— Ne me lâche pas maintenant ! Tu m'as compris ? S'écria Emma d'une voix rauque à l'adresse de son sapin de Noël.

Elle le pointa du doigt sévèrement.

— Tiens bons ! Plus que deux jours ! Tu n'as pas le droit de me faire faux bond maintenant.

Emma releva le menton, en le défiant du regard, mais son pauvre sapin de Noël était en train de lui faire comprendre de par ses branches tombantes qu'il allait rendre l'âme.

Elle soupira tristement avant qu'elle n'entende des coups à sa porte.

Emma jaugea cette dernière le cœur battant.

Ses fins de mois s'étaient montrées difficiles, et elle avait un léger retard sur son loyer. Elle s'approcha de la porte et tortilla ses doigts nerveusement.

— Je suis désolé du retard sur mon loyer, Déclara-t-elle en déverrouillant sa porte. J'avais l'intention de vous payer demain j'ai juste...

Emma sentit ses jambes se dérober quand elle découvrit sur le pas de sa porte, Azzario Dantes, dressé de toute sa hauteur, vêtu d'un costume noir, le rendant aussi sombre que les ténèbres.

Immédiatement, elle fut subjuguée, comme à chaque fois qu'elle le voyait, à cause de sa haute stature d'un mètre quatre-vingt-dix, et de ce côté presque animal féroce qu'il émanait.

— Mon...sieu Dantes, mais qu'est-ce que...

— Bonjour mademoiselle Brok.

Contre toute attente sa voix était chaleureuse et courtoise.

— Puis-je entrer un instant ?

Emma ramena la porte contre elle, pour qu'il ne puisse pas entrevoir son appartement.

— Pourquoi ? Écoutez monsieur Dantes je n'ai pas la moindre envie d'être votre attraction du mois, vous m'avez suffisamment fait payer mon délit non ?

L'homme prit un air presque désolé.

— Justement, laissez-moi entrer s'il vous plaît.

Il était tellement énigmatique qu'elle n'arrivait plus à dominer son esprit. Contre sa volonté, elle poussa la porte pour le laisser entrer dans son modeste appartement. Elle dut lever la tête pour garder le contact de ses yeux qui l'étudiaient avec une intensité troublante.

Emma brisa le contact et c'est gêné qu'elle prit les barreaux du lit de son futur bébé qui traînaient par terre.

En réalité ils étaient par terre depuis trois jours.

— Ce n'est pas totalement fini je...j'ai...

Elle s'interrompit elle-même en ramassant les barreaux pour les mettre dans un recoin du salon.

Quand elle se redressa, Emma sentit son regard sur elle.

L'homme pénétra dans son salon en se pliant pour passer les deux portes battantes. Il balaya les lieux, l'expression impassible. Mais au fond d'elle, Emma savait exactement ce qu'il pensait de cet endroit.

— Que faites-vous ici monsieur Dantes ? Parvint-elle à demander d'une voix détachée.

— Je suis venu vous présenter mes excuses.

À sa voix glaciale, Emma sut qu'il n'avait pas l'habitude de s'excuser, mais il semblait sincère.

— Alors je les accepte...

Autant en finir rapidement, songea Emma en maudissant le destin malchanceux qui à chaque fois, les réunissait.

Il s'avança vers elle et planta son regard dans le sien. Tous ses sens se perdirent devant cet homme implacable, elle balbutia quelques mots inintelligibles et se recula d'un pas.

— Tenez...c'est pour vous. Déclara-t-il en sortant une enveloppe de sa poche intérieure.

Emma s'en saisit en frôlant ses doigts bronzés.

— Qu'est-ce que c'est ? Demanda-t-elle en ouvrant l'enveloppe.

Elle découvrit une belle carte aux gravures dorées.

— Une invitation pour Noël.

Incrédule, le cœur battant, elle releva la tête. Et devant son regard incrédule, l'homme soupira, soudain nerveux.

— Chaque année, j'organise une réception pour le réveillon de Noël. Expliqua-t-il faisant tressauter sa mâchoire.

— Je ne comprends pas monsieur.

Il plissa les yeux, une lueur étrange dans le regard.

— Vous ne savez pas lire mademoiselle Brok ?

— Évidemment que je sais lire, mais pourquoi m'inviter ?

— Pour me faire pardonner ma méprise envers vous...

Abasourdie, Emma cligna des paupières. Il fallait qu'elle trouve une excuse pour refuser.

— Je ne peux pas, j'ai déjà des projets.

— Vous n'avez aucun projet miss Brok. Répliqua-t-il comme s'il connaissait son agenda même si elle n'en avait pas.

— Bien sûr que si ! Je passe Noël ici, j'ai déjà tout prévu !

Il haussa un sourcil éloquent et se dirigea vers son sapin.

Pas ça ! Se hurla-t-elle mentalement quand il le pointa du doigt.

— Est-ce cela que vous appelez un projet ? Demanda-t-il soudain la mine assombrie.

Il toucha une de ses boules de Noël et cette dernière se balança avec désespoir avant qu'une poignée d'aiguilles lui tombe aux pieds.

Emma se tordit en une grimace gênante alors qu'il s'en écarta.

— Il ne faut pas le toucher, il n'est pas en forme !

L'homme l'observa du coin de l'œil avant de reporter son attention sur elle.

— Je pense surtout qu'il a une bonne crise de foie. Remarqua-t-il d'une voix profondément rauque.

— Pas du tout enfin !

Mais la remarque de l'homme eut raison de son sapin qui, au ralenti, devant ses yeux écarquillés, tomba en arrière juste à côté de l'homme, dans un grincement qui signa sa mort. Emma, la bouche ouverte, regarda horrifiée, une boule jaune roulait jusqu'au pied du redoutable milliardaire.

— Vous avez tué mon sapin ! Dit-elle d'un souffle.

— Je ne l'ai pas tué, il a rendu l'âme tout seul. Rectifia-t-il en ramassant la boule jaune un sourire en coin.

Emma accourut jusqu'au désastre et tenta de le relever.

— Laissez-le, il ne tient plus debout, Ordonna-t-il en lui saisissant le bras.

Un frisson courut le long de sa mâchoire quand ses doigts se refermèrent un peu plus sur son bras.

— Vous n'avez donc aucun cœur ?

La seconde suivante, un pli dur se dessina sur ses lèvres.

— Bien sûr que si, puisque je vous invite pour Noël ! Gronda-t-il en la relâchant.

Emma déglutit.

— Et vous allez accepter. Rajouta-t-il impérieusement.

Consternée, Emma poussa un rire étranglé.

— Vous ne pouvez pas m'obliger à venir !

— Vous n'avez plus de sapin, vous êtes seule et enceinte, personne n'aimerait se retrouver seul pour le réveillon.

— Et bien si, moi par exemple. Répondit-elle d'un air buté.

Sans qu'elle ne s'y attende, il lui attrapa délicatement les épaules pour l'obliger à s'asseoir sur son canapé. De là, dans une situation aussi inattendue qu'embarrassante, il s'accroupit en face d'elle.

— Venez Emma, il y aura un délicieux repas, des pâtisseries, un beau sapin...Dit-il d'une voix plus douce.

Soudain l'idée de manger de délicieux produits de qualité l'avait séduite un instant.

— Vous n'avez pas de sapin de Noël.

Un lent sourire naquit sur ses lèvres dures.

— Parce que je le mets au dernier moment et vous devriez en prendre exemple. Déclara-t-il en passant un regard sur son arbre de Noël écroulé.

Emma se mit à fuir son regard, elle n'arrivait plus à le regarder dans les yeux. Elle aurait tant voulu repartir en arrière et ne jamais prendre la décision de le rencontrer.

— Pourquoi m'avoir méprisé ?

Il expira lentement.

— Parce que je sors d'une mauvaise période, à cela, ajouter un caractère déjà froid et vous comprendrez pourquoi.

Il fit une pause dans laquelle ses yeux se perdirent sur le tapis.

— Et il m'arrive parfois de reconnaître mes erreurs quand je le juge nécessaire et là...je vous dois des excuses.

Dans le silence qui s'ensuivit, l'homme au regard pourtant toujours impassible devint triste. Il se releva.

— Vous devriez réfléchir à mon invitation, je vous promets que ce bal sera agréable, féerique...

De là, il se dirigea vers le sapin pour le relever, avec une aisance et une détermination particulières le sapin resta debout, et ne bougea.

— Tout est marqué sur la carte, venez mademoiselle Brok.

Sur ceux dire, l'homme inclina sa tête imperceptiblement et quitta son appartement.

Emma reprit son souffle et se passa les mains sur son visage. Malgré son départ, elle avait l'impression que sa présence était toujours là, comme s'il avait laissé son empreinte. Emma prit le carton d'invitation pour le relire.

Devait-elle accepter ?

Tiraillée entre la raison et ce que son cœur lui disait de faire, Emma, perdue, se remémora le triste visage de l'homme.

Que lui était-il arrivé ? Qu'est-ce qui l'avait rendu si en colère ? Si casanier ? Si méprisant ?

Devait-elle accepter son invitation pour le découvrir ?

Son sapin lui donna une réponse claire en s'écroulant une seconde fois...