronçant les sourcils, Hermione ouvrit le papier plié en deux et le parcourut. Elle regarda alors Rogue avec surprise et sa bouche s'entrouvrit.
— Mais, c'est...?
Rogue opina.
— Je savais que j'allais mourir, j'avais tué Albus et récupéré la baguette de Surreau, c'était imminent, dit-il. Je savais que le Lord prévoyait une attaque massive sur Poudlard et que je n'en sortirai pas vivant. J'ai alors rédigé mon testament et vous ait tout légué. Presque tout...
Hermione avala sa salive et regarda de nouveau le parchemin.
— Monsieur, ce...
Rogue secoua la tête.
— Je comprendrai que vous refusiez, mais à part vous, je n'ai plus de famille, Hermione... dit-il. Vous êtes la dernière personne... à qui j'ai un tant soit peu tenu avant de mourir.
Hermione sentit sa gorge se serrer et elle cligna des paupières. Elle posa le parchemin sur la table et alla chercher un baiser que l'homme lui rendit avant de la prendre dans ses bras.
— Je sais que ce n'est pas « moi », dit-il quand elle recula. Mais ce papier est valide. Mon Notaire vous le confirmera. Celui-ci est une copie, mais celui que vous trouverez dans le tiroir du secrétaire est un vrai.
— Qui vous l'a fait ?
— Un vieux bonhomme, au quatrième étage de Poudlard, répondit Rogue avec un mince sourire. C'est un juge... Il est capable de rédiger des documents officiels depuis son tableau et de les... sortir dans le monde réel. Je lui devrais pas mal de choses en retour, mais tant pis.
Hermione sourit à son tour puis elle prit la main de l'homme dans la sienne et caressa la peau lisse et douce.
— Porter votre nom fera de moi une veuve, dit-elle alors. Et il mourra avec moi...
— J'ai travaillé pour l'Ordre du Phénix pendant de très nombreuses années, répondit alors Rogue. Minerva s'est occupée de faire reconnaître que mes actions ont été un plus non négligeable pendant la guerre. Si vous acceptez de m'épouser à titre posthume, vous aurez une rente à vie d'environ deux mille Gallions par mois.
Hermione secoua la tête.
— Je ne ferai jamais une telle chose pour l'argent... dit-elle. Je ne deviendrai pas une autre Narcissa.
Elle grimaça puis souffla par le nez et secoua la tête de nouveau. Elle regarda alors Rogue puis se blottit contre lui. Il l'entoura de ses bras en s'adossant au canapé et Hermione posa sa main sur son torse.
.
Hermione ignorait depuis combien de temps elle était dans le monde des tableaux, mais elle se sentait apaisée, là, serrée contre cet homme qui lui avait menée la vie dure pendant six ans, avant de mourir et de continuer par la suite d'une façon bien différente.
Se redressant sur un bras, la Gryffondor observa Rogue. Il lisait un livre, allongé sur le dos sur le canapé, et quand il se sentit observé, il baissa les yeux vers elle.
— Qu'y a-t-il ? demanda-t-il. À quoi venez-vous de penser ?
— À rien... répondit la jeune femme en se rallongeant contre lui. J'étais juste en train de me dire que c'est terriblement injuste que je ne puisse vous ramener chez les vivants...
Rogue, le bras levé pour lire son livre, soupira soudain et le baissa.
— Vous savez très bien pourquoi c'est impossible, dit-il.
Hermione releva la tête et opina d'un air triste.
— Vous n'êtes qu'un écho, dit-elle. Protégé par la magie du tableau, vous ne vous éteindrez jamais, mais si vous reveniez dans le monde des vivants, vous finirez par mourir pour de bon car vous n'auriez pas la force nécessaire pour créer un autre écho... Le monde vous oublierait alors...
Rogue dodelina de la tête. Hermione soupira et se releva sur un bras. Elle s'appuya sur le torse de l'homme et s'approcha de lui. Quand elle l'embrassa, il lui rendit son baiser puis elle se coula contre lui et il l'entoura de son bras.
— Il reste une dernière solution, dit-il alors.
— Pour ?
— Pour laisser une trace de mon passage parmi les vivants...
Hermione se redressa, surprise, et se mit à genoux sur le canapé tandis que Rogue s'asseyait au bord en passant ses mains dans ses cheveux. Il tourna ensuite la tête vers elle et lui prit la main.
— Il suffirait que vous ayez un enfant... dit-il doucement.
Hermione eut un sursaut et sa main glissa de celle de l'homme.
— Un enfant ? Mais... Vous êtes mort !
— Oh, merci de me le rappeler ! grogna Rogue. Il n'empêche que la magie pourrait vous donner un enfant qui porterai par la suite mon nom...
Hermione fronça les sourcils. Elle se mordit soudain les lèvres en retenant un sourire et Rogue haussa les sourcils dans sa direction.
— Oh non, dit-il. Je ne suis qu'un écho...
Baissant la tête, Hermione sourit et s'approcha alors de l'homme dont elle enjamba les longues guiboles. Il posa ses mains sur ses hanches et quand elle l'embrassa doucement, il serra les doigts.
— Miss Granger, je suis un écho, je ne suis pas... dit-il quand elle recula.
— Je le sais, mais... Un écho, c'est une partie de l'âme du sorcier, non ? C'est la version non maléfique d'un Horcruxe, alors...
Rogue secoua la tête. Hermione soupira et s'assit sur ses cuisses. Elle croisa les bras et fit la moue. Rogue l'observa alors et, levant une main, il lui toucha le menton. Elle tourna la tête vers lui et l'interrogea du regard.
— Je refuse de coucher avec vous juste pour ça, dit-il alors.
Hermione haussa les sourcils. Elle décroisa les bras et Rogue lui prit la main.
— Ce n'était pas censé se passer comme ça, reprit-il. Nous devions juste discuter, mettre les choses à plat, mais au lieu de cela, nous nous torturons encore plus et quand vous sortirez d'ici, ce sera encore pire qu'avant...
— Pas nécessairement, répondit Hermione. À présent, je sais que je vous aime, et je sais que vous m'aimez aussi... Je suis peut-être tombée amoureuse d'un homme après sa mort, mais vous, vous l'étiez bien avant et je n'ai rien vu...
— Je n'avais pas le droit de vous montrer mon attachement pour vous, vous n'aviez que dix-sept ans et j'étais passible de prison pour ça... répondit Rogue en secouant la tête.
— J'avais dix-huit ans, Severus... répondit Hermione avec un sourire en coin. Je suis née au mois de septembre... J'avais un an d'avance sur tous mes camarades à chaque rentrée scolaire...
La jeune femme perdit son sourire et détourna les yeux. Elle retourna sur le canapé et Rogue l'observa un moment. Il tendit ensuite le bras et elle se fondit contre lui en soupirant.
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