Chapitre 24

     Un uppercut. Puis un crochet du droit. Inspirer, expirer. Héléna ne devait pas laisser son souffle lui échapper. Son regard était vissé sur sa cible. Elle ne la quittait pas une seconde des yeux, tentant d'anticiper ses futurs mouvements. Ses pieds s'ancraient intimement dans le sol, oscillant longuement entre deux respirations. Héléna contracta sa ceinture abdominale et elle serra les fesses.

Soudain, un cri retenti dans les airs.

Mince !

Il lui semblait pourtant ne rien avoir oublié cette fois.

— Ta garde Héléna, rouspéta Ronan. Tiens ta garde, bon sang !

La jeune femme frotta son épaule douloureuse en le fusillant du regard.

Ah oui, sa garde... Elle avait encore positionné ses mains trop basses.

Essoufflée, elle resta un moment pliée en deux. Elle essuya la transpiration qui perlait sur son front à l'aide de la serviette que son bourreau lui tendit amicalement. Après chaque entraînement, peu importe leurs formes, peu importes leurs objectifs, peu importe leurs sujets, Héléna finissait toujours dans le même état : trempée de sueur et la respiration mutilée. Ronan s'était mis en tête de consacrer le peu de temps qu'il leur restait ici afin de forger ses muscles et de lui apprendre quelques techniques de combat. Cela lui serait utile, si un jour elle se retrouvait une nouvelle fois nez à nez avec le Chasseur.

Une perte d'équilibre la fit brusquement atterrir sur les fesses. Héléna gémissait lentement, en frottant son fessier douloureux.

— Sois toujours aux aguets, insista-t-il en l'aidant à se relever, après l'avoir lâchement fait tomber à la renverse. On reprendra notre séance plus tard.

La princesse le regarda partir. Son débardeur blanc moulait admirablement son torse taillé dans la roche. Les muscles de son dos roulaient à chaque enjambée. Il arborait une démarche souple et féline, en totale contradiction avec son imposante masse musculaire, qui lui rappelait vaguement celle des ours avec lesquels les enfants perdus et elle furent confrontés dans les égouts.

— Il est trop doux avec toi.

La voix tranchante de Nephtys coupa court à ses tergiversions. Vêtue d'une brassière rafistolée, délimitant ses abdominaux parfaitement dessinés grâce à ses entraînements quotidiens, elle observait Héléna d'un air hautain. Les jumeaux se rassemblaient comme deux gouttes d'eau physiquement mais leurs caractères étaient bien différents. Ils s'opposaient comme le Ying et le Yang, le noir et le blanc, l'obscurité et la lumière. Héléna n'avait peut-être qu'un vague aperçu de leurs personnalités en sa présence. Les traits de son visage se figèrent lorsque la mercenaire la détailla de la tête aux pieds. Héléna ne rivalisait clairement pas contre cette femme.

— Allez, mets toi en position l'héritière, cracha-t-elle ce dernier mot, le prononcer semblait lui filer la nausée.

Nephtys se mit naturellement en position, se battre était inné chez elle. Elle n'avait peur de rien, et ça, Héléna lui enviait. Elle l'imita, peu certaine de la marche à suivre. À l'entendre parler, la princesse avait l'impression qu'elle ne méritait pas son titre, bien que cela soit quelque peu déplacé. On lui avait imposé à la naissance. Elle n'avait jamais demandé à devenir une héritière. Elle n'avait jamais souhaité qu'on massacre sa famille. Elle n'avait jamais voulu devenir une fugitive. Elle ne méritait pas l'importance qu'on lui accordait. Elle ne voulait pas de cette vie, et si Nephtys la désirait, elle lui léguerait sans problème.

Son comportement vis à vis d'elle insupportait Héléna. Elle ne lui manquait pas de respect, elle ne se montrait pas hautaine, ni mal-aimable. Hors, Nephtys la prenait constamment de haut, comme si celle-ci était meilleure qu'elle - bien que cela soit peut-être vrai d'une certaine manière. Héléna n'avait rien d'une combattante, ni même d'une dur à cuire. Elle n'était qu'elle et ainsi bien sûr, tous les autres patronymes qui lui collaient à la peau comme des maudites sangsues. Elle plaça ses poings face à son visage suivant les indications que Ronan lui avait enseignées plus tôt dans la journée. La mercenaire l'invita à débuter ce combat. Héléna ne se fit pas priée pour lui asséner un coup au visage. D'une manière souple et agile, elle l'évita sans grande surprise. La princesse eut à peine le temps de cligner des yeux qu'en deux temps trois mouvements, elle se retrouvait désormais à la merci de sa rivale.

Elle n'avait rien vu venir !

Héléna gémissait faiblement à terre. Nephtys ne trouvait pas l'utilité de retenir ses coups. Elle prenait un malin plaisir à la voir écroulée à ses pieds. Elle méprisait Héléna. Héléna était censée devenir leur reine mais elle n'avait rien d'une dirigeante. Elle n'avait en aucun cas les épaules pour mener une rébellion et encore moins pour gouverner le royaume. Elle s'effondrerait certainement au premier obstacle.

Un rictus sournois se dessinait sur les lèvres de la mercenaire, ce qui eut le don de la pousser hors de ses gonds. Elle se redressa sur ses coudes pour se relever. Soudain, bousculée sauvagement, Héléna heurta violemment le parterre. La chute ne fut pas amortie. À genoux, elle grimaçait sous la rudesse du choc, tenant ses côtes en proie à une douleur lancinante.

Des doigts glacés agrippèrent son visage, l'obligeant à relever le menton.

— Regarde-toi Héléna, tu es pathétique.

Nephtys relâcha violemment sa prise. Identique à une violente gifle, la tête de son adversaire bascula dangereusement sur le côté. Les sourcils d'Héléna se grignèrent à l'entente de ses paroles. Le mot « pathétique » lui restait en travers de la gorge. Elle se releva d'un geste brusque, faisant abstraction des courbatures qui lui tiraillaient les membres. Le sourire sadique de Nephtys s'agrandissait en voyant sa détresse, mais celui-ci s'effaça aussi rapidement qu'il était apparu. Héléna écarquilla les yeux, gros comme deux soucoupes. Elle regarda la mercenaire passer une main sur son nez. Un filet carmin suintait de sa narine gauche. Possédées par une colère noire, ses pupilles se dilatèrent jusqu'à ce que la limite entre ses iris d'une couleur sombre et son diaphragme ne soit plus perceptible. Elle essuya le sang qui fuyait son corps d'un revers de manche. Puis, elle se jeta sur Héléna. Elles tombèrent toutes deux à la renverse. Des coups s'échangèrent d'un coté comme de l'autre, griffant, frappant, mordant. Aliénées par un esprit bestial, elles se battaient comme des chiffonnières. Emportées par un élan hargneux, elles roulèrent sur le sol ferme et atone. Cet entraînement prenait désormais l'aspect d'un règlement de compte. Nephtys lui arracha un cri tandis qu'elle déracinait une poignée de ses cheveux roussâtre.

Sa longue chevelure blonde n'était plus qu'un lointain souvenir. Ils avaient mis en place un discours dans le but de dévoiler l'existence de l'héritière au monde entier et de dénoncer les agissements criminels du Chancelier. Cette nouvelle révélation empêchait qu'on l'élimine. Dans le cas contraire, ils la feraient passer pour une martyr aux yeux du monde entier. Procéder autrement que par un massacre était donc inévitable, ce qui accordait à sa nouvelle équipe quelques jours de répit. Étant pourchassée et en fuite, il n'était plus question qu'Héléna se trimbale avec son petit minois qui se diffusait en boucle sur toutes les chaînes. Il fallait qu'elle change d'apparence jusqu'à ce qu'elle soit dans un lieu sûr. Mahaud, encouragée par Teïlo, lui avait coloré les cheveux en bruns, l'éloignant ainsi de son blond naturel. Mais tout ne s'était pas déroulé comme prévu... Par inadvertance, celle-ci avait mal dosé la poudre, laissant alors une teinte maltaise s'enraciner dans ses crins.

— Arrête Héléna !

Le beuglement de Nephtys l'encouragea à continuer sur sa lancée. Son genou rencontra amèrement son ventre, lui en coupant le souffle. Un bon coup dans l'estomac ne lui ferait pas de mal ! Par la suite, la princesse enchaîna hâtivement avec un coup de coude dans les côtes avant que la mercenaire ne reprenne brièvement le dessus sur ce combat. La tension électrisante qui les entourait enivrait le hall. Héléna ne trouvait plus la capacité de lâcher l'affaire. Elle allait poursuivre par un énième coup, quand tout à coup, son corps fut immobilisé.

— Regarde par terre, cilla-t-elle en tournant le crâne d'Héléna de sa main libre d'un geste dominateur.

Le visage en sang et les phalanges abîmées, elles étaient toutes deux à bout de souffle. Nephtys la relâcha avec hésitation, en remarquant que celle-ci s'était calmée. Héléna passa une main dans ses cheveux. La longueur nouvellement raccourcie la dérangeait encore. Dans leur chute, elles avaient renversé une table d'appoint, étalant son contenu sur le sol gris. Héléna rampa, saisissant l'objet qui scintillait à la lueur des projecteurs. Elle ne comprenait pas quel était le problème avec sa broche. Ce n'était pourtant pas la première fois que Nephtys la voyait. Elle se redressa difficilement et leva ses bras léthargiques en l'air afin d'y voir plus clair. Malgré les quelques rayures qui s'incrustaient dans l'or à force de la trimbaler à droite et à gauche, la face extérieur ne semblait pas endommagé. Par contre, elle ne pouvait pas en dire autant de l'intérieur. Un minuscule point noir se collait dans le métal. Elle était pratiquement certaine que cette tache n'y était pas avant. Zut, voilà qu'elles avaient abîmé la broche lors de leur crêpage de chignon. Elle sentait le souffle de Nephtys chatouiller sa nuque. Penchée au dessus d'elle, elle scrutait également les dégâts occasionnés sur le symbole royal.

— Bordel de merde, blasphéma-t-elle avant de lui arracher l'artefact des mains.

Héléna rouspétait en silence, la suivant à travers le laconique couloir qui menait à la salle principale. La mercenaire héla Mahaud d'un claquement de langue, en lui lançant la broche sous le regard complètement horrifié de la princesse. Heureusement celle-ci la rattrapa aisément.

— Dis-moi que ce n'est pas ce que je crois...

— Un traqueur, hoqueta-t-elle.

À bout de force, Héléna se laissa soudainement sombrer sur le bout du canapé. Ses jambes flageolaient à cause de l'épuisement. Elle frotta son visage entre ses mains, chassant les sombres pensées qui détérioraient son esprit. Elle était tellement naïve ! Nephtys avait raison sur toute la ligne, et ce depuis le début. Pathétique était certainement son deuxième prénom. Ronan, une serviette autour de la taille approchait lentement en prenant garde à ne pas glisser. Ses cheveux étaient encore mouillés par la douche tiède qu'il venait de s'accorder, des gouttelettes d'eau dégoulinait tout autour de lui et les traces humides de ses pas marquaient son chemin. Alarmé par la voix nourrit d'inquiétude de Mahaud, Teïlo quitta son poste de garde et accourut au grand galop dans le hall. Il manqua de percuter Nephtys dans sa travée précipitée. Le traqueur expliquait comment ce maudit Chasseur réussissait à dénicher l'héritière à chaque fois.

— Il n'émet plus grâce aux brouilleurs positionnés autour de la zone, rassura Mahaud avant de vérifier ses dires.

Elle ajusta sa paire de lunette et scruta l'objet qui attisait autant d'inquiétude de leur part. La jeune femme aux cheveux rouges fouilla dans une trousse avant d'en extirper un objet à pointe aiguisée. Le bout de sa langue ressortait légèrement, humidifiant le contour de ses lèvres. Ses épais sourcils se froncèrent lorsqu'elle se concentrait pour désactiver une fois pour toute ce maudit bidule.

— Avec les coupures de courant de cette nuit, est-il possible qu'il arrive à émettre ne serait-ce qu'une demi-seconde ? surenchérit Nephtys, en enfilant une veste molletonnée pour couper court à sa chute de température corporelle.

Mahaud blêmit.

Les cheveux rouquins de la princesse, où régnait une pagaille monstrueuse se collaient sur le sang séché qui parsemait la peau pâle de son visage. Cependant, malgré les contusions qui lui arrachaient quelques mimiques disgracieuses, Héléna jubilait parce qu'elle n'était pas la seule à demeurer dans cet état. Les nattes à moitié dérobées, défroquée et de mauvais humeur, Nephtys s'agitait la tête baissée. Sa posture masquait les filets rougeâtres qui entachaient sa face, dégoulinant jusqu'à l'encolure de son maillot.

— Préparez vos affaires ! Inutile de prendre le moindre risque, on se barre d'ici ! adjura Teïlo en commençant à rassembler quelques babioles.

— C'est trop tard, dit Ronan. Ils sont déjà en route...

Il tourna d'un geste brusque l'écran de vidéos de surveillances qui émettaient en direct grâce au satellite que Mahaud avait piraté. Une fil indienne de camionnettes blindés jusqu'aux roues apparaissait sur les images. Les véhicules n'étaient qu'à une dizaine de kilomètres au Nord de leur position. D'ici une dizaine de minutes, ils ne tarderaient pas à être aux portes de l'entrepôt.

— Dans ce cas, prenez uniquement le nécessaire. On n'a pas une seconde à perdre.

Le groupe s'agita avec précipitation mais chaque mouvement était calculé aux millimètres près. Teïlo tendit un sac à Héléna, ce geste eut le don de raviver les braises d'un sombre souvenir qu'elle ahanait à étouffer.

Ses yeux s'embuèrent de larmes et une intense chaleur s'emparait de ses joues. Une vile impression de déjà-vu lui donnait la chair de poule, ou était-ce la fièvre qui lui montait à la tête ? Elle dessina mentalement le coquart qui trônait autrefois sous sa pommette gauche, son haleine alcoolisé qui avait frappé de plein fouet ses narines, ses globes oculaires rougies par ses pleurs passées. Elle ne l'avait jamais vu dans un tel état. Cela aurait dû l'alarmer bien plus tôt. À la hâte, il lui avait fourré un bout de papier froissé dans la paume de sa main et lui avait mis entre les pattes, un sac préparé à l'avance. Elle n'avait rien vu venir, ça oui... Pourtant, elle aurait dû s'y attendre ! Son père, le Gouverneur, était un homme prêt à tout. Personne ne pouvait échapper à sa colère... Pas même son propre fils. Le Chancelier se suspendait au-dessus de leurs têtes comme une épée de Damoclès. Il ne lésinait pas sur les moyens employés pour faire pencher la balance en sa faveur ; quitte à briser la vie de celui qui oserait le défier d'un simple jeu de regard.

Le haussement de ton des jumeaux fit revenir Héléna à l'instant présent. Les autres s'agglutinaient comme un épais tas de boue près du centre de commandes, la laissant ainsi tergiverser seule dans son coin. Ils se séparèrent et une étrange sensation se mêla dans l'atmosphère. Héléna fronça les sourcils devant la pièce douteuse qui nourrissait en elle de mauvais pressentiments. Leurs visages étaient fermés et leurs regards étaient éteints. Ils se dirigèrent à la fil indienne vers la porte blindée qui menait dans les sous-sols du bâtiments.

Héléna s'apprêta à leur emboîter le pas lorsqu'on la tira brusquement en arrière par le bras. Elle heurta un torse beaucoup trop mou pour être celui du mercenaire, et beaucoup trop plat pour être celui d'une des deux filles. Elle pivota lentement en devinant qui l'interpellait. Héléna déglutit en sentant les paumes froides de Teïlo se déposer sur les côtés de ses mâchoires. Il plongea ses yeux noisette dans les siens, la scrutant longuement comme s'il gravait les traits de son visage dans sa mémoire, de peur de les oublier un jour. Son haleine humide frappa ses narines. Hésitant, il prit une courte inspiration. La jeune femme releva le menton pour le confronter tant ce comportement anormal l'intriguait.

— Fais-moi une promesse Héléna.

Elle hocha la tête, attendant une suite qui tardait à venir.

— Mets tout en œuvre pour te rendre en Orient, déclara-t-il en collant délicatement son front contre le sien. Je t'en pris, j'ai besoin de te l'entendre dire, insista-t-il pendant qu'Héléna refermait ses doigts autour de ses poignets.

— Je te le promets, murmura-t-elle si bas qu'il dû tendre un minimum l'oreille pour capter la faible intonation qui émanait de sa voix.

Il pressa ses lèvres contre son front avec ténacité, y déposant un intense baiser. Une inquiétude serpentait contre les parois de ses organes, ondulant à l'intérieur de son être. Un voile humide glissait sur ses paupières, voguant jusqu'à atteindre l'île ténébreuse de ses pupilles qui prenait racines au milieu d'une mer dorée. Héléna grimaça. Teïlo venait de la pousser à travers l'encadrement de la porte, refermant celle-ci derrière elle.

— Promets-moi de rester en sécurité, brailla-t-il à travers l'épaisse couche de métal qui désormais, les séparait.

Héléna fit rapidement volte-face, tournant la clenche comme une cinglée sans qu'elle ne daigne s'engrener. Elle tambourinait à la porte, hélant Teïlo à s'en briser la voix. Seul un lourd silence eut la décence de répondre à ses délations.

— Héléna ! Dépêche-toi on doit partir, intervint Mahaud en la tirant par le pans de son manteau.

Elle la guidait dans l'obscurité du tunnel. La lumière de sa lampe torche se reflétait sur les flaques humides d'eau qui, gelées par le froid, les éblouissaient. Dehors, un véhicule préchauffait. Ses phares dévoilaient une brume peu dense qui tempérait l'atmosphère d'une douce pâleur opalescente. Ronan attrapa son sac et le fourra à l'arrière du tout-terrain dont le moteur ronronnait agréablement au milieu de la nuit. Les échos des voitures blindées de la Garde se répercutaient à travers les branches dénudées qui encerclaient les bois. Le pied au plancher, elles grondaient sauvagement, brisant le calme platonique du soir.

— Monte Héléna, on doit y aller maintenant !

La jeune femme secoua la tête, s'y refusant. Teïlo manquait encore à l'appel. Il était impensable de partir sans lui. Elle vit Ronan s'avancer précipitamment vers elle, ne comptant pas réitérer ses paroles mais bien l'embarquer dans ce véhicule coûte que coûte. Son accord lui importait peu et employer la force pour la fourrer dans ce véhicule si nécessaire ne le gênerait pas.

Elle ravala durement sa salive, voyant dans son regard une lueur d'opiniâtreté qui l'obligerait à flancher face à cette imposante masse musculaire. Toutefois, elle décida de camper solidement sur ses positions, reculant lentement pour s'éloigner du véhicule.

— Je ne pars pas sans Teïlo, affirma-t-elle en les scrutant un à un.

Cependant, aucun d'eux n'osait braver son regard.

Le sol trembla sous leurs pieds.

Le ciel obscur s'illumina, comme frappé par la foudre des abysses de la Terre. Héléna s'abaissa, protégeant sa tête des éclats de gravas qui voltèrent dans les airs, emportés par un souffle colossal. Les vibrations cessèrent. Elle redressa le menton, hurlant son prénom à travers le crépitement des flammes. L'ardeur du brasier se reflétaient dans ses pupilles. Une fumée noire, opaque envahissait le ciel. Omniprésente, l'odeur du souffre s'infiltrait dans leurs poumons. Les hurlements de terreur des hommes de la Garde résonnaient dans les tréfonds de la forêt autrefois silencieuse.

— Teïlo, hoqueta-t-elle.

À bout de force, elle chavira à genoux. Une effluve, emportant avec-elle les émanations de la chair carbonisée lui donna un haut le cœur. Hurlant contre l'astre argenté, son cri d'agonie s'amenuisait dans sa gorge irritée. Son corps tremblait, victime d'une armée de sanglots incontrôlés. Elle peinait à respirer convenablement, ne faisant aucun effort pour améliorer sa condition.

Inconsciente, Héléna sombra sur l'humus des bois.

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